mardi 20 février 2024

Box office chinois 2023

Les films historiques continuent d'être influents dans le cinéma populaire chinois. Les 10 plus gros succès chinois de 2023 qui ont dépassé le milliard de renminbi, soit cent millions d'euros (si on ne compte pas les importations) étaient les suivants : 

Full River Red $637.24m (RMB4.54b) film historique
The Wandering Earth 2 $564.64m (RMB4.03b) sf (Liú Cíxīn)
No More Bets $539.27m (RMB3.85b) drame policier
Lost In The Stars $493.73m (RMB3.52b) drame policier
Creation Of The Gods I $369.49m (RMB2.63b) épopée
Never Say Never $369.3m (RMB2.21b) comédie arts martiaux
Chang An $255.62m (RMB1.82b) dessin animé historique
Boonie Bears: Guardian Code $209.58m (RMB1.49b) dessin animé
Under The Light $189.33m (RMB1.35b) drame policier
Godspeed $165.93m (RMB1.18b) road movie familial

Le 5e dans cette liste, Creation of the Gods (Première Partie de la trilogie), l'épopée fantastique sur la chute des Shāng d'après Xǔ Zhōnglín, j'en ai déjà parlé

Full River Red (满江红) de Zhāng Yìmóu est une enquête et une intrigue d'espionnage vers 1146 chez Qín Huì (1091-1155), chancelier de l'Empire des Sòng du Sud, qui avait trahi sa dynastie face aux Jurchen (la "dynastie Jīn") en faisant périr le général Yuè Fēi (1103-1142). L'assassinat d'un plénipotentiaire des Jīn met en danger les négociations. Le titre, Mǎn Jīang Hóng, (Le Fleuve Complètement rouge), est une allusion à un poème célèbre (et même un type de rythme et de versification) qui a été attribué plus tard au général Yuè Fēi après l'effondrement de Jìngkāng de 1127 (quand les Jurchen réussirent à conquérir la capitale des Sòng en prenant même l'Empereur en otage). Il y a souvent des allusions à cette période dans Le dénicheur d'aigles

Cháng'ān (长安三万里, "à 30 000 de Xi'an" ?) est un dessin animé de 2 heures 48 sur la vie du grand poète Lǐ Bái (701-762) et du général & poète Gāo Shì (704-765) sous la dynastie des Táng et notamment à la fin des années 750 quand le général Ān Lùshān se révolte et prend le contrôle de Luòyáng, la capitale orientale. Gāo Shì assiégé se remémore sa vie avec d'autres grands auteurs de la période à Cháng'ān, la capitale des Táng, comme Dù Fǔ (712-770). (Par coïncidence, le poète Wáng Zhīhuàn, un des compagnons et rivaux de Gāo Shì aurait écrit un poème sur la "tour de la grue ou du héron", comme plus tard le général Yuè Fēi...). 



dimanche 18 février 2024

Mechanical Dream 8 Le "Pilier"

1 Gnaths, Odwoanes & Volkoï, 2 Yakis & Soleks, 3 Les Frilins & les Zins, 4 les Emovans, les Inaïs & les Nayans. 5 Les 10 échos ("classes"), 6 Chronologie et cadre général, 7 Création de personnage

L'univers de Mechanical Dream n'est pas médiéval, ni même seulement "steampunk" (contrairement à ce que je disais dans mes premiers messages) mais un mélange de haute technologie (industrie, robots Odwoanes, clones et androïdes Volkoï...) et de fantastique (avec le Songe et des lois physiques différentes sur l'énergie). Le cadre principal est un ensemble de mégalopoles comme la nature sauvage est rendue terrifiante par le "Nocturne". 

Les Arbres Kioux sont gigantesques et portent plusieurs plateformes de douzaines de millions d'habitants. L'Arbre de Khaï-Bhek est un des plus grands connus, il fait 30 kilomètres de haut (plus que 3 Everest, un peu plus que l'immense Mons Olympus sur Mars) avec une base de 10 km. Cette verticalité des Arbres Kioux explique l'incroyable densité urbaine (plus de 5 milliards d'habitants). Le "Pilier" est composé de Khaï-Bhek (145 millions d'habitants, 9 plateformes) et de 4 autres Cités-Etats construites en carré autour de lui et nommées chacune pour leur chef : Kolester (55 millions), Oce (45 millions), Kaderun (70 millions) et Ulabediare (25 millions), sans parler de Danaac la cité aquatique des Emovans dans les profondeurs sous les racines de Khaï-Bhek (400 millions). Ce carré fait, je crois, près de 500 km de côté (ce qui ferait à peu près la superficie du Royaume-Uni ou de l'ancienne RFA). Le Train céleste relie les différentes branches.

