Comme tout le monde (par exemple
Guillermo, voire la généralisation plus violente par
Autheuil), je suis vraiment effaré par toute la scène depuis le micro-événement de Dijon. C'est vraiment à en gémir.
Une personnalité socialiste (Royal) crée un courant (Espoir à Gauche), et le laisse dirigé par un futur ambitieux (Peillon). Peillon, ex-porte-parole qui veut prendre son autonomie, organise une réunion sur l'éducation en disant qu'il ne veut aucun Présidentiable. Royal s'invite malgré le mot d'ordre de son propre courant (et prétexte même hypocritement que Peillon n'a aucun moyen de savoir si elle se présenterait ensuite aux Primaires). Peillon, furieux, dit qu'elle a tout gâché (et sa réaction est une prophétie auto-réalisatrice car on ne parle plus en effet que de cela), qu'elle ne pourra ni ne mérite de gagner et qu'elle est
folle. Royal exclut donc Peillon de son courant, ce qui est devenu inévitable, et Peillon s'insurge qu'elle n'en a pas le droit et qu'il a été élu. La fête de l'éducation devient un gigantesque hara kiri sur la place publique de tout ce courant "royaliste".
Royal a fait une vraie faute en s'imposant ainsi, en voulant jouer le fait accompli, même si c'était "son" courant. Elle n'avait rien à y gagner et elle pouvait se douter que la tentative de réunion des divers groupes n'allait pas faire de Peillon un Présidentiable, même si elle redoutait l'autonomie qu'il voulait prendre.
Mais Peillon a fait une faute encore plus ennuyeuse en rendant son indignation publique. Pourquoi interdire ainsi des invités ? Le thème même d'unité qu'il espérait défendre, c'est lui encore plus que Royal qui le ridiculise. Il pouvait l'engueuler en privé et s'écraser un peu hypocritement en public. Sa réaction disproportionnée paraît pire que le caprice initial de la fâcheuse importune.
Peillon nous dit qu'il n'a jamais eu confiance en Royal mais il était son porte-parole et cela jette un discrédit sur tout ce qu'il soutiendra par la suite (de même que Royal avait dit après la défaite qu'elle ne croyait pas non plus à son propre programme).
Le personnage de Royal commence à m'inspirer une compassion que je ne crois pas de mauvaise foi (et j'étais pourtant depuis au moins les Primaires d'un anti-Royalisme assez primaire, ayant même pris ma carte du PS à 20 euros en grande partie pour voter contre elle).
A force de souffrir de complexes visibles sur les critiques violentes (dont
certaines pouvaient être en effet sexistes) et une forme de surcompensation narcissique, elle renforce toujours ces doutes sur elle, en un cercle vicieux. Plus on l'attaque, plus elle s'enferme et plus on l'attaque.
Quand Jospin attaque son jeu d'évangéliste, elle répond "Pardonnez-leur, ils ne savent pas ce qu'ils font" ou se compare à Jeanne d'Arc, c'est-à-dire précisément de manière à s'auto-dissoudre dans ce que Jospin lui reprochait. Elle est plus charismatique que les autres dirigeants, c'est indéniable mais elle n'arrive pas à accepter que ce "charisme" empoisonne tout débat, au point que même si elle avait raison sur un sujet, on se demanderait si elle n'en parle pas que pour des raisons médiatiques.
Il est très pernicieux et de mauvais goût de prétendre tout psychologiser avec de la psychanalyse de bistrot mais tout se passe comme si les dirigeants socialistes étaient tous prisonniers d'une forme d'auto-destruction compulsive. Plus ils parlent de réconciliation, plus ils se divisent entre eux, voire se contredisent individuellement d'un jour à l'autre. On en vient à se demander s'ils ne redoutent pas de gagner et s'ils ne préfèrent pas se contenter de fiefs régionaux par une forme d'auto-flagellation que je ne m'explique pas.
La droite a la chance d'une cohérence rare qui ne vient pas d'un mérite du Président ou pas seulement de la synthèse des courants libéraux et conservateurs-autoritaires mais des effets destructeurs du Président précédent qui avait fait le vide autour de lui (au point qu'il ne lui restait plus que des médiocrités comme Raffarin).
La gauche désintégrée aurait peut-être un trop plein de personnalités présidentiables mais elles auront du mal à rassembler (DSK, Fabius, Royal), ont un passif trop lourd (DSK, Fabius, Aubry), manquent de charisme (DSK, Fabius, Aubry) ou semblent trop inconsistantes (Royal). Je n'arrive plus à imaginer d'issue heureuse - même si la majorité accumulait encore plus d'erreurs qu'elle n'en fait déjà actuellement.
Add. En parlant d'autorité charismatique de Gourou de secte, ce
message sur Sarah Palin en Rogue de Dungeons & Dragons :
On every single page she bemoans her 8 INT build and blames her horrible playing on everyone else! It's her fault for putting all her stat points into Charisma!