mercredi 16 septembre 2009
Agnus horribilis
Christophe Barbier est un journaliste qui maîtrise sans doute grâce à ses études des médias de nouveaux domaines de l'économie des services publics. Il argumentait déjà que supprimer des tribunaux permettait de faire baisser la demande de procès. Il nous expliquait que les enseignants-chercheurs français - groupe auquel il a réussi héroïquement à ne pas appartenir - ne s'opposaient à une dégradation de leur statut que pour être égaux dans la médiocrité par "léninisme".
Face à la vingtaine de suicides chez France Télécom, il a trouvé le vrai responsable : ce n'est pas du tout leur management actuel ou des pressions pour éliminer les anciens statuts, c'est de la faute de l'Etat qui a trop materné tous les fonctionnaires, en en faisant des "agneaux dans un monde de loups".
Barbier a raison d'hurler avec la meute, car il serait dommage que son image de l'Agneau en Bouc-émissaire ne suggère une déshumanisation de ce qu'il prétend défendre comme un ordre naturel.
Jacques Attali défend aussi ce concept mais avec moins de violence que C. Barbier.
RépondreSupprimerSon article est meilleur et sa position extrêmement défendable. De toute façon, il va falloir progresser en ce sens chez FT, car pour l'instant étant donné les possibilités techniques, on ne devrait pas payer autant pour le téléphone et la VoIP est interdite sur les mobiles pour protéger leurs marchés et employés.
Question : pour combien de temps ? et est-ce le boulot d'un PDG de ne pas faire évoluer son entreprise vers d'autres modèles et de restructurer pour sauver sur le long terme le plus d'emplois possibles ?
"est-ce le boulot d'un PDG de ne pas faire évoluer son entreprise vers d'autres modèles et de restructurer pour sauver sur le long terme le plus d'emplois possibles ?"
RépondreSupprimerEst-ce son boulot de le faire en acculant ses employés au suicide? Je croyais que s'il était le boss, c'était justement parce qu'il savait manager une équipe et l'inspirer de sorte à ce que cette équipe accepte le changement? De toute évidence, le résultat (23 morts!) montre que l'équipe dirigeante n'est pas douée en management du changement.
En même temps, si on écoute bien le PDG de France Telecom , il dit la même chose (entre les lignes). J'imagine très bien notre petite élite parisiano-pantouflarde issue des corps de l'Etat se prenant pour des entrepreneurs aller cracher sur les anciens fonctionnaires, ces feignasses. C'est écoeurant. Et évidemment, les journalistes renchérissent.
RépondreSupprimer@ Thierry Lhôte : venez donc vivre aux US pour payer plein pôt et admirer l'inefficacité chronique d'un service qui n'a jamais été public, vous regretterez les PTT.
Par exemple, le débit moyen sur Internet aux US est 12 fois moins importants qu'au Japon; vivant dans l'Upper East Side, je n'ai JAMAIS eu une connexion même comparable à ce que j'avais en région parisienne. En France, on se gargarise sur le fait que la privatisation des télécom a été "réussie", mais c'est parce que le réseau était en très bon état, du fait de l'opérateur public historique.
Un autre exemple pour rebondir ce que vous dites: ATT et T-Mobile font tout, absolument tout, pour empêcher l'utilisation des logiciels de VOIP sur leurs réseaux.
@Tom Roud
RépondreSupprimerVous répondez à côté de la plaque, je n'ai rien contre l'opérateur historique.
Une fois que le marché s'ouvre vous pouvez au plus freiner la concurrence (comme le fait AT&T).
Le PDG de FT sait très bien que malgré les aides de l'Etat, son groupe va connaitre dans un futur proche des années dures car on ne pourra pas indéfiniment laisser la VoIP a la porte.
Prévoir c'est être capable de prendre les bonnes décisions avant que la tuile vous tombe sur la figure et que vous en êtes réduit alors aux plans sociaux.
En fait les PDG inconscients au niveau de la gestion des entreprises, ont été ceux qui lors de belles passes économiques ont embauché plus que de mesure, parce qu'ils n'ont pas prévu (ou qu'ils s'en foutaient) qu'un jour il y aurait une ou des crises (on sait pourtant que l'économie fonctionne par cycle.)
S'en prendre à des dirigeants qui font leur métier et restructurent en vue d'un gros orage, c'est qussi naïfs que d'acclamer celui qui embauche comme un fou quand le temps est au beau fixe. C'est manquer l'essentiel du boulot du dirigeant d'entreprise qui est d'avoir une stratégie pour la survie de l'ensemble.