L'Etat a en plus de l'Armée et de la Banque (qui émet la monnaie, les Pièces de Sang), trois parties : la Gestion des Ressources Politiques (police, magistrats et bureaucrates), des Ressources Economiques et des Ressources Sociales (éducation et propagande). 

L'Etat du Pilier est un mélange d'autocratie (dirigée depuis un siècle par le Gnath Droliath Estolah qu'on surnomme "Le Pilier En Personne"), d'économie planifiée (tous les services comme la médecine sont organisés par l'Etat) et d'ultra-capitalisme (tous les services doivent être payés individuellement, même les pompiers et cela peut conduire à des citoyens de plus en plus endettés). 

Les quartiers les plus riches et développés technologiquement sont généralement dans les plateformes des hauteurs et les bidonvilles sont plus dans les racines. 

Les "sociétés" sont sous les ordres de l'Etat mais les plus puissantes ont des droits de vote dans la Gestion des Ressources économiques. Certaines ont des juridictions limitées à des secteurs ou des branches de leur arbre Kioux. Les sociétés sont décrites dans MD Dream Aspect p. 111-121. Il faut ainsi transporter, stocker et répartir l'Orpee ingéré chaque semaine par des milliards de personnes et importé entièrement des Foyers des Inaïs par les méga-corporations ORPEE PARTOUT et SECURITE STOCKAGE. Une des sociétés (Naissance de Héros p. 116) gère les Echos. Il y a aussi un chapitre sur les emplois disponibles dans le livret du supplément Engrenages p. 11-23. 

Le Pilier a une importante croissance territoriale et démographique depuis cent ans. Cette croissance vient de s'arrêter devant la Cité de Yhrne Llemir (p. 105), loin au-delà des Plaines de Vlorë dans la Grande Jungle où Le Fléau (chef de l'Armée du Pilier) a été repoussé. Yhrne Llemir a des pierres modifiées par les échos Artisans de l'étrange qui ont permis des murailles surélevées sur toutes les plateformes et son despote n'est pas plus démocrate que le Pilier. 

mardi 13 février 2024

Pentimento

 

C'est peut-être évident pour tout le monde mais je n'avais pas remarqué avant que le "scandale" du Déjeuner sur l'herbe (1865) n'était pas du tout que la femme soit nue mais que les deux hommes soient habillés (et habillés en tenue contemporaine et non en bergers antiques). Une copie entièrement nue de l'original perdu de Raphaël dont on n'a que cette gravure de Marc-Antoine de Bologne vers 1510 n'aurait provoqué aucune réaction négative si elle n'avait créé ce décalage entre le thème classique et un anachronisme. 




lundi 12 février 2024

Creation of the Gods I Kingdom of Storms



A l'occasion du Nouvel An chinois et du passage à l'Année du Dragon de Bois, les cinémas diffusaient pendant 48 heures le film Creation of the Gods du réalisateur Wuershan qui est la première partie d'une trilogie. Il n'est hélas pas prévu d'autre sortie nationale, ce que je trouve assez peu compréhensible car le film est certes un peu long (2h30) mais on commence à s'habituer à ces durées et il assez facile à suivre malgré les nombreux personnages et quelques allusions peu expliquées. Le Parisien exagère complètement en disant que cela ne peut viser que des spectateurs chinois émigrés.

C'est l'adaptation de l'Investiture des Dieux (封神演義, Fēngshén Yǎnyì), roman mythologique du XVIe siècle qui raconte de manière fantastique la chute de la Dynastie Shāng et l'arrivée de la Dynastie Zhōu vers l'an 1050-1046 avant J.C. Yīn Zhòu (aussi appelé Zhòu Xīn, 1075-1046) est le dernier empereur des Shang et le roman justifie comment les Shang perdent le "Mandat céleste" (tiānxià, 天下) au profit de Jī Fā (姬發, 1076-1043), qui deviendra le futur Empereur Zhōu Wǔ wáng (Wǔ le Roi des Zhōu). Il y a 20 ans en 2004, j'avais fait un bref survol de l'Investiture des Dieux dans la traduction si peu pratique paru chez You Feng.

