Casus Belli n°22, octobre 1984, 54 pages, 15 FF.
La couverture est par Pierre-Olivier Vincent (alors âgé de 17 ans), qui est devenu depuis directeur artistique chez DreamWorks (sur How to Train Your Dragons) et qui réalisera aussi, par exemple, des illustrations intérieures (p. 43 dans le scénario AD&D) et la couv' du n°26. L'image semble présupposer toute une histoire implicite obscure, avec son aventurier humain à dos de tortue volante et son petit gnome jovial. Ces couvertures mystérieuses de Casus semblaient toujours faire allusion à un morceau extrait d'une campagne privée. A l'époque, je croyais complètement à tort qu'il y avait peut-être une allusion à une intrigue dans la bande-dessinée Elfquest parce que son titre était mentionné. J'ai l'impression qu'il y a plutôt une influence du personnage de Bragon dans la Quête de l'Oiseau du Temps de Loisel (les deux premiers volumes étaient déjà parus en 1984 et à l'époque, on n'avait pas tant de bd de fantasy sous la main).
Nouvelles du Front & Têtes d'Affiches. Denis Gerfaud fait une brève recension plutôt positive de Chill et fait l'éloge de sa Table unique de résolution (ce qu'il va appliquer dans son propre Rêve de Dragon, qui utilise la formule [Caractéristique.x((Compétence+Difficulté+10)/2) %], mais ironiquement dans ce même numéro, il propose de remplacer les tables d'AD&D par une formule). On annonce aussi le jeu de rôle Indiana Jones (en disant seulement qu'il n'y a pas de création de personnage et que le système d'initiative est le plus "poli" car on demande seulement aux PJ de choisir qui agit en premier), Ringworld, Time Masters, la boite Companion (D&D version Frank Metzner niveaux 15-25). En français, on annonce la traduction de l'Appel de Cthulhu, l'arrivée de six Livres Dont Vous Êtes Le Héros de Gallimard (il y a aussi une publicité à la fin du magazine avec des illustrations de chacun de ces six livres), les Chroniques de Linaïs (règles avancées de l'Ultime Epreuve de Fabrice Cayla - Jeux Actuels fait d'ailleurs pas mal de pub dans Casus Belli à cette époque) et Empire Galactique de François Nédélec.
Il y a les résultats d'un sondages sur les articles du n°20 et on y voit à quel point les lecteurs sont plus rôlistes que wargamers : les articles JDR sont systématiquement mieux notés que ceux sur les wargames.
Les pages wargames de ce numéro (+ Ludotique) occupent les p. 10-29 (+ plateau de jeu p. 37-39), soit environ 39% des 54 pages. Il y a encore un jeu en encart sur la Première Guerre mondiale, suite de celui du n°21, et un programme en Basic pour gérer les combats dans Car Wars.
Mais vous devez voir ci-contre une publicité assez peu explicite (je n'y retrouve d'ailleurs pas cette illustration) pour une aventure publiée par la N.E.F., La Vallée des Maléfices, située sur l'île de Rope, qui évoque sur certains points une Islande un peu plus tempérée, avec des steppes plus slaves à l'est (mais il y a des fjords et on y adore le panthéon nordique). Le Casus Belli n°23 décrira l'île et j'ai déjà évoqué ce monde avec ses deux premières aventures, La Guilde du A (Principauté de Lemach') et Les Îles Flottantes (Duché de Smier - il y eut aussi un 3e, la Relique perdue, et un 4e, Le Joyau d'Aranel). Ce 5e module, par un certain V. de Georges (est-ce un pseudonyme de Marc Laperlier ?), se passe dans le Comté de Skara au nord-ouest de Rope, région de scandinaves assez brutaux et dont la seule richesse est la production d'une drogue qui rend psychotique. C'est un module très classique, avec beaucoup d'imitations de modules TSR mais il y a un peu de "bac à sable" avec une atmosphère au début (son Dragon invisible, ses Druides en crise) avant de finir dans des Donjons. Des caractéristiques sont données pour AD&D, C&S et Runequest.
Devine qui vient dîner ce soir : L'olog-haï (un demi-orc/demi-troll), le cadavre animé (une version de zombie par Martin Latallo qui peut continuer de combattre en plusieurs parties s'il est coupé en morceaux), le Golem de bois (par Denis Gerfaud dans le Sage Zormilius illustré par Tignous), l'erginpe (un type d'épée maléfique empoisonnée qui transforme ses victimes en morts-vivants).
Treasure Traps. Un reportage sur cette organisation britannique qui lança le "Grandeur-Nature" au Royaume-Uni. Fondée en 1982 dans le nord-ouest de l'Angleterre (dans le Cheshire), l'organisation d'origine ferma en 1985 mais de nombreuses autres branches survécurent.
