mercredi 18 novembre 2015

Béthorm: The Plane of Tékumel


Béthorm ("Univers de Poche"): The Plane of Tékumel est le nouveau jeu de rôle de Jeff Dee (co-créateur et illustrateur de Villains & Vigilantes) dans l'univers de Tékumel, l'Empire du Trône du Pétale. C'est, je crois, le 5e jeu "officiel" professionnel dans ce monde (voir cette liste avec Empire of Petal Throne, Sword & Glory, Gardásiyal et Tékumel) mais il y en a eu beaucoup d'autres (comme Tirikélu).

Le titre de Béthorm est un jeu de mot comme Dee avait déjà créé son système nommé "Pocket" avant de remarquer que Tékumel se trouvait être dans une "Poche" extra-dimensionnelle avec son propre système stellaire mais sans le reste de l'univers. Le livre fait 262 pages et inclut surtout un système de règles assez simple avec distribution de points (comme d'ailleurs dans le jeu précédent Tékumel de Guardians of Order) : on doit faire moins que Caractéristique ou que Caractéristique + Bonus de Compétence sur 2d10 (les doubles sont des critiques).

Jeff Dee commence par une histoire de Tékumel (p. 10-12) qui a un peu le défaut de trop détailler le passé très ancien et pas assez le passé récent (défaut qu'on trouvait aussi dans la première version d'Empire of Petal Throne) mais ensuite il a un court chapitre (p. 14-15) pour expliquer qu'il a choisi de commencer non pas avec tout l'Empire de Tsolyanu mais avec un cadre plus restreint : uniquement la ville de Katalál (et la Province de Ketvíru, ville à l'ouest, plutôt globalement alignée avec le Panthéon de la stabilité, je crois). On est à environ 1000 km de la cité de Béy Ssü (voir la carte comparative de l'Europe et Tsolyanu pour comparer les distances). Voilà la localisation des environs (le livre a aussi une carte plus concentrée sur les abords de la ville et il est sorti un petit Gazeteer uniquement sur cet hexagone de 133 km) :



EPT avait commencé avec une grande ville du sud, Jakálla. J'avais fait un début de campagne une fois plus à l'ouest encore, dans les Chakas (les grandes jungles) mais je ne connaissais rien de Katalál. Le livre ne décrit donc que les Clans dominants de ce coin (comme surtout la Lame Brandie, clan militaire lié au dieu Karakán, le Rameau d'Or ou l'Epée de Feu de Vimúhla - voir cette liste des dix Très Hauts Clans). Le jeu se déroule (comme Tékumel) dans les années 2370 après le Sceau Impérial (alors que la première édition, qui se déroulait avant les romans de MAR Barker, commençait plutôt vers 2360). J'ai une tendance à préférer la Guerre civile très ouverte des années 2364-2370 (voir cette chronologie) que le présent récent avec le nouvel Empereur, redevenu plus calme en apparence.

Il suggère qu'il faut des connexions entre les PJ et donc qu'ils font tous partie (1) du même Clan (2) d'une même Légion (mais cela revient souvent au même qu'un Clan), (3) du même Culte, (4) de la Légion Omnipotente d'Azur (les services secrets de l'Empire) ou bien (5) ont été réunis malgré toutes leurs différences avec un Destin décidé par un Panthéon.

sorcière du culte de Grugánu la Noire Epée


La création de personnages (p. 16-51)
Le MJ a choisi un Clan et un niveau social homogène pour la campagne. Les joueurs choisissent ensuite leur personnage d'après ce niveau social et ont aussi le droit de jouer des visiteurs de l'extérieur de Katalál. Les espèces non-humaines sont autorisées (même s'il est plus simple qu'ils soient des citoyens intégrés à la société humaine pour que le système social soit compréhensible). Les règles expliquent que la caractéristiques statut social (sur 12) doit être dans le même intervalle de 4 points ou il ne serait pas cohérent que les personnages parlent entre eux comme des égaux. La stratification sociale est si forte dans l'Empire qu'au-delà de 4 points différence entre deux statuts, il n'y a même plus de communication directe possible. [Voir les différentes manières d'user de la Seconde Personne.]

Bien que le jeu utilise des répartition de points, il y a beaucoup de tables de génération aléatoire pour des détails du background comme les villes d'origine, les prénoms et les noms (tables qui viennent de Gardásiyal).

Il y a 5 caractéristiques : Physique (à la fois Force et Endurance), Adresse (en anglais Deftness), Intellect, Volonté (dont il est dit qu'elle comprend aussi l'empathie et le charisme) et la Capacité Psychique. Toutes les caractéristiques sont à 8 (sur 12) initialement, sauf la Psyché qui est à 2. On a ensuite 10 points de "Construction" à répartir, ce qui me semble donner des Caractéristiques qui risquent de se ressembler un peu. Les Points de Vie ne sont pas égaux à Physique mais dérivés de manière non-linéaire (un 10 en Physique donne 10 Points de Vie mais un 12 donne 20 PV par exemple). Les points d'énergie psychique (ce qui s'appelle dans d'autres versions le Pedhétl) sont égaux à Psy x 5, ce qui fait que cette version ne conserve pas l'idée d'autres jeux tékumeliens selon laquelle la Capacité psychique et le Réservoir de Mana sont indépendants (dans Gardasiyal, on pouvait en théorie avoir un mage avec une bonne capacité psychique mais un Réservoir de Pedhetl médiocre). Curieusement, l'Initiative dépend de la Volonté et non de l'Adresse : c'est la détermination qui compte plus que la coordination physique. On dérive aussi un nombre de Contacts de la Volonté et du Niveau social.