@Hady-Ba
RépondreSupprimerLe boulot d'un PDG n'est pas de manager une équipe de 100000 personnes, ce qui est impossible. Pour cela il y a des délégations, et une responsabilité des ressources humaines, et de chacun dans l'entreprise.
Le boulot du PDG c'est d'être capable de détecter les futures opportunités et menaces, puis d'élaborer la stratégie du groupe en conséquence.
Vous ne faites aucune distinction intellectuelle comme Tom Roud et vous ramenez le débat à l'émotionnel, sans vous interroger avec un discours simpliste : "les méchants gros contre les gentils petits".
"J'imagine très bien notre petite élite parisiano-pantouflarde issue des corps de l'Etat se prenant pour des entrepreneurs aller cracher sur les anciens fonctionnaires, ces feignasses. C'est écoeurant."
RépondreSupprimer+1
@ Thierry Lhôte : Pardon d'être dans l'émotionnel, je vois tout rouge quand j'entends les français tresser les louanges de la concurrence dans les télécom, moi qui n'ai jamais réussi à avoir un téléphone et un internet potable dans ce recoin du Tiers Monde appelé Manhattan.
RépondreSupprimerJe m'explique donc : le problème de fond, c'est que les Telecom sont assez proches d'un monopôle naturel. Et ces histoires de suicides me semblent liées.
Sur le monopôle naturel : vous parlez d'ATT qui "voudrait" freiner les concurrents, mais il me semble qu'ATT est un ancien monopôle, qui a été découpé par les lois antitrust en 1984, sauf que depuis ... il s'est "naturellement" reconstitué (voir le graphique assez édifiant sur cette page :
http://en.wikipedia.org/wiki/Bell_System_Divestiture#Evolution_of_the_RBOCs )
Colbert avait fait un sketch assez bon là-dessus. Vous me direz qu'il reste donc (encore) trois concurrents aux US, mais je vous répondrai qu'ils se constituent en monopôle locaux et donc en pratique il est impossible de faire jouer la "concurrence". Par exemple, à NY, pour le fixe, c'est Verizon ou rien.
Les liens avec les suicides ?
Je dirais qu'on paie les pots cassés d'avoir voulu mettre de la concurrence par idéologie dans un domaine où ce n'est pas naturel, et où on devrait avoir un service public. On a "ouvert le marché" pour gagner en "efficacité"; mais les autres sociétés n'avaient aucune chance face à l'opérateur historique, donc on a tout fait pour rendre la tâche impossible à celui-ci (puisque FT *devait* perdre des parts de marché pour que les autres compagnies puissent exister), et d'ailleurs le PDG de FT ne veut pas sauver des emplois, si je comprends bien il a plutôt envie d'en perdre un maximum. C'est assez facile de faire perdre de l'argent à l'opérateur historique : il suffit de lui faire entretenir les lignes pour tous les autres de façon non rentable (c'est une technique très courante, on fait par exemple la même chose au Canada avec Bell). La conséquence de ça, c'est le management suicidaire, et au final ces discours odieux empreints de darwinisme social au nom de l'"esprit d'entreprise" et des bénéfices de la concurrence.
Sinon, comme je vous le disais plus haut, l'interdiction de la VoIP sur les mobiles n'est pas le privilège de FT, toutes les Telecom le font. De ce point de vue là, FT n'est pas moins vertueuse que les autres, je ne vois donc pas pourquoi il faudrait exiger que FT "progresse" comme vous dites dans le premier commentaire.
@Thierry Lhôte:"Le boulot d'un PDG n'est pas de manager une équipe de 100000 personnes, ce qui est impossible. Pour cela il y a des délégations, et une responsabilité des ressources humaines, et de chacun dans l'entreprise."
RépondreSupprimerLe boulot du PDG est de veiller à bien choisir ceux à qui il confie la responsabilité des RH non? Si ce choix se solde par 23 morts, se défausser sur ses subordonnés est totalement méprisable.
Les RH relève également d'un choix stratégique. Quand Steve Jobs ou Balmer haranguent leurs employés, ils font leur boulot de PDG en créant dans la boite un esprit tel qu'il pourra après leur demander de bosser 20h sur 24 sans qu'ils se suicident!
D'un point de vue stratégique, cette "mode du suicide" (Lombard dixit) est une atteinte à l'image de FT, entreprise qui sera désormais perçue par les investisseurs et les clients comme harceleuse et criminelle.
La stratégie de Lombard est intellectuellement stupide.
Sur: "vous ramenez le débat à l'émotionnel, sans vous interroger avec un discours simpliste : "les méchants gros contre les gentils petits"."