Elfquest. Denis Gerfaud fait un long portrait du jeu de Steve Perrin en comparant les règles avec celles de Runequest (au moment où Gerfaud est en train d'écrire sa propre variante du Basic System avec Rêve de Dragon). Il parle assez peu de l'univers si ce n'est pour dire que c'est plus du "Néolithique-Fantastique" que du "Médiéval-Fantastique" (de même que Glorantha est en partie de l'Antique-Fantastique). Il faudrait nuancer : les Humains sont au Néolithique, les Trolls (qui sont plus proches des Nains des autres jeux) maîtrisent la metallurgie et les Elfes sont, selon les cultures, plus proches d'une société antique. Il finit encore une fois par une attaque en passant contre D&D. Mais il n'y aura pas de scénario pour Elfquest dans le magazine avant sa traduction française (dans Casus Belli n°87, juin-juillet 1995).
Formule ou Tables. Encore un article de Denis Gerfaud, proposant de remplacer les tableaux d'AD&D par une formule assez simple. Au lieu de donner un score d'attaque (comme la THAC0 d'AD&D2 d'où on devait soustraire l'AC de la cible), la Classe d'Armure descendante est remplacée par un score de Défense ascendant (21 - AC) et les attaquant ont ensuite un bonus pour dépasser ce score de Défense (pour les Monstres et les Guerriers, le bonus est en gros leur Niveau ou Dé de coup). En un sens, Denis Gerfaud pourrait dire qu'il avait déjà esquissé le moteur de D&D3e édition 15 ans avant.
Quel JDJDR êtes-vous ? Une parodie qui offre le choix entre introverti qui ne joue pas et fanatique.
La nécropole de Tahad Kohok (pour AD&D, niveau non-précisé). Je crois que ce fut le dernier scénario à être officiellement situé dans le Pays d'Alarian (décrit dans le n°13, plus des scénarios dans les n°14, n°16, n°18 et le n°20). La nécropole est un cimetière censé contenir toutes les classes sociales d'Alarian mais les personnages y descendent en service commandé par le Roi Khalidan pour y retrouver le Sceptre du fondateur d'Alarian. On peut difficilement imaginer plus générique. Ce premier monde n'aura décidément pas vraiment inspiré les auteurs de Casus (en dehors peut-être de celui du n°18, par Gerfaud, qui a dû être adapté articiellement à ce monde).
Cthulhu est toujours vivant. Martin Latallo donne (en une page) quelques conseils pour jouer à Cthulhu soit à l'époque victorienne, soit de nos jours. Cthulhu by Gaslight sortit en 1986 et Cthulhu Now en 1987, mais il y avait déjà eu une version dans White Dwarf n°42-43 (1983).
Tout au Fond. Scénario par Martin Latallo pour son adaptation de Cthulhu de nos jours. Le début ressemble aux Masques de Nyarlathotep : les PJ sont des chercheurs français qui travaillent au Musée d'Histoire naturelle et étudient les données d'une expédition au Kenya qui a rapporté d'étranges "singes" qui sont en fait des créatures du Mythe. Comme la traduction française n'est toujours pas sortie à ce moment-là, Latallo cite toujours toutes les données techniques en VO.
Les Jeux de Lyn. Un bref scénario de Fabrice Cayla pour son jeu, l'Ultime Epreuve. Il s'agit d'une sorte de simulation d'un défi sportif de type olympique pour essayer plusieurs Compétences. Ce fut l'unique scénario jamais publié pour l'Ultime Epreuve dans Casus, ce qui me paraît un peu injuste pour le premier jeu français. Mais d'un autre côté, même Légendes (co-illustré par Guiserix) ne fut pas nettement mieux traité (Légendes celtiques eut 4 scénarios et Légendes des Mille et Une Nuits 2 scénarios).
Chouette, la série continue ! :-)
RépondreSupprimerJe n'avais pas suivi l'évolution de carrière de Pierre-Olivier Vincent... Impressionnant !
Merci pour cet article. Ces anciens numéros, j'en ai quelques uns, achetés bien après leur parution et lus avidement, comme s'ils contenaient d'anciens savoirs (selon la théorie du vieux = mieux). Quelque part, ça me rappelle des souvenirs que je n'ai pas connu.
RépondreSupprimerTout de même, une petite critique. J'aime beaucoup le prénom Frédéric mais je crois que pour Nedelec, c'était François... Mais encore : on ne s'en lasse pas.
Oops, je corrige.
SupprimerJe te confirme que V. de Georges est bien un pseudo que j'ai utilisé pour "La vallée des maléfices" dans le but d'éviter qu'on voit mon nom trop souvent.
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