mercredi 18 juin 2008

Topoi





Plus que 99 copies. Je vais à un rythme très lent au début, avant de trouver les types de paralogismes les plus usuels, mais j'espère le faire descendre à 30 minutes par copies, sinon je n'arriverais pas à garder la concentration toute la journée.

Le sujet 1 sur l'art est très répétitif et avec tout le temps le même argument pseudo-hégélien faux ("l'art classique ne modifierait rien à notre conscience alors que l'art moderne oui"). J'aimerais qu'un élève me cite Don Quichotte ou Mme Bovary (et non pas seulement le sous-heideggerianisme des Chaussures de Van Gogh qui commence à me lasser comme seul exemple de "transfiguration du banal"). J'étais content au début qu'ils essayent de citer des films (j'aurais même apprécié un machin récent du genre d'American Beauty) mais pour l'instant ce sont toujours des artefacts "sociologiques" sans grande valeur esthétique comme Indigènes.



Le sujet 2 est effectivement pris par des élèves meilleurs mais il reste en fait trop dur pour eux puisque ils ont des idées assez floues sur la notion de vérité et sur l'épistémologie (et qu'ils réduisent donc la question à un domaine théorique trop étroit).

Je corrigeais dans la bibliothèque municipale Couronnes mais il y a trop de bruit et trop d'élèves de Terminales en train de réviser ensemble.

J'ai découvert que j'habite juste à côté de la librairie Ambikâ, spécialisée sur l'Inde et j'ai acheté un poster très kitsch de श्री विष्णु, qui reste un des dieux favoris (bizarrement les représentations des divinités shivaïtes font encore plus "saint-sulpiciennes" par rapport à ce qu'elles sont), un bouquin de cuisine indienne et deux bouquins de contes. Je n'ai vraiment plus d'excuses pour ne pas revenir au jeu Bharatavarsa...

Je suis allé voir hier Börn ("les Enfants", 2006) écrit et réalisé par Ragnar Bragason (il a ensuite réalisé la suite, Foreldrar, "les Parents", qui eu l'Edda du Meilleur film 2007). Le film dans un noir et blanc cassavetesien a plusieurs familles monoparentales éclatées à Breiðholt : Marinó (Ólafur Ólafsson) est un autiste trentenaire un peu attardé qui vit chez sa mère, l'adolescent Guðmundur (Andri Helgason) est le seul homme de la famille chez l'infirmière Karitas (Nína Filippusdóttir) et enfin Garðar (Gísli Garðarsson) est un voyou qui croit avoir certains étranges principes.

Le Courrier International de la semaine a un bon article sur l'Islande qui fait remarquer que cette nation de pêcheurs, où les pères étaient longtemps absents, a une indulgence pré/post-chrétienne pour les mères célibataires et une habitude enracinée dans la société d'avoir des familles recomposées (les pêcheurs adoptaient les enfants que leur épouse avait eu avec des Þræll, serfs souvent d'origine irlandaise), les jeunes filles ayant souvent des enfants pendant leur jeunesse avant de se remarier plusieurs fois (la Présidente de la République Vigdís Finnbogadóttir était une mère célibataire il y a 30 ans sans que cela n'inquiète personne). Quand j'enseignais à Reykjavík, j'étais surpris par la quantité de crêches pour étudiantes (qui ont souvent des enfants entre le lycée et la première année d'université). Le film présente clairement cette atmosphère de ce que Tchekhov appellerait "Безотцовщина" (l'a-patrie), qui est une bonne métaphore de la modernité, surtout avec une onomastique qui reposait aussi directement sur le Patronyme. J'espère que la suite, Parents (où on retrouve notamment les personnages de l'autiste Marino et du sociopathe Garðar), sortira vite en France.

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