Quand bien même sa stratégie permettrait, grace à sa suprême intelligence, de faire de FT la première boite française, devrait-on passer les morts pour perte et profit? Et dans ma réponse à votre commentaire, je n'ai pas dit qu'il était méchant, j'ai suggéré qu'il faisait mal son boulot: être un boss qui inspire ses troupes!
"Je suis né chez France Télécom il y a quarante-deux ans. Je suis probablement l’un des plus anciens salariés de cette maison. Ma vision de l’entreprise est une vision de tribu. Quand un pan craque, cela m’affecte profondément. Cela me rend malade. Je ne pense qu’à une chose : arrêter la spirale infernale et repartir avec un nouvel Orange. Pour ce qui est du calendrier, rien ne change."
RépondreSupprimerDixit Lombard : ce type est un paranoïde qui rend tout le monde malade. C'est lui l'abcès à crever.
http://marches.lefigaro.fr/news/societes.html?&ID_NEWS=118398751
@Tom Roud
RépondreSupprimerJe ne chante pas les louanges de la concurrence. Je constate simplement qu'on vit à présent dans un monde inter-dépendant.
Et cette inter-dépendance au premier niveau s'appelle la Commission Européenne.
Par exemple, l'Elysée pour l'instant, n'a pas envie d'attribuer la 4ème licence, car ils savent bien que ce serait une arme de choix pour Free pour raviver la concurrence.
Et qui voit-on donner des conseils aussitot à l'Elysée pour attribuer la 4eme licence et accélérer la concurrence ? Bah la Commission Européenne.
Vous ne pouvez pas demander de gagner des marchés à l'extérieur, dans d'autres pays et refuser une pression politique en échange. Tout ceci c'est de la négociation.
Et je sais très bien que la négociation ca n'a jamais vraiment très bien fonctionné dans les pays totalitaires ni avec les opinions tranchées.
@Hadi-Ba
RépondreSupprimerVous rêvez totalement, vous faites fi de toutes les compromisions institutionnelles par lesquelles doit passer un PDG de groupe qui était très récemment sur l'échelle historique, une grande et vaste administration. Des départements entiers peuvent faire de la résistance et pourquoi pas les ressources humaines s'estimer payer le prix symbolique de la crise si ils avaient été nommés fautifs.
Ce qui se passe c'est comme si vous aviez demandé à l'Education Nationale de s'aligner sur les résultats des écoles privées.
La seule solution pour Lombard, c'est justement de faire intervenir une forme d'arbitre dans la discussion, qui ne soient pas des cabinets privés de consultants. C'est à dire en l'occurence l'Etat.
Autre chose, je ne vois pas un fonctionnaire français attaché à la qualité, l'obéissance et la rigueur d'un travail au prix de la productivité, se sentir tout à fait à l'aise chez Apple ou Microsoft où les deadline du Marketing amènent au niveau du software par exemple, à sortir des produits pas finis en version beta.
Je ne crois pas non plus qu'ils soient formés culturellement à l'innovation (qui est un mot assez laid) comme le sont les gens qui bossent aux USA. Donc chez Apple ou Microsoft, ils n'auraient pas fait long feu ou, de la même manière, auraient connu de graves problèmes du à un écart culturel encore plus radical.
De plus, ni Ballmer ni Jobs n'ont dirigé de leur vie une organisation qui correspond à un effectif de 100.000 personnes.
Vous pouvez dire en effet que Lombard est fautif, mais vous ne faites rien avancer, seulement dans l'émotionnel, car votre pensée n'est pas reliée aux responsabilités, et donc au nécessaire jeu politique et culturel (français) auquel très peu de dirigeants dans le monde sont confrontés.
Thierry Lhote, si ce serait votre femme qui bosserait à France telecom et qui déciderait un beau jour de sauter d'un pont sans que vous ayez pu l'en empêcher, je vous dirais pour vous consoler de ne pas réagir sur le plan émotionnel, ce serait la faute à pas de chances, la concurrence, le contexte international, européen que sais-je encore, que voulez-vous pour que nos glorieux dirigeants nous mènent vers le fabuleux monde qui s'ouvre, il faut bien quelques pertes. En fin de compte, vous ressemblez avec votre discours complètement déconnecté de la réalité bien plus à un apparatchick de l'empire stalinien finissant qu'à un thuriféraire de la modernité moribonde à la Attali, quoique, à bien y réfléchir, ces deux types d'individus ne soient pas si éloignés l'un de l'autre, mais je laisse ça, car ça vous dépasserait.
RépondreSupprimer