Parade nuptiale
Imaginos me fait découvrir un roman de science fiction dont je n'avais jamais entendu parler, Courtship Rite (publié en 1982 dans la revue Analog et dont certaines éditions s'appellent, sans doute en référence à Dune, juste Geta) de Donald Kingsbury. Il fut nommé aux Hugo 1983 face à Heinlein, Clarke, Wolfe et Asimov (qui gagna avec Foundation's Edge). Kingsbury a peu publié mais sa carrière fut longue puisqu'il fit passer ses premières nouvelles (qui se situent déjà dans la même continuité hard science) dès les années 1950.
(Entre parenthèses, les fans de GRR Martin ne peuvent plus se plaindre : Kingsbury a évoqué un autre ouvrage dans le même univers que Geta qui serait en manuscrit chez son éditeur depuis 1970 et qu'il n'a toujours pas fini de "peaufiner" 50 ans après !)
L'histoire se déroule sur cette planète, Geta, qui est un outback assez aride en dehors de quelques mers. La flore indigène ou la maigre faune locale ne sont pas comestibles pour les Humains. Même s'il y a quelques végétaux terriens importés (mais quasiment pas d'animaux terriens en dehors d'hyménoptères pour permettre la pollinisation), les Humains ont aussi des rituels de cannibalisme : ceux qui sont jugés les moins adaptés pour survivre doivent rituellement se suicider pour apporter des protéines à leurs congénères.
Les descendants des colons ont perdu presque toute leur technologie, qui a régressé à un niveau du XIXe siècle en dehors des biotechnologies qui leur ont permis de survivre. Ils adorent comme divinité l'ancien vaisseau de leurs ancêtres qui est pris comme une sorte de Lune toujours en orbite. La société s'est divisée en clans spécialisés qui sont dirigés par des clans de Prêtres.
Ce qui a l'air d'intéresser Kingsbury d'après cette interview (qui semble notamment être connu pour un militantisme libertarien assez didactique) est surtout la description ethnologique de structures polyamoureuses sans jalousie qui donnent leur titre au livre. Comme dit Imaginos, cela évoque à la fois Le Guin et Herbert, ou peut-être aussi Vance.
De même que le jeu de rôle Space Quest fut (peut-être) inspiré par l'obscur Jeffrey Carver ou des comics de Howard Chaykin, je me demande cette planète Geta n'a pas partiellement inspiré la planète Jorune du jeu de rôle homonyme par Andrew Leker.
Certes, Jorune vient surtout (comme on l'a déjà raconté) d'un autre jeu de rôle post-apocalyptique, Metamorphosis Alpha / Gamma World. Il en a gardé les espèces zoomorphes et les différences entre Humains et Mutants (les Boccords et les Muadras) ou bien l'idée selon laquelle les Humains "Purs" sont les seuls à pouvoir utiliser la technologie interdite aux Aliens et aux Mutants. Leker avait commencé sa campagne sur une Terre post-apocalyptique vers 1979 avant de déplacer finalement cela sur une autre planète, Jorune. Il faudrait donc voir si les détails communs de Jorune (première édition 1984) et Geta ne sont apparus qu'après 1982 ou si Leker les a trouvés indépendamment.
Ressemblances entre Geta et Jorune
1 Les Humains ont oublié leurs origines (mais c'est le cliché standard de la planetary romance coloniale, ce n'est pas assez spécifique)
2 Le point commun principal est que les Humains ont un énorme problème de gestion de l'alimentation car les végétaux locaux sont toxiques, ce qui conduit à la même solution, faute de terraformation, l'utilisation de biotechnologies (sur Jorune on apprend qu'en dehors de l'amer durlig, on peut avoir accès à des créatures biotech pour donner du lait).
Mais il n'y a pas d'équivalent au rituel de cannibalisme sur Jorune (certes, les Cleash dévorent leurs enfants ou les transforment en grenades mais cela n'a rien à voir).
3 La technologie a extrêmement régressé (même si Geta, plus steampunk, est bien plus avancée que Jorune, qui est quasiment médiévale en dehors de la technologie avancée retrouvée par le gouvernement).
4 Il n'y a pas d'animaux terriens et donc pas de montures comme des chevaux. Mais Jorune a du moins des montures aliens pour le transport alors que Geta n'a aucune "macrofaune", seulement des "insectes".
5 La société de Geta est fondée sur des Clans liés à une fonction ou compétence. La société de Jorune est fondée sur des "Klades" liés à une fonction ou compétence.
Mais une grosse différence est que la religion ne semble pas avoir beaucoup d'importance sur Jorune (il y a certes eu quelques descriptions de mouvements religieux) alors que les clans de "Prêtres" sont dominants sur Geta.
6 En exagérant un peu, on pourrait dire que la religion de Geta est fondée sur sa seconde "lune" artificielle (le Vaisseau mère - la vraie lune a l'originalité de ne pas pouvoir être vue sur toute la surface) alors que toute la Magie de l'Isho sur Jorune est fondée sur 7 Lunes.
Mais dans le premier cas, ce n'est qu'une interprétation superstitieuse alors que dans le second, les 7 Lunes ont réellement un effet.
Autres oppositions en plus de celles déjà notées
1 Geta est de la hard science, Jorune est encore nettement de la fantasy centrée sur un système magique original. On voit cette différence dans les aéronefs : ceux de Geta sont des véhicules technologiques alors que ceux de Jorune dépendent des cristaux anti-gravité.
2 Geta n'a que des Humains en espèce intelligente, c'est une colonie de peuplement sans autochtones. Jorune a des douzaines d'espèces différentes, dont des Mutants, des animaux Provolués et des Non-Humains (dont surtout une espèce indigène essentielle dans l'atmosphère de ce monde).
3 Geta est aride (même si Kingsbury a insisté sur le fait qu'il ne voulait pas d'une planète avec un seul milieu). Jorune ne l'est pas particulièrement.
4 La société humaine de Jorune dans le royaume de Burdoth (contrairement à celle de Tsolyanu) n'a pas du tout repris le thème de la polygamie généralisée (même si l'éducation collective des enfants dans certains Klades doit faire penser à des formes de collectivisation de la famille).
Voir aussi la comparaison entre Jorune et Shaan. Et rappelons dans le sens inverse que Tékumel a directement inspiré les romans de Feist.
Bomb Cyclone
-
So, I'm writing this from a friend's house, about 15 minutes south of
Grubb Street. Because Grubb Street is currently without Internet.
You may have he...
Il y a 4 heures
1 commentaire:
Merci d'avoir pris le temps pour mettre par écrit toutes ces réflexions !
(mais quand tu as réagi, je pensais vraiment que tu l'avais lu)
Enregistrer un commentaire