Le film est une débauche d'effets spéciaux qui vise à concurrencer les trilogies de fantasy occidentales et lorgne parfois plus vers Marvel que vers Lord of the Rings

J'ai pu voir quelques petites différences mais je ne me souviens pas assez du roman pour détailler. Le Méchant Empereur Yīn Zhòu me paraît plus actif et courageux dans cette version au lieu d'être seulement la victime languissante de Dájǐ la démone renarde à neuf queues (húlijīng).



Daji est quasiment le seul personnage féminin de tout ce premier volet. Elle est jouée par une actrice russe d'origine bouriato-mongole Naran (Narana Erdyneeva, née en 1997 - Wuershan est aussi d'origine mongole) et le choix de mise en scène change beaucoup le personnage traditionnel de Daji. Au lieu d'être une manipulatrice froide et cruelle, cette version de Daji en fait plutôt une jeune femme-bête certes sexy mais aux yeux innocents et qui ne semble pas toujours comprendre entièrement ce monde humain dans lequel elle a été plongée. Quand elle tue, cela semble être plus un acte de prédation dénué de toute malveillance (même si elle est quand même consciente de la catastrophe à venir). Elle n'a pas ses soeurs démones pour l'instant. 

J'aime bien aussi l'idée que les différents seigneurs ne sont pas que des princes à la Cour mais un corps des "Otages", fils des Quatre Ducs élevés par l'Empereur Yīn Zhòu pour former une Garde d'élite dévouée à sa personne. Cela crée une dynamique nouvelle où le héros Jī Fā a une double allégeance entre son père adoptif l'Empereur et le père dans sa province du Xiqi. 

Une autre différence est de faire de "l'Investiture des Dieux" du titre non pas simplement un événement à la fin de l'histoire (où le sage Jiāng Zǐyá proclame la liste et la déification de divers personnages de l'histoire) mais le MacGuffin depuis le début, le Parchemin divin qui est le vrai enjeu de la guerre entre les démons et les différents Immortels de Kunlun. Les scénaristes ont décidé que ce rouleau pouvait absorber la force vitale pour la donner à l'Empereur légitime mais qu'il était le seul moyen qui pouvait éventuellement rétablir l'ordre du cosmos. 

Une autre intrigue est l'idée de sacrifice du Roi. L'Empereur des Shang Yīn Zhòu prétend être prêt à s'offrir en sacrifice pour sauver le cosmos contre le chaos mais il semble changer d'avis quand le parchemin lui offrirait la puissance du sacrifice d'autres victimes. 

Jiāng Zǐyá, le vieux sage taoïste qui est en un sens le vrai héros du roman, a ici perdu tous ses pouvoirs et notamment ses pouvoirs oraculaires. Il les a sacrifiés pour accepter de revenir sur Terre et d'apporter l'Investiture des dieux. Pour faire des comparaisons occidentales, il apparaît comme une sorte de Gandalf incompétent de cette trilogie (ou pour ceux qui connaissent Dragonlance, il ferait plus penser à Fizban). Il est représenté avec ce ton un peu humoristique chinois que j'aurais du mal à décrire si ce n'est comme ce mélange de sublime et de comic relief des vieux maîtres excentriques, mélange de sagesse et de ridicule (un peu comme Yoda au début de l'Empire contre-attaque). Peut-être que les scénaristes voulaient diminuer sa puissance pour qu'il ne vole pas la vedette à Jī Fā. Il n'a pas son Fouet Divin, il porte l'Investiture des Dieux et a gardé sa sagesse mais il a besoin de ses deux gardes du corps divins Nézhā et Yángjiǎn pour le défendre. 

Nézhā, l'enfant demi-dieu qui vole sur ses roues de feu est l'un des plus célèbres héros de la mythologie chinoise. Yángjiǎn est plus connu sous le nom d'Èrláng Shén, Neveu de l'Empereur de Jade et un des dieux de la guerre avec son Trident. On les voit aussi tous les deux se faire vaincre par le Roi des Singes dans le Voyage vers l'Ouest.

L'adversaire Shēn Gōngbào n'est pas ici un frère du sage Jiāng Zǐyá mais plutôt juste un nécromancien générique (et un peu caricatural avec sa cape noire et ses crânes et son aspect de clown illusionniste). Il sert un Maître plus puissant qui serait peut-être aussi derrière Daji et toutes les catastrophes cosmiques. 

