City of Strangers est un supplément de James Lafond Sutter décrivant la ville de Kaer Maga, la Cité des Exilés pour le jeu de rôle Pathfinder. J'ai déjà évoqué une douzaine de cités de jeu de rôle, plus Cadwallon ou Ptolus et Kaer Maga rejoint maintenant mon panthéon des grandes créations de jeu de rôle, malgré la briéveté de cette description (64 pages).
Kaer Maga n'est certes pas "réaliste" (j'ai notamment de gros doutes sur la logistique de son alimentation comme elle est enfermée loin de toute agriculture) mais franchement, les joueurs s'en fichent. La Cité est construite autour d'un grand Lac artificiel (alimenté par magie) et enclose à l'intérieur d'un mur cyclopéen hexagonal (d'ailleurs sans doute vraiment construit par des Géants). On ignore qui furent les premiers bâtisseurs de la ville mais ses habitants les plus antiques sont de mystérieuses créatures effrayantes qui se nourrissent en volant les souvenirs. La muraille hexagonale servit longtemps de prison du temps des anciens Seigneurs des Runes (Karzoug, Seigneur de la Cupidité - chaque Seigneur runique était associé à l'un des sept péchés capitaux), mais le mur nord-ouest est aujourd'hui en partie effondré.
L'accès à la Cité close reste difficile comme elle est en haut d'un haut plateau de steppes, avec de grandes chutes d'eau qui tombent de son mur sud par des gargouilles dignes de Druillet. La seule voie directe depuis les basses terres si on ne veut pas prendre un grand détour est un long escalier en colimaçon (la Porte Tournante) qui remonte dans les profondeurs de la falaise et qui traverse des galeries antiques de troglodytes, des nécropoles et des geôles abandonnées. D'habitude, dans les jeux de rôle à la D&D, la Ville est un préliminaire aux Oubliettes, là, vous devez déjà passer par le seuil du Donjon pour parvenir à la Ville (et il faut demander le passage auprès d'un groupe d'éclaireurs et rangers, les Gardiens Crépusculaires, Duskwardens).
Malgré cette difficulté d'accès, Kaer Maga est accueillante, avec environ 8000 habitants, et elle est même d'un laxisme assez radical puisqu'elle semble être une sorte d'aglomérat anarchique de diverses factions sans aucun gouvernement central, en dehors de l'équilibre entre ses groupes.
James Sutter, qui est l'un des auteurs principaux des fictions et modules pour Paizo, s'est de toute évidence un peu "lâché" comme on dit sur ce cadre urbain, qui vise un public plus "adulte" que d'habitude. On a par exemple l'un des principaux problèmes politiques qui est la "Guerre des Putains", la lutte entre une tenancière de bordel qui prétend créer un syndicat des prostituées et une faction de prostitués/espions masculins (les "Garçons au Suif") qui travaillent pour un lupanar sado-masochiste qui aurait plu aux amateurs de Fantomette ou au Baron de Charlus.
Kaer Maga manque parfois un peu d'unité comme c'est un peu une cuve de plusieurs idées chimériques. L'une des particularité est les Mages Boursouflés (Bloatmages) ou Hématothéurges, qui augmente la quantité de sang dans leur corps pour augmenter leurs pouvoirs magiques. Ils sont d'ailleurs contraints de se couvrir de sangsues lorsque le sang commence à exercer trop de pression sur leurs veines et qu'il menace d'éclater ou de devenir fou sous l'afflux sanguin au cerveau. Ils ne sont pas intrinsèquement maléfiques ni vampires mais cette apparence leur donne un petit air de Baron Harkonnen et je me demande si on pourrait imaginer d'autres utilisations des Quatre Humeurs (j'en parle dans "mon" monde de Limen).
Un autre exemple de bizarrerie sinistre est les Augures, des oracles trolls qui regardent l'avenir dans leurs propres entrailles (ce sont des Trolls et ils peuvent donc se régénérer comme le foie de Prométhée). Il y a un quartier, Ankar-Te, ouvert aux nécromanciens, aux zombies (et bien sûr une maison close pour nécrophiles, ce qui fait un peu Black Dog). Les quartier pauvres ont un Orphelinat pour abandonner les mutants, assez nombreux.
La Cité abrite des exilés et donc aussi des cultes étranges comme les Beaux-parleurs du Quartier des Soupirs, monothéistes qui font voeu de silence en se scellant la bouche (en dehors d'un simple orifice pour boire et manger avec une paille, ce qui leur permet aussi de communiquer entre eux avec quelques claquements de langue) ou les Frères du Sceau (moines martiaux qui passent leur temps à s'entretuer sur la question de savoir s'ils doivent ou non rompre le Sceau dont ils ont la garde sous le sol de la Cité).
Ce cadre a déjà servi pour au moins deux scénarios qui ne me paraissent pas aussi bien originaux : le module D2 Les Sept Epées du péché (un simple dungeoncrawling de niveau 7 pour récupérer une épée du Seigneur de la Luxure, pas explicitement relié avec la première campagne du Réveil des Seigneurs des Runes) et The Godsmouth Heresy (que je n'ai pas lu mais qui semble être encore un dungeoncrawling de niveau 1 dans les nécropoles sous la ville).
(Dans l'édition française des Sept Péchés du péché d'octobre 2008, le quartier de Widdershins est mal traduit comme "Les veuves" (Widows) mais widdershins signifie "dans le sens inverse du sens habituel" (par exemple "ouest-est" ou bien "dans le sens inverse des aiguilles d'une montre" - on pourrait l'appeler "Rebrousse" ?).
City of Strangers recèle assez d'idées pour une campagne urbaine mais cela donne parfois une impression d'un amas d'idées hétérogènes. En 64 pages, le supplément a peu de descriptions de personnages non-joueurs mais beaucoup de pistes de scénario, ce qui peut être aussi précieux.
Kaer Maga n'est certes pas "réaliste" (j'ai notamment de gros doutes sur la logistique de son alimentation comme elle est enfermée loin de toute agriculture) mais franchement, les joueurs s'en fichent. La Cité est construite autour d'un grand Lac artificiel (alimenté par magie) et enclose à l'intérieur d'un mur cyclopéen hexagonal (d'ailleurs sans doute vraiment construit par des Géants). On ignore qui furent les premiers bâtisseurs de la ville mais ses habitants les plus antiques sont de mystérieuses créatures effrayantes qui se nourrissent en volant les souvenirs. La muraille hexagonale servit longtemps de prison du temps des anciens Seigneurs des Runes (Karzoug, Seigneur de la Cupidité - chaque Seigneur runique était associé à l'un des sept péchés capitaux), mais le mur nord-ouest est aujourd'hui en partie effondré.
L'accès à la Cité close reste difficile comme elle est en haut d'un haut plateau de steppes, avec de grandes chutes d'eau qui tombent de son mur sud par des gargouilles dignes de Druillet. La seule voie directe depuis les basses terres si on ne veut pas prendre un grand détour est un long escalier en colimaçon (la Porte Tournante) qui remonte dans les profondeurs de la falaise et qui traverse des galeries antiques de troglodytes, des nécropoles et des geôles abandonnées. D'habitude, dans les jeux de rôle à la D&D, la Ville est un préliminaire aux Oubliettes, là, vous devez déjà passer par le seuil du Donjon pour parvenir à la Ville (et il faut demander le passage auprès d'un groupe d'éclaireurs et rangers, les Gardiens Crépusculaires, Duskwardens).
Malgré cette difficulté d'accès, Kaer Maga est accueillante, avec environ 8000 habitants, et elle est même d'un laxisme assez radical puisqu'elle semble être une sorte d'aglomérat anarchique de diverses factions sans aucun gouvernement central, en dehors de l'équilibre entre ses groupes.
