vendredi 30 juillet 2021

Jeux de rôle arthuriens contemporains

 

Le livre de William Blanc sur les adaptations de la Matière de Bretagne s'arrête en 2018 (et cite déjà par exemple le nouveau jeu de rôle français Knight où on joue des chevaliers en armure magique dans un futur pas si lointain) mais le même chercheur avait aussi rédigé un article de synthèse dans JDR Magazine n°45 (mars 2019 "Le roi Arthur - le mythe aux mille visages"). Je ne voudrais parler ici que de quelques adaptations arthuriennes au monde contemporain sans donc parler des jeux classiques dans le passé (Pendragon, Keltia) ou dans le futur (The Once & Future KingWasteland, Knight). Je ne parlerai pas non plus ici des jeux de superhéros, qui mériteraient un traitement à part (Champions avait eu son supplément Kingdom of Champîons, 1990, qui donnait une large place à des héros arthuriens réincarnés au XXe siècle dont un groupe qui s'appelait The New Round Table). Les trois jeux de rôle sur l'occulte contemporain, Nephilim, Trinités et Les Héritiers ont tous un élément arthurien assez important. 

Nephilim

En 1993, à la sortie de Nephilim (jeu de rôle français où on joue des esprits immortels élémentaires qui se réincarnent depuis des milliers d'années), Stéphane Adamiak avait sorti la première campagne Le souffle du Dragon où on apprenait l'intégration du mythe arthurien dans la mythologie de ce jeu. 

Un Nephilim, créature faite de magie, peut dégénérer sous une forme bestiale pure, le Khaiba et l'Arcane VIII La Force lutte contre ces Nephilim monstrueux, dont une des formes les plus puissantes s'appelle le Dragon. Morgane appartient à un ordre de femmes (comme Dahud, Melusine et Viviane) qui tentent de canaliser ces forces du "Dragon" et Uther Pendragon était leur instrument. Merlin est un Nephilim de l'Arcane de la Force qui manipula Arthur pour le soulever contre cet Ordre. Galahad fut aussi en réalité un plan des Nephilim pour trouver le Graal (qui a, lui aussi, une explication qui n'a plus rien de chrétien). Mais Mordred, le fils de Morgane, fut ensuite retourné par la société du Bâton (les Templiers) et tout cela finit par une victoire des Templiers contre les croyances païennes celtiques, au Mont Saint-Michel. La campagne contemporaine traverse la Bretagne et voit plusieurs manoeuvres liées à cet Ordre du Dragon et d'autres sociétés, dont le retour de la cité d'Ys et le réenchantement de la Bretagne. 

En 1996, Stéphane Adamiak rajouta une campagne de flashback (pardon, d'Effet Mnemos), les Arthuriades, où les Nephilim contemporain pouvaient aussi jouer leurs incarnations passées pendant le cycle de Merlin. J'imagine que cela doit être une expérience assez géniale d'alterner ces flashbacks au VIe siècle avec la campagne en Bretagne contemporaine. 

Curieusement, quand Nephilim fut traduit en anglais, la version de Chaosium revue par Greg Stafford retira presque toute allusion arthurienne. Stafford jugeait-il qu'il fallait le réserver à Pendragon ? Ou que c'était déjà trop utilisé ? En tout cas, le jeu américain propose à la place une incarnation à l'époque de Charlemagne où les Douze Paladins étaient des humains chasseurs de Nephilim armés d'épées d'orichalque (comme Durandal) et où c'est Ganelon qui fut un agent infiltré des Nephilim et où Ogier de Danemark fut séduit par une Nephilim elfe. Le Nephilim contemporain peut commencer sa vie actuelle avec le traumatisme d'avoir été tué au VIIIe siècle par Roland

Cette version US a donc préféré la Matière de France à la place de la geste de Camelot (alors que Chaosium voulait que leur version soit MOINS francocentrique...). 

