Je crois que ne bloguerai pas jusqu'au bout, je dois me lever tôt demain.
Comme a dit Sophia Aram, on ne peut s'empêcher de penser que cela fait un peu jeu TV ("vous gagnez une immunité si vous vous présentez en moins d'une minute").
Manuel Valls : "Chaque Français a droit à la vérité."
L'ennui est que dans sa définition de "Vérité" (réduire plus les déficits), la vérité est déjà au pouvoir...
Montebourg : "Je suis un enfant de bouchers-charcutiers."
Baylet lit un texte banal mais il a dû multiplier son score par environ 1000% comme personne n'avait entendu parler de lui ou de son accent.
En revanche, j'avais réussi à oublier à quel point Royal était mauvaise à l'oral. On peut reprocher à Aubry d'être fade mais on peut l'écouter sans se crisper. Je vais censurer aussi mes observations superficielles sur ce collier de perles.
C'est un format curieux que de faire six "entretiens" ainsi. Je suppose qu'ils voulaient éviter le "contre-modèle" des débats d'octobre-novembre 2006 LCP par Emmanuel Kessler et Emilie Aubry (le Canard enchaîné rappelle que Pujadas a changé d'avis à ce sujet). Les candidats attendent dans leur loge pendant que leur concurrent passe devant trois journalistes.
(1) Montebourg a de la chance de commencer car il paraît sans doute plus original que les autres. Mais cela ne pourra guère que changer les décimales de son score...
(2) "M. Baylet, que faites-vous ici ?" Pujadas sait poser des questions qui passent pour impertinentes quand il n'y a aucun risque (même si Baylet aurait été classé dans les 500 plus grandes fortunes du pays, vers le bout de la liste).
Mais Baylet semble en effet être plus là pour critiquer le PS que pour donner l'illusion que le PRG aurait une existence autre que fictive.
Il se présente comme le plus pro-Européen mais il plaira à l'aile Canal+ de la gauche en proposant la dépénalisation du cannabis (vous avez remarqué à quel point cette chaîne n'a l'air de ne penser qu'à ce seul sujet ?).
Lapsus, si j'ai bien entendu, Baylet parle de "droit à la vie" au lieu de "liberté de choix" (i.e. IVG), au moment où il évoque de nouveaux droits bioéthiques ou une forme d'euthanasie ("droit de mourir dans la dignité").
(3) Ah, Royal évoque la réforme fiscale de Piketty.
Elle est quand même meilleure que dans la courte présentation initiale, mais elle croit toujours à des formules vides comme "la République du Respect" et "Ordre juste".
(4) On parle de l'enseignement pour reprocher à Hollande son manque d'austérité s'il veut recréer des postes non-renouvelés. François Hollande dit que le programme ne sera appliqué que s'il y a assez de croissance. Comme le programme annonçait une croissance délirante de +2,5%, il n'y a pas d'engagements à moyen terme.
Une ombre du Hollande ironique et un peu énervé revient quand il demande que Pujadas reprenne son socle d'éducation primaire et apprenne à compter. Mais il court le risque de paraître trop agressif.
(5) "En quoi n'êtes-vous pas de droite ?" Manuel Valls : "Je n'aime pas les étiquettes." Ben, présente-toi "SE-Divers-Droite" alors.
"Être de gauche, c'est dire la Vérité et (...) défendre le Triple A."
"Être de gauche, c'est se révolter contre une école qui reproduit les inégalités ethniques. Il faut donc plus de sport dans les quartiers populaires."
Valls est pour la TVA sociale. Où est Laurent Fabius ?
"Être de gauche, c'est ne plus supporter des ghettos et mettre en place des quotas par métier." Il mentionne qu'il y a trop de médecins étrangers, pas de doute, c'est du travaillisme très bleu-ciel à la Baron Glasman.
"J'ai été l'un des seuls au PS à voter la loi contre le voile intégral." Badinguet poursuit Le Pen mais on ne sait pas exactement qui Valls poursuit.
(6) Aubry parle avec un débit moins haché que Royal et Hollande (dont je me demande s'ils sont influencés inconsciemment par le ton du Président actuel plus que par les périodes patientes de Mitterrand).
"Les emplois-jeunes seront désormais les emplois-Avenir et participeront à une croissance plus verte". Ils sont censés notamment trouver assez d'emplois dans l'isolement thermique ?
Non, mais pourquoi pas au Cinéma de Minuit pendant qu'ils y sont...
Faut-il quelqu'un d'expérimenté ou de neuf contre Badinguet ?
C'est une question vide, une perche à Royal contre son ex-compagnon qui n'a jamais été ministre, mais elle essaye de ne pas paraître trop agressive. Aubry refuse la question en rappelant qu'il faut surtout quelqu'un qui ne soit pas Badinguet.
Hollande : "Je n'ai jamais été ministre mais en fait, j'ai été associé à Matignon par Lionel Jospin en 1997-2002." Il y aurait de meilleures défenses, j'imagine.
Valls en profite pour faire l'éloge de Badinguet en Libye. Bon, on sait maintenant pourquoi il se présente, pas pour être Ministre des finances du Président PS mais en espérant une nouvelle "Ouverture".
Montebourg, qui semble admettre qu'il n'est pas dans la Triade Hollande-Aubry-Royal, commence par attaquer Valls. "On ne gagnera pas en imitant les idées de Badinguet".
Baylet : "C'est en tout cas l'un d'entre nous six qui affrontera Badinguet." Même sans doute un sous-ensemble plus strict qui ne comprend pas M. Baylet.
Quelles alliances
Montebourg dit qu'il a été choisi par Chevénement (mais il n'ose pas citer explicitement d'éventuels rapprochements possibles avec le FDG de Mélenchon).
Aubry dit qu'elle a pu s'allier au MoDem local à Lille. Le problème est que si on croit les rumeurs actuelles lancées par les Borlooistes comme Dominique Paillé, Bayrou prépare un nouveau virage vers l'UMP.
Hollande dit que, contrairement à son cher ami Lionel qui l'associait tant au pouvoir, selon lui, il ne veut penser qu'au Premier Tour pour éviter un nouveau "21 avril".
Royal dit qu'elle veut aussi une alliance avec les "Centristes Humanistes" (en gros, les cathos discrets dans leurs crucifix) et les "Gaullistes sociaux". Les Gaullistes sociaux, oui, ce serait une bonne couche géologique. Pourquoi pas une alliance avec l'UDSR, la faction Gambetta des Républicains ou avec l'aile la plus orléaniste des Feuillants ?
Que faire face aux déficits et pour la Croissance ?
Montebourg n'est pas mauvais sur la Règle d'or (il exagère le consensus des économistes mais il aurait pu citer Christine Lagarde aussi dans ceux qui tiennent soudain un discours plus "eau salée" contre le Hooverisme des Pères La Rigueur). Il compare la politique d'austérité aux Médecins de Molière qui tuent leurs patients en les saignant.
Valls redit pour la 4e fois qu'il est le seul à ne pas mentir aux Français (et il se réclame de Pierre Mendès France pour défendre le discours de François Fillon). Il semble même déjà critiquer des alliances à gauche. Mais même lui fait attention de ne pas attaquer "son ami Arnaud" trop frontalement. La discussion est d'ailleurs plus cordiale que ce à quoi je m'imaginais en regardant les rixes des Primaires du GOP.
Ah, Royal dit qu'elle interdira les taux "Revolving". Cela me paraît plutôt une vraie réforme facile à obtenir et je me demande même quelle législation doit déjà exister à ce sujet. Elle rappelle aussi qu'elle réintroduira une réforme de la pénibilité dans la réforme de la retraite.
Aubry critique l'idée de Hollande qu'on pourrait promettre un équilibre pour 2017. Elle semble même être plus directe contre lui que tout ce que Valls disait contre le programme socialiste.
Valls paraît presque précis soudain en évoquant la question de la création des Eurobonds. Mais l'analyse reste en fait assez vague. Je ne regrette pas du tout l'absence de DSK mais ils auraient pu faire des fiches plus détaillées.
(22h51 Un des caméramen n'en peut plus et dérive complètement, on dirait...)
Le choix tactique d'Aubry est compliqué : elle dit qu'elle est plus sérieuse parce qu'elle ne prend pas d'engagement précis sur le déficit.
Aubry attaque maintenant Hollande sur son refus de sortir complètement du Nucléaire, et cela relance le débat sur cette direction. Elle l'aura finalement plus critiqué sur le plateau que Royal.
Baylet, Hollande, Valls et Montebourg ne parlent que de réduction graduelle du Nucléaire vers 2025, pas de sortie. Mais la différence Hollande/Aubry n'est que de degré si le cap de sortie est à une date non-précisée. Royal accepte l'expression de sortie du Nucléaire, sauf des générateurs pour les déchets (elle épuise tout son temps de parole en essayant de rassurer EDF).
La libéralisation ou dépénalisation du cannabis
Baylet est le seul des six à être pour (comme certains EELV, comme Stéphane Gatignon).
Pujadas dit que Valls est bien placé pour en parler comme il est maire de banlieue. Ce commentaire ne semble pas choquer Valls.
Strauss-Kahn
Montebourg dit être contre le retour de DSK à cause de sa politique au FMI. Il demande même des excuses de DSK à la gauche.
Valls dit qu'il faudra DSK éventuellement pour la composition du Gouvernement. "Sa vision est dans notre patrimoine génétique". Je ne sais même pas ce que veut dire cette expression.
Hollande appelle à voter aux Primaires le 9 octobre. Le Président devra associer plus de concertation.
Royal appelle à lire son programme. Elle mentionne l'année de stage pour les enseignants et l'encadrement militaire pour les délinquants.
Baylet dit qu'il est juste content d'avoir été sur une télé nationale et d'avoir goûté à son quart d'heure de notoriété.
Montebourg joue le storytelling et raconte une rencontre avec une salariée. Il transforme cette rencontre en un changement radical vers la "Démondialisation".
Valls appelle aussi à voter le 9 octobre, et promet que le PS restera uni. Il cite pour la 6e fois le fait qu'il est le seul à dire la Vérité. Il rappelle qu'il est d'origine espagnole et qu'il est donc le plus patriote parce qu'il a choisi sa naturalisation.
Aubry dit qu'elle veut un sursaut moral (Montebourg, qui a critiqué Guérini avec plus de clarté, doit sourire).
Hollande a été autoritaire, sans doute parce qu'il redoutait son image de "Flanby". Aubry a cherché à se démarquer de lui (sur la réduction du nucléaire, sur le cap des déficits et sur le contrat générations), même si cela paraissait parfois un peu artificiel. Elle est pour un cap sur le nucléaire, contre pour le budget, et est contre le contrat générations mais pour un contrat jeune. Cela ne risque pas de tellement changer les lignes entre les deux favoris.
oui, René Capitant avec nous!
RépondreSupprimerCela dit, on fait souvent comme si des courants politiques existaient toujours (même le Gaullisme tout court est un courant fantôme en un sens, depuis le Chiraquisme).
RépondreSupprimerCe que je retiens quant à moi :
RépondreSupprimerAubry et Hollande n'ont finalement divergé que sur la forme et de vagues accusations réciproques d'être trop précis (l'un sur la dette, l'autre sur le nucléaire). Aubry a constamment oscillé entre son nous d'ancienne première secrétaire, annexant des points des autres, et un je dont la seule caractéritisque est d'être prête. Valls a consciencieusement joué à droite tout en attaquant de façon purement ad hominem Badinguet. Royal a été très mauvaise sur la forme même si elle s'est un peu rattrapé dans le débat. On aura remarqué qu'elle occupe l'aile gauche avec Montebourg. Ce dernier était certainement le plus incisif ; il ajoutait à la réforme fiscale de Hollande et à la reprise en main des banques de Royal une dose de protectionnisme européen, mais je ne sais pas si son attaque de DSK l'a vraiment servi. Baylet a défendu la dépénalisation du cannabis (ce qui est, après tout, la seule position raisonnable) et l'eutanasie, mais n'a pas eu le temps de parler du mariage gay, mais il a apparemment retiré la réduction du temps de travail de son programme sans quoi j'aurais été tenté de voter pour lui... Enfin Hollande a constamment été dans la posture de la raideur ce qui l'a même handycapé à un moment en rendant son débit saccadé. Il a néanmoins réussi à maintenir son image de favori. Cela explique sans doute pourquoi il est le seul à ne pas avoir fait d'appel du pied à des électeurs hors parti : Aubry a dragué les verts, Valls l'UMP, Baylet son parti et les fumeurs, Royal Villepin et Chevènement, et Montebourg les cocos. Dans l'éventail des possibles, on s'achemine paradoxalement vers une confrontation entre les deux positions les plus indiscernables, Hollande et Aubry. Montebourg aurait pu marquer des point si l'aile gauche n'était pas tenu par Hamon qui soutient Aubry. Royal a sans doute perdu sa chance de doubler Aubry. Valls rêve déjà de son maroquin de ministre de l'intérieur.
