mercredi 9 septembre 2009

L'ennemi de mes ennemis peut être mon ennemi



Barack Obama veut nommer son ancien collègue et ami de Chicago, Cass Sunstein, célèbre professeur de droit, à l'Office des Affaires de Régulations (mais certains disent que ce ne serait qu'une étape pour être un futur candidat à la Cour Suprême dès que John Paul Stevens daignera officialiser sa demande de retraite) et l'affaire devient assez surprenante.

D'une part, certes, comme auparavant, les dingues habituels d'extrême droite comme Glenn Beck, grisés par la démission de Van Jones, essayent d'avoir la tête de Cass Sunstein en ressortant hors-contexte des citations. Il est notamment connu pour son hostilité envers la chasse et de nombreuses prises de positions théoriques sur les normes juridiques et bioéthiques.

Le plus amusant est cet "argument" d'un activiste conservateur :

“You can never elevate animals,” said Martosko. “All you can do is lower humans to the level of animals. If you’re intellectually honest — and Sunstein is a Harvard Law professor, so I’m sure he has thought through this — you can draw the conclusion from there to organ donation without consent, or to rationing of end-of-life care. There’s nothing special about you. You’re just another animal.”


Parce que Sunstein veut accorder certains droits aux animaux non-humains, cela implique obligatoirement qu'il va retirer tout droit de vivre aux humains (le philosophe Peter Singer a dû intervenir pour défendre Sunstein de l'accusation d'être son disciple). C'est bien là de "l'honnêteté intellectuelle" (en fait, il avait proposé que le don d'organe soit autorisée par défaut si la personne défunte n'avait pas spécifié explicitement qu'elle le refusait).

On admire au passage comment cette chasse aux sorcières permet en même temps de continuer la tactique de Health Scare en faisant croire qu'Obama veut faire un sénicide comme dans Logan's Run (dans le roman, on est tué à 21 ans, dans le film, on a droit à 30 ans) et prélever les organes de force comme dans Soylent Green : toute la dystopie SF des années 70 en un seul juriste ! Il faut espérer qu'ils pourront aussi montrer qu'il est un vampire, voleur de corps, un partisan de puces dans votre cerveau, de parasites extra-terrestres et d'androïdes homicides !

Mais d'un autre côté, les conservateurs libertariens (comme chez Instapundit ou dans le blog de droit & de droite Volokh) le soutiennent car il est connu comme l'un des plus proches de leurs positions dans l'équipe Obama. Cass Sunstein défend une philosophie "libertarienne molle" appelée "paternalisme libertarien" de régulation minimale et une doctrine juridique appelée minimalisme, qui est une version bien plus "moderée" d'interprétation des droits que la conception "libérale" d'adaptation de la Constitution.

Et à l'inverse, certains à gauche comme John Quiggin espèrent en fait que ces attaques de l'ultra-droite contre Sunstein réussissent parce qu'ils le jugent justement trop partisan du consensus "modéré" avec la droite. Il serait particulièrement ironique que Sunstein, qui prône la négociation avec les Conservateurs, tombe sous le coup de l'hystérie ultra-conservatrice qu'il avait l'air de minimiser.

Cass Sunstein est un des "centristes" dans l'entourage d'Obama et il est marié avec Samantha Power, spécialiste des droits de l'Homme et conseillère en politique étrangère, qui avait dû quitter (pendant quelques temps) la campagne Obama après avoir dit qu'Hillary Clinton se comportait de manière "monstrueuse".

Mais le principal reproche qu'on pourrait faire à Cass Sunstein serait (si on peut croire Wikipedia) que ses parents ont choisi pour son prénom d'honorer un Démocrate relativement pro-esclavage, secrétaire d'Etat du pire Président américain.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire