samedi 12 février 2011

[JDR] En relisant... Casus Belli (9)

Casus Belli n°9, juin-juillet 1982, 40 pages.

Je ne parle en théorie que des jeux de rôle. Cela dit, les pages "Wargames" et la première page sur les jeux de plateau (le terme apparaît encore neuf à l'époque) ont chacune un article de Frédéric Armand sur des jeux de la compagnie SPI, tous les deux créés par Greg Costikyan (le designer qui créera plus tard notamment Star Wars, Toon et Paranoia). Le premier article, sur les jeux d'alliances autres que Diplomacy, mentionne notamment Barbarian Kings (1980), une variante diplomatique où on peut par exemple forcer un joueur à accepter ou à rompre une alliance par Magie (il y a eu une nouvelle édition en 2001). Le second article, sur le jeu de plateau Deathmaze (1979), donne des conseils pour faire du "Donjon" sans Meneur de Jeu (avec une liste de créatures à ajouter).

D&D : Attention à la Marche est à nouveau un article de conseils pour joueurs débutants. Didier Guiserix recommande de commencer plutôt par le Basic Set et l'Expert Set avant de se mettre à AD&D car ce dernier lui paraît une immersion trop brutale (alors que Casus ne donne en fait tous ses scénarios que pour AD&D). Il dit aussi qu'on peut ajouter des règles optionnelles, comme la Localisation des coups (sur 1d6), à condition de ne pas ralentir le jeu. Cette idée se trouvait dans le Supplement II Blackmoor avant Runequest mais elle fut vite abandonnée dans toutes les autres versions de D&D tant elle ne s'adapte pas bien au système abstrait des points de coup.

Devine qui vient dîner ce soir a un descriptif des différents Gladiateurs romains (Rétiaire, Mirmillon, Secutor, Thrace, Samnite) par Gianni Vacca (qui est toujours très actif sur les forums Basic/Runequest et a sorti un supplément Basic Chine Impériale). G. Vacca a aussi envoyé la race des Greegs, singes violents de la "planète du Nécromant". Ils sont tiré d'Images de SF de Steven Eisler, p. 63 (mais c'était en fait une couverture de Michael Whelan pour le roman de Poul Anderson Night Face).

Bazar du Bizarre reprend les traductions de White Dwarf avec 12 potions magiques. La plus amusante est sans doute celle où le buveur inverse ensuite systématiquement les portes et les murs (ce qui peut être gênant pour un jeu Porte-Monstre-Trésor), ou bien la Lotion anti-mort-vivant (qui est efficace mais dégage une telle puanteur quand on s'en enduit qu'elle repousse aussi toute forme d'être vivant).

La module AD&D de FMF et Guiserix reprend les Gladiateurs décrits par Gianni Vacca, les Jeux de l'Arène (à intégrer dans un scénario du 3e Niveau). Les personnages sont capturés par Lord Helldrum, le Vice-Roi de l'Empire Thark après avoir tenté de cambrioler sa propriété. Celui-ci leur propose en échange de la vie sauve de se battre dans les Arènes. On imagine mal plus dirigiste et minimaliste comme scénario. Les amateurs du jeu Ave Tenebrae de FMF, qui sort justement vers cette date, reconnaissent dans ce nom d'Empire Tharque l'Etat du monde de Dreamrift, attaqué par le Magiocrate Orvarth le Ténébreux (= Haazel Thorn de la Lune Noire ?) et Wismerhill après la chute de L(h)ynn. J'imagine que si FMF était resté après ce numéro 10 au lieu de partir aux USA, il aurait fait de son univers le "monde-maison" du magazine (à la place d'Alarian que va créer Guiserix). Qui sait si cela aurait permis de mieux détailler ce monde de "Creux-du-rêve" ?

Nouvelles du front parle pour la première fois du club de Saint-Gaudens en Haute-Garonne d'Henri Balczezak (qui va lancer le fanzine bimestriel du jeu de rôle toulousain Runes six mois plus tard, et ensuite travailler pour Jeux Descartes). Si on arrive jusqu'à janvier 1983, on pourrait aussi commenter Runes (qui était un peu plus ouvert vers Runequest et Traveller)...

Casus raconte aussi l'histoire du fameux Donjons & Dragons de Mathilde Maraninchi aux édition Solar (1982), qui fut le premier jeu de rôle en français, une traduction/adaptation pirate du Basic D&D(où Lawful était traduit "Droit" et Chaotic "Vil"). Il semblait croire que D&D était déjà une activité dans le domaine public. L'éditorialiste dit que ce jeu peu "Droit" ne fut en vente que 48h avant que TSR ne l'apprenne et ne menace Solar d'un procès. Mais je me demande ce qui a pu arriver à cette mystérieuse Mathilde Maraninchi depuis. Son "Donjons et Dragons" clandestin est devenu très recherché par les collectionneurs (même si ce n'est en gros qu'une version de D&D). Ironiquement, ce sont les mêmes éditions Solar qui traduiront ensuite les Endless Quests de TSR.

Il commence à y avoir beaucoup plus d'annonces de sorties et je vais donc commencer à les sélectionner plus (même si c'était souvent ce que je préférais lire, en dehors des scénarios). Ils annoncent notamment Star Frontiers, Thieves'Guild (jeu de rôle consacré aux voleurs de Gamelords) et Thieves'World (le supplément de contexte multijeux de Chaosium). Casus prévoit aussi la première édition d'Ave Tenebrae chez DragonLords, "un wargame fantastique où plusieurs provinces satellites seront mêlées aux luttes de deux empires, au milieu des hordes destructrices et des armées magiques" (sans mentionner que c'est écrit par le rédacteur en chef FMF). La seconde édition sera reprise par Jeux Descartes et c'est le jeu qui va ensuite fonder la carrière de FMF comme scénariste de bandes-dessinées.

7 commentaires:

  1. "Je me demande ce qui a pu arriver à cette mystérieuse Mathilde Maraninchi depuis."

    Tu n'as pas cherché bien loin ;-) Une simple recherche google sur ton nom t'en apprendra énormément. Elle a sorti une encyclopédie sur les jeux de société chez le même éditeur en 1991, et semble depuis avoir fait une carrière d'écrivain de livres pour enfants/scénariste de séries animées pour enfant.

    RépondreSupprimer
  2. J'ai raté mon jet de Googling. Je ne voyais que des traces du D&D avec la mention "épuisé".

    RépondreSupprimer
  3. salut d'un visiteur
    c'est peut etre pas trop a propos mais j'ai les numéros 7, 8, 9, 10 de 1982 si ca interesse quelqu'un on peut en parler ?? jpx33260@gmail.com

    RépondreSupprimer
  4. Si je me rappelle bien, Mathilde Maraninchi avait dû débarquer un soir au club de la rue d'Ulm (du moins je suppose, sinon je ne vois pas comment ce qui suit aurait pu se produire) et s'était présentée à FMF comme journaliste, désireuse d'écrire un bouquin sur les jeux de rôles. Flatté d'être interviewé, mais pensant qu'un aparté serait impossible dans les salles de l'École normale, il lui avait proposé de l'accompagner chez lui pour finir la conversation et peut-être lui faire jouer une partie d'initiation. Il m'avait donc embarqué à cette fin. Au grand agacement de François, un quatrième larron avait décidé de nous suivre (dont j'ignore le nom, mais qui, arrivant pour la première fois au club de Saint-Rémy le lendemain, y fût aussitôt baptisé "Lord Cradingue").

    Bien que je n'aie rien préparé d'avance, je parvins à improviser cette nuit-là une aventure à peu près potable, et surtout assez drôle à partir du moment où je décidai de me payer la tête de notre quatrième joueur, histoire de détendre une atmosphère quelque peu crispée par ses incessantes gesticulations (il ne cessait pas de plonger ses longs bras dans les manches ou l'échancrure de son ample tee-shirt d'âge et de couleur indéterminés, pour se gratter différentes parties du corps, comme s'il était infesté de puces, à la grande horreur des deux autres).

    La partie se passa bien, Mathilde et François semblèrent se quitter bons amis, et on mit Lord Cradingue à la porte avant de prendre quelques petites heures de sommeil, indispensables avant de rejoindre Saint-Rémy.

    Quelques semaines plus tard, passant à l'Oeuf cube, j'y découvris un petit livre en français, parlant de "Donjons & Dragons", et signé Mathilde Maraninchi. Après en avoir acheté un exemplaire, j'appelai François pour lui demander si je pouvais passer par lui pour me le faire dédicacer. Mon coup de fil le trouva très en colère, et clairement déterminé à faire retirer ce livre de la vente et à ruiner l'insolente qui avait osé le commettre. Le lendemain, une ordonnance de référé imposait le retrait du bouquin de tous ses points de vente, et la destruction de tous les exemplaires invendus.
    Pour ce que j'avais cru en comprendre à l'époque, François avait appelé TSR (probablement Gary Gygax lui-même) qui l'avait soit chargé, soit autorisé à effectuer toute action nécessaire à la préservation de leurs droits. Je ne lui ai jamais demandé d'explication précise et donc je n'en sais pas plus, d'autant que je n'ai jamais revu Mathilde.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci pour ce récit. FMF ne raconte pas dans CB qu'il connaissait l'auteur personnellement.

      La naïveté de Mathilde Maraninchi et surtout des éditions Solar est assez étonnantes. Ils pensaient vraiment que le nom même de D&D qui venait d'apparaître depuis cinq ans pouvait être complètement libre ?

      Cela dit, si elle avait fait la même chose mais en appelant cela d'un nom plus générique comme "Chevaliers & Sorciers", elle aurait créé le premier "rétro-clone de première génération" et aurait peut-être pu échapper à un procès, j'imagine.

      Supprimer
    2. FMF a ensuite travaille a TSR et en particulier sur les Aventures Orientales pour D&D

      Supprimer
  5. @didier

    Intéressante anecdote. Est ce que tu m'autoriserais a la reprendre pour l'ouvrage que je met au point ? (tu as peut être participé aux enquêtes d'ailleurs...)

    RépondreSupprimer