mercredi 28 août 2019

Brian Bendis sur Superman


Le scénariste Brian Bendis est maintenant chez DC depuis plus d'un an et on peut commencer un bilan. Il a commencé dans Action Comics #1000 (juin 2018) et a écrit au moins une trentaine de numéros : la minisérie introductive Man of Steel + deux mensuels, Action Comics + Superman Comics, sans compter les nombreux autres titres comme la nouvelle version de Young Justice (qui partage des intrigues avec H For Heroes) ou de nouvelles séries comme Naomi.

Quand Bendis est arrivé, DC a fait une promotion qui rappelait l'époque où Jack Kirby était revenu chez eux ("The King is coming", 1971-1975). Pendant 18 ans, Bendis avait quasiment fini par représenter Marvel et son arrivée apparaissait comme une des tentatives périodiques de DC de capter un peu de l'énergie de son rival. Au début du XXIe siècle, DC était incarné par Geoff Johns, mélange de retour nostalgique à l'Âge d'Argent avec des thèmes plus sombres. Bendis, lui, avait certes procédé du même éternel retour aux sources mais sa force était le ton de Film Noir ou de polar, avec un arrière-fond politique un peu cynique qui convenait si bien aux héros urbains de Marvel.

On se serait donc attendu à ce que Bendis choisisse la facilité en réclamant Batman.

Superman est un personnage plus difficile, qui semble plus décalé par rapport à notre époque que Batman. L'évolution de la fiction va vers le héros marginal, la fascination pour la psychose comme seule caractérisation. Il suffit de voir l'obsession pour les tueurs en série dans la fiction populaire. Superman paraît désespérément naïf et passéiste.

Bendis a hérité d'un nouveau statu quo depuis quelques années :

(1) Kent est marié avec Lois Lane et ils ont eu un enfant Jonathan ("Jon") Kent, qui arrive maintenant à l'adolescence. (Dans cette version, Clark n'a jamais été Superboy mais il y a certes eu un autre Superboy, clone imparfait).

(2) Jor-El a en fait survécu à Krypton et est devenu un personnage ambigu et manipulateur. Bendis à son arrivée dans Action Comics #1000 a semblé vouloir prendre ses distances avec ces éléments en envoyant Jonathan, Lois et Jor-El dans un voyage spatial mais en réalité ces différents personnages sont vite revenus et jouent un rôle central (Lois dans Action Comics, Jor & Jon dans la série Superman depuis le numéro 6).

Bendis a choisi de donner deux tons très différents, voire opposés, aux deux séries qu'il écrit, qu'on pourrait qualifier de (1) la série Lois Lane et (2) la série Jor-El / Jon Kent. Les deux séries ont des clins d'oeil l'une à l'autre mais sont parfois relativement indépendantes même dans le contenu.

(1) Lois

Action Comics (qui, de l'avis général, est le plus réussi et le plus conforme aux forces de Bendis) est ancré sur Terre, à Métropolis et sur le métier de Clark Kent comme journaliste et enquêteur. Les intrigues principales y sont donc la vie quotidienne de Kent, ses rapports à sa femme Lois Lane (dont des papiers à scandale disent qu'elle couche en fait avec Superman). L'intrigue policière suit un réseau criminel de Metropolis qui s'est créé sur la volonté non pas de confronter Superman mais au contraire de rester invisible à ses yeux. Ce réseau va peu à peu pénétrer plus profondément le Daily Planet de sa direction aux collègues de Clark (ce qui justifie aussi de relancer des miniséries autour de Lois Lane et Jimmy Olsen, ce qu'on ne faisait plus depuis environ 45 ans). On reconnaît une intrigue qu'avait apportée Jack Kirby à son Jimmy Olsen où le propriétaire du Daily Planet, Morgan Edge, était devenu un criminel lié à Darkseid.