A la fin, la scène avec le monstre de pierre n'est pas un dragon mais un Tāotiè. Le gentil démon "Coup-de-Tonnerre" adopté par la dynastie Zhou et élevé par les Immortels est Léi Zhènzǐ, fils de Léigōng.

Ce premier volume a certaines des scènes les plus célèbres du roman comme la scène à la Thyeste où un père va être forcé de manger son enfant ou celle où le grand devin qui a identifié la démone-renarde sera forcé d'arracher son propre coeur (mais la résolution est assez différente ici et n'inclut pas le sage Jiāng Zǐyá). 

A la fin, la Rébellion (et la Guerre des Immortels) a bien commencé contre l'Empereur Yīn Zhòu et je me demande comment ils vont tenir sur deux films entiers pour tout le reste de la Guerre. Ils vont devoir multiplier de nouveaux ennemis (comme Wén Zhòng au Troisième Oeil ou les frères Mo, les Quatre Géants Gardiens qu'on voit dans le post-générique). Toute la difficulté de ce genre d'épopée est de créer du suspense alors que la chute des Shang est aussi clairement annoncée dans chaque scène. 

mercredi 7 février 2024

Erasistrate, Agnodike et Stratonike


C'est seulement William Harvey (1628) qui a découvert la circulation cardiaque (les veines apportant le sang vers le coeur, les artères prenant l'impulsion cardiaque pour apporter l'oxygène des poumons vers les organes). La théorie classique de Galien au IIe siècle de notre ère disait que le foie secrétait du sang à partir de l'alimentation et l'envoyait vers les organes et que les artères prenait le Souffle (pneuma) depuis les poumons, mélangeant ainsi le sang et l'air. Harvey va relier ce pouls dans les artères avec le rythme de ce moteur cardiaque. 

Mais à l'époque hellénistique dans la cité d'Alexandrie, cette histoire de pulsion du souffle vital apparaît dans une des premières psychothérapies

Le médecin Hérophile (330-250), père de la médecine alexandrine et de la dissection anatomique, aurait eu parmi ses élèves à Athènes une certaine Agnodike. Agnodike n'a que des sources légendaires beaucoup plus tardives et est donc probablement un personnage imaginaire. Elle serait la première femme médecin, première gynécologue qui dut, dit-on, se déguiser en homme vers -300 (?) pour pouvoir exercer avant d'obtenir la modification des règles excluant les femmes. Elle aurait été obligée de se dénuder devant ses juges de l'Aréopage pour dévoiler son sexe. Et puisqu'on parle de premières femmes médecins, Jean de Mandeville raconte dans ses étranges voyages (milieu du XIVe) une autre légende sans rapport où une fille d'Hippocrate de Cos aurait été transformée en dragon de Cos par Artemis et ne reprendrait forme humaine que lorsqu'un homme l'aimerait. 

Hérophile aurait aussi été le maître de son rival Erasistrate (310 - 250). Cet Erasistrate aurait aussi travaillé avec la médecin Pythias (II) la Jeune, la fille d'Aristote (qui n'eut pas les mêmes difficultés qu'Agnodike comme elle n'exerçait pas à Athènes et n'aurait pas eu autant de patientes). Erasistrate a repris à Hérophile une méthode très empirique de vivisection mais il aurait été plus radical que lui dans la critique des théories hippocratiques (et notamment dans le rejet des saignées). 

Je connais pas assez l'histoire de la médecine, la théorie d'Erasistrate et les différences précises avec la physiologie de Hippocrate, Aristote et ensuite Galien mais il défend que les veines transportent le sang et les artères l'air. 

Or c'est cette théorie sur l'Air et les artères qui permet de comprendre la célèbre anecdote sur Antiochus. 

Le Roi Seleucos (358-281), roi de la partie orientale de l'Empire macédonien, demande à Erasistrate de soigner son fils Antiochus (324-261) vers -294. Erasistrate devine que la cause de sa langueur n'est pas physique mais psychologique. Il remarque en l'auscultant que le pouls du Prince dans ses artères augmente quand passe sa nouvelle et jeune belle-mère Stratonice (320-254), princesse macédonienne et fille du roi Demetrios Ier Poliorcète (337-283). Le mouvement de l'air, rythme du Pneuma, ne trompe pas face à la femme même si le patient ne dit pas la vérité. L'organe trahit l'esprit. Ses symptômes cliniques parlent plus sincèrement que sa volonté. 