Trinités

Chez les XII Singes, Trinités (2006) est (pour simplifier) un autre jeu de rôle occulte contemporain créé pendant une éclipse du jeu Nephilim et par des anciens fans comme Franck Plasse et Claude Guéant. On ne joue plus des esprits "élémentaires" ou féériques mais dans un cadre plus "manichéen" ou plutôt plus "gnostique" où chaque Héros (qui, lui aussi, se réincarne depuis des siècles) a une sorte de lame magique et deux esprits liés, un Deva de Lumière et un Archonte de Ténèbres et chacune de ses actions peut renforcer un des deux camps (en sachant que dans ses incarnations passées, il a pu succomber à chaque fois de l'un des deux côtés). Dans Nephilim, on joue deux parties, le corps humain ou son parasite immortel qui le possède alors que dans Trinités, il y a 3 parties, l'Adam, le Deva et l'Archonte.   

Dès le livre de base, on propose que les Trinités de chaque joueur sont tous des réincarnations de divers Chevaliers de la Table ronde à la fin du XXe siècle (dont surtout "Lancelot") et on apprenait que le roi Arthur était un Trinité qui avait mal tourné et il sera même (en tout cas au moins pour un temps) un adversaire de ses anciens Chevaliers bien que purement tourné vers la Lumière (ce qui peut illustrer que Lumière n'est pas toujours une condition suffisante pour être "bon"). La "vérité" révélée est donc plus ironique que dans la version de Nephilim. Il y eut une suite dans plusieurs volumes, le livre III Les Décans + livre V Le Serpent, et finalement livre VIII Arthur (2012). Les scénarios se passent plus en Angleterre et pas en Petite-Bretagne. 

Je ne voudrais pas trop divulgâcher les secrets d'un jeu à secrets d'il y a moins de 20 ans et je vais donc passer en Rot13vy l n nh zbvaf qrhk snpgvbaf : yr Qentba (Yhzvèer) rg yr Frecrag (Géaèoerf). Zreyva, dhv vapnear yr Qentba (nybef dhr qnaf Arcuvyvz vy f'bccbfnvg nh phygr qh "Qentba"), yhggr pbager Zbetnar yr Frecrag. Vy n ibhyh pbafgvghre ha beqer qr purinyvref nezéf qr ynzrf zntvdhrf cbhe dh'vyf fr pbhcrag qr yrhe Nepubagr qrf Géaèoerf. Zbeqerq f'nièer êger y'Nepubagr qvffbpvé q'Neguhe rg yn pnzcntar bssvpvryyr qr yn cerzvèer éqvgvba qr Gevavgéf n qbap gbheaé nhgbhe qr prf abhirnhk purinyvref qr yn Gnoyr ebaqr rg ba l ergebhir yn zêzr fgengétvr qr purepure har rkcyvpngvba bpphygr ra nwbhgnag qrf fbpvégéf frpeègrf rg cyhfvrhef yvrhk pbzzhaf (pbzzr prggr îyr qh Zbag Fnvag-Zvpury znvf qh pôgé natynvf).

Un élément que j'ai beaucoup aimé est le Bréviaire I Les chevaliers sans tête (supplément gratuit au premier scénario). Les personnages doivent se documenter et au lieu de juste dire "ils font un jet de recherche en bibliothèque", le scénario détaille des références imaginaires mais assez vraisemblables dans plusieurs livres réels (dont une fille de Merlin qu'ils doivent retrouver dans un vieux lai breton). Chaque indice conduit à continuer dans un livre suivant. 

Les Héritiers

Les Héritiers, édité par Les Sombres Projets (qui font aussi le post-apocalyptique sur la Terre Gaste, Wasteland) est un jeu de rôle qu'on pourrait considérer comme une fusion entre Changeling (jouer des fées dissimulées dans le monde contemporain) et Maléfices (jouer dans l'occultisme de la Belle Epoque dans l'Europe de 1900-1914). Fondé par une équipe de la regrettée Isabelle Perrier, cela peut évoquer aussi le cycle Paris des Merveilles de Pierre Pevel (si ce n'est que les Dragons y sont peut-être plus importants dans ces romans). 

Les fées, gnomes, elfes, vampires vivent parmi nous, plus ou moins bien cachés (ils doivent tout faire pour dissimuler leur existence, on n'est pas dans une uchronie explicite à la Castle Falkenstein). Leur société parallèle est plus traditionaliste que celle de l'Europe depuis les Lumières et est encore dominée par l'aristocratie et des croyances païennes celtiques en conflit avec la christianisation de l'Europe ou l'essor du positivisme. Quoi qu'il arrive, on va vers la fin d'un monde pour 1914. 