Contrairement à Hero System ou à GURPS, le système de répartition de points sépare les points pour les Caractéristiques et ensuite les points d'expérience pour les Compétences (dont le total de départ dépend seulement de l'Intelligence, approximativement une compétence par point d'Intelligence). Ce sont aussi les mêmes points qui servent à acheter des Sortilèges, ce qui signifie que si on veut créer un Sorcier un peu puissant, il aura nécessairement moins de Compétences que les PJ non-magiciens.

Les Avantages et Désavantages sont eux "achetés" avec un autre total égal à zéro, comme dans Ars Magica (il faut donc compenser tout Avantage par autant de Désavantages). Ces Avantages et Désavantages sont hélas génériques alors que la version précédente de Tékumel en avait quelques-uns avec plus d'atmosphère. Parmi les Désavantages typiques de Tékumel, il y a "Annulateur Psychique" (p. 35, certains individus de Tékumel ont un si bas niveau d'énergie psychique qu'ils peuvent nuire à la magie autour d'eux en drainant cette énergie).

Survol du reste du livre

Après une longue liste d'équipement (p. 52-62). les règles générales tiennent sur les p. 62-77. Le chapitre sur la magie (p. 78-155, donc près d'un tiers de tout le livre) a repris de longues listes de sortilèges des éditions précédentes, liées à des cultes particuliers. Il faudrait étudier de près pour voir ce qui a été conservé et modifié. Après une lecture superficielle, j'ai l'impression qu'il y avait plus de sortilèges, dont certains construits un peu comme des pouvoirs de superhéros mais il s'agit en gros de versions plus détaillées et graduelles que les sorts de Gardasiyal. Un Sortilège est semblable à une compétence (avec un jet de Rituel ou de Sorcellerie) mais les Sortilèges s'apprennent par des listes ou "phyla" (comme dans GURPS).

Un détail important pour les règles et pour l'atmosphère est qu'on recharge un taux variable de son énergie psychique chaque jour. En pratique, il faut donc souvent 2-3 jours après utilisation pour revenir à son taux de départ (voire plus si on n'a vraiment pas de chance au dé), ce qui peut ralentir les sorciers par rapport à d'autres jeux de rôle où la règle habituelle était qu'on récupérait tout en 24h.

Le Bestiaire (52 pages) a l'avantage d'avoir de nombreuses illustrations de Jeff Dee, ce qui me paraîtrait justifier l'achat du livre même si on n'a pas envie d'utiliser le système de Béthorm. Il y a en plus des systèmes Old School pour le MJ comme des tables de rencontres aléatoires et de nombreuses listes de trésors reprises encore des éditions précédentes depuis EPT. C'est une synthèse réussie qui permet de ne pas trop se demander s'il ne manque pas des petits détails d'atmosphère qui enrichissaient les premières versions.

La fin décrit un peu Katalál et les environs autour du fleuve Chaigáva, mais il n'y a pas beaucoup de pistes directes pour l'aventure, comme par exemple un jeune sorcier nommé Meshétsu qui enquête sur les ruines occultes du coin. Je regrette qu'il n'y ait pas plus de PNJ (ne serait-ce que pour les "Contacts" dont a besoin le PJ). Le site a une autre version de la carte de la ville en couleurs. Le Gazetteer (vendu séparément) est très bref (5 pages que les joueurs doivent pouvoir lire aussi). Il y a aussi un long errata mais les erreurs citées ne me semblent pas gêner le jeu.


Béthorm me fait penser un peu au jeu précédent Tékumel, mais il intègre mieux des listes de données de Gardasiyal. Grâce à son cadre plus restreint, il paraît aussi moins effrayant ou moins général pour commencer.

Un autre avantage est que Jeff Dee a l'air de vouloir le faire vivre avec au moins un scénario paru (ce qui n'était pas arrivé en dehors de fanzines depuis les aventures en solo écrites par MAR Barker).

Les scénarios de jeu de rôle se vendent relativement mal mais ils sont essentiels pour un univers aussi dépaysant pour se rendre compte du type d'aventure qu'on peut avoir (même si, dans les faits, les aventures publiées sur Tékumel ont souvent été de simples tunnels avec Portes-Monstres-Trésors qui n'exploitaient pas assez les spécificités de l'univers de Tékumel).

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Merci d'avoir inscrit Béthorm dans la lignée des jeux officiels précédents, en notant ses différences avec Gardasiyal et EPT. C'est très utile après toutes ces années et toutes ces éditions!