dimanche 9 décembre 2007

Rigveda



Les écritures indiennes sont tout un corps énorme de traditions s'écoulant sur des millénaires, intégrant des textes dits védiques de -1200 à des odes plus mystiques des innombrables écoles d'interprétations. Pour imaginer un équivalent occidental, il faudrait que les divers textes païens européens de la mythologie grecque aient été intégrés en un tout continu dans les philosophies grecques puis gnostiques dans de nouvelles interprétations, si Pythagore et Platon avaient été plus uniquement des prophètes-gourous et s'ils n'avaient pas contribué à séparer λόγος (d'origine mathématique) et μῦθος.

L'Hindouisme a en effet intégré une littérature épique et religieuse bien plus ancienne, les Védas, en en modifiant progressivement le sens. Une particularité de la religion polythéiste indienne a été d'avoir des Textes révélés comme les grands monothéismes hébreux, zoroastriens, chrétiens ou musulmans.

On peut distinguer dans les écritures indiens les Védas (les Savoirs) dont les Upanishads (Enseignements directs, plus élaborés philosophiquement pour les Brahmanes), puis plus tard les grandes épopées (le Mahabharata contant la guerre entre deux branches d'une famille royale, et le Ramayana, racontant les aventures du prince Rama) et les Purâna ("récits des temps anciens", diverses "Chroniques" mythologiques réinterprétées dans l'Hindouisme vishnouiste et shivaiste).

Les Védas sont traditionnellement divisés en 4 Védas : Rigveda (Védas d'éloges, un peu comme les Hymnes homériques), Yajur Veda (Vedas des sacrifices), Samadeva (Védas des chansons de cérémonie) et l'Atharvaveda (étymologie un peu obscure : Védas des Atharvas, clan de prêtres).

Le Rigveda est sans doute le plus ancien (date inconnue mais remontant peut-être au XIe siècle avant notre ère) composé d'un peu plus d'un millier d'hymnes (1017 à 1028, dix mille "stances"). Les hymnes sont groupés en dix livres (Mandala), de tailles très inégales. On pense que les livres 2-7 sont les plus anciens et ils sont les plus courts (plus d'un tiers du total). Les livres 1 et 10 sont les plus longs, représentant à eux seuls près de 40% du texte, et les plus récents.

On peut trouver le texte complet dans une traduction anglaise de 1896. La plupart des Hymnes sont dédiés à Indra, le dieu céleste de la foudre, Zeus de la religion védique, et à Agni, le dieu du feu, très important pour tous les sacrifices et la relation entre la consommation des choses périssables et le Ciel. Un autre dieu important est Soma, dieu de l'Elixir d'immortalité qu'on peut identifier à l'Ambroisie des Grecs. Tout le livre 9 lui est consacré. Il y a des hymnes d'éloges à des sujets bien plus divers, y compris aux animaux qu'on sacrifie, comme le Cheval.

Les dieux classiques de l'Hindouisme comme Vishnou et Shiva n'ont pas encore le rôle principal mais on les voit déjà.

Voilà dans le livre I, les hymnes 154-156, des hymnes sur Vishnou, où il est fait allusion à quelques mythes védiques comme Vishnou qui marche sur l'univers en trois pas et comme allié d'Indra il prend le Soma :

I, 154

Je vais déclarer les hauts faits de Viṣṇu, qui a mesuré les espaces terrestres,
Qui a élevé le sommet en posant trois fois son pas,
Pour cela, on fait l'éloge de Viṣṇu comme d'un terrible animal sauvage de la montagne,
Lui dont les trois pas comprennent tout ce en quoi vivent tous les vivants,
Que l'hymne s'élève jusqu'à la force de Viṣṇu, Taureau s'élançant au loin,
Lui qui a mesuré les étendues en trois pas,
Lui dont les trois endroits sont emplis de Douceur, de Joie et d'Immortalité,
Lui qui seul soutient le triple lieu, la terre, le ciel et tous les vivants,
Puis-je atteindre sa demeure bien-aimée où les hommes dévoués aux dieux sont bienheureux,
Car là-bas surgit près de Grand-Pas, le puits du dernier pas de Viṣṇu.
Puissions nous aller dans l'enclos des boeufs gracieux aux multiples cornes,
Là où brille la demeure la plus haute du Taureau au pas large.

I, 155

Au Grand Héros (Indra) et à Viṣṇu, louanges en chants et en libations,
Ô Dieux jamais détournés, qui se sont tenus sur les collines sur leur noble monture,
Votre coupe à Soma détourne votre élan furieux, Indra et Viṣṇu, quand vous venez dans toute votre puissance,
Qui s'est dirigée contre un homme mortel, vous détournez la flèche de Kṛśānu (Celui qui bande l'arc, le Sagittaire, dans une version le Gardien du soma).
Ces offrandes augmentent sa force virile, il amène les deux Parents pour partager le flux généreux,
Il amène par un fils le haut nom du père, le troisième est ce qui brille dans la lumière du ciel.
Nous louons le pouvoir viril du Puissant, préservateur, fécond et bienveillant,
Celui qui marche, en trois pas sur les royaumes de la terre pour la liberté et la vie,
Un mortel quand il contemple les deux pas dans la lumière est émerveillé,
mais il ne peut pas même approcher le troisième pas, et pas même les oiseaux ailés,
Lui qui, comme une roue, a rapidement enveloppé nonante étalons dans son quatrième,
Jeune et immense, il répond à notre appel, à ceux qui chantent son éloge.

I, 156

Brillant et célébré, oint d'huile, aide-nous, semblable à Mitra,
Ô Viṣṇu, même le sage doit changer tes louanges et payer pour tes rites solennels,
Celui qui apporte des offrandes à l'ancien et l'ultime, à Viṣṇu, qui ordonne tout avec son épouse,
Celui qui conte la haute naissance du Très-haut, surpassera en gloire même son pair,
Vous l'avez satisfait, chanteurs, graine primordiale de l'ordre,
Puissions-nous, Viṣṇu, jouir de ta grâce, ô Tout-puissant.
Le Sovran Varuṇa et les deux Aśvins attendaient de suivre celui qui guide l'armée des Maruts.
Viṣṇu a le pouvoir et la force et ouvre avec ses amis l'étable des vaches
Même lui le Céleste qui est venu, Viṣṇu et Indra, le divin et le plus divin,
Créateur des trois mondes, qui aide l'homme Ārya et donne au fidèle la Loi.

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