Comme dans les deux jeux précédents, on retrouve Merlin et Morgane. Allez, je repasse en Rot13Zreyva rfg ha Qehvqr vzzbegry rg Zbetnar qvevtr ha Pyna qr sbeprf cyhf bofpherf. Vy l n rapber q'nhgerf sbeprf pbzzr Tjlqvba yr Znepurhe rg q'nhgerf. Neguhe ninvg gragé qr snver eétare ha édhvyvoer rager yn Sbv abhiryyr qrf Uhznvaf rg yrf sérf cnïraarf ninag qr qéevire iref cyhf q'vagbyéenapr pueégvraar. Zbeqerq, nh pbagenver, égnvg ha ntrag qr sérf cyhf genqvgvbanyvfgrf. Qnaf y'npghnyvgé cyhf eépragr, har ervar sér n gragé ha pbhc q'Rgng cbhe erfgnhere ha abhirnh Pnzrybg pbager yrf snzvyyrf napvraarf qr yn Zbanepuvr q'Ninyba.


L'univers des Héritiers vient à peine de commencer à paraître et ces références vont nécessairement aller en se complexifiant dans les suppléments. 

vendredi 23 juillet 2021

Autres arthuriana

 * Cursed était une série Netflix (et un projet de romans illustrés) par Frank Miller et Tom Wheeler (scénariste et producteurs de films plutôt pour enfants). Il n'y aura pas de seconde saison alors que la série s'arrête en plein suspense et je vais donc annoncer plusieurs SPOILERS. Dans cette version, à une époque médiévale peu déterminée (on mentionne la chute de l'Empire romain mais aussi de manière confuse Charlemagne dans un épisode), les Humains persécutent les divers Faes qui vivent avec eux. Certains sont plus proches d'hommes-bêtes mais d'autres peuvent paraître presque indiscernables des Humains en dehors de certains liens parfois avec des forces élémentaires de la nature. Merlin est un Fae qui joue un rôle ambigu puisqu'il a perdu ses pouvoirs et veut manipuler les pouvoirs terrestres humains. L'héroïne de l'histoire est une fae Nimue, qui a hérité de l'ancienne Epée de puissance des anciens Rois Faes (et dont on apprendra ensuite qu'elle est une fille illégitime de Merlin). Le roi Uther, un peu dépassé et en conflit avec une mère castratrice, laisse un Ordre de chevaliers nommés les Paladins Rouges de l'Eglise catholique massacrer les Faes et faire régner la terreur. Nimue, dont la famille a été massacrée par les Paladins Rouges et le Moine Pleureur (Lancelot, qui a le don de détecter les Faes), va s'allier avec deux humains, le soldat Arthur et sa soeur la sorcière Morgane, pour apporter l'Epée de puissance à Merlin et tenter de sauver le plus de Faes possible. Mais certains des Faes, comme Gauvain le Chevalier Vert, se méfient de la duplicité de Merlin et Merlin croit qu'il vaudrait mieux détruire l'Epée maudite que de la laisser tomber dans les mains d'Uther ou pire encore, de l'Eglise. Le début est très lent mais le rythme commence à prendre à la fin notamment grâce à des intrigues politiques qui deviennent plus compliquées quand Nimue est prise en tenaille entre divers choix stratégique possible et où elle décide de se proclamer Reine des Faes. On sent une influence de Game of Thrones quand on découvre qu'Uther n'est pas non plus l'héritier légitime mais que le cousin Cumber (mélange de Lot d'Orcanie et de Leodagan de Carmélide) serait en fait potentiellement encore pire qu'Uther bien que plus "légitime" comme Pendragon. Le discours païen anti-chrétien est presque encore plus lourd que dans Mists of Avalon, ce qui a dû contribuer à l'échec de la série et on y reconnaît des touches de Frank Miller. Certains des vilains de l'Eglise sont trop caricaturaux mais la petite fille humaine rendue folle d'intolérance par la haine et l'Inquisition est une adversaire inquiétante. Je présume que la sauvage raider viking Lance Rouge, la fille rebelle de Cumber (et une inversion de Cordelia face à Lear / Cymbeline ?), serait en fait devenue Guenièvre et c'est une des versions les plus réussies de ce personnage. Le Lancelot ne commence à devenir intéressant que dans les tout derniers épisodes. 

* Grimm Fairy Tale : Age of Camelot. A éviter, c'est très ennuyeux et sans intérêt, une des séries arthuriennes les plus médiocres en ce moment. A notre époque, le sorcier malfaisant Merlin, frère mais aussi ennemi du démoniaque Mordred Empereur du Tarot, veut retrouver le Graal pour recréer l'ordre oppressant de son Camelot avec ses agents, Morgane, Baba Yaga et plusieurs chevaliers morts-vivants (dont Arthur). Une flopée de jeunes filles très peu vêtues avec des épées (dont une sorte de valkyrie à demi-nue nommée Black Knight, des versions féminines de Robin Hood et de D'Artagnan) tentent d'arrêter les deux frères ennemis en même temps. Cet éditeur de comics, Zenescope, ne vaut guère que pour ses "cheesecakes" de guerrières en bikini mais le thème arthurien en reste à un Seigneur maléfique assez générique en dehors de l'inversion. Mais l'idée de laisser tomber le triangle habituel Arthur-Guenièvre-Lancelot pour un triangle Merlin-Morgane-Mordred est un rare élément de décalage dans cette arthuriade inversée (l'arthuriade inversée est devenue un nouveau cliché). Il y a aussi un "Obéron" allié à Merlin mais c'est un Humain, une version maléfique de Tam Lin en Nain commandant des Trolls, alors que Puck est au contraire un Fae héroïque qui lutte contre cet Obéron. 

* Kaamelot : Je vais quand même sans doute aller voir le Premier Volet d'Alexandre Astier bien que je n'aie pas complètement accroché au mélange des genres original de cette série (ni d'un point de vue humoristique ni du point de vue dramatique). Je reconnais ne pas être du tout compétent pour en parler (à chaque fois que je suis tombé sur un épisode, c'était juste Arthur qui roulait des yeux devant la stupidité de Perceval). D'après le peu que j'ai compris de quelques saisons de cette série (et j'ai dû rater beaucoup d'éléments), Arthur n'a jamais aimé Guenièvre et il l'a trompée avec d'autres, dont l'épouse de Caradoc (choix qui doit plus renvoyer à Caradoc Père qu'à Caradoc Fils dans la légende traditionnelle où le Roi Caradoc Père a été cocufié par un Enchanteur). Arthur est complètement dépressif dans la conscience de ses échecs, dans son refus de sa Destinée et d'Excalibur et dans son obsession sur le fait de ne pas pouvoir (croit-il) engendrer une vraie lignée. Lancelot (est-il lié à la Dame du Lac dans cette version ?) est bien plus directement opposé à Arthur (mystique et amoureux de Guenièvre, il a même détruit la Table Ronde et créé son propre Ordre) et le personnage de Méléagant a l'air d'être un être surnaturel ambigu qui manipule Lancelot contre Arthur pour des raisons que je crois encore inconnues. Cet Arthur, choisi par Merlin, est censé servir des "Anciens Dieux" mais il est plus un personnage moderne existentialiste et mélancolique, un individu condamné à l'isolement, qu'un Roi épique (même si on peut s'attendre à une retombée dans une structure où le Refus de l'Aventure est suivi de l'Acceptation ?). Il y a un mélange de la version traditionnelle où Arthur est en fait vraiment le fils d'Uther Pendragon et d'une version plus pseudo-historique où il est en fait Artorius, un agent élevé dans l'Empire romain en train de s'écrouler. 

jeudi 22 juillet 2021

Les Sept Péchés capitaux

Seven Deadly Sins est un manga et un animé pour ados (Shōnen) de Suzuki Nakaba (1977-) publié pendant 8 ans de 2012 à l'an dernier. Il s'agit d'une version très décalée du mythe arthurien dans un monde parallèle où chaque chevalier est plus un superhéros aux pouvoirs individuels distincts qu'un personnage classique (ce qui ressemble donc aussi à la série Demon Knights chez DC, 2011-2013, même s'il doit plus s'agir d'une coïncidence). 

