Enfin, Dan Proctor a deux arguments : (1) l'Old School supposait de revenir à ces règles archaïques contre la montée en puissance de D&D 3 et D&D 4E, mais le vrai déclencheur de l'intérêt du public fut la mort de Gary Gygax en mars 2008, qui conduisit à un examen de ce qui avait été perdu (voir aussi l'histoire du mouvement sur laquelle revenait David Macauley le mois dernier).
(2) Mais l'Old School était aussi liée au mouvement plus général Open Source (ou "Source Ouverte", comme le préconise le Québec). Sur ce point, même si Basic D&D est disponible, il est plus facile légalement de produire un module pour Labyrinth Lord. Leur nombre estimé atteint presque la centaine.
Le premier argument semble "puriste". Proctor ne cache pas sa lassitude devant l'inflation de tous ces quasi-clones modifiés, depuis Lamentations of the Flame Princess, Adventurer Conqueror King, Astonishing Swordsmen & Sorcerers of Hyperborea. L'époque des anciennes fanzines a été rouverte par l'Internet qui permet à chaque MJ de publier sa propre campagne. [Un exemple touchant est James Kramer, qui en plus de suppléments professionnels, remet gratuitement sur son site les scénarios qu'il écrivait à 14 ans dans les années 70.] Et j'imagine que son allusion à "l'Appendice N" est aussi une référence contre DCC, qui finit par s'écarter de D&D au nom d'un retour aux origines littéraires. Mais les mêmes causes ont produit les mêmes effets : D&D avait produit les jeux de rôle en réaction contre lui, l'évolution de l'OSR a suivi les modifications de l'ancêtre archétypal et on commence à redécouvrir les générations suivantes et des clones d'autres jeux (TFT par exemple).
Le second argument sur la Source Ouverte contredit le purisme apparent : il ne dit pas qu'il veut garder la flamme du Vrai D&D mais que désormais ce hobby va échapper au copyright de la compagnie qui la possède. Ce qu'il y a de plus créatif et dynamique dans l'OSR est sa philosophie dite DIY (pardonnez-moi pour l'anglais, Faites-le vous-même), c'est un loisir créatif, disons, comme le tricot, et pas seulement un loisir de consommation (même si les vieux fans que nous sommes ont une tendance à demeurer aussi des consommateurs par fétichisme ou par désir vain d'exhaustivité).
L'unité de l'OSR est un peu fissurée entre ceux qui voudraient vraiment un purisme du Donjon à l'ancienne et qui se montrent parfois presque puritains ou idéologues dans leurs goûts (ainsi ceux qui ne veulent pas souiller OD&D par ses suppléments) et ceux qui y voient avant tout une occasion d'expérimenter aussi vers de nouvelles formes. Comme le dit si bien la devise de Rob Conley, l'OSR n'était pas seulement un retour à un seul système ni même la nostalgie d'un style de jeu comme le Dungeon Crawl, mais "de revenir aux racines de notre hobby pour voir ce qu'on aurait pu faire différemment, quelles voies n'avaient pas été explorées pour des raisons commerciales ou à cause des intérêts personnels des créateurs de l'époque." Un auteur comme Kevin Crawford (Stars Without Number) en est un bon exemple en créant sa propre synthèse de Traveller et D&D ou un D&D africain. Et pour l'instant, mes créateurs favoris dans cette vague DIY seraient des gens comme Zak (sa cité modulaire Vornheim est certes devenu un supplément professionnel) ou Jack (Tales of the Grotesque est complètement gratuit).
En ce sens, l'OSR, qui a été alimentée par la nostalgie après la mort de Gygax en 2008, a fleuri aussi grâce à un dynamisme qui vient en partie de ce mouvement de partage gratuit, ce qui implique que le loisir créatif soit en partie négatif pour les compagnies professionnelles qui vivent de ce loisir.
Je n'ai même pas besoin de partager ses critères pour trouver ses critiques très divertissantes. Cela dit, certains Adventure Paths de Paizo pleins de background (comme Crimson Throne) m'attireraient plus que des Mégadonjons comme Rappan Athuk, et je ne comprends pas sa thèse qu'un "Porte-Monstre-Trésor" serait foncièrement moins dirigiste qu'une intrigue classique parce qu'on peut choisir de ne pas entrer dans une salle ou de s'enfuir.
Merci pour tous ces détails intéressants! Je découvre ainsi Tales of the Grotesque, qui m'avait échappé, et qui est très joli et intéressant! Actuellement, je suis impressionné par Adventurer-Conqueror-King, et par Blood & Treasure: ils ne réinventent pas tout, loin de là, mais, un peu comme DCCRPG ou S&W Complete, il y a un souci de présentation générale, notamment des illustrations, qui forment un tout cohérent. Et si les Retroclones étaient, d'abord, des objets - plus que des jeux?
RépondreSupprimerLe module sur le fromage, tu l'as lu ?
RépondreSupprimerSi oui, je serais intéressé par un avis (non que je compte me le procurer, mais l'idée de départ m'intéresse).
> Thierry C.
RépondreSupprimerJe comprends comment on peut les collectionner et certains (y compris ceux qui n'ont que des illustrations libres de droits) sont vraiment jolis. DCC est devenu un objet à part en tout cas par sa création ironique d'hommages.
La généalogie ou la classification de tout cet écosystème des clones est devenue touffue.
Des clones plus fidèles comme ACK ou LotFP ont chacun apporté quelque chose de différent (un jeu de Domaine différent de BECMI pour ACK, un système de magie avec une atmosphère plus inquiétante pour LotFP).
Je n'ai pas essayé Blood & Treasure (qui est payant) mais généralement j'aime bien la "voix" d'auteur et l'humour de John Stater sur Land of Nod. D'après cette analyse, je crois comprendre que B&T fait un peu l'inverse de Castles & Crusades : C&C était une reprise du d20 le faisant revenir vers une version antérieure alors que B&T est une version d'AD&D qui recrée aussi certains aspects de D&D3.
> Imaginos
Je l'ai téléchargé sur RapideJDR (il est seulement à 2,25 euros en ce moment, pour certes seulement 16 pages) mais je ne l'ai pas encore lu.
Je ne sais pas pourquoi j'aime tant les Champignons et Moisissures dans ces scénarios à l'Ancienne. Je crois que c'était la seule chose que j'avais aimée dans le très ennuyeux Temple of Elemental Evil, Zuggtmoy, cette déesse des Champignons.
Il y a eu aussi une autre critique très positive de La Roue du Mal chez Grognardia.
En effet, B&T part peut-être plus de D&D B/X qu'Advanced, et propose, par exemple, 3 saving throws (Fortitude, Reflex, Will), ou juste une quarantaine de "feats" optionnels, empruntés à DD3. C'est très convaincant. Le" Companion" de ACK quant à lui propose un système de construction "modulaire" de classes de personnages, qui est assez impressionnant.
RépondreSupprimerEnfin, j'admire assez la ressortie du mégadonjon "Rappan Athuk" (Frog Lord Games), en version "Pathfinder" et aussi en version "Swords & Wizardry": comme ça tout le monde sera content - pour ma part, je pense sous peu en faire jouer au moins un bout, en "S&W".