vendredi 19 décembre 2014

Doom Patrol (7) : My Greatest Adventure #85


prologue#80#81#82, #83, #84.



My Greatest Adventure #85 ("février" 1964, 6e épisode)
(les publicités mentionnent des titres qui sortiront en décembre 1963, ce qui doit être plus proche de la date réelle. Cela me fait penser qu'à ma connaissance, en dehors du célèbre Superman #170 de juin 1964, les comic books de cette époque n'ont pas osé mentionner l'assassinat de Kennedy)
"The Furies from 4,000 Miles Below" (17 pages)
L'Index chez Lou Mougin
Le titre fait référence au Centre de la Terre, à 6 400 km de la surface (soit le rayon terrestre).

Synopsis
Un avion transportant un sérum s'est crashé sur la côte sud des USA. La Patrouille intervient en pleine mer pour récupérer de manière urgente ce sérum pour sauver la vie d'un enfant (mais tout ce début sous l'eau ressemble un peu à leur mission au début du #81Elasti-Girl se battait à coup d'objet phallique contre une pieuvre géante en une sorte de 蛸と海女 inversé).

A leur retour, le Chef s'étonne que Rita Farr ait refusé une offre de reprendre le cinéma (par coïncidence, le courrier de Roy Thomas publié dans le numéro précédent réclamait justement cela). Elle explique qu'elle veut maintenant se consacrer à la Patrouille qu'elle considère comme sa famille. Le Chef rétorque qu'au contraire la Patrouille a pour but de permettre aux Grands Accidentés de reprendre une vie normale ou de faire accepter leur différence et qu'elle doit donc viser à se réintégrer (ce qui est quand même nettement plus facile pour elle que pour Larry devenu une Momie radioactive et Cliff devenu un robot frankensteinien).

Elle accepte donc de repartir vers Hollywood pour tourner dans un film de science-fiction produit par M. Lorman. Mais elle précise qu'elle veut y jouer en tant qu'actrice et sans se servir de son pouvoir. Les producteurs lui font croire qu'elle y incarnera une humaine normale et que ce sera justement son mari qui se miniaturisera grâce à des décors artificiels (comme dans The Incredible Shrinking Man de 1957 - Attack of the 50 Foot Woman avait suivi dès 1958). Mais l'acteur semble se blesser pendant le tournage et les producteurs font croire à Rita que c'est de sa propre initiative qu'elle propose de le remplacer et de se passer de trucages. Elle mène une enquête et découvre que tout était arrangé pour qu'elle joue dans un film nommé The Dimishing Woman, et que le Chef était au courant.

Pendant ce temps, le Chef montre à la Patrouille le sous-sol de leur base où il a construit un engin foreur. Les Américains et "Une Autre Puissance Nucléaire" ont fait des essais sous la Terre qui ont réveillé une créature vivante vivant dans le Noyau et Le Chef a fait partir Rita parce qu'il craignait qu'elle ne se mette en danger. Le Chef craint en effet que deux de ces créatures sorties du centre de la Terre ne se rencontrent et n'explosent à la surface en déclenchant une réaction en chaîne.

C'est la première fois que le Chef part avec eux en mission. La température où descend l'engin foreur dépasse les 300° (Larry ne sort qu'avec une tenue spéciale mais on sait d'après le #82 que l'enveloppe de Robotman ne fond qu'à 1300° - le Noyau, lui, dépasserait 5000°, soit presque la même température que la surface du soleil). Mais au moment où Negative Man, Robotman et the Chief sont en difficulté, Elasti-Girl redescend par le même trou dans un autre engin du Chef (un bathyscaphe modifié) et leur sauve la mise (de manière totalement irréaliste comme elle n'a, elle, aucune protection thermique).

Lorsque les deux créatures sont enfin vaincues à la surface, Rita promet en riant au Chef de se venger s'il recommence ainsi à manipuler sa carrière pour la protéger. Mais le paternalisme du Chef semble ici particulièrement raté puisque c'est elle qui les a sauvés. On peut reprocher bien des choses à Arnold Drake dans tous ces scénarios mais Rita me semble parfois plus féministe que d'autres jeunes filles dans des équipes.

Précédents chtoniens & catabase

Si on cherchait mieux dans les anciens My Greatest Adventure, on trouverait bien d'autres explorations sous la terre avec des créatures du même genre (#11 d'octobre 1956, dont la couverture est presque reproduite dans l'histoire, #29, #36 par exemple).