Enfin, cela conduit à un nouvel "événement" annuel qui prend un ton d'espionnage, Leviathan, où une organisation mystérieuse élimine toutes les autres organisations secrètes de l'Univers DC (et je ne me rendais pas compte à quel point elles s'étaient multipliées entre Spyral, Task Force X, Checkmate, le D.E.O., A.R.G.U.S., S.H.A.D.E. ...). Les réseaux labyrinthiques de Leviathan ont été créés ces dernières années dans des épisodes de Batman, où on ne sait même plus qui manipule qui (le Dr Dedelus / Agent Zero dirigeait à la fois Leviathan et Spyral, et Talia al Ghul croyait dominer Leviathan).

(2) La famille des El

La seconde série (qui est repartie au numéro 1) Superman au contraire est plutôt du Space Opera, sur un terrain où on imaginerait donc plus quelqu'un comme Grant Morrison. On y suit notamment un nouveau vilain, Zaar, dont on découvre qu'il est celui qui a détruit Krypton (alors que traditionnellement, l'explosion de Krypton était une catastrophe naturelle que les scientifiques de Krypton n'avaient pas su empêcher).

Imaginer un responsable est assez conforme à une sorte de règle narrative des comics :  tout ce qui paraît accidentel ou fortuit doit trouver une explication avec une intention et un agent. Superman est en deuil de Krypton, donc il faut que quelqu'un soit derrière ce deuil.

Zaar est hélas un personnage assez ennuyeux et unidimensionnel qui rappelle trop d'autres brutes comme Doomsday et qui répète depuis un an qu'il va tuer tous les Kryptoniens.

La révélation dans les derniers épisodes de Supergirl (par Andreyko, un ami de Bendis) est en fait qu'il y avait derrière Zaar un complot un peu plus vaste. Une organisation intergalactique secrète nommée le "Cercle" avait pour but avoué de pacifier la galaxie mais certains de ses membres décidèrent le génocide de l'espèce kryptonienne en manipulant la soif de vengeance de Zaar (et, j'imagine, par crainte des dangers que pouvaient représenter la puissance kryptonienne).

On aura reconnu derrière le complot du Cercle des thèmes que Bendis avait déjà utilisé avec son complot des Illuminati (Richards et les autres) qui tentaient de contrôler la Terre). La Légion du futur avait lutté contre une secte nihiliste nommée aussi le Dark Circle et cela pourrait avoir un lien.

Un défaut de tous ces retcons est que maintenant Jor-El avait des contacts avec toutes les Puissances intergalactiques bien avant la destruction de Krypton. Cela rend le fait qu'il n'ait pas pu construire plus d'un vaisseau encore moins plausible. Il est assez important pour le mythe kryptonien que la planète soit isolationniste et pré-spatiale, sinon l'Arche-Berceau de Superman paraît assez ridicule.

Zaar est finalement arrêté (non sans l'aide du Général Zod et sa famille) dans Superman #14 paru aujourd'hui mais surtout, Jon Kent et la famille El réussissent à convaincre les puissances de l'Univers DC de fonder une Organisation des Planètes Unies qui comptera par exemple Thanagar (planète de Hawkman), Rann (planète d'Adam Strange), les Dominateurs, les Lanternes de diverses couleurs ou les factions de Vega (Araignées, Psions, Citadelle, voir les retcons récents sur Green Lantern ou dans la minisérie Omega Men).

Et c'est à ce moment que la Légion des Superhéros apparaît du XXXIIe siècle pour recruter non pas Superman mais son fils Jon Kent comme nouveau membre et en tant que fondateur de l'Union des Planètes Fédérées. Cela faisait longtemps que les histoires reliaient la Légion et l'organisation interspécifique mais cette fois Superboy n'est pas qu'un symbole héroïque mais un symbole politique.



Je n'ai pas aimé cette première année parce que Zaar était un vilain raté (même si ses motivations réelles ne sont toujours pas claires pour l'instant). Mais je suis très curieux de voir ce que Bendis prépare pour la Légion (qui reste un de mes concepts favoris dans le Multivers DC avec le Corps des Lanternes Vertes). L'idée de faire du fils de Lois et Clark le membre à la place de Superboy suffit à créer un certain renouvellement thématique. Au lieu d'être un adolescent fuyant sa vie de Smallville, il est l'Héritier reconnu comme le fondateur de l'équipe.

