dimanche 18 janvier 2009

Augures



Dans le New York Times, certains auteurs de discours font des prédictions sur le Discours inaugural du Président Obama ce mardi 20 janvier (vers midi), 55e Discours Inaugural Présidentiel et premier Discours du 44e Président.

Le genre est plus bref que les Discours de l'Etat de l'Union (tradition dont Jefferson pensait qu'elle était bien trop monarchique ,mais qui fut ravivée avec délectation par ces quasi-Tories pseudo-libertariens depuis Ronald Reagan) mais il est donc aussi souvent plus vide dans sa rhétorique (même si certains risquent parfois d'entrer dans des détails, comme l'énumération de principes de politique étrangère chez Eisenhower en 1953).

Le nixonien Safire prédit que le modèle sera surtout celui de FDR le 4 mars 1933 ("la seule chose que nous ayons à craindre est la crainte elle-même. Et les Martiens. Mais ça ferait deux choses"), le Premier discours inaugural de Lincoln (mars 1861) ("Allez, on est tous frères, je ne m'opposerai pas à un amendement interdisant au gouvernement fédéral d'interdire l'esclavage là où il existe déjà, vous pourrez continuer à les exploiter vos champs de coton") ou le discours du 28 août 1963 de Martin Luther King devant le Lincoln Memorial ("J'ai fait le rêve que dans trois quinzaines d'années un métis noir serait élu Président") - et Safire, en bon Safire, espère qu'Obama ne critiquera pas les financiers et les marchands du temple comme l'avait fait FDR. Le Clintonien Shesol cite bien sûr JFK 1961 ("Ne demande pas ce que ton pays peut faire pour toi, il est ruiné") mais il dit que le genre vieillit mal et que finalement on n'en a retenu que très peu (en tout cas, pas ceux de Clinton...). Le Clintonien Waldman espère qu'Obama osera aller plus dans l'activisme de Roosevelt que dans la veine d'unification de Lincoln.

Mais le plus amusant est le Carterien Gordon Stewart qui énonce les règles du Discours inaugural :

1. Praise the country and its people as God’s gift to the rest of humanity.
2. Extol the peaceful transition of power as though not having a coup was a miracle.
3. Thank the predecessor at the outset, and then trash his administration for 20 minutes.
4. Declare the end of partisanship, a vow that in the age of cable-Internet-talk radio will last less than 10 minutes.


Sur le point 1, même le très sobre et éloquent Lincoln (peut-être un théiste agnostique "dans le placard"), dont on dit que le Second discours ironisait sur l'idée d'une ordalie divine et critiquait le désir de percer les intentions insondables de la divinité, ne cessait de jouer sur le fait que Dieu aimait l'Union et les valeurs du Nord. C'est vrai aussi bien pour le Premier discours (où il tente encore de rassurer le Sud en assurant qu'il n'a rien contre l'esclavage dans les Etats où il existe déjà, ne voulant que l'interdire dans les nouveaux Territoires) que dans le Second Discours (où il médite de manière plus brève sur la fin de la Guerre civile et sur la nécessité de la réconciliation maintenant que l'esclavage est aboli).

Notre Carterite préféré Hertzberg, lui, considère que le meilleur reste ce Second Discours de Lincoln (qui reste bien sûr inférieur à l'un des plus sublimes discours politiques de tous les temps, le Discours de Gettysburg de novembre 1863 ("il y a quatre fois vingt et sept années, nos pères ont fait naître sur ce continent une nouvelle nation conçue dans la Liberté, et dédiée à cette proposition que tous les hommes sont créés égaux, sauf du moins s'ils ont de la mélanine dans leur pigmentation").

Abraham Lincoln, dont le Président Obama va fêter le 12 février 2009 le 200e Anniversaire, venait d'être réélu en novembre 1964 avec 55% des voix dans les Etats du Nord et de l'Ouest (le Sud en Sécession ne votait pas et il eut donc 22 Etats sur 25, avec un soutien très large de l'Armée de l'Union). Atlanta avait été reprise en septembre 1864 et les troupes de Sherman marchait sur la Virginie. Mais ce ne fut qu'un mois après l'inauguration en avril 1865 que Richmond, la capitale de la Confédération esclavagiste tomba enfin. Le 9 avril, Lee capitula et le vendredi 14 avril, quarante jours après ce Discours, le Président Lincoln fut assassiné par des meurtriers qui avaient été présents lors de cette cérémonie.

Lincoln parle aussi devant un groupe de soldats noirs émancipés, dont certains prendront Richmond le mois suivant.


One-eighth of the whole population were colored slaves, not distributed generally over the Union, but localized in the southern part of it. These slaves constituted a peculiar and powerful interest. All knew that this interest was somehow the cause of the war.

To strengthen, perpetuate, and extend this interest was the object for which the insurgents would rend the Union even by war, while the Government claimed no right to do more than to restrict the territorial enlargement of it.

Neither party expected for the war the magnitude or the duration which it has already attained. Neither anticipated that the cause of the conflict might cease with or even before the conflict itself should cease. Each looked for an easier triumph, and a result less fundamental and astounding.

Both read the same Bible and pray to the same God, and each invokes His aid against the other. It may seem strange that any men should dare to ask a just God's assistance in wringing their bread from the sweat of other men's faces, but let us judge not, that we be not judged. The prayers of both could not be answered. That of neither has been answered fully. The Almighty has His own purposes. 'Woe unto the world because of offenses; for it must needs be that offenses come, but woe to that man by whom the offense cometh.' [Matthew 18:7]

If we shall suppose that American slavery is one of those offenses which, in the providence of God, must needs come, but which, having continued through His appointed time, He now wills to remove, and that He gives to both North and South this terrible war as the woe due to those by whom the offense came, shall we discern therein any departure from those divine attributes which the believers in a living God always ascribe to Him? Fondly do we hope, fervently do we pray, that this mighty scourge of war may speedily pass away. Yet, if God wills that it continue until all the wealth piled by the bondsman's two hundred and fifty years of unrequited toil shall be sunk, and until every drop of blood drawn with the lash shall be paid by another drawn with the sword, as was said three thousand years ago, so still it must be said 'the judgments of the Lord are true and righteous altogether'.

With malice toward none; with charity for all; with firmness in the right, as God gives us to see the right, let us strive on to finish the work we are in; to bind up the nation's wounds; to care for him who shall have borne the battle, and for his widow, and his orphan – to do all which may achieve and cherish a just and lasting peace, among ourselves, and with all nations.

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