Le médecin conseille donc à Seleucos de renoncer à sa nouvelle épouse (la fille de Demetrios Poliorcète) pour la donner à son fils, ce qu'il accepte. Le futur Antiochus Ier Sôter sera l'ancêtre de la dynastie séleucide par cette Stratonice, fille des Antigonides. 

La scène est souvent représentée dans une inversion sur le Regard Masculin : Antiochus est alité, en pâmoison, en convulsion qu'on associait plus aux vapeurs hystériques et c'est sa belle-mère qui passe alors comme le sujet actif du tableau (comme Omphale et Héraclès) tout en essayant de se cacher timidement dans certaines versions comme si elle était consciente d'être la cause des troubles de son beau-fils. Antiochus y est souvent représenté assez jeune mais il avait quand même 30 ans (et son père 48) quand il tombe malade d'amour. Stratonice avait eu une fille avec Seleucos avant ce re-mariage. 







La flèche du contexte

Il existe certaines citations qui sont si tronquées de leur contexte qu'on ne peut pas trop en vouloir à nos élèves pour le contre-sens qu'elles occasionnent. Peut-on reprocher à leur mémoire individuelle d'être aussi sélective ou partielle que l'a été la mémoire collective ?

Le cas classique est Montaigne qui atténue en fin de phrase : "je voudrois aussi qu’on fut soigneux de luy choisir un conducteur qui eust plustost la teste bien faicte que bien pleine, et qu’on y requit tous les deux" (Essais I, 26). 

Hume est connu pour avoir dit qu'il n'y a rien d'irrationnel à être égoïste mais on cite moins souvent la phrase suivante qu'il n'y a rien d'irrationnel non plus à se sacrifier de manière altruiste (Traité de la nature humaine, Livre II, Partie 3, Section 3 Sur les influences qui motivent la volonté). 

'Tis not contrary to reason to prefer the destruction of the whole world to the scratching of my finger. 'Tis not contrary to reason for me to chuse my total ruin, to prevent the least uneasiness of an Indian or person wholly unknown to me. '

Hume ne veut pas dire seulement que la raison seule ne peut pas nous tirer de l'égoïsme mais que la raison seule ne suffirait pas à fonder tous nos comportements moraux fondés sur les émotions de sympathie. 

Kant dit dans l'Idée d'une histoire universelle que "l'homme est un animal qui, lorsqu'il vit parmi les autres membres de son espèce, a besoin d'un maître" (Der Mensch ist ein Tier, das, wenn es unter andern seiner Gattung lebt, einen Herrn nötig hat) mais il ajoute aussitôt la précision qui change tout le sens de la phrase, que ce maître aurait lui-même besoin d'un maître s'il était homme (car il risque d'abuser de son pouvoir) et donc qu'il a besoin que ce maître légitime ne soit pas un homme et soit des Lois (et la forme républicaine d'un Etat) et si possible dans l'idéal de pouvoir un jour ne pas en rester à des lois qu'il reçoit mais à respecter des lois morales qu'il se donnerait de manière autonome. Il commence ce texte comme du Hobbes (l'homme est trop associal pour ne pas avoir besoin d'une tutelle), puis l'articule avec Rousseau et sa propre position (sur l'autonomie, d'un Etatisme de fait et d'un anarchisme de droit). 

mardi 6 février 2024

Mechanical Dream (7) Un peu de "mécanique"

J'aime bien la richesse de l'univers de Mechanical Dream mais reconnaissons que le système de règles accuse un peu son âge et une mécanique "à l'ancienne". Mon trouble de l'Attention de vieux quinquagénaire addict à Internet m'empêche maintenant de bien lire et résumer ces aspects de règles tant que je n'aurais pas testé une partie. Ce ne sera tout au plus qu'un survol et non une recension critique (surtout que cela fait deux semaines que ce messages végète dans les brouillons de ce blog sans assez progresser). 

Création de personnage

MD (1e édition) a beaucoup de caractéristiques, au moins 13 de base sans compter les nombreuses caractéristiques dérivées, ce qui va à l'encontre de l'évolution actuelle des jeux de rôle. La seconde édition ne semble pas avoir considérablement simplifié cet aspect, je crois. 

