Nous sommes arrivés à la moitié des 25 contes du Vetala, avec ce conte un peu plus long.
Petit rappel des épisodes précédents :
- 1 Comment le prince obtint une femme grâce à son ami le fils du ministre
- 2 Comment les prétendants demeurèrent fidèles à la jeune femme morte
- 3 Si les femmes sont ou non plus méchantes que les hommes
- 4 Comment Vīravara se sacrifia pour son roi, qui le rendit ensuite à la vie
- 5 Comment la fille eut à choisir entre trois prétendants
- 6 Comment les têtes du frère et de l'amant furent interverties
- 7 Comment le roi maria son féal à la fille du roi des démons
- 8 Des trois frères à l'excessive délicatesse
- 9 Comment le roi fut embarrassé en présence des quatre prétendants à la main de sa fille
- 10 Comment Madanasenā fit une promesse étourdie
- 11 Des trois reines au coeur sensible
Le jeune roi Yaśaḥketu des Aṅgas passait son temps dans le plaisir sensuel de son gynécée et laissait la charge du Royaume à son sage ministre, Dīrghadarśin. Celui-ci craignit qu'on ne l'accuse d'enfermer le roi dans la licence pour accaparer le pouvoir et il décida donc de partir en pélerinage sur les routes pour quelques temps en remettant le pouvoir au roi pendant son absence. Lors de son voyage, alors qu'il naviguait déguisé en brâhmane vers l'Île d'Or (Suvarṇadvīpa)il vit une nymphe sortie de l'Océan sur un arbre, qui jouait de la cithare. Quand le ministre revint en son royaume, il raconta la scène au roi Yaśaḥketu, qui tomba amoureux de la description de la nymphe. Le jeune roi décida de partir à son tour sur ce même périple, déguisé lui aussi en ascète. Il la revit au même endroit dans l'Océan et la suivit dans une cité magique sous les eaux. Elle lui dit qu'elle s'appelait Mṛgāṅkavatī et qu'elle acceptait de l'épouser à condition qu'il ne la suive pas quand elle partirait en fin de chaque semaine. Ils se marièrent mais à la fin de la semaine, il la suivit, la vit dévorée par un Démon qu'il terrassa pour la délivrer. Mṛgāṅkavatī expliqua alors au roi Yaśaḥketu qu'elle avait été maudite par son père et qu'elle devait ainsi être dévorée et renaître jusqu'à ce qu'il la délivre, mais qu'à présent que la malédiction était terminée elle devait le quitter pour rejoindre les Cieux. Le roi lui demanda un sursis de sept jours et elle y consentit. Quand les jours furent révolus, la nymphe céleste s'aperçut qu'elle avait perdu le pouvoir de voler et qu'elle devait rester sur Terre. Le roi la ramena donc comme son épouse mais quand il revint, le sage ministre Dīrghadarśin eut le coeur brisé et mourut.
L'énigme du Vetāla-Narrateur est donc de savoir pourquoi le ministre était mort ainsi, était-ce par jalousie parce qu'il voulait garder le pouvoir ?
La réponse du roi Trivikramasena est que le vertueux ministre était mort de chagrin car il savait que le jeune roi passerait encore plus de temps dans le plaisir maintenant qu'il avait ramené une nymphe céleste et que son vice s'était donc aggravé au lieu de se résoudre.
C'est un des thèmes fréquents avec les héros de classe royale kṣatriya : leur Dharma, leur devoir cosmique, est souvent compromis par les plaisirs de la Chasse ou du Gynécée. Une des curiosités du Conte est que contrairement au thème qu'on trouve dans le mythe de Psyché, le roi est "récompensé" parce qu'il transgresse l'interdit en la suivant - sa transgression a été déjà été prédite au début de la malédiction, il ne fait que réaliser son Karma. Il n'y a en revanche pas d'explication à l'échec paradoxal du sage ministre : il est parti en pélerinage pour sauver son monarque de la luxure et il l'y enfonce encore plus.
La nymphe s'appelle Mṛgāṅkavatī, comme la plus délicate épouse dans le conte précédent. Le conte fait un peu penser au 1e conte (où le ministre aide le roi à prendre une épouse) mais surtout à une inversion du 7e conte où le roi Caṇḍasiṃha aidait son vassal Sattvaśila à épouser la fille du Roi des Asura, qui vit aussi dans une Cité magique sous les flots.
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