Le dessinateur de Doom Patrol, Bruno Premiani, avait collaboré à la création en septembre 1960 de Cave Carson, une histoire sur des spéléologues étudiant des mondes sous la terre (dans Showcase #31-33, 40, 41, 48 avec des "Hommes-Taupes", 49, 52). A la fin des années 1950, les comic books n'avaient pas encore stabilisé leur mélange de superhéros urbains et de science-fiction et DC utilisait souvent des explorateurs : les Challengers of the Unknown (créés en février 1957, juste après The Flash) ou The Sea Devils (créés en août 1960). Les Challengers of the Unknown venaient d'ailleurs d'affronter l'Homme-Volcan dans leur n°27, août 1962 et n°32, juin 1963, écrit par le même scénariste Arnold Drake).

Chez Marvel Comics, il y avait eu aussi de nombreux monstres de ce genre comme une chute dans un Monde perdu avec d'inévitables dinosaures dans Tales to Astonish #2 (1959) ou l'Être en Fusion (Tales of Suspense #7, janvier 1960),  les Quatre Fantastiques ont commencé dès leur première histoire à lutter contre l'Homme-Taupe en 1961 et Thor rencontre Molto et les Hommes-Lave dans Journey into Mystery #97, octobre 1963.

Hors des comics, une adaptation du Voyage au centre de la Terre venait de sortir en 1959 (avec James Mason en Professeur écossais Oliver Lindenbrook à la place du Professeur allemand Otto Lindenbrock chez Jules Verne - c'était déjà James Mason qui jouait le Capitaine Nemo dans le film de 1954 et ses origines indiennes avaient déjà été oubliées).

Il y a aussi sans doute une influence d'un thème issu des films de monstres daikaiju comme Godzilla (1954) où l'angoisse face à la puissance nucléaire contrôlée par l'homme est représentée ici par un être sorti du Noyau terrestre pour se venger de nos essais atomiques.

Et en même temps que ce 6e épisode de la Doom Patrol :

Comme cette relecture de la Doom Patrol vient aussi d'un intérêt pour comprendre ce qui a fait l'Âge d'Argent, je ne mentionne pas les titres de guerre, d'humour, d'horreur ou de romance, seulement la sf et les superhéros, pour donner une idée du contexte général des comics DC.

Action Comics #309 John Fitzgerald Kennedy aide Superman à préserver son identité secrète en se déguisant en Clark Kent.
Adventure Comics #317 Dream Girl arrive dans la Légion des Superhéros.
Aquaman #13 Des criminels du futur changent la nouvelle amie d'Aquaman, Mera (qui vient d'apparaître) en une sorcière.
Atom #10 Atom enquête en Autriche sur l'assassinat d'un savant en pleine Guerre froide.
Batman #161 Batman dit au lutin Bat-Mite d'aller se trouver un autre héros.
Brave & the Bold #51 Aquaman & Hawkman luttent contre un Atlante transformé en amphibien ailé.
Detective Comics #324 Batman se fait capturer dans un robot.
Flash #142 (37e épisode du Flash de l'Âge d'Argent) Flash rencontre pour la première fois le Trickster
Green Lantern #26 Star Sapphire découvre l'identité de Green Lantern et réciproquement.
Justice League of America #25 La JLA enquête sur des voyageurs extraterrestres qui semblent détruire involontairement les mondes qu'ils visitent.
Metal Men #5 Les Metal Men luttent contre la Reine des Robots.
Mystery in Space #89 : Hawkman et Adam Strange
Rip Hunter... Time Master #18 : un dinosaure envahit l'an 2550.
Sea Devils #15 Un sous-marin se fait capturer dans la toile d'une araignée de mer...
Showcase #48 Cave Carson visite les Hommes-Taupes.
Strange Adventures #161 : Trois histoires, dont une anomalie qui gèle l'eau soudain à une température différente.
Superboy #110
Superman's Girlfriend Lois Lane #47 Une Terre-47 où Lois a des pouvoirs (Krypton Girl) mais Clark est un humain normal.
Superman's Pal Jimmy Olsen #74 Jimmy Olsen semble acquérir les pouvoirs de M. Mxyzptlk
Superman #167 Brainiac et Luthor s'allie pour miniaturiser Superman.
Wonder Woman #144 Wonder Girl est courtisée par Mer-Man et Bird-Boy.

