SPOILER!
Une longue critique de The desolation of Smaug qui couvre la totalité de l'épisode, si vous vous fichez de découvrir déjà tous les ajouts par rapport au livre.
- Quelques bonnes idées du film :
Balin (joué par Ken Stott) est très sympathique, ce qui rend la découverte de sa mort dans la chambre de Mazarbul de Khazad-dûm dans Fellowship of the Ring plus poignante (mais dans mon souvenir, c'était déjà dans le livre). Martin Freeman (Bilbo) est infiniment plus charismatique que le larmoyant Elijah Wood - ou bien la différence réside peut-être dans le personnage et non dans l'acteur.
Tauriel est finalement à ma grande surprise plus supportable que je le pensais parce que l'histoire manque cruellement de personnages féminins (Peter Jackson a dit que sinon les personnages masculins risquaient de "dominer", heu, non, il n'y aurait eu aucun personnage féminin à part le passage ajouté de Galadriel ou les filles de Bard). Mais on ne croit pas une seconde à cette histoire d'amour de Tauriel avec Kili (c'est un coup de foudre sans aucun essai de justification), les allusions salaces tombent à plat ("fouillez aussi mon pantalon", oui, très tolkiénien quand on connaît la pudibonderie de cet univers) et le triangle amoureux avec Legolas est carrément grotesque (elle s'éprend de Kili parce qu'elle sait qu'elle n'est qu'une Elfe sylvestre roturière qui n'a aucune chance avec un fils de Thranduil).
Le trésor de Smaug en trésor de l'Oncle Picsou est certes immense mais je trouve cela plutôt réussi.
Accroître le rôle de Bard est aussi une bonne idée en théorie pour qu'il n'ait pas l'air de sortir de nulle part à la mort de Smaug (ce qui est le plus gros défaut du Hobbit originel), mais en pratique, cela ne marche pas parce qu'ils veulent en faire un Robin Hood démocrate alors qu'il ne réussit que parce qu'il est l'héritier du seigneur de Dale.
- Quelques mauvais éléments :
Environ la moitié du film est seulement un jeu vidéo avec des gens qui courent en sautant sur un jeu de plate-formes. Cela en devient pénible et de moins en moins convaincant dans la dernière heure de poursuite à travers Erebor où les scénaristes tentent de faire durer pour justifier qu'on ne tue pas Smaug tout de suite. J'aime beaucoup lire des épopées où on décrit des combats interminables individuellement mais au cinéma, je ne suis pas persuadé. On a l'impression de revoir 500 orques se faire tuer les uns après les autres, soit par des flèches lancées, soit par des flèches enfoncées directement, soit par des coups d'épée. Il y a de quoi vous dégoûter de tout combat. Et il y a tellement d'Orques, leur mort devient insignifiante et glaçante.
Les douze dernières années ont été assez cruelles envers ce pauvre Orlando Bloom qui avait 23 ans pendant le tournage du LotR et 35 ans pour le Hobbit, et qui semble avoir presque perdu sa silhouette fluette et androgyne (Ian McKellen s'en tire bien mieux dans son maquillage, les changements ne sont pas aussi évidents entre 61 ans et 73 ans).
Tout le film est tourné vraiment uniquement comme un prequel qui ne cesse de rendre hommage à la trilogie dans le futur au lieu de tenter d'être son propre sujet. Cela nuit vraiment à la spécificité originale de cette quête qui n'est plus qu'un épisode prologue. Si vos enfants n'ont jamais vu aucun épisode de la série, je me demande s'ils ne comprendront pas mieux en commençant par les épisodes 4,5,6 que par cela (oui, Jackson a donc vraiment imité Lucas sur ce point).
Tout le film est tourné vraiment uniquement comme un prequel qui ne cesse de rendre hommage à la trilogie dans le futur au lieu de tenter d'être son propre sujet. Cela nuit vraiment à la spécificité originale de cette quête qui n'est plus qu'un épisode prologue. Si vos enfants n'ont jamais vu aucun épisode de la série, je me demande s'ils ne comprendront pas mieux en commençant par les épisodes 4,5,6 que par cela (oui, Jackson a donc vraiment imité Lucas sur ce point).
Le troisième va être encore pire : 2h30 avec seulement Bard qui s'évade, reprend sa flèche noire, tue Smaug et la Bataille des Cinq Armées alors que Sauron part de la colline de Dol Guldur et retourne se cacher dans la tour mordorienne de Barad-dûr ?
16 commentaires:
Personnellement, c'est le film que j'ai préféré des cinq, pour l'instant (mais je ne suis pas un fondamentaliste de l'univers de Tolkien). J'ai adoré le personnage de Tauriel ; comme l'a écrit je ne sais plus quel critique anglais, c'est le personnage qu'aurait dû être Arwen dans le Seigneur des Anneaux.
Les blagues salaces étaient bienvenues, c'est des Nains, quoi, c'est pas des enfants de chœur. J'ai également trouvé l'épisode des tonneaux moins vidéoludique que celui de Gobelin-ville dans le film précédent.
En revanche, comme tu le soulignes, on se demande avec quoi Peter Jackson va bien pouvoir remplir les 2h30 du dernier volet...
Le premier LotR a quand même quelques bons moments avant de s'embourber dans les deux volumes suivants.
Je n'ai rien en soi contre des Elfes capables de répondre à des allusions grivoises d'un Nain - mais dans le Hobbit, je trouve que cela fait un peu tache.
Il y avait quand même un personnage féminin qui n'était pas dénu d'intérêt dans LotR, c'était Eowyn et la mort du Roi-Sorcier est un des rares moments de plaisir dans l'ennui des deux derniers films.
La Moria était un morceau de bravoure ; mais je parlais plus généralement des films dans leur intégralité. Et, de ce point de vue-là, le dernier me paraît le plus réussi.