(3) Naomi

Une dernière note sur la nouvelle mini-série Naomi (six épisodes pour l'instant dans la saison 1) qui est en fait aussi en parallèle avec Superman.

Tous les enfants rêvent peut-être d'avoir été adoptés et de découvrir que leurs vrais parents génétiques ont des secrets bien plus intéressants que leurs tuteurs légaux (cf. M. Robert, Roman des Origines et Origines du Roman, le thème du Bâtard extraverti et de l'Enfant Trouvé introverti). Le philosophe Bernard Stiegler dit souvent que la société américaine s'est fondée sur ce concept d'Adoption : tous les Américains sont sur leur Terre d'Adoption et non pas sur l'autochtonie. Brian Bendis a lui-même adopté une enfant et le thème de la série est l'adoption dans un univers où Superman existe vraiment et où tous les enfants doivent rêver d'être des Kryptoniens. On voit que Bendis y a mis beaucoup d'émotion et il a réussi à faire une série sur une adolescente assez différente des autres, mais le rythme est un peu lent et les révélations assez prévisibles.

lundi 26 août 2019

[JDR] Création des aventuriers dans le nouveau RuneQuest


Le nouveau RuneQuest est très bien mais je remarque deux choses qu'on pourrait compléter dans la création.

1 La liste des noms propres

La liste des noms est assez tard dans la section sur chaque culture (les "Homelands", Sartar par exemple est p. 103 dans l'édition originale) et assez brève (14 noms au féminin, 11 au masculin, dont certains que je déconseillerais comme "Argrath" pour éviter un peu trop d'homonymie).

Même si ce n'est peut-être plus canonique dans la version actuelle de Glorantha, on peut plutôt s'aider pour Sartar de la liste qui était dans le supplément pour HeroQuestThunder Rebels: Player's Book for Orlanthi Barbarians (2000, p. 156-157). Il y a aussi une liste dans Sartar: Kingdom of Heroes (2009, p. 26) mais je ne crois pas qu'il y en ait dans le nouveau GM Screen Pack (2018) qui développe les données sur la Tribu Colymar.

La première liste comprend des racines dont on peut modifier la désinence de plusieurs façons (-or, -os, -us, -tyr).


Angor-, Ask-, Barngrad-, Barntad-,Bastak-, Benev-, Bundr-, Butar-, Brygg-, Byrgar-, Dastandr-,Enestak-, Engarn-, Enjoss-, Estav-, Faltik-, Fedark-, Fistiv-, Haldel-,Hurb-, Ortoss-, Iristh-, Iskall-, Jarstak-, Kagrad-, Karendr-, Kar-,Koll-, Korstard-, Londr-, Malt-, Manisk-, Miltr-, Monr-, Mor-, Odd-,Orlgand-, Ran-, Renedal-, Rostak-, Rostal-, Rostand-, Tarkal-,Unstan-, Valenst-, Yerest-.

Men’s Names (add -a or -e for women)
Alebard, Amald, Anton, Aransand,Aren, Argrand, Arkell, Arlest, Arnal, Arnbord, Asborn, Ashart,Askul, Aslandar, Avareen, Baranthos, Baranwolf, Belkar, Bender,Bofrost, Bolik, Bolthor, Boltar, Borngold, Branbrig, Brandgor,Branduan, Bren, Brol, Broost, Broyan, Bruth, Dangmag, Dangmar, Dangmet, Darndrev, Darrold, Derek, Desrad, Domas, Dorasor, Drelfon, Drenyan, Dunorl, Elgan, Ellisif, Enastar, Endal, Enent, Enfrew, Entarios, Eonislar, Eonistaran, Eparikondos, Eric, Errol,Erryn, Fantarl, Farad, Farangar, Farnan, Feren, Filbar, Frekor,Garaystar, Gardrostan, Garnath, Garrath, Garstal, Gastar, Gavial, Glendar, Gordangar, Govoran, Gralar, Griseld, Grivton, Gustand,Gyffun, Hahlgrim, Hallarax, Haloric, Harbard, Harev, Hargart,Hargran, Harkalor, Harmast, Harnafel, Harnkorl, Harran,Harsaltar, Harvald, Harvar, Hastur, Heleric, Helgan, Hemrid, Hendrick, Hengall, Heorl, Hervald, Hindal, Hiord, Hofstaring, Ilgalad, Illig, Ingan, Ingard, Intagarn, Ivarth, Jafoksor, Janar,Janstan, Jarang, Jarastan, Jarenst, Jarnandar, Jarolor, Jaronak, Jarosar, Jarstan, Jenest, Jistin, Jonatan, Jonrik, Joram, Jorator, Jordan, Jostharl, Jotaran, Kangharl, Kenstrel, Kentvent, Kestald,Ketil, Kirnan, Kistrald, Koreng, Korlaman, Korlmar, Kornos, Korol,Kost, Krogar, Kulbrast, Kurash, Leik, Londar, Loricon, Magan,Malan, Markalor, Mikhil, Minar, Minaryth, Miran, Morgan,Mosdorl, Narden, Offir, Olav, Olend, Orand, Ordag, Orendal, Orfal,Orkarl, Orngerin, Orstalor, Orstanor, Ostlan, Parzel, Penterest,Perandal, Petrad, Randalyar, Randan, Randel, Rangard, Rangor, Ranulf, Rastoron, Renath, Robasart, Roganvarth, Rurik, Salinarg, Sarask, Saronil, Sarotar, Sasar, Simbal, Skalfar, Soran, Swen, Tamar, Tarkal, Taros, Thandren, Tonalang, Urenstand, Valstatch, Vamastal, Vandarl, Varmand, Varsens, Varthanis, Venharl, Veoslin, Verlain,Vinin, Voskandor, Voskandoras, Willandring, Willem, Yaransor, Yend, Yorsar.

Other Men’s Names: 

Angtyr, Biturian, Brandig, Dushi, Elmalandti, Elnor, 
Enderos, Enerin, Enothan, Entarios, Flesso, Friedar, Frithorf, Garnen,Gringle, Heortarl, Kalf, Kallai, Kamil, Korlmhy, Koschei, Kuschile, Leikan, Levru, Lhankpent, Lismelder, Orlaf, Orlaront, Orldag, Orlev, Orlgard, Orlkarlman, Orlkarnth, Orlkarth, Orlkensor, Orlmakt, Rastorlanth, Rollo, Sarostip, Sartark, Temertain, Terasarin, Torvath,Torkan, Tormakt, Torvald, Umathkar, Vastyr, Wilms.

Other Women’s Names:
Aileena, Ailrene, Camille, Dorasa, Dushi, Elnor,
Enderos, Enerin, Enothea, Entarios, Erissa, Ernaldesta, Ernaldinna,
Ernaldness, Esrania, Flesso, Frieda, Frithorf, Garneneva, Insterid,
Ivarne, Janerra, Jareen, Jareena, Jeraka, Jerernalda, Jeresrola,
Kareena, Leikan, Levru, Lismelder, Lyzal, Marlesta, Morganeth,
Myara, Natalina, Neela, Nevana, Niquena, Onelisin, Rolla, Sora,
Uraldinna, Yanioth, Yrsa.


2 La date 

La création de personnage à la Pendragon impose une date de 1625 comme nouveau départ de la campagne et on crée la génération des grands-parents (nés vers 1560) puis parents (nés vers 1580), en supposant que le personnage naît vers 1600.

Si on veut jouer un peu avant et avoir quand même des renseignements sur les aïeux (par exemple pour avoir 18 ans dès 1600), voilà quelques dates en plus, depuis les années 1540.

1520 Apothéose de Sartar. Son fils Saronil Bonnepierre devient le deuxième Prince de Sartar.

1540's 
Naissance de Terasarin, fils de Tarkalor et futur 6e Prince de Sartar. Assassinat de Sarotar, fils de Saronil en Esrolie. Son cousin Dorasar part s'exiler en Prax et finira par fonder Nouvelle Pavis (1550).
Saronil bat la tribu des Dinacoli à la Bataille des Plaines de Donalf. avec le soutien des tribus des Cinsina et des Culbrea, qui se réconcilient.

1550's
Le Prince Saronil est tué par des Nains. Son fils Jarolar Grandpas devient le 3e Prince de Sartar. Korlmar puis Orlgandi sont Rois de la tribu Colymar.
Jarolar soutient la cause des Tarshites Exilés de Palashee Longue-Hache contre la faction pro-Lunaire.
Conflit entre Tarkalor Tueur de Trolls et les tribus Kitori.

1560's

1561
Salinarg, neveu de Dorasar, est né. Il sera le futur 7e et dernier Prince de Sartar.

1565
Bataille du Gué des Nains : Les Sartarites soutiennent la Confédération Alda-Churi contre les Lunaires. La bataille est une victoire, contrairement à la Bataille du Pic aux Ours 7 ans plus tard mais le Prince Jarolar meurt (ainsi que Orlgandi, roi des Colymar). Umathkar devient la Reine des Colymar et Jarosar Longues-Flèches, fils de Jarolar, devient le 4e Prince de Sartar.

Lancez 1d20
1-5 Votre ancêtre n'y était pas ou ne s'y est pas illustré.
6-10 Votre ancêtre y a survécu. Haine des Lunaires.
11-18 Votre ancêtre y est mort glorieusement. Passion Honneur, Loyauté à Sartar et +1d3% Réputation.
19-20 Votre ancêtre y fut aidé par des Telmori. Amitié Telmori. 
Ne pas oublier la table des morts aléatoires des aïeux p. 35.

1569 Jarosar est assassiné. Son oncle, Tarkalor Tueur de Trolls, fils de Saronil, devient le 5e Prince de Sartar.

1570's

1573 Penterest, frère d'Umathkar, devient Roi des Colymar. Il sera tué par le Prince Tarkalor lors d'un combat en 1577. Kenstrel devient le 20e Roi des Colymar.
1579 Dorasar, le Duc de la Nouvelle Pavis meurt.

mercredi 14 août 2019

[JDR] Premières impressions d'Oreste


Oreste est un nouveau jeu de rôle de science fiction française créé par Sébastien Moricard (qui travaille notamment sur les adaptations de jeu vidéo chez Bragelonne). Le financement participatif a permis des illustrations somptueuses qui évoquent des art books ou des Bibles de jeux informatiques.

Je n'ai pas le temps de faire une vraie recension de cette réalisation impressionnante (notamment du volume 2, les règles, que je n'ai pas du tout lues) et je vais donc me contenter d'un survol très incomplet et subjectif (et en essayant de ne pas gâcher trop les Secrets de l'arrière-fond, ce qui est trop souvent le défaut de mes notes).

Mais soyons franc, je suis lu par 2d6 personnes, donc ce n'est peut-être pas trop grave pour les joueurs potentiels. Mais caveat lector si vous voulez garder le suspense.

Le premier volume, Les Mondes alignés, décrit l'univers, y compris les Secrets uniquement pour le MJ. Pour le dire très vite, et bien que ce ne soit pas du tout une inspiration explicite (S. Moricard cite plutôt Frank Herbert et Pierre Bordage ou des animé que je ne connais pas), cela me fait beaucoup penser à la série Babylon 5.

Non, non, pas seulement le fait évident que le jeu se centre sur la station spatiale éponyme (comme beaucoup d'autres jeux de SF récents d'ailleurs, voir l'excellent jeu suédois Coriolis) mais même les rapports diplomatiques entre les différentes espèces et même certains des secrets (qui m'ont aussi rappelé les romans d'Alastair Reynolds sur le Paradoxe de Fermi, voire, pour les réflexions sur les dimorphismes sexuels, certaines des obsessions des romans de Larry Niven).

On est dans un futur proche, XXIIe siècle (et on est donc à la frontière entre le cyberpunk poisseux et le transhumaniste). L'Humanité, qui a découvert un mode de voyage FTL, vient de faire le premier contact avec plusieurs espèces et d'affronter une espèce mystérieuse contre lesquels les autres sont prêtes à se liguer malgré tous leurs différends. Cette espèce a soudain cessé d'agir mais ce n'est sans doute pas trahir un secret que de dire qu'ils sont toujours là. Et tout le monde se réunit sur une Station qui est la Ville-Monde du jeu, la station spatiale ORESTE.

Ces quatre espèces sont toutes assez humanoïdes, ce qui peut donner un côté un peu "star trekien". Après une première lecture, l'aide-mémoire peut-être réducteur me semble être le suivant :

(1) Les Solariens font penser à première vue à des "Petits Gris" de sf mais avec des exosquelettes osseux qui les changent au contraire en de robustes géants. Ils ne pondent qu'un seul oeuf dans leur vie. Ils ont une gérontocratie pacifiste et intellectuelle et sont les fondateurs de l'Alliance qui a conduit à la station-ville Oreste en ONU de l'Espaaace.

(2) Les Elfhayms sont... des Elfes de l'Espaaace (un peu comme dans Tigres Volants). Ecologistes, mystiques (même théocratiques), ils ont des pouvoirs psi de télépathie (qui provoque une sorte de conscience collective, y compris avec les pensées stockées des ancêtres) et de télékinésie (dont ils ont d'ailleurs besoin pour se reproduire).

(3) Les Déchus sont en fait une évolution des Elfhayms dans le sens opposé. Hypertechnologiques, ayant rompu avec l'esprit collectif des Elfes et leur culte de l'équilibre naturel après une Guerre civile, ils sont des cyborgs qui ne cessent de modifier leur forme.
NB : Ils s'appellent en fait les Fallens et le terme est censé être un autonyme sans aucune signification anglaise mais je trouve cela assez peu crédible. De même que la langue elfe semble trop clairement hébraïque (les "Déchus" sont donc sans doute des Nephilims) et qu'il est curieux d'imaginer qu'Oreste est le nom local de la station sans aucune référence terrienne au mythe grec et au Fils qui tue sa Mère. (Ni aux Erinyes qui apparaissent comme un des secrets du jeu sous leur nom d'Euménides).

(4) Les Khrones, à première vue, me font plus penser à un mélange de Klingons (bellicisme, apparence) et de Vulcains (stoïcisme). Ils peuvent communiquer par phéromones et ont une tendance à la violence qu'ils répriment. Ils se régénèrent, certains peuvent même se transformer (les Doppelgangers) et ils sont victimes d'une maladie génétique qu'ils n'ont jamais réussi à éradiquer et qui a une forte probabilité de les tuer dès qu'ils ont des rapports sexuels. Le livret réfléchit aux conséquences psychologiques et sociales de cela (notamment une séparation des sexes où le puritanisme est une condition de survie) mais un des aspects est sans doute qu'ils devraient se cloner plus encore que les Solariens et qu'ils devraient avoir un Etat assez social pour gérer une espèce où une majorité des individus sont des orphelins. En passant, si les Khrones causent (certes involontairement) la mort de leur parents, cela donnerait un autre sens symbolique au nom parricide d'Oreste pour la station...

Les alliances diplomatiques sont Solariens + Elfes vs Déchus + Khrones et l'Imperium humain est devenu la nouvelle force qui remet en cause cet équilibre. Quant aux Seths (l'espèce mystérieuse qui est vue comme une menace par tous les cinq empires), on ne les voit plus mais certaines factions militaires interspecifiques continuent à mener une guerre secrète pour les retrouver. Il y a des traces d'autres peuples mais on ne trouve que des ruines...

Si on pousse l'analogie avec Babylon 5, les Minbaris ressembleraient à la fois aux Solariens et aux Elfes. Les Narns seraient peut-être plus proches des Khrones mais leur religiosité ferait plus penser aux Elfes (et dans ce cas, ce seraient les Centauris qui joueraient un rôle plus proche des Déchus dans cette rivalité ?). Je ne dis pas qui seraient les Vorlons et les Ombres.

