mercredi 1 octobre 2008

Les Limites de la Politique de l'Identité



J'ai traversé un accès inexcusable de misogynie quand des sondages avaient révélé un fort phénomène spontané d'identification des femmes "blanches" vis-à-vis de Palin (McCain avait gagné soudain 20 points chez elles, passant de -8 à +12). [de même quand j'ai entendu Ségolène Royal dire le 24 septembre de manière étrangement conciliante que, même si elle préférait Hillary Clinton, elle avait de l'admiration pour l'énergie de l'évangéliste mythomane de l'Alaska.]

Mais si cela a existé (et c'est discutable), cela n'a pas duré une fois qu'elles ont appris à connaître Palin, et cela ne traduisait peut-être qu'une suspension rationnelle du jugement ou un manque d'information.

D'après ce sondage, les femmes "blanches" sont à présent également réparties (45%/44%).


While McCain continues to lead Obama among white voters overall, his support among whites is concentrated among men, older voters, those with less education, and those living in the South.
Obama currently leads McCain among college educated whites.


Au niveau national, les Américaines sont nettement pro-Obama (54% contre 37% pour McCain, une avance de +17), alors que les hommes sont plutôt pro-McCain (43% contre 47% pour McCain). Voilà de quoi être "misandre" (est-ce la discrimination dans les salaires et le travail partiel qui peuvent expliquer ce Gap ou s'agit-il de questions sociétales comme le droit à l'avortement ?).

Cela redonne, comme souvent aux USA, un énorme "Gender Gap". Malgré les manoeuvres ambiguës de Hillary et surtout Bill Clinton et des "PUMA"s, les femmes sont revenues vers le candidat démocrates.

Le vote noir se concentre de plus en plus sur Obama et il atteindrait 95% chez cette communauté (il est vrai que Gore et Kerry frisaient aussi avec des scores presque aussi importants, dans les 85%, ce qui explique certaines anomalies dans les districts des minorités).


Add.
Si je lis bien cet interview de Palin, elle prend une position ambiguë, disant qu'elle est personnellement pro-life dans tous les cas (elle ne précise pas quand la vie de la mère est en danger ; mais un fanatique pro-life lui reprocherait d'avoir fait une amniocentèse, qui peut augmenter légèrement les risques de fausses couches). Elle dit qu'elle n'est pas pour la pénalisation, qu'elle veut simplement laisser chaque Etat décider (ce qui paraît bien hypocrite si elle prétend que c'est un meurtre d'une vie innocente, pense-t-elle que le meurtre devrait dépendre du niveau local ?). Elle accepte la contraception (mais pas la pilule abortive RU 486, ni l'enseignement de l'éducation sexuelle).

En revanche, elle fait une gaffe du point de vue de son camp en disant qu'il y a bien un droit à "la vie privée" (privacy) dans la Constitution, ce que les Conservateurs comme Antonin Scalia ou Clarence Thomas refusent avec véhémence (en revanche Roberts et Alito l'acceptent aussi tout en étant pro-life). Or ce droit contesté est un des fondements de certaines décisions "libérales" de la Cour Suprême comme Griswold v. Connecticut (droit à la contraception), Roe v. Wade ou Lawrence v. Texas(2003, qui a renversé les lois sur les pratiques sexuelles consentantes privées, contre la décision Bowers v. Hardwick, 1986). Voir aussi cette note sur la différence entre Originalisme strict (si ce n'est explicite dans le sens des auteurs de la Constitution, alors il n'y a pas de droit) et la théorie d'une compatibilité entre droit à la vie privée et opposition à Roe (qui est après tout possible).

Si elle accepte un droit à la vie privée implicite dans la Constitution (et après tout le Neuvième Amendement me semble conforter cela, de même qu'une lecture du Troisième) mais qu'elle décide que son application devrait relever de l'Etat et non de l'Union (ce qu'on appelle aux USA de manière ambiguë "fédéralisme", c'est-à-dire en gros chez nous "subsidiarité"), elle arrive à une position peu cohérente du point de vue constitutionnel où chaque Etat peut décider quelle partie de la Constitution est valide. On peut dire que la vie du foetus ne relève pas de la vie privée, au lieu de nier un droit à la vie privée, mais cela ne changera pas le problème pour Lawrence v. Texas.

La scène où Palin a été incapable de citer un seul cas de la Cour Suprême avec lequel elle n'était pas d'accord était angoissant (quel lycéen américain ne connaît pas au moins Dredd Scott ??). Elle ne pouvait même pas citer de décisions récentes qui déplaisent aux Conservateurs comme Kelo, Hamdan v. Rumsfeld ou il y a 3 mois Boumediene v. Bush. Il se peut qu'elle ait simplement choisi de ne pas citer une décision pour ne pas froisser l'électorat mais elle devait simplement paniquer puisqu'elle était contre Exxon v. Baker (qui avait réduit il y a 3 mois les amendes d'Exxon de 5 milliards de dollars à 500 millions).

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