Par ailleurs je recommande chaudement le livre de Rémi Lefebvre: Les Primaires socialistes. La fin du parti militant chez Raisons d'agir, qui décrit très bien les logiques qui ont conduit à l'organisation de ce processus et se permet même le luxe d'une prédiction confirmée ce matin (voir l'édito de Libération): après avoir réclamé les primaires comme symbole de "modernité", de "démocratie", de "transparence", etc., la presse dite "de gauche" va dénoncer inlassablement la "machine à perdre" avec une stratégie imparable : si le débat est policé, il sera "ennuyeux" et "stérile", et si les échanges sont vifs, ce sera le "retour de la guerre entre socialiste" et le signe de la "désunion".
RépondreSupprimerMerci pour ce résumé, je n'ai pas eu le courage de me farcir cette émission.
RépondreSupprimer"Pujadas dit que Valls est bien placé pour en parler comme il est maire de banlieue. Ce commentaire ne semble pas choquer Valls."
RépondreSupprimerContrairement à vous, bobo vivant dans un quartier riche et ignorant tout des réalités de La Vraie France, Valls sait bien que ce n'est que grace à sa fermeté que les barbares ne contrôlent pas sa ville de banlieue et que la Mosquée d'Evry n'émet pas de fatwa contre la Cathédrale toute proche. Reste plus qu'à espérer qu'il sera le ministre de l'intérieur d'ouverture de Sarko II.
"Lapsus, si j'ai bien entendu, Baylet parle de "droit à la vie" au lieu de "liberté de choix" (i.e. IVG), au moment où il évoque de nouveaux droits bioéthiques ou une forme d'euthanasie ("droit de mourir dans la dignité")."
RépondreSupprimerCe n'en est malheureusement pas un, c'est un renversement intentionnel chez lui. Voir aussi cet interview où il parle de "droit à la naissance"...
http://www.dailymotion.com/video/xl2moy_jm-baylet-invite-du-journal-de-public-senat_news (16'30").
Cordialement.
> Goodtime
RépondreSupprimerLa fin du Parti militant et l'imitation du modèle italien (les primaires "ouvertes" de l'Union de la gauche en octobre 2005 s'explique aussi à cause de la relative faiblesse du PS à gauche.
Un but des Primaires était d'éviter trop de division de la Gauche plurielle. Ils n'ont pas pu éviter la candidature EELV (même si Cohn-Bendit était pour un accord) mais les Primaires auront au moins évité une candidature de Baylet (ou Taubira en 2002). C'est toujours 1 ou 2% de plus au premier tour.
> 賈尼
Je crois effectivement qu'on ne manque pas grand-chose, comme ceux qui annoncent des choses précises ne les tiendront pas ensuite.
Mais cela permet quand même de voir sur quoi ils choisissent de faire un débat.
> Hady Ba
Comme Valls se trompe tout le temps cela prouve qu'il n'y aurait même plus d'ouverture, même si Badinguet gagnait.
> Arthur
Ah, merci, cette question me turlupinait comme aucun commentaire n'en avait parlé, je croyais vraiment avoir mal entendu.
L'expression "droit à la naissance" pour "droit de ne pas faire naître" paraît un peu bizarre, même indépendamment de son analogie "droit de ne pas faire naître" / "droit d'interrompre les soins".
Cette vidéo de Baylet m'apprend aussi qu'on prononce "Ba-ï-lette" et non "Ba-ï-lè" si j'en crois ce journaliste de LCP.