J'aime bien les illustrations et les cartes du jeu, c'est très bien écrit, un jeu admirablement professionnel, mais je ne suis pas convaincu que le jeu soit pour moi. Peut-être à cause de certaines de ces espèces ET. Peut-être est-ce juste le hasard du fait que Coriolis (qui a d'ailleurs tout autant de space fantasy avec ses Djinns virtuels de l'Espaaace) m'attire plus en ce moment pour du Space Opera ?

Les scénarios me semblent plus orientés vers le cyberpunk à la Shadowrun (des agents entre les différentes Corporations et les factions des différentes espèces), ou alors de manière assez militariste dans les factions de l'armée d'Oreste. Les secrets sont certes intéressants pour l'exploration de l'univers (et en un sens, j'ai déjà presque donné la clef dans la description des espèces) mais je crains de ne pas pouvoir faire tenir la révélation très longtemps dans une campagne.

Et une partie du technobabble (sur l'origine de la vie) ne paraît pas très plausible. Sans vouloir trop en dire, on peut quand même relever une inversion originale, mais, par scrupule, je vais la mettre en Rot13. Q'unovghqr, qnaf qr abzoerhk haviref qr fpvrapr svpgvba bh qr pbzvpf, ba qépbhier dhr y'Uhznavgé n égé znavchyér cne qr Tenaqf Napvraf. Yà, p'rfg yr pbagenver, har fvathynevgé qrf Uhznvaf rfg dh'vyf fbag ienvzrag fbegvf cne unfneq qr y'Ribyhgvba angheryyr fnaf nhphar vagreiragvba rkgengreerfger. 

Notons une bonne idée inspirée par les cartes de pouvoirs et de sorts dans d'autres jeux : le jeu s'accompagne de cartes d'équipements et de cartes de dons de chaque classe. L'auteur a dit avoir cherché un jeu à la fois très simple d'accès et pourtant profond, ce qui me paraît un but de design intéressant dans la SF.

3e partie de Gods War


Cette fois, ce fut avec l'exemplaire que j'ai reçu (en VF). Nous n'étions que trois, Mellon, ma compagne et moi et Mellon jouait Kyger Litor, elle jouait Orlanth et je jouais Yelm.

Orlanth a commis l'erreur de ne pas construire assez de temples dès le début et a donc été devancé en Points de victoire. Le livret de règles dit que l'Aiguille doit éclater dès le second tour et je me dis qu'on ne doit pas assez optimiser ces premiers tours car nous avons tendance à ne pas la voir éclater avant le troisième tour.

Yelm a pu étendre son empire sur tout le sud de Glorantha mais avec pas mal de défaites face aux Trolls et sans jamais convaincre quiconque de pouvoir le ressusciter. La "carotte" qu'il peut offrir (2 points de Pouvoir et une rune, si je me souviens bien) n'attire pas beaucoup d'autres joueurs (même si Orlanth, par exemple, a parmi ses objectifs de voir au moins un de ses adversaires terminer tous les siens).

NB : Une correction pour la VF : les Phénix coûtent 2 points de Pouvoir mais n'ont qu'une force de 1. Ils deviennent intéressants quand on a le Don Lance solaire mais pas tellement sinon.

Une nouvelle victoire pour les Ténèbres !



Par ailleurs, nous avons aussi pu tester Draftosaurus grâce à la Bibliothèque Sorbier, qui est aussi devenue une Ludothèque. Le thème (on gère un Parc à Dinosaures et on doit sélectionner les types de dinosaures parmi six types en différents "enclos") me semblait au départ trop lointain comme c'est un jeu de réflexion assez abstrait où il faut un peu comme au Yahtzee placer des dispositions aléatoires, en faisant des paris sur ce qu'on pourra compléter avant les autres. Mais c'est rapide (faisable en quinze minutes) et les petits dinosaures en bois sont amusants à manier et changent un peu des cartes. Je trouve que le dé ajoute un peu trop de hasard en plus par rapport aux combinaisons qu'on peut tenter de retenir.