Elles sont ordonnées en 3 catégories

Physique Mental Social
Force Force mentale Apparence
Endurance Endurance mentale Présence
Agilité Agilité mentale Charisme
Vivacité Vivacité mentale Expression
+Perception

C'est une classification étrange dans son souci de symétrie (et cela fait penser à un problème similaire dans DC Heroes avec ses six caractéristiques mentales/spirituelles). Ici dans MD, on ne saisit par exemple pas bien les différences entre Force Mentale et Agilité Mentale ou bien entre Présence et Charisme. La Force mentale permet d'imposer sa volonté alors que l'Endurance mentale est défensive et l'Agilité mentale serait la manière de varier les arguments et pas seulement de les "asséner" comme la Force... La Présence permet de se faire obéir (un chef), le Charisme de se faire aimer (un gourou), l'Expression passe plus par la communication de ses émotions (un artiste). 

La 13e caractéristique, Perception (ou Intuition) que j'ai mise arbitrairement dans la colonne "mental" n'est en fait dans une aucune des trois catégories. 

Le système de résolution a l'avantage de réduire (un peu) les additions par rapport à son modèle Earthdawn. La caractéristique donne le type de dé polyhédrique à lancer (d4, d6, d8, d10, d12) et la compétence donne le nombre de dés (sachant qu'on ne garde que le meilleur). Le dé peut être infini (open-ended, "explosif" comme on dit dans d'autres jeux) et on note alors le dé avec D majuscule "D8" : si on obtient le maximum, on le relance et on additionne le second résultat (si j'obtiens un 6 sur le D6 et un 1 au second jet, cela fait 7). De même, si on obtient un 01, c'est un échec critique. Le nombre de succès est égal à une marge de réussite : (résultat du dé - la difficulté ou le résultat de l'adversaire)/5. Certaines actions longues demandent d'accumuler plusieurs succès. Une difficulté standard est à 8 et un score normal pour un héros est le D8.  Il existe aussi des Maîtrises qui sont des bonus directs (+1, +2...) à ajouter au résultat final du dé. 

On crée le PJ par une répartition de points. Le choix de l'espèce coûte des points variables (minimum 5 pour les sentients de base, les Gnaths ou les Odwoanes, maximum 50 points pour les Zins métamorphes). Chaque espèce donne un bonus au score brut de la caractéristique (sur 3d6) qu'on peut augmenter avec les points de répartition. Les points ne donnent pas directement des bonus mais plus de re-tirages de ces 3d6 sur une des trois catégories de caractéristiques. Ce score de la caractéristique donne ensuite le type de Dé associé (un score de 5-10 est le d6, 11-15 est le d8, 16-20 est le d10) mais on a aussi besoin du score brut pour d'autres calculs de caractéristiques dérivées.

C'est une création un peu lourde qui combine répartition, tirage aléatoires et tableaux. 

Le joueur achète ensuite les compétences (dont la valeur va être le nombre de dés à jeter) et la liste est encore old school, elle couvre environ 50 compétences (en dehors de toutes les spécialisations sur les Connaissances). 

On choisit ensuite sa vocation en tant qu'Echo

C'est le moment d'évoquer un peu le Combat

C'est censé être plus souple que pour d'autres actions ou compétences car les compétences de combat forment ensemble un "pool maximal" de dés et c'est au joueur de répartir les dés de son pool en manoeuvres offensives ou défensives. Ce pool de départ (p. 75) est égal à 1 + (la moyenne d'Agilité, Vivacité, Agilité Mentale et Vivacité Mentale divisée par 5).  En pratique, j'imagine qu'on aura presque toujours 4 (ou 5) dés maximaux à répartir dans ce "pool" individuel, ce qui réduit considérablement la souplesse. Mais il faudrait voir comment cela marche en jeu. 

Les points de vie sont égaux à l'Endurance physique + un bonus de taille (il y a aussi un score de "taille mentale"). 

La santé obéit à des lois de la nature propres à MD (un peu comme les points de vie dans World Tree, 2001, jeu publié peu de temps avant) : l'énergie vitale "L'Eflow" doit être renouvelée périodiquement : on en perd 3 points chaque jour, les blessures créent des "hémorragies" d'Eflow mais on ne peut pas non plus trop dévorer d'Orpee d'un coup pour anticiper des pertes plus tard sous peine d'overdose.