Je n'ai vu que la première saison sur Netflix et je n'ai pas du tout lu la série de manga qui suit celle-ci (Les Quatre Cavaliers de l'Apocalypse, qui se passe à la génération suivante, avec Perceval) donc je ne peux pas juger toute l'évolution mais il y a des éléments d'inversions du mythe arthurien qui sont intéressants. Les Médiévaux adoraient faire des prequels ("Les Enfances de...") et c'est un des prequels les plus inventifs sur une génération avant les Chevaliers de la Table ronde. 

Les Sept Péchés en question sont sept chevaliers du Royaume de Lyonesse (non, je ne reprends pas l'orthographe choisie par les traductions) qui sont poursuivis depuis des années et se sont dispersés et la quête de la première saison consiste surtout à les réunir. La série Demon Knights aussi avait 7 "Chevaliers" dont Nimue et le demi-frère démoniaque de Merlin. 




Leur chef est Meliodas (La Colère - le père du futur Tristan), qui est en fait un démon enfermé dans un corps de jeune adolescent et son personnage cache sous une apparente naïveté optimiste une violence contenue. Les autres chevaliers comprennent Ban (L'Avidité - le père du futur Lancelot, un voleur qui a bu la Fontaine d'Immortalité mais est inconsolable de la mort de la fée Elaine qui devait la garder), King Harlequin (La Paresse, l'immortel Roi des Faes et frère d'Elaine, qui a une apparence d'enfant, comme Aubéron, et porte la Lance Chastiefol, dont le nom était celui de l'épée d'Arthur dans Le Chevalier au Papegau du fin XIVe), Diane (l'Envie - une Géante féérique assez naïve et dont le Roi des Fées est amoureux), Gauthier (la Luxure - un.e intellectuel.le androgyne et sans émotion qui cache de nombreux secrets magiques sur la perte de son identité personnelle et un télépathe qui peut explorer les souvenirs des autres - son nom Gowther vient d'un récit du XVe siècle sur un demi-frère de Merlin), Merlin (La Gourmandise - une ancienne sorcière polymorphe et manipulatrice) et Escanor (l'Orgueil - un chevalier à la force difficile à contrôler - dans les légendes arthuriennes, c'est le nom du Chevalier noir que remplace Yvain comme gardien de la Fontaine dans Le Chevalier au Lion). 

Les personnages sont parfois aussi complexes que les intrigues à tiroir chez des décennies de Chris Claremont. Un des choix de Suzuki Nakaba est de ne pas toujours suivre vraiment le Péché dans la caractérisation. Colère, Paresse, Avidité sont assez cohérents (encore que Meliodas est plus marqué par la luxure) mais Gauthier ou Merlin n'ont pas de connexion claire avec leur Péché. On apprendra en fait que le nom des péchés est presque à chaque fois lié à un quiproquo où ils ont été injustement accusés. 

La première série raconte comment le Royaume de Lyonesse est tombé sous la domination des Chevaliers Sacrés, qui ont été corrompus par une sorte de Graal Inversé, ou une Eucharistie Inversée par le Sang du Démon. Certains des Chevaliers sacrés sont encore sincères et dévoués mais d'autres ont accepté de boire le Sang démoniaque pour augmenter leur pouvoir. Les Sept Péchés ont été accusés à tort d'avoir assassiné l'ancien Grand Maître de leur Ordre, Zarathras. 

Le Roi de Lyonesse, Bartra (Bertram ?) n'est plus qu'une marionnette emprisonnée par cet Ordre et la Princesse Elizabeth est l'une des seules qui va suivre Meliodas et reformer une partie des Sept Péchés (sa soeur la Princesse Véronique est devenue une Chevalière sacrée et son autre soeur Margaret est une otage au Château). Merlin, elle, est devenue la conseillère d'un autre jeune Roi voisin, Arthur de Britannia, et il apparaît si tard dans la série qu'on en est heureusement surpris. 

Viviane (qui porte un masque inquiétant et semble insensée tout comme la Nyneve dans Camelot 3000) est encore débutante dans les adversaires mais je vois sur Internet que la suite de l'histoire verra apparaître La Dame du Lac (distincte de Viviane) dans un autre rôle ambigu comme une Déesse du Chaos. Le monde de Britannia est composé de 5 peuples : les Humains, les Faes, les Géants (qui ne vivent plus que comme mercenaires des Humains), les Démons & les Déesses (adorées par les Druides, la Dame du Lac et Elizabeth sont en fait issues d'une des Déesses). 