Quant à Éowyn contre le Roi-Sorcier, c'était aussi une belle et émouvante scène. Au sein d'un film longuet...
> Le premier LotR a quand même quelques bons moments avant de s'embourber dans les deux volumes suivants.
Tu parles des bouquins là, ou des films ? :-)
Les deux, en effet. :)
Les blagues salaces étaient bienvenues, c'est des Nains, quoi, c'est pas des enfants de chœur.
Personnellement, je trouve, depuis le SdA, que l'un des points sur lesquels Peter Jackson à le plus "manqué" l'univers tolkienien (ou du moins le plus symptômatique), c'est précisément le traitement des nains.
Alors que ce peuple, dans les romans, a un caractère relativement austère dans son capitalisme digne d'un bourgeois luthérien, PJ ne manque aucune occasion de les réduire, à grand renfort de rots et de "lancer de nains" à la caricature naheulbeukienne issue de trente ans d'AD&D.
Oh, le Dwarf Tossing, j'avais oublié ce gag (deux fois en plus dans mon souvenir). Un des moments en effet les moins tolkiéniens que de réduire un personnage entièrement à un faire-valoir comique.
L'ambiance Film d'Horreur Bad Taste Série Z d'humour noir avec gags sur les os qui craquent dans les Morts de Dunharrow est aussi un autre moment où je me disais que l'auteur Peter Jackson l'emportait sur la source qu'il adaptait. Mais je ne sais pas si on pouvait l'adapter entièrement au premier degré.
Et bien sûr Denethor en entièrement méchant et fou. Saruman en serviteur de Sauron au lieu de allié/concurrent. La scène ridicule de guérison de Theoden où il change de tête en quelques secondes.
Je crois que j'ai mis le doigt sur ce qui me rebute dans ce Hobbit 2: c'est l'égarement de "l'applicabilité". Tolkien préférait ce terme à celui, trop clos, d'allégorie; tout en affirmant la réalité intrinsèque de son monde, il laissait cependant au lecteur la possibilité de lui trouver des points d'"application" avec le monde véritable, la morale, la théologie, la politique, etc… et bien sur, surtout, avec la vie de chacun. Jusqu'à présent, j'avais trouvé que (même) les films de Jackson conservaient cette (ou une) part précieuse d'"applicabilité". Mais avec ce dernier film, je me suis souvent senti face à quelque chose à quoi, moi personnellement, je ne trouve pas d'"application" - ou bien seulement à des choses qui ne m'intéressent pas, ou que je trouve bêtes… Je n'avais pas eu cette impression avec le Voyage Inattendu, où j'avais lu souvent sur la visage des acteurs (de M. Freeman surtout) quelque chose qui puisse "s'appliquer" à la vie, disons à la mienne. Mais là, j'ai bien du mal - alors que mes enfants ont adoré…
(achtung !)
les nains chez Tolkiens ne sont pas luthériens, ils sont Juifs. Vraiment. Reprenons ... chaque peuple chez Tolkien est un rendu mythique d'un peuple européen, avec langue et bagage, en plus du pathos inhérent d'un auteur ancré dans la fin du XIXème.
On retrouve chez les Nains de Tolkien le parallèle avec les Juifs que l'on peut trouver dans la Tétralogie de Wagner, mais sans l'antisémitisme du Wagner. Chez Tolkien, les Nains sont le peuple qui est né sous la tutelle direct de leur dieu. Ils sont organisés en tribus, et leur langue (et c'est l'élément irréfutable) est la vision JRR de l'hébreu (exemple simple : fort se dit 'khazak' en hébreu). Ensuite on va retrouver la vision amour de l'or/thésaurisation utilisée par Wagner, et transformée en force littéraire par Tolkien.
Voilà, vite fait. C'était le scoop du jour !
Il a vaguement tenté de mettre un peu plus de politique à Lacville mais en effet, c'est assez creux.
J'imagine qu'il y a une "morale" qui se limite à nous dire que Thorin Oakenshield (qui était quand même moins incompétent dans le bouquin) se laisse dévorer par la cupidité comme tous les Nains mais qu'il finira par préférer son sens du devoir et de l'amitié et ainsi méritera l'Arkenstone.
Dans cet article (qui étudie les différences avec le livre et le reste de l'oeuvre de Tolkien), l'auteur trouve que la grande qualité est au contraire l'individualisation des Nains.
t'as zappé mon commentaire ?
Non, le commentaire était dans les spams. Je ne vois pas pourquoi, pas de mots anglais ou de noms de médicaments. Cela commence à arriver assez souvent, il va falloir que je regarde plus souvent dans le filtre anti-spam.
Sur les Nains, oui, cela paraît en partie vraisemblable : orfèvres, sonorités de l'hébreu.
La Cité d'Irilian dans de vieux White Dwarf avait repris la même idée en faisant même un Ghetto nain et des pogroms anti-Nains (on retrouve cela en partie dans Middenheim, la cité de Warhammer).
Mais en dehors de ce dernier point, l'aspect Orfèvre vient bien sûr déjà des Nains scandinaves avant même les Nibelungs de Wagner.
Certes:
"I do think of the 'Dwarves' like Jews: at once native and alien in their habitations, speaking the languages of the country, but with an accent due to their own private tongue..."
Mais le parallèle entre le peuple israélite & les nains tolkieniens tient plus de la linguistique que de la caractérisation -laquelle, comme dit plus haut, doit davantage aux nains des sagas et des eddas (à commencer par leurs noms).
Alors là, l'hypothèse selon laquelle PJ et ses scénaristes auraient trouvé leurs meilleures idées (la blessure de Kili, et même la brouette…) dans les brouillons de Tolkien!?!
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