vendredi 19 juin 2009

ἀδύνατον



D'habitude, il n'y a que les présentateurs français qui prennent cet air amusé/effaré en citant les sujets de baccalauréat de philo. Mais maintenant, ça a atteint même la blogosphère washingtonienne.


Apparently there’s also a question asking if it’s absurd to desire the impossible.

I think it is.

Either way, I think it’s safe to say that Barack Obama’s nowhere near turning us into France.


J'espère que mes élèves ne suivent pas la méthodologie lapidaire d'Yglesias - une large majorité des élèves ayant pris cette "question de cours".

Art Goldhammer surdétermine la question comme une révolte mai-soixante-huitarde (la citation de Maurice Blanchot, "être réaliste, c'est demander l'impossible", autrement dit la Chose en soi au-delà des phénomènes connaissables dans l'expérience - la phrase est parfois attribuée à divers auteurs dont Guevara) alors que c'est une question éthique standard depuis au moins Epicure ou le Stoïcisme.

5 commentaires:

Anonyme a dit…

J'ai trouvé que le sujet sur l'échange était particulièrement difficile.

Hier sur la 2 un élève interrogé sur le sujet du désir a déclaré avoir mis la citation (sic)suivante :
"Mieux vaut être un homme insatisfait qu'un porc satisfait."

Phersv a dit…

Oui, surtout que la plupart des ES risquent de chercher quel gain (échanger plus pour gagner plus) au lieu d'analyser s'il y a des finalités non-utilitaires aux échanges.

On leur parle pendant l'année par exemple du potlatch selon Marcel Mauss (Essai sur le don) pour qu'ils discutent l'idée de l'échange qui entretient le lien social pour lui-même. Généralement, ils arrivent à imaginer qu'il y a des échanges non-marchands mais ils en restent à une simple énumération.

La citation est une phrase de l'utilitariste John Stuart Mill (Utilitarianism, 1863, chapitre 2) qui voulait ainsi modérer l'hédonisme radical de son maître Jeremy Bentham. "It is better to be a human being dissatisfied than a pig
satisfied; better to be Socrates dissatisfied than a fool satisfied.
"

Bentham, hédoniste plus relativiste et conséquent au contraire, avait refusé l'idée d'une telle hiérarchisation en dehors des préférences des usagers et avait écrit "Prejudice apart, the game of push-pin is of equal value with the arts and sciences of music and poetry."

Berber a dit…

Je viens de regarder les coms chez Yglesias. Tout le monde a l'air surpris, c'est bizarre. Question de profane : c'est un truc purement français la dissertation alors ?

Elias a dit…

combien de copies cette année?

Phersv a dit…

> Bertrand
Oui, en un sens. La technique de rédaction de l'essay américain me paraît un peu moins "problématique", plus inspirée du modèle rhétorique de la Plaidoirie d'avocat alors que le modèle français est plutôt l'ancienne "disputatio" scolastique.

En gros, le Français pose une question et fait semblant d'envisager des objections et des points de vue différents pour opérer un "renversement" de perspective alors que l'Américain expose une thèse dès le début et donne ensuite plusieurs séries d'arguments pour défendre "sa" thèse.

> Elias
122, dont sans doute 75% sur le désir.

Le sujet est très peu sélectif car presque tous les bacheliers citent exactement la même référence (Epicure et Descartes : il est raisonnable de limiter ses désirs). La différence va donc se faire à la périphérie, non par la culture mais par la qualité de l'argumentation ou par les exemples.