Il y a d'autres éléments moins arthuriens mais qui viennent peut-être de la Prydain de Lloyd Alexander comme une Truie Géante (qui serait une déesse maternelle et qui abrite l'Auberge Itinérante des Sept Péchés, peut-être aussi une allusion à Henwen, la Truie mythique dont l'enfant félin tua Arthur dans certaines versions apocryphes). Je soupçonne quand même dans les clins d'oeil de Suzuki une érudition assez vaste et éclectique. 

C'est un shonen, ce qui implique donc des combats interminables et des discours répétitifs sur les niveaux respectifs comme des commentaires sportifs faits pour créer un faux suspense ("il est d'une puissance incroyable, encore plus que X, je n'y arriverai jamais... blablabla"). Il y a aussi les signes culturels d'une sexualité japonaise adolescente aux codes si différents des nôtres où le héros et personnage globalement "positif" Meliodas ne cesse de palper, d'objectiver et harceler la Princesse Elizabeth en bas résille, avec une perversité sadique sans supposer son consentement, ou alors de nombreux personnages féminins qui demeurent bloqués à un stade de lolitas comme Elaine ou en un sens la Géante Diane. Je ne veux pas porter de jugement trop rapide, l'érotisation ecchi des mangas (et le fan service) n'est peut-être pas toujours plus malsaine pour les adolescents que le refoulement extrême de la Ligne claire belge catholique ou l'érotisation légèrement plus allusive des anciens comics avant leur évolution vers un medium de nostalgie. Mais il est clair que cela m'empêcherait pour le moment de le montrer à mes jeunes enfants. 

Malgré cela, les nombreuses histoires d'amour sont parfois intéressantes. Pas tellement celle entre Elizabeth et Meliodas (où Elizabeth est trop passive) mais celle entre Ban et Elaine, celle entre Gowther et Nadja (la soeur défunte du Roi de Lyonesse) ou entre Diane et le Roi des Fées (qui s'est enfermé dans une relation impossible en voulant la préserver et qui a créé sans le vouloir le triangle amoureux avec Meliodas). 

mardi 20 juillet 2021

Cité réticulaire

Une très jolie carte d'une Cité féérique de campagne de jeu de rôle, Gossamer, par l'illustrateur (et professeur de littérature fantastique à UBC à Vancouver) Jonathan Newell, l'équivalent de 80 pages dessinées qui ont été assemblées (vue d'ensemble). Il est aussi l'auteur de Genial Jack, un cadre de campagne fantastique à la Gulliver qui se déroule dans le ventre d'un Léviathan. 

Il a mis en ligne d'autres cartes de Hex, sa cité magique créée sur les anciennes Ruines des Archives des Bibliothécaires, la cité des sorciers d'Erubescence ou la Côte des Plumes. C'est incroyablement impressionnant si on aime ce genre de fantasy à la Gormenghast, plus proche de versions romantiques sombres de contes de fées que de fantaisie héroïque. 

mercredi 7 juillet 2021

Le prétendu TSR

 Axelle Bouet (l'autrice et illustratrice des Chants de Loss) a un article sur la controverse de la nouvelle compagnie qui se fait appeler "TSR" mais aussi sur les trolls réactionnaires francophones dans notre hobby du jeu de rôle (qui commence à être contaminé aussi par des dérives de "guerre culturelle" qu'on trouvait plus dans le discours "masculiniste" du jeu vidéo). On peut compléter aussi par ce thread sur twitter qui résume la situation juridique. Il y a 3 TSR : Wizards of the Coast est toujours propriétaire des droits de la TSR Hobbies originel et de D&D, mais en 2011 une seconde compagnie TSR Games qui a publié le jeu Top Secret et vient depuis le 3 juillet de changer de nom pour se faire appeler Solarian Games, mais depuis 2020 Ernest Gygax et LaNasa possèdent à nouveau le trademark de TSR sans leurs jeux (même s'ils prétendent pouvoir développer à nouveau Star Frontiers, ce qui paraît confus légalement).