dimanche 24 mai 2020

Invente ton pitch arthurien


Depuis la synthèse impressionnante de William Blanc, je suis plus convaincu encore de la plasticité du mythe arthurien malgré le risque de sur-utilisation.

En jeu de rôle, il y a eu récemment en plus de Pendragon, au moins deux jeux de rôle que je n'ai pas du tout essayés : Keltia, qui revenait au Arthur gallois, et Wastelands, qui projetait Arthur dans le post-apocalyptique (ce qui est bien adapté au thème de la Terre Gaste même si on ne croit pas aux thèses de Jessie Weston.

Kieron Gillen fait en ce moment un comic book Once & Future (chez Boom Comics) dans le genre de "l'Arthuriade Inversée", qui ne m'a pas vraiment emballé. Cela semble opposer une extrême droite britannique pro-arthurienne et une famille de tueurs de zombie.

Sur Twitter, je suis tombé sur ce bon titre en jeu de mot : Merlin XVIII (au lieu de Berlin XVIII). Et cela évoque peut-être plutôt une Arthuriade en plein XVIIIe siècle. Le Roi George devient fou et Merlin réapparaît dans les Colonies rebelles. On peut imaginer soit qu'Arthur tente de se faire couronner Roi du Nouveau Monde ou alors une idée plus originale où c'est Morgane qui va faire alliance avec les Tribus indiennes ? Il y a déjà un jeu de plateau Witches of the Revolution et je me demande si on peut y trouver des idées (le Graal est-il maintenant dans la Cloche de la Liberté de Philadelphie ?). Je cherche depuis longtemps une campagne de superhéros au XVIIIe siècle mais je n'avais pas pensé à y superposer Arthur.

Par hasard, je lisais des légendes sur les Nartes (divers Héros qu'on retrouve dans le Caucase, chez les Ossètes, les "Alains" et leurs voisins) et le guerrier quasi-divin Bat'radz a parfois quelques similitudes avec la geste arthurienne, notamment le fait qu'on va rejeter son épée magique dans l'eau. Ce n'est probablement qu'une coïncidence (et en réalité, on jette l'épée de feu pour le vaincre et non pas après l'avoir vaincu, ce qui est donc très différent, Batradz étant lié au feu et fils d'une nymphe des eaux) mais cela fonde une des théories d'Arthurologues selon lesquels Arthur serait en partie une retransposition de mythes d'origine "sarmate" par des Légions romaines qui avaient été cantonnées dans le Caucase avant d'aller en Britannia... Mais comment savoir si la causalité n'est pas inverse et si les mythes oraux du Caucase (qu'on n'a guère dû retranscrire avant le XIXe siècle, je crois) ne peuvent pas à leur tour avoir été infectés par la popularité des textes arthuriens qui sont devenus un mythe pan-européen.

5 commentaires:

  1. Je me souviens avoir lu, il y a quelques années, quelques pages sur les Nartes, et avoir trouvé à leurs épopées une saveur quelque peu... tolkiennienne. Un cas de fécondation croisée ne serait pas impossible, compte tenu des centres d'intérêt de Tolkien.

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  2. Tolkien cite le Kalevala finlandais mais je ne me souviens pas d'allusion aux Scythes et Alains. Dumézil développe dans son Loki les analogies des Nartes (Syrdon / Loki) avec les Eddas.

    Une des autres choses bizarres chez les Nartes est que le Caucase était censé être le lieu du châtiment de Prométhée et que les mythes caucasiens semblent obsédés par Prométhée aussi.

    Est-ce que les Grecs avaient localisé cela parce qu'ils recevaient vraiment Prométhée de cette région ou alors est-ce que les peuples du Caucase qui retranscrivent leurs légendes à partir de la Christianisation par des Moines grecs orthodoxes sont assez remplis de culture classique hellénique pour insister sur Prométhée comme un sujet de fierté locale ?

    Et pourquoi les mythes de la région ont-ils tant de Cyclopes et Arimaspes ?

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  3. Sur les morts de de Batradz et d'Arthur : tiens, pourquoi tu penses que ce n'est probablement qu'une coïncidence? Tu as lu le vieil article de Grisward?

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  4. Oui, il y a vraiment des analogies fortes qui vont plus loin que des coïncidences, mais dans quel sens (dans le cas du mythe de Cuchulainn, moins connu qu'Arthur, cela paraît plus vraisemblable comme fond indo-européen).

    Il y a l'élément du "signe", où Batradz annonce que si on jette l'épée, on doit voir des signes dans l'eau et cela lui prouve d'abord que l'épée n'a pas été lancée puis il meurt enfin quand on jette vraiment l'épée, comme pour Arthur.

    Dans les deux cas, le héros délègue le fait de jeter l'épée et le héros meurt ensuite.

    La scène reste assez différente : dans la version dont parle Joël Grisward, Batradz sacrifie sa vie volontairement (parce que son immortalité n'apportait que malédictions aux Nartes) et veut détruire son épée pour pouvoir renoncer à son immortalité alors qu'Arthur a l'air de rendre l'épée dans l'épisode avec Griflet/Bedivere et doit en tirer une immortalité quand les dames d'Avalon viennent le chercher.

    Grisward va jusqu'à dire que cela prouve que le mythe de Batradz est la clef ou la vérité de la version peu claire d'Arthur : en fait, Arthur ne rend pas Excalibur, il la détruit pour pouvoir mourir. Je ne suis pas sûr qu'on doive voir cette clef dans ce seul sens où le mythe scythe expliquerait la Mort d'Arthur.

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  5. (et pour revenir au message précédent sur le Kalevala, Grisward parle aussi d'analogies entre Kullervo et Batradz)

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