James Sutter, qui est l'un des auteurs principaux des fictions et modules pour Paizo, s'est de toute évidence un peu "lâché" comme on dit sur ce cadre urbain, qui vise un public plus "adulte" que d'habitude. On a par exemple l'un des principaux problèmes politiques qui est la "Guerre des Putains", la lutte entre une tenancière de bordel qui prétend créer un syndicat des prostituées et une faction de prostitués/espions masculins (les "Garçons au Suif") qui travaillent pour un lupanar sado-masochiste qui aurait plu aux amateurs de Fantomette ou au Baron de Charlus.
Kaer Maga manque parfois un peu d'unité comme c'est un peu une cuve de plusieurs idées chimériques. L'une des particularité est les Mages Boursouflés (Bloatmages) ou Hématothéurges, qui augmente la quantité de sang dans leur corps pour augmenter leurs pouvoirs magiques. Ils sont d'ailleurs contraints de se couvrir de sangsues lorsque le sang commence à exercer trop de pression sur leurs veines et qu'il menace d'éclater ou de devenir fou sous l'afflux sanguin au cerveau. Ils ne sont pas intrinsèquement maléfiques ni vampires mais cette apparence leur donne un petit air de Baron Harkonnen et je me demande si on pourrait imaginer d'autres utilisations des Quatre Humeurs (j'en parle dans "mon" monde de Limen).
Un autre exemple de bizarrerie sinistre est les Augures, des oracles trolls qui regardent l'avenir dans leurs propres entrailles (ce sont des Trolls et ils peuvent donc se régénérer comme le foie de Prométhée). Il y a un quartier, Ankar-Te, ouvert aux nécromanciens, aux zombies (et bien sûr une maison close pour nécrophiles, ce qui fait un peu Black Dog). Les quartier pauvres ont un Orphelinat pour abandonner les mutants, assez nombreux.
La Cité abrite des exilés et donc aussi des cultes étranges comme les Beaux-parleurs du Quartier des Soupirs, monothéistes qui font voeu de silence en se scellant la bouche (en dehors d'un simple orifice pour boire et manger avec une paille, ce qui leur permet aussi de communiquer entre eux avec quelques claquements de langue) ou les Frères du Sceau (moines martiaux qui passent leur temps à s'entretuer sur la question de savoir s'ils doivent ou non rompre le Sceau dont ils ont la garde sous le sol de la Cité).
Ce cadre a déjà servi pour au moins deux scénarios qui ne me paraissent pas aussi bien originaux : le module D2 Les Sept Epées du péché (un simple dungeoncrawling de niveau 7 pour récupérer une épée du Seigneur de la Luxure, pas explicitement relié avec la première campagne du Réveil des Seigneurs des Runes) et The Godsmouth Heresy (que je n'ai pas lu mais qui semble être encore un dungeoncrawling de niveau 1 dans les nécropoles sous la ville).
(Dans l'édition française des Sept Péchés du péché d'octobre 2008, le quartier de Widdershins est mal traduit comme "Les veuves" (Widows) mais widdershins signifie "dans le sens inverse du sens habituel" (par exemple "ouest-est" ou bien "dans le sens inverse des aiguilles d'une montre" - on pourrait l'appeler "Rebrousse" ?).
City of Strangers recèle assez d'idées pour une campagne urbaine mais cela donne parfois une impression d'un amas d'idées hétérogènes. En 64 pages, le supplément a peu de descriptions de personnages non-joueurs mais beaucoup de pistes de scénario, ce qui peut être aussi précieux.
Décrit comme ça, Kaer Maga m'a un vague parfum de Bas-Lag. Peut être les Bloatmages (simili Scabmettlers?) qui me font ça.
RépondreSupprimerSjmsb, C. Mieville est rôliste - peut être une inspiration?
Oui, Miéville a même continué un peu à jouer. Je n'ai pas lu ses romans mais on m'a dit qu'il y avait une parodie d'aventuriers D&D dans un des volumes.
RépondreSupprimerMiéville a participé à un des suppléments Pathfinder, Guide to the River Kingdoms où il décrit une petite communauté, "Outsea", une confédération de créatures de l'eau de mer qui vivent dans une bulle d'eau salée au milieu des rivières d'eau douce.