lundi 11 juin 2018

Troy: Fall of a City (6/8)


Paris a donc tenté de se suicider en se jetant d'une falaise et revient à la vie. Aphrodite lui apparaît, ainsi qu'à Hector et Hécube, pour dire que cette mort le délivre de la Malédiction ainsi formulée "Tant que Paris vivra, Troie tombera". Il est mort l'espace d'un instant et la prophétie deviendrait caduque. Jolie ruse de scénario pour réinjecter un peu de frisson d'indétermination contre le titre fatal de la série, même si on sait bien que la Chute Aura Lieu (je ne sais si les scénaristes anglais connaissent Jean Giraudoux). On aurait d'autant besoin de surprise que c'est peut-être l'épisode le plus traditionnel puisqu'il s'agit ici de la fin de l'Iliade (ou presque, le dernier chant sera dans le prochain épisode). 

L'autre surprise est les Amazones. Paris rescapé rencontre Penthésilée et ses guerrières, qui viennent combattre auprès des Troyens pour venger ses "soeurs" tuées par Achille (allusion qui reste obscure mais qui rappelle qu'au lieu d'être un jeune débutant, Achille est censé être ici une sorte de machine à tuer). Ils reviennent ensemble à Ilion et lancent une sortie pour couper les vivres des Grecs, qui se sont rapprochés des murailles au dernier épisode. 

Avoir gardé les Amazones du cycle épique est assez rare dans les adaptations récentes de la Guerre de Troie, il me semble et d'habitude, comme elles ne sont pas chez Homère, on les fait arriver après la mort d'Hector, par exemple dans l'Ethiopide ou chez Quintus de Smyrne. (Chez Kleist, c'est Penthésilée et non Paris qui tue Achille mais il est douteux que la série reprenne cette inversion moderne, surtout avec leur héroïsation de Paris). 

Enée, fils d'Aphrodite, et Penthésilée, fille d'Arès
(Mais à part Achille, on ne parle pas de demi-dieux ici)


Ici, la série parvient au chapitre XVI de l'Iliade. Patrocle et les Myrmidons ne peuvent plus supporter de garder les bras croisés (et Ulysse a plusieurs fois demandé à Patrocle d'intervenir) alors que les vivres sont attaqués. Patrocle porte l'armure d'Achille et est très vite tué par Hector (sans les victoires et la démesure qu'il montre dans l'épopée). Hector et les Troyens sont si étonnés qu'ils laissent Achille venir sans armes reprendre le corps (alors que dans l'épopée Hector garde l'armure et le combat pour le corps dure tout le chant XVII).

Achille a eu le temps dans un dialogue d'exposition moyennement réussi à expliquer à Patrocle que l'amour est nuisible car c'est par amour que sa mère Thétis l'a tenue par le talon pour qu'il ne se noie pas "dans la Rivière". Oui, ils ont tenté de mettre en une seule phrase la catalepse de sa mort à venir et l'explication de son deuil pour Patrocle. Thétis est d'ailleurs l'un des plus grands effacements de cette série. On voit souvent Aphrodite et Zeus mais Thétis n'est représentée que par la scène où Achille contemple les vagues. 

Ce même soir où Hector tue Patrocle, Andromaque accouche et Hector nomme l'enfant Astyanax en l'honneur d'un orphelin troyen tué au début de l'épisode. Comme "Astyanax" veut dire "Roi de la Cité", cela paraît peu heureux comme nom pour un simple orphelin et ce pathos ne sert qu'à humaniser davantage Hector. 

On passe assez abruptement au chant XXII (et on a donc sauté beaucoup d'intrigues divines et surtout l'Armure forgée par Hephaïstos). 

Achille ne s'embarrasse pas de bataille, il vient tuer des prisonniers (dont une Amazone) devant Ilion pour forcer Hector à sortir. La mort d'Hector est représentée avec encore plus de cruauté et d'humiliation si c'est possible que dans l'épopée ; Hector n'est pas encore mort quand Achille l'accroche à son char pour le traîner dans la poussière en lui disant qu'il tuera aussi sa famille. Andromaque doit voir son mari mourir alors que son nouveau-né n'a qu'un seul jour.

Une des choses que je reprochais un peu à la série au début était d'avoir déprécié le personnage de Hector par rapport à Paris mais ce n'est plus vrai (en dehors peut-être du coup d'Etat du 5e épisode) et Hector apparaît à nouveau comme le seul Prince qui se soucie vraiment sincèrement de sa ville et de ses concitoyens et pas seulement de son amour comme Paris ou de sa gloire comme Achille. 



Cassandre dit qu'elle ne voit plus qu'obscurité et les Troyennes espéraient que cela signifiait que la Prophétie de Paris était brisée. Les malheureux Troyens n'auront eu que très peu de répit car ils ont eu encore moins de victoires apparentes que dans l'Iliade

Dolon se suicide pour sa trahison contre les chevaux troyens (alors que tous s'interrogent sur le prétendu "suicide" de Pandaros). Sa soeur Briséis est maltraitée par Agamemnon (qui réussit à être encore plus brutal que dans les représentations habituelles) et Achille ne semble aucunement s'intéresser à elle, on ne songe même pas à la lui restituer. S'il n'y avait pas tout ce qu'on attend sur Cassandre et Clytemnestre, on aurait aimé que Briséis puisse exercer quelque vengeance contre l'Atride mais je crains que cela ne reste sans résolution.

Hélène, avec le retour de Paris, essaye de dissimuler ses compromissions avec l'agent grec Xanthius. Mais Hélène n'ose le dénoncer et cette accumulation de petites trahisons annonce la scène finale. J'imagine que dans cette chronologie plus compressée, le scénario ne forcera pas Hélène à épouser l'autre Prince Déiphobe après la mort de Paris Alexandre. Je viens de me rendre compte que cet agent a un nom très proche d'un des deux Chevaux d'Achille, Xanthus (celui qui parle à Achille une fois dans l'Iliade pour prophétiser sa mort) alors que Xanthius, comme agent infiltré, préfigure le Cheval que construira Ulysse. 

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