mardi 24 mars 2009

Geithnerophobie IV : Vers la Solution Suédoise ?



Merci à Markss pour ses explications. Je continue à paraphraser les messages que je lis sur le programme de sauvetage comme une sorte d'exercice pour savoir si un citoyen ignorant peut à peu près réussir à suivre ces domaines devenus tellement complexes de finances et économie politique qu'on a l'impression de ne pouvoir saisir que des métaphores approximatives.

Wall Street a bien aimé le Plan Geithner et a monté hier, mais il reste à voir pour combien de temps.

Richard Bernstein, de Bank of America (qui était déjà critique au début et dont on a appris aujourd'hui que cet ancien stratège de Merril-Lynch racheté par Bank of America devait la quitter après 20 ans chez eux), me semble prouver que les pessimistes comme Krugman ont raison contre le Plan Geithner et que la Nationalisation deviendra indispensable.


Investors should sell bank stocks after they rallied 12 percent today because the Treasury Department’s plan to buy toxic assets won’t stop profits from dropping, Bank of America Corp.’s Richard Bernstein said.

Removing devalued loans and securities from banks’ balance sheets is a short-term solution that will delay the problem’s ultimate solution, which is bank takeovers, Bernstein said. The government won’t be able to inflate the prices banks receive for selling bad assets indefinitely, he added.

“The history of bubbles shows quite well that financial sector consolidation is inevitable,” Bernstein, Bank of America’s chief investment strategist, wrote in a research note. “Financial stocks will be attractive when the government tries to speed up that inevitable process. However, to the contrary, the government continues to attempt to stymie that inevitable consolidation.”


Bank of America est retombé de plus de 7% ce matin.

En revanche, on peut se demander si l'Administration résiste à la Nationalisation des Banques (la "Solution Suédoise") par idéologie, pour ne pas choquer Wall Street (déjà peu favorable au plan de stimulus d'Obama), ou bien par un choix stratégique pour la faire admettre plus facilement ensuite.

Un des détails amusants est que le Plan a été développé à l'origine par des Investisseurs comme Warren Buffett et Bill Gross.

Felix Salmon expliquait hier que le plan a deux parties, de rachat des actifs (qui est plus difficile parce qu'il demande la surveillance du budget du fond du TARP) et un endettement en se servant de la Caisse des dépots de la FDIC pour effet de levier, si j'ai bien compris (somme qui vient donc s'ajouter aux fonds que le Gouvernement devra demander au Congrès). Il ajoute aujourd'hui que l'ajout des fonds d'investissements alternatifs dans le programme mixte public/privé ("PPIP") ne remplira pas bien sa fonction de distinguer les prix de bons actifs des actifs "contaminés" parce que les investisseurs n'ont pas nécessairement les moyens pour le savoir mais en plus ils ont peu d'incitations à le faire s'ils ont peu de risques (ils peuvent faire un profit même en payant trop, parce que Geithner veut pousser les Banques à remettre ces actifs en vente aux Investisseurs).

Le Prix Nobel Joseph Stieglitz dit que c'est un mauvais plan, qui revient à voler les contribuables et à faire plaisir à quelques investisseurs qui en profiteront. Il ajoute aussi (mais c'est plus vaste que le plan Geithner) qu'il faut que le FMI se serve de ses Droits de Tirage Spéciaux pour ne plus dépendre seulement du Dollar américain (ce qui fait penser à la question débile de cette folle ultra-réac de Michelle Bachmann, R-Minnesota, à Geithner et Bernanke quand elle exige qu'ils s'engagent à ne pas renoncer au Dollar).

James Surowiecki défend le Plan Geithner après DeLong en disant que (1) la Nationalisation coûterait vraiment trop cher et (2) poserait surtout des problèmes politiques en étant trop difficile à faire accepter. Geithner n'aura tort que si la valeur des actifs toxiques est encore pire que dans ses prédictions.

John Heileman (New York Mag) explique les racines de la Geithnerophobie. Obama a hésité entre le Clintonien Larry Summers, Geithner (ancien protégé de Summers) et l'ancien de la FED Paul Volcker. Summers avait le désavantage principal d'être un peu discrédité sur sa remarque sur le manque de prédisposition génétique des femmes pour les sciences quand il dirigeait Harvard (il avait dû démissionner). Volcker était âgé (mais cela aurait pu aussi rassurer, même si son nom est aussi associé à la Récession de la fin des années Carter). Le relativement "jeune" Tim Geithner (48 ans) fut donc choisi bien qu'Obama le connaisse peu et les Obamiens se méfièrent vite de quelqu'un qui avait travaillé avec Paulson et Bernanke. Ensuite, il commit une erreur de communication fatale en changeant son plan au dernier moment, ce qui rendit son discours du 10 février trop vague et maladroit, ce que ne fit qu'accentuer sa faiblesse rhétorique. Mais cela n'empêche que selon les témoignages, Obama redoute trop les incertitudes politiques de l'option de la Nationalisation. Il doit donc concilier le populisme "progressiste" (devant une opinion choquée par AIG) et les élites de Wall Street qui risquent de lui être hostiles. D'où le Plan Geither et son partenariat privé-public complexe comme compromis.

Matt Taibbi (sans doute le meilleur styliste sur ce sujet) décrit les événements en prenant l'histoire d'AIG comme un cas représentatif. Il raconte un cas amusant où les plus grandes Banques américaines furent menacées par l'Union européenne de plus de régulations mais détournèrent l'attention en faisant créer par l'Administration une commission fantôme censée les surveiller et qui ne les inspecta jamais (ce qui désarma aussitôt les velléités de régulations par l'UE). Puis il parle de Geithner avec plus d'acrimonie comme un vendu digne de Paulson.

Geithner even refloated a Paulson proposal to use TALF, one of the Fed's new facilities, to essentially lend cheap money to hedge funds to invest in troubled banks while practically guaranteeing them enormous profits.

God knows exactly what this does for the taxpayer, but hedge-fund managers sure love the idea. Strangely, there aren't many people who don't run hedge funds who have expressed anything like that kind of enthusiasm for Geithner's ideas.

2 commentaires:

  1. Of interest sur le sujet: http://blogs.ft.com/undercover/2009/03/why-there-will-be-no-price-discovery-in-geithners-plan/

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  2. Merci, en effet c'est un paradoxe intéressant :
    "There seems to be little point in this auction; if this is the best the Treasury can do to promote price discovery I think we need to consider entirely different approaches. It not that I’m complaining about the subsidy - although that is always galling - but that the subsidy comes in a form that undermines the whole point of the auction."

    C'est à se demander si les concepteurs du Plan veulent ces effets pervers.

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