Mouais, à part le Green Lantern #26, qui va durablement conditionner toute la vie sentimentale ratée de ce pauvre Hal Jordan, ou bien cette histoire d'Atom, rien de très remarquable.

Marvel a nettement moins de titres que DC en ce mois de février 1964 (en comptant aussi janvier-février). Je ne compte guère que 8 titres contre la vingtaine de titres de DC. Quand Arnold Drake imite les Fantastic Four depuis 6 épisodes, il ne doit pas vraiment imiter d'autres choses :

Amazing Spider-Man #9 Il affronte Electro
Avengers #3 Les Vengeurs contre Hulk et Submariner
Fantastic Four #23 Ils sont capturés par Doctor Doom
Journey into Mystery #101 Thor lutte contre Zarrko du Futur.
Strange Tales #117 La Torche contre l'Anguille.
Tales of Suspense #50 Iron Man rencontre pour la première fois le Mandarin
Tales to Astonish #52 Giant-Man et Wasp contre le Chevalier noir.
Uncanny X-Men #3 Les X-Men contre le Blob

Daredevil n'arrivera que deux mois après.

5 commentaires:

Nicolas Dessaux a dit…

Challengers of the unknown... Je devrais écrire un hack de sotu sous ce titre ;)

Phersv a dit…

La version contemporaine ? Les Challengers otU étaient plutôt Pulps (inspirés de Doc Savage) mais ont évolué vers de la sf de plus en plus superhéroïque (en adoptant un animal avec superpouvoirs par exemples).

Anonyme a dit…

Le peu de titres Marvel est du a un contrat avec "Independent News Distributors" qui appartenait a DC et en limitait le nombre (drastiquement par rapport aux dizaines de mensuels Atlas).
Ce qui expliquera aussi que les titres generiques (Tales of Suspense ,Tales to Astonish ,etc) ne tarderont pas a promovoir 2 heros par magazine.

Je ne suis absolument pas lecteur de DC mais votre regard et les à-côtés que vous mentionnez m'interesse.

Bonne fetes.

Phersv a dit…

Merci. Je ne connaissais pas ce fait.

DC sous-estime donc au début Marvel mais veille à mettre des bâtons dans les roues de toute éventuelle concurrence.

Il y a une interview d'Arnold Drake dans Alter Ego (dont je reparlerai sans doute) où il raconte qu'il avait écrit un mémo (vers 1966 ?) mettant en garde DC face au danger croissant de Marvel. Il conseillait de créer plusieurs sous-studios dans DC dont une sorte de version de Vertigo pour adultes pour pouvoir reprendre ce nouveau marché des lecteurs étudiants (Vertigo fut créé en 1993, soit près de 30 ans après).

Les dirigeants de DC lui auraient ri au nez en disant "Mais nous vendons 4 fois plus qu'eux, vous exagérez complètement leur importance !".

Mais dès cette époque, DC craint d'être un peu dans la "poubelle de l'histoire" face à la Révolution Marvel (même si aujourd'hui le récit biaisée à la Stan Lee a eu tendance à exagérer la radicalité de cette Révolution).

Anonyme a dit…

Extremement interessant,j'ignorais.

Pour revenir sur le contrat j'aurais du preciser qu'il datait de 1957 (ce qui change la donne)

Source : http://zak-site.com/Great-American-Novel/comic_sales.html

"At the start of 1957, Marvel (then called Atlas) was the biggest comics publisher in America and published 75 comics a month, with 5 stories per comic. But as a result of the campaign against comic violence by Fredric Wertham, comics got very bad press. Many retailers and distributors stopped taking comics. Many comics stopped publication. Atlas (Marvel) lost its distributor and one month produced no comics at all. To survive, Marvel had to take a very restrictive contract with National Periodicals, DC's parent company. Marvel was only allowed to sell eight titles a month. Writers and artists were fired. For a few months they just used up the work that should have gone into the 75 previous titles."



Ceci a du,on imagine,faire les affaires de DC aprés coup et explique peut-etre aussi en partie la motivation de S.Lee a essayer une nouvelle formule ("last chance") avec les FF.

Le contrat a pris fin en 1968 (debut de la "Marvel explosion") :
http://goodcomics.comicbookresources.com/2005/08/04/comic-book-urban-legends-revealed-10/