mardi 23 octobre 2007

Journée de la Glandouille Totale




Une chose qui m'a fait rire sur la lecture de la lettre de Guy Môquet est que le PCF jouait les indignés en insistant pour qu'on rappelle bien qu'il était communiste.

En fait, le PCF tout comme les Sarkozystes n'avaient pas trop envie qu'on parle du contexte réel. Plus ils se plaignaient de l'absence de contexte, plus on comprenait qu'ils voulaient l'occulter. La mauvaise foi a atteint le comble des deux côtés.

Le problème est qu'en savoir trop sur Môquet enlève plutôt de son mérite ou cette valeur mystique qu'on voudrait conférer à un sacrifice.

(1) Il est le fils d'un député communiste, autrement dit un Héritier, quasiment un futur notable de la Nomenklatura, pas un héroïque ouvrier prenant conscience de la résistance anti-fasciste, ce qui explique que le PCF en fera tant sur lui à la Libération,

(2) Môquet n'est pas exécuté pour un acte de résistance mais par représailles comme otage pour l'acte accompli par un autre et parce qu'il a distribué un tract communiste en octobre 1940,

(3) le tract distribué n'appelait pas à la Résistance, au contraire il est conforme à l'Appel du 10 juillet (voir aussi la demande de reparution de l'Humanité, il soutient le Pacte germano-soviétique, renvoie dos à dos Allemands et Alliés, critique surtout l'impérialisme britannique et aussi les affairistes "qu'ils soient juifs, protestants, catholiques ou francs-maçons". On dirait presque de l'anticapitalisme SA. Le père de Môquet a été arrêté en décembre 39 par la police française après la dissolution du PCF, parce que le Parti est à l'époque objectivement allié de l'Allemagne nazie.

Môquet, un pauvre gosse de 17 ans, exécuté par les fascistes parce qu'il soutenait l'alliance totalitariste de son papa avec les fascistes.

Joli symbole de la France sarkozyenne, la France des Héritiers qui n'a que le mot "équité à la bouche pour dissimuler qu'elle ne sert qu'à accroître la richesse de l'oligarchie.

La nouvelle la plus importante dans les lois scélérates actuelles n'est pas les tests ADN (loi gadget inapplicable comme tous les trucs médiatiques sarkozyens) mais plutôt la suppression de l'impôt de succession, le bouclier fiscal agravé et la réforme de la fiscalité sur les dividendes qui comme le dit Thomas Piketty revient à faire peser tous les Impôts uniquement sur le Travail.

Voilà la réhabilitation du Travail par les Sarkozyens : l'argent ne doit rester qu'aux Fils à Papa et au seul mérite de ceux qui en ont déjà, à la mobilité financière de sa Jet Set, aux Rentes de ses amis People. L'impôt proportionnel, acquis radical de 1914, est désormais en danger et on voit que ceux qui ne parlent que de pouvoir d'achat jusqu'aux municipales vont faire peser plus sur la TVA.

Quant à cette ordure raciste de Papa Guaino, qui aime tant Barrès, il a attaqué les enseignants qui refusaient la lettre en disant qu'ils manquaient de patriotisme et qu'il était important de communier dans une émotion.

Mais c'est exactement cela qu'un enseignant doit refuser, sinistre crétin.

L'école (je sais, je l'ai déjà dit le 24 mai dernier), ce n'est pas la télévision de votre médiocratie ou le théâtre, contrairement à tout le pathos qu'on veut inoculer. L'école, c'est un lieu différent. La démocratie, pour reprendre Hegel et Arendt, a besoin de plusieurs espaces, de séparer la sphère du noyau familial et celle de l'agora, les intérêts privés et les libertés civiques. L'espace de l'école, c'est celui de la distance, de la réflexion, de l'ennuyeux apprentissage de la grise théorie, pas celui de la Messe, du meeting ou d'une ferveur artificielle qui n'est là que pour faire croire que la kleptocratie sarkozyenne aurait la moindre idée sur l'éducation.

Une chose que je n'avais pas remarquée est que même ceux qui font l'éloge des enseignants leur portent préjudice dans leur commiseration apitoyée.

On en parle parfois comme d'humanitaires qui iraient en terre de mission. Et même la mythologie des Hussards noirs contribue à cette confusion. Le but n'est pas la charité, c'est l'éducation. Il y a des enseignants qui ont du mérite à en faire bien plus que leur travail (et on connaît tous des individus qui manifestent une vraie dévotion et une sorte de vocation pour la transmission de leurs connaissances), certes, mais ce travail n'est pas un don généreux à des masses défavorisées, c'est le devoir normal d'une société démocratique pour établir le plus d'égalité et d'accès à la connaissance. A force d'en parler comme d'un généreux supplément d'âme, on prépare l'idée que ce ne serait qu'une sorte d'option gratuite à côté de la seule formation professionnelle.

Il faut que j'arrête mes rants, désolé. Je dois vraiment vieillir, ma tolérance envers tous ces bobards et la mauvaise foi est devenue ridiculement faible.

EDIT : Pour revenir à une version moins pontifiante, voir le débat de Steven & Stephen - Even Stevphen - sur l'impôt sur les successions.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire