mardi 31 janvier 2012

Maurras en rédacteur en chef du Point


Arrêt sur Images fait un grand jeu des Unes des hebdos français et le Marronnier sur le Grand Complot au Compas et en Tablier continue de bien marcher dans le Point.


On vit dans une société gravement malade s'ils n'ont rien de mieux pour attirer les lecteurs âgés.

Certes, on ne peut pas entièrement se plaindre : des hebdos italiens d'information générale mettraient souvent des jeunes filles dénudées plus répétitives à la place de ces clichés, alors que les nôtres, plus prudes, ne le font le plus souvent que pour leur "spécial sexe" du numéro d'été.

Voyage à Angoulême


C'était mon premier Festival de la BD à Angoulême ce dimanche 29. La ville est finalement assez charmante, malgré le froid. Et c'est très agréable de traverser des rues Goscinny ou de s'arrêter à la station de bus Franquin.

Le salon des indépendants a une quantité incroyable de petits éditeurs rangés autour de l'Association (qu'on ne peut plus vraiment considérer comme un "petit") et je n'aurais jamais imaginé qu'il y avait tant de groupes. Je n'ai pas vraiment cherché des autographes comme cela demande beaucoup d'attente. Mais Armide a pu discuter au Nouveau Monde avec Zelba au stand de Jarjille (l'éditeur de Saint-Etienne).

Un des pays invités était Taiwan et j'ai pu trouver du 武俠 (wǔxiá) chinois traduit en anglais, avec ces épais albums Abi Sword, écrit par "Ma Li" (pseudo de Rex How) et dessiné par Chen Uen. Toujours pareil : des sociétés secrètes qui se battent et des épées légendaires. Mais il y a parfois au milieu de cela des pages vraiment surprenantes.

Boulet était masqué en espérant éviter d'être trop suivi par ses hordes de fans. En vain.

Je n'ai hélas pas eu le temps de visiter le Musée de la BD, de l'autre côté de la rivière, avec la seconde expo Spiegelman (celle où il sélectionnait l'histoire de la BD et où il n'y avait que des Américains...) mais nous sommes allés à la place à l'Hôtel Saint-Simon pour l'exposition Fred Aristidès.


Rarement une expo de BD aura autant réussi à créer une impression d'immersion dans l'univers de l'auteur et dans les Lettres de Philémon. Je craignais qu'il n'y ait que des planches et la muséographie parvenait à suggérer tout l'humour et l'imaginaire de Fred, avec la superposition des jeux sur la troisième dimension. Cette page a quelques documents sur l'histoire de Fred.

Gratuits



Direct Matin (le Monde + Bolloré Médias) n'est pas exactement le Figaro. Il n'y a pas vraiment des attaques contre l'opposition, par exemple, plutôt des expressions qui vantent Notre Gouvernement Au Travail, et une absence d'impertinence qui surprend parfois dans sa révérence.

Mais dans le RER ce matin, je lisais un des décombres qui jonchent les couloirs des wagons (c'était 20 Minutes, je crois, du groupe norvégien) et la différence de ton avec la prétendue neutralité de Direct Matin sautait aux yeux. L'ironie sur l'intervention de Badinguet à la télévision devenait presque agressive. Ils allaient jusqu'à se demander si la hausse de la TVA dite "TVA anti-délocalisation" allait non seulement augmenter les prix (et sur cela, personne ne croit le Président qui se contredit lui-même en disant qu'il espère une hausse de la consommation avant la hausse de la TVA) mais même (ce qui serait le suprême paradoxe) pénaliser des produits français dans le marché intérieur face aux produits chinois, qui avaient des marges suffisantes pour se permettre de moins augmenter que les autres, malgré tout le mécanisme de baisses des charges (sans contrepartie). Je ne sais pas si c'était exagéré mais cela prouve à quel point tout le discours du Chef de l'Etat tourne à vide et semble paniquer. Le quotidien gratuit impliquait que même le but affiché serait inversé, en une complète "hétérotélie".

Fixer son salaire



Richard Descoings, directeur de l'IEP de Paris :

"Si l'on compare ma rémunération [27 000 Euros brut + Primes décidées par son Conseil d'administration qui pouvait largement le doubler] aux 4 500 euros d'un président d'universié, que faut-il penser : qu'ils sont mal payés ou que je le suis trop ?"

Les deux ne sont pas exclusifs mais j'ai l'impression qu'il ne comprend vraiment pas qu'une très vaste majorité de non-pantouflards voteraient spontanément pour la seconde hypothèse.

Et avant qu'on ne parle de populisme démagogique (certes, Descoings étant un énarque haut fonctionnaire, conseiller d'Etat, il peut espérer à un traitement élevé et il rétorque qu'il pourrait gagner bien plus en pantouflant vers un cabinet d'avocats), si on tient compte de l'augmentation relative, cela reste considérable. Descoings était à 17 400 euros bruts lors de son mandat précédent. Il s'est donc arrogé une augmentation de +55% (sans compter les primes).

En revanche, sa réponse sur la suppression de la Culture générale est assez habile : il fait remarquer qu'il garde l'histoire, et en options les lettres ou la philosophie. Les philosophes, qui ne cessaient de trouver que la Culture Gé était une pseudo-matière ridicule, sont assez étranges de se plaindre maintenant que cette suppression va leur enlever une part de leur gagne-pain.

Mais il est amusant de ne cesser de se vanter d'avoir voulu démocratiser son IEP alors que les frais de scolarité explosent et que la Culture Générale était relativement moins discriminatoire que l'épreuve de langues. Il a aussi voulu supprimer la note éliminatoire en langues (une rumeur dit que Badinguet avait raté Sciences Po dans les années 1970 en partie à cause d'un zéro en anglais).

lundi 30 janvier 2012

Les couards, ça ose tout



Il était une fois un lointain pays dont le Président, Monsieur Malinguet, avait exercé son mandat depuis déjà cinq ans.

Dans une version peu plausible du conte, M. Malinguet fut interrogé par plusieurs journalistes économiques.

Il y avait de la diversité dans ceux qui l'interviewaient : l'un était un journaliste économique qui pensait que M. Malinguet avait vraiment fait des réformes nécessaires mais qu'il aurait dû aller plus loin ; et l'autre était un journaliste économique qui pensait que M. Malinguet avait vraiment fait des réformes nécessaires mais qu'il aurait pu aller plus loin. Tout le spectre des théories économiques et politiques était donc couvert.

Monsieur Malinguet expliqua avec sérénité qu'il "ne se déroberait pas à ses responsabilités". Tous admirèrent sa gravité. Il était prêt à l'héroïsme. Il exerçait tous les pouvoirs depuis cinq ans et il n'irait pas immédiatement pantoufler chez Gazprom comme son ami le Chancelier social-démocrate de Germanie pour mener enfin la vie dorée de ses amis. Il pourrait même remettre les navires de luxe à cinq ans après. Il était prêt à tous les sacrifices et même à ne gagner que ce salaire minable de Président dans ses années avant sa retraite. C'est dire s'il était altruiste, mais il trouvait que ce serait indécent de trop le faire remarquer.

Il dit avec sagesse et flegme qu'il avait toutes les audaces. D'abord, il n'hésiterait pas, quel qu'en soit le risque, à baisser les impôts sur les plus hauts revenus de ses amis les plus fortunés. Non, il était de cette trempe-là. Oui, il savait qu'un autre n'aurait pas été assez intrépide pour le faire. Et oui, il aurait la bravoure suffisante pour faire ce que ses amis du Mouvement des Dirigeants d'Entreprise lui demandaient en baissant les charges patronales et en faisant payer l'ensemble des citoyens en montant la TVA pour compenser cette baisse. Et il aurait assez de caractère, de cran et de conscience pour dire qu'il le faisait parce que lui, au moins, il croyait à l'Intérêt Général et qu'il ne voulait pas s'attaquer aux "Classes Moyennes". Il avait quelque chose d'héroïque. Les autres faisaient de la politique. Lui défendait toujours les intérêts de ses amis, quel qu'en soit le coût politique. Il savait que certains n'auraient pas assez de hauteur d'âme pour comprendre cela. Si seulement d'autres que lui étaient capables de son sens du don de soi.

Et oui, il serait même assez hardi pour dire qu'il savait que la hausse de la TVA ne ferait pas monter les prix. Il en avait la conviction intime, quelque part entre ses intuitions compartimentées. D'ailleurs, dit-il avec équanimité, il n'y a pas de Vérité. Il n'y a que l'Authenticité. Et on savait bien qu'il n'y avait rien de plus authentique qu'un acteur qui a assez de fermeté d'âme pour dire que la Vérité n'existe pas. D'ailleurs il n'y a plus de gauche ou de droite aujourd'hui. Il faut vraiment être un idiot de gauche pour croire qu'il y a une gauche et une droite. Il n'y a que le miroitement multiple des Vérités et l'Authenticité Unique des Héros assez généreux pour mener une politique si impopulaire chez ceux qu'il ne fréquentait pas mais qui devraient voter pour lui s'ils avaient un peu le sens des responsabilités.

Et oui, il aurait assez de résolution pour s'attribuer un nouvel impôt sur les transactions financières alors qu'il avait supprimé cinq ans avant un impôt sur les opérations de bourse. Il parvenait à s'attribuer la création de ce qu'il avait détruit, ce qui est le sommet de l'art politique. Et il ajouta avec placidité que sans aucun doute l'Allemagneleferaitaussi. Hum. Il le dit très vite et aucun journaliste ne lui demanda d'où il tirait cette information au détour d'une des Vérités perdues parmi d'autres.

Il serait assez vaillant pour permettre à ses mêmes amis dirigeants de négocier librement dans chaque entreprise s'ils voulaient réduire les salaires sans tous ces ignobles crimes perpétrés par des lois communes ou un code du travail. Mais il était convaincu que cela n'entraînerait aucune baisse des salaires ou aucune détérioration des conditions du travail. Hélas, certains syndicats représentant seulement des employés s'opposeraient à cette nouvelle liberté. Il était déterminé à donner la priorité aux souhaits des employeurs. Mais il n'y avait plus de droite ou de gauche. Car "la Vérité", plus personne ne croit à ces vieilles lunes désuètes et métaphysiques d'une "Vérité", on est quand même au XXIe siècle, non, est-ce que je me trompe ou bien ?

Le lendemain, les journaux et les médias s'étonnèrent des vertus morales insignes de Monsieur Malinguet. Quel courage ! Quelle chutzpah !

Sans aucun doute, s'il n'était pas réélu, ce serait seulement parce qu'un peuple de citoyens timorés n'arrivait pas à suivre le sens du sacrifice d'un héros qu'ils ne méritaient pas. Mais un jour, quand il serait parti pantoufler avec une autre mannequin sur un autre navire d'un autre oligarque qui lui serait resté "loyal", ils devraient enfin reconnaître qu'ils n'étaient pas prêts, eux, si médiocres, à une telle figure capable ainsi de mettre l'intérêt du cercle de ses proches au-dessus de tout désir démagogique de défendre d'autres intérêts.

Quel courage !

dimanche 29 janvier 2012

Retour à Thra



Je préfère ne pas trop revoir Dark Crystal trente ans après.

Le film (sorti aux USA pour Noël 1982 et en France en mars 1983) avait eu un grand succès à l'époque (du moins en France où il avait été un des records de l'année en nombre de spectateurs, les résultats furent plus décevants aux USA où le public "familial" trouvait le film trop cauchemardesque) mais le charme reposait presque uniquement sur la performance, sur les marionnettes de ce premier long métrage non-animé mais sans aucun acteur humain représenté. L'histoire, en revanche, était quand même trop simpliste : les derniers Gentils Elfes (pardon, "Gelflings") rapportent le cristal magique dans le Château des Méchants Vautours vampires (les Skeksès) et on découvre que les sages oiseaux Mystiques urRu et les Méchants Vautours étaient en réalité la scission d'êtres angéliques, ils sont guéris, FIN. Même à l'époque, je trouvais cela un peu décevant.

[Mais je me demande si toutes ces scènes où les Podlings se font vampiriser pour avoir un elixir de jeunesse n'ont pas pu être pompées par Jodorowsky dans le début d'Alef-Thau. Ce doit être une coïncidence car L'Enfant-tronc sort en même temps, en mars 1983, et même si Jodorowsky l'avait vu en décembre, cela ferait court pour l'illustrateur Arno.]

La suite prévue, Power of the Dark Crystal a l'air tout aussi simpliste : des années après, les héros d'origine sont devenus les vieux monarques des Gelflings et une créature vient du monde sous la terre du monde de Thra pour voler le cristal pour sauver son Soleil du sous-sol, ce qui refait naître la scission originelle à nouveau entre Skeksès et Mystiques. Le genre de suite inutile qui ne semble rien apporter en plus.

Il y avait eu aussi un "manga" sans grand intérêt, Legends of the Dark Crystal, qui se déroulait avant le premier film, du temps des grandes guerres entre les Gelflings et les Skekses (les Skekses vont massacrer les Gelflings quand une prophétie leur annoncera que c'est un Gelfling qui mettra fin à leur Empire).

Mais Brian Froud, qui avait été le designer graphique pour le film il y a 30 ans, vient de diriger un nouvel album BD (dessiné par Alex Sheikman et Lizzy John), The Dark Crystal: Creation Myths, un nouveau Prequel, et je suis un peu plus satisfait du résultat. On suit ici la mythologie d'Aughra, la vieille Sorcière astrologue à un seul oeil qui servait un peu de "Yoda" femelle pour les Gelflings. Ici, elle tient plus d'une Déesse ou de culture-heroine du monde des Trois Soleils de Thra.

Cela manque encore un peu de complexité mais il y a un nouveau Trickster plus ambigu pour perturber les origines de l'Alignement où les Skeksès et les Mystiques se sont divisés, Raunip, le fils d'Aughra, qui n'est pas foncièrement maléfique même s'il est guidé par la jalousie.

L'éditeur, Archaia (qui fait aussi Artesia, a annoncé un jeu de rôle (fondé sur le système de The Burning Wheel, comme Mouse Guard) dans l'univers de Thra pour l'été prochain. Je suis vraiment sceptique sur les possibilités de cet univers qui semble si limité.

samedi 28 janvier 2012

[JDR] Univers pour Chivalry & Sorcery


  • Une des grandes originalités de Chivalry & Sorcery (1978) par rapport à D&D était que C&S (dont la première édition avait un nom en français, Chevalier) était censé être "pseudo-historique", plus proche du Moyen-Âge européen que des seules conventions habituelles de la fantasy.

    Les deux auteurs canadiens Edward E. Simbalist et Wilf K. Backhaus disent dès l'introduction qu'ils jouaient dans une version de la France sous Louis VII et Philippe Auguste.

    The Feudal Age was chosen as the setting of the action. There is a powerful and most appealing tradition of glorious deeds and stirring events surrounding the whole period of Chivalry. Furthermore, most fantasy occurs in societies that are generally feudal in nature, and the richest traditions of “Magick” belong to that period as well. To make the life of the Feudal Ages live again and to provide an authentic setting in which to play out the campaign, C&S is filled with aides and guidelines which make the creation of an entire world possible. Our group has chosen France, 1170, as the center of our world, although it is a France drawn with a liberal brush indeed.

    Mais les règles de C&S avaient repris directement les Hobbits, les Elfes et les Khuzdûls des Terres du Milieu de Tolkien et toutes ces espèces fantastiques étaient évoquées comme si elles étaient des minorités indépendantes dans la France de Philippe Auguste. On précisait par exemple que les Noldor et Sindarin avaient un droit au statut féodal de "noble" quand ils étaient dans le territoire humain. Les règles de Magie (Magick) mentionnaient à la fois le Diable judéo-chrétien et des Balrogs tolkieniens, des Ordres comme les Templiers et des monstres comme les Hommes-Lézards.

  • Dans la préface de son adaptation de C&S pour le Japon médiéval, Land of the Rising Sun, la célèbre Lee Gold (qui dirigeait aussi la plus importante fanzine de l'époque, Alarums & Excursions, décrit brièvement sa propre campagne "européenne" de C&S. Elle avait créé une Angleterre médiévale très différente en superposant l'invasion de Guillaume le Conquérant et l'arrivée des éléments tolkiéniens.

    The C&S I co-GM with my husband is set in an England in which the Norman conquest occurred in the 10th century under the reign of Æthelred the Unready - and the Elves and the Númenóreans landed in 1066, set adrift in the world-lines when the shape of Middle Earth was changed during the Fall of Númenor. Recent research has revealed that even the humans, maybe even the Dwarves, are not the native inhabitants of the land. The Patterns that walk the Gorsedd Bran go back much farther, and the players are currently still trying to figure out just how to get them all back to sleep again.

  • Le monde de Hârn avait à l'origine aussi commencé comme une campagne de C&S, autant que je sache (tout comme Ars Magica). L'île de Hârn ressemble un peu à un mélange de l'Angleterre saxonne pré-normande avec des minorités d'Elfes, des Nains et d'Orcs en plus (mais aussi quelques cités-Etats décadentes et sataniques à l'ouest avec la République Thardique). Je trouve la description de Hârn étrangement proche de celle de la campagne de Lee Gold.

    Certes, c'est presque l'inverse : l'Angleterre de la campagne de Gold voit arriver les Elfes des Terres du Milieu dans une invasion récente. Hârn était d'abord peuplée d'Elfes et de Nains, puis sont arrivés les premiers Humains (les Jarins, qui jouent le rôle des Celtes) et ensuite les royaumes féodaux venus du continent (Chybisa, Kaldor, Kanday, Rethem) et enfin invasion des Iviniens (qui jouent le rôle des Danois). Un détail qui manque dans les invasions de Hârn serait l'effet civilisateur des quelques siècles d'Empire britanno-romain. Cela explique peut-être (en dehors de la taille) que Hârn paraisse finalement si peu civilisée et même presque plus "Dark Age" que médiévale.

  • Par la suite, Edward Simbalist créa un univers pseudo-médiéval appelé Archaeron et décida d'atténuer les références à l'Europe réelle en retirant les noms judéo-chrétiens des Démons.

    Il ne publia qu'un seul supplément officiel dans cet univers de campagne, Arden: A Complete Kingdom, ne décrivant qu'un seul Royaume médiéval assez classique (uniquement des listes rébarbatives de châteaux et de fiefs). Dans le premier numéro de Different Worlds, Simbalist décrit un peu plus son univers.

    Le monde d'Archaeron eut naguère des espèces inhumaines mais les Elfes conduits par Oberon et les Nains conduits par Thorsald Ecu-de-Fer se levèrent contre la tyrannie des Seigneurs-Dragons et leurs hordes humanoïdes. Depuis, les Dragons ont fui vers les Îles de la Mer du Ponant.

    Arden (capitale Warminster) est un Royaume féodal. Au sud, Archaeron (cités principales Archaeron et Erewhon) est une magiocratie, où les Mages sont la noblesse et où ils pratiquent surtout la Nécromancie, l'Alchimie et la Sorcellerie (Hex Mastery). Le réseau des Mages s'étend au Royaume voisin de Hwicca. Le Kargard pratique le Cabbalisme. L'Artegon est le Saint Siège de la Foi Unique et l'Eglise interdit toute Magie. Certains Royaumes adorent encore le Ténébreux, l'ancienne divinité de l'Empire des Seigneurs Dragons. Les Marches sont occupées par des Ordres et des Ordres combattants. La Terre Sainte a des guerres contre les Sarrasins, avec des Croisés et Paladins aux pouvoirs mystiques. A l'est, au-delà du Fleuve Noir se trouve la Forêt Enchantée, où dort le mystique Enchanteur et où on peut trouver tous les monstres du jeu. Il y a dans le nord des royaumes entiers de Trolls et de Gobelins.


  • Add. Comme le fait remarquer JF, il faudrait ajouter le supplément Saurians (1979). Il y eut aussi deux scénarios pour la seconde édition qui se déroulaient encore dans un autre monde vague, The Songsmith et DragonLord (1984).

  • 20 ans après la première édition, en 1996 paraît ce qu'on appelle la "3e édition de Chivalry & Sorcery", chez Higlander Games. Les règles sont devenues très différentes, rendues plus modernes mais aussi plus génériques, ce qui détruit tout le charme de la Première édition (déjà un peu appauvri dans le rangement de la deuxième). Il y a cette fois un nouvel univers pseudo-médiéval qui utilise la carte réelle de l'Europe mais avec des peuples fantastiques en plus, le Monde de Tannoth. Il ne sera jamais développé.

  • Dès la 3e édition, un certain Steve A Turner avait proposé un second univers, Dragon Reaches of Marakush et ensuite, après la faillite de Higlander Games, un micro-éditeur Britannia Games Design reprit les droits de C&S et proposa une 4e édition révisée en 2002 (C&S: The Rebirth), avec son Marakush comme univers officiel et abandon total du Tannoth.

    Le nom de ce monde m'avait fait penser à une référence au Maroc ou aux Croisades et il n'en est rien. L'univers a quelques nuances pseudo-celtiques, avec ses Elfes gallois et un culte de totem de l'Ours, qui ne me semble pas toujours bien cadrer avec une ambiance médiévale. Un problème linguistique est le mélange constant de noms de l'Europe réelle et de sonorités purement fantasy.

  • J'ai longtemps pensé qu'un bon univers de quasi-Croisades pour C&S, à la fois médiéval et fantastique, serait non pas la vraie "Terre Sainte" mais le Prêtre Jean, dans une version ou une autre (voir notamment le roman d'Eco, Baudolino).


    Le Royaume de Zazamance est un Royaume païen qui avait une forme étrange d'Islam polythéiste adorant à la fois Allah, son épouse Alilat, Mahomet et des formes d'astrolâtrie syrienne (les textes médiévaux comme la Chanson de Roland ou le Parzival disent qu'ils adorent "Apollon" et "Jupiter" mais dans ce contexte, on va dire que c'est une simplification de dieux chaldéens).

    Le Patriarche Johannes est le fils du chevalier Feirefiz, métis sarrasin de la famille du Roi-Pêcheur et cousin de Perceval, et de Réponce la Vierge du Graal, pour qui Feirefiz s'est convertie. Johannes descend des Rois Mages de Perse (Balthasar vint d'Arabie, Melchior de Perse, Gaspar d'Inde). Son Royaume de Zazamance aux portes des Indes garde désormais le Château du Graal, les trois Tombeaux des Rois Mages et la Porte du Jardin d'Eden, gardé par les Archanges.

    L'Ordre des Chevaliers aux Cygnes sont un ordre mystique de Croisés, notamment flamands et allemands, venus de Terre Sainte pour garder le Graal. Ils contestent son autorité au Patriarche Johannes parce qu'on le dit trop indulgent envers les esprits païens, les Djinns, Devas, Asuras, Invisibles et Fées de son Royaume. Le Patriarche nestorien n'a-t-il pas d'ailleurs eu des enfants ? Ils tiennent les Portes d'Alexandre, faites pour empêcher les Nephilim et Titans de Gog et Magog de déferler.

    D'autres vassaux colons "latins" ont fondé le Comté de Poictesme et d'Averoigne (Vyones et Ximes), où vivent les mages d'Ambreville et les lycanthropes comme Malachie du Marais.

    L'Ordre des Chevaliers des Etoiles est une curiosité de mélange entre le judaïsme khazar et l'astrologie syrienne [idée volée à Philip José Farmer qui met dans un roman sur son World of Tiers l'idée de Chevaliers juifs, si ce n'est qu'ils sont ashkénazes].

    La Forêt de Rosecorne est dirigée par la Dame à la Licorne, Esclarmonde, descendante de la Dynastie Isaurienne et Khazare, qu'Aubéron le Roi des Elfes donna à Huon de Bordeaux. Elle est Reine de Féérie et tient l'ancien Cor de Huon, qui peut évoquer les anciens héros. On dit que la Source de Jouvence coule là et que Johannes a eu le droit d'en boire une gorgée, d'où sa légendaire longévité.

    Les Terres Gastes sont maudites et on dit que c'est causé par la Lèpre qui a frappé le Prêtre Jean.

    En Hyrcanie voisine, d'où viennent les Lycanthropes, on trouve aussi une tribu d'Amazones (qui furent dirigées par la Paladin Yde, fille de Florent et descendante de Bradamante), de Gorgones et de Femmes-Vouivres (Yamilka, la Reine des Serpents, soeur d'Eblis et reine des Invisibles, tient encore le Jardin d'Eden), mais aussi diverses créatures hypernotiennes, des blemmyes, des sciapodes, des panotes, des Cynocéphales nacumériens (dont certains suivent Saint Christophe, Saint Ysengrin et Saint Guinefort), des grylles, des gargouilles, les Rocs vus par Sinbad.

    L'ancienne cité d'Iram, Pndapetzim et la Cité d'Airain, ancienne forteresse des Djinns rebelles contre le Roi Salomon, se trouvent aussi dans ce Royaume.

    Le Royaume abrite une population avec de nombreuses minorités religieuses qui n'ont pas rejoint le Nestorianisme de l'Eglise de Saint Thomas l'Apôtre des Indes. Il y a des Yezidis, kurdes gnostiques qui adorent un aspect d'Eblis-Lucifer (Melek Taus) comme repenti, des Mages zoroastriens et des Musulmans qarmates révolutionnaires et astrologues, qui ont fondé un Ordre plus redouté encore que les Assassins du Vieux de la Montagne.

    On dit que Gengis Khan a demandé du Prêtre Jean la main de sa fille et qu'il va venir ravager ses terres s'il ne lui donne pas. Depuis le début de la Guerre, on dit que le Patriarche a été capturé par les Mongols (qui hésitent encore entre le paganisme, l'Islam, le Bouddhisme et le Nestorianisme). Un autre "Jean" se prétend le vrai Patriarche évadé et un certain "Prêtre David" se dit l'héritier légitime, fils du Patriarche par une Princesse éthiopienne.

  • vendredi 27 janvier 2012

    [JDR] 10 auteurs de fiction jouant une partie de D&D



    On devinait en lisant Patrick Rothfuss qu'il avait été un joueur et il participe avec d'autres comme Scott Lynch, Abercrombie et Elizabeth Bear à une partie Old School de D&D pendant la Convention de SF dans le Michigan, Epic CONfusion.

    Le co-Maître du donjon était le nouvel auteur de SF Libano-Américain de Detroit, Saladin Ahmed et je suis curieux de voir ce que va donner son roman de fantasy inspiré des Mille et Une Nuits.

    Une Loi contre la recrudescence du cannibalisme



    L'Oklahoma a près de 4 millions d'habitants. Il est aussi très, très solidement Républicain avec des marges énormes (la dernière fois qu'ils ont voté à une majorité pour les Démocrates remonte à 1964, avec LBJ contre Goldwater). Leurs chambres sont aux deux-tiers républicains, presque tous leurs Représentants au Congrès (sauf une circonscription urbanisée à la frontière), leurs deux Sénateurs (les deux dingues Jim Inhofe et Thomas Coburn) sont tous Républicains.

    En 2010, un référendum fit passer un Amendement à la Constitution de l'Etat interdisant l'application de la Charia en Oklahoma, enjeu qui paraissait, pour utiliser un euphémisme, peu imminent dans l'Etat. Il fut voté à 70% et la Cour d'appel vient de faire remarquer qu'un tel amendement était absurde et que sa formulation était d'ailleurs discriminatoire.

    Et cette semaine, un élu local ("Sénateur dans le parlement de l'Etat") propose une nouvelle Loi pour "interdire l'usage de foetus avorté dans l'alimentation".

    Le Sénateur a ensuite admis qu'il ne connaît aucun cas réel où cela serait arrivé, "du moins dans son Etat", mais on ne sait jamais.

    J'imagine qu'une partie de la presse pro-life doit considérer comme évident que la "Culture de Mort" conduit au cannibalisme. Et c'est un thème constant d'une hystérie contre la Technique (voir Soylent Green) qu'une société désacralisée irait basculer dans la transgression de tous les tabous fondamentaux en ne réduisant plus toute chose qu'à des ressources et outils disponibles.

    Certes, c'est un élu local, comme ces gens du New Hampshire qui voulaient mettre la Magna Carta comme préambule de leurs libertés féodales. Le même élu de l'Oklahoma a déposé aussi (en vain) une loi pour abolir le droit d'appel dans les affaires criminelles et une autre loi pour autoriser aux élus le port d'armes à feu à l'intérieur du Congrès pendant les délibérations. On ne sait jamais. Mentionner ces élus locaux est un peu comme commenter les libres associations d'un cercle de schizophrènes. J'espère un peu que même les élus locaux, disons, de notre département du Var, au hasard, n'auraient pas des idées pareilles, du moins tant que quelques années de destruction de l'éducation nationale, de couvertures du Point et de paranoia Internet n'auront pas fait leur boulot.

    Je comprends mieux comment des gens aussi dérangés ont pu croire aussi que le plan de santé d'Obama prévoyait d'exterminer les vieillards récalcitrants.

    Il devrait aussi préventivement voter une loi disant qu'Obama n'aura pas le droit de sacrifier des vierges à Cthulhu, du moins à l'intérieur des frontières de l'Oklahoma. On ne sait jamais.

    jeudi 26 janvier 2012

    [JDR] Les mondes de Traveller (5)


    Rappel des épisodes précédents : (3) Introduction aux mondes de Judges Guild, (4) Secteur Ley & système Tancrède


  • Glimmerdrift Reaches (1981)
    C'est le deuxième secteur créé par Dave Sering pour Traveller après Ley. Je ne sais pas comment traduire le nom de cette région. "Glimmer" signifie "luire, scintiller, étinceler, miroiter faiblement". "Drift", c'est "dériver" mais une sanddrift est une forme de dune, donc cela donnerait quelque chose comme les "Dérives d'étincelles", ou bien de manière plus imaginative les "Vagues scintillantes" peut-être. Un peu trop long. Je vais donc lâchement garder l'anglais.

    La nouvelle édition PDF officielle de chez Judges Guild est légèrement plus longue que l'original, et il y a notamment en plus des 16 sous-secteurs, des cartes qui se trouvaient au dos du plan du Secteur, neuf cartes de planètes (Cazor, Galnor, Hyde, Hyline, Priluki, Randabar, Rasma, Seraul, Vinyl). Les cartes (projection gnomonique sur icosaèdre) sont très peu inspirées (un peu comme une carte de la Terre où on ne verrait que deux vagues masses principales des Amériques et de l'Eurasiafrique), sauf Randabar qui a au moins l'avantage d'être en couleurs. Je crois que Dave Sering était aussi revenu sur le secteur et le Domaine de Gateway dans la revue maison de Judges Guild de Pegasus (dans les n°5-7, 1981) mais je n'ai pas encore comparé s'il y avait des éléments nouveaux.

    Alors que le Secteur Ley était en majorité à l'intérieur de la bordure de l'Imperium, les Glimmerdrifts sont en vaste majorité des mondes indépendants en relation neutre ou "d'Etats-Clients", Etats-Tampons entre l'Imperium et d'autres entités (la Fédération des Ruches et les 2000 Mondes K'Kree), un peu comme le bord des Marches Directes (Spinward Marches). Les Seigneurs d'Outremer, du secteur Ley, empiètent sur le secteur Thorstone devant le Concordat de Ginlenchy et il y a aussi quelques mondes non-alignés.

    Les Cinq Etats interstellaires (Zariens, Homo-Danins, Marliens, Krax et Ginlenchy) sont tous issus de descendants d'Humains, mais le Co-Dominium Homo-Danin est mixte bi-spécifique et il a su dépasser la xénophobie de certains mondes solomani.

    Le Domaine Zarien abrite un peuple humain transporté par les Anciens. Les Zariens étaient des Humains modifiés génétiquement pour être un peuple de serviteurs des Anciens. SPOILER ALERT Alors que les Jhodanis ont été sélectionnés pour leur potentiel psionique et ont formé toute leur société sur l'Ouverture télépathique d'humains incapables de mentir, les Zariens ont un pouvoir latent plus subtil : ils ont une communication inconsciente entre eux qui les rend plus solidaires mais aussi plus conservateurs que des Humains normaux. Dès qu'un Zarien est agressé, les autres ressentent la menace de manière diffuse sans connaître la source de leur inquiétude et cherchent à y mettre fin. C'est un détail assez intéressant et qui exploite bien l'univers officiel, des sortes de quasi-Jhodanis qui ne connaissent d'ailleurs même pas leurs capacités empathiques limitées. /SPOILER

    Le Co-Dominium Homodanin (Mandanin) est une symbiose entre une colonie humaine et un peuple reptilien, les Danin. Je ne sais pas s'il y a une influence du Humanx Commonwealth, la série des romans d'Alan Dean Forster, qui décrivait une fédération plus pacifique. Malgré leur entente, les Homo-Danins sont traversés par des tensions comme certaines factions Danins sont agressives et voudraient mener une politique plus impérialiste vers leurs voisins. Il y avait une division du travail entre les Humains qui géraient plus la Flotte stellaire et les Danins qui contrôlent plus les Armées planétaires. Ils ont essayé vainement d'annexer des mondes du Primat des Marliens et ils sont présents aussi sur le Secteur Crucis Margin du côté "Traîne" (trailing).

    La Primature Marlane est une théocratie qui (pour une fois) a l'air assez bienveillante. Il y a certaines rumeurs à la fin du livre qui laissent penser que certains Prêtres du coin peuvent être plus ambigus. Aucun détail n'est donné sur le contenu de leur religion à part le fait qu'il y a un "Primat" et donc une centralisation.

    La Confédération de Krax et le Concordat de Ginlenchy sont deux alliances de protection mutuelle qui cherchent encore un peu à ne pas devenir de simples protectorats de l'Imperium. Les rumeurs de Ginlenchy montrent qu'ils ont très peur d'une invasion marlane.

    Après les seize secteurs, le supplément a plusieurs pages de tables de rencontres et de quelques rumeurs pour chaque zone.

    La critique sur Freelance Traveller signale quelques erreurs :
    In the Ryazan subsector, hex 3122 is listed as Kara Su on the USP side of the page, and as Kara on the graphic side. In the Glowing subsector, there is an extra political boundary line that is not on the large map. It doesn't affect anything, but is an annoying misprint.

    Judges Guild a quelques scénarios dans les Glimmerdrifts : Doom of the Singing Star et Darkling Ship par Dave Sering. Le premier est surtout la présentation de vaisseaux locaux avec plusieurs d'aventures à bord.





  • Dans le secteur Ley, le sous-secteur Outremer avait des noms intéressants par ses références mais je n'ai rien trouvé d'aussi excitant ici. Ici, le concept des Zariens est une idée à voler pour un peuple humain mineur, par exemple à la frontière des Jhodanis.

    La version de tout le Domaine de Judges Guild a été rendue non-canonique et elle décrit donc maintenant un "univers parallèle". En 2001, GURPS Traveller a eu un supplément, Granicus sur un monde de "pirates" de l'espace dans les Glimmerdrifts vers l'An 1110 de l'Imperium (UWP D335589-6).

    En 2005, la version d20 OGL de Traveller utilisa la nouvelle version officielle du Domaine Gateway, Gateway to Destiny par le prolifique Martin Dougherty, avec des noms de sous-secteurs proches mais sans les mêmes mondes (de plus, le "présent" de l'édition T20 était l'An 1000 de l'Imperium, soit un siècle avant le présent habituel de Classic Traveller).
    [Une coïncidence amusante avec l'univers des Spacefarers'Guides est que le supplément Gateway de Dougherty aussi fait référence à un peuple de nomades interstellaires appelés les Wanderers, mais qui sont insectoïdes.]

    Sur le Net, je viens de tomber sur cette campagne d'un joueur pour Warhammer 40k ou Rogue Trader qui utilise très partiellement les versions JG du Domaine (il l'appelle les Glimmerdrift Reaches mais il y a surtout des inspirations du Secteur Ley).

    L'arrêt du Mur



    D'après une décision du tribunal de Lille, le documentaire Le Mur de Sophie Robert (dont je parlais la semaine dernière) ne pourra plus être montré tant qu'elle n'aura pas retiré de son film les entretiens de trois Lacaniens qui s'étaient plaints, Esthela Solano Suarez, Eric Laurent et Alexandre Stevens. Cela va peut-être inciter les autres psychanalystes à porter plainte aussi.

    Par ailleurs, je ne sais s'il y a un lien avec l'actualité de ce documentaire mais le député UMP Danielle Fasquelle du Pas-de-Calais (Professeur de Droit communautaire et président du Groupe d'études parlementaires sur l'autisme) vient de proposer d'interdire les pratiques psychanalytiques dans le traitement de l'autisme.

    Article unique
    Les pratiques psychanalytiques, sous toutes leurs formes, doivent être abandonnées dans l’accompagnement des personnes autistes, au profit de traitements opérants, les méthodes éducatives et comportementales en particulier.
    Une réaffectation de l’ensemble des moyens à ces modes de prise en charge doit être exigée.
    Cela peut paraître une réaction disproportionnée ou qui devrait plutôt dépendre d'autorités sanitaires.

    Le CIPPA (Coordination Internationale entre Psychothérapeutes Psychanalystes s'occupant de personnes avec Autisme) a répondu à la proposition en prenant ses distances avec toute pratique psychanalytique qui culpabiliserait les parents.

    mercredi 25 janvier 2012

    A quoi je perds mon temps en ce moment

    Alors que je n'aime pas les casse-têtes (je n'ai jamais été capable de trouver la solution du Solitaire) et les jeux de réflexion, je passe mon temps à faire les problèmes de ce jeu, Les Murailles de Troie / Troy -Extra Muros (Smart Games).

    (Problème 31, il n'en reste plus que 29)

    Le but est seulement d'utiliser les quatre murailles pour enfermer tous ses pions bleus (Troyens) pour les protéger des pions rouges (Grecs).

    Tout réside donc dans le thème ou l'illusion d'un thème.

    Si c'étaient uniquement des pions noirs et blancs, je n'essayerais même pas de trouver la solution mathématique, alors qu'ici avoir l'impression de sauver Priam, Cassandre et Astyanax me donne immédiatement envie de jouer.

    Finalement, des figurines ont une fonction inverse dans les jeux de société et dans les jeux de rôle. Dans un jeu de société, cela me fait imaginer qu'on n'est pas que dans une structure mathématique mais dans le thème. Dans un jeu de rôle, cela tend souvent à trop "matérialiser" le support, à nuire à l'imagination et rappeler qu'on n'est que dans un jeu et non dans le récit recomposé dans la partie.

    mardi 24 janvier 2012

    Super-scripts


    (Superman est trop sérieux pour blogguer et il ne perd jamais son temps sur un réseau social)

    Dans les années 1950-1960, Superman passait son temps dans sa Forteresse de Solitude au Pôle Nord, à écrire son "Super-Spicilège" dans sa langue maternelle devenue idiolecte privé, le "Kryptonais".

    Au début, il rédigeait ce journal en le gravant sur du métal de ses doigts invulnérables.


    Puis il a dû trouver le procédé manuel trop primitif car il l'écrit directement de ses yeux, avec son rayon thermique.


    Et enfin, il décida de passer par un instrument technologique, mais pas une vulgaire plume d'un Roc kryptonien ou par une machine à écrire comme dans son métier civil de journaliste.

    Il s'agit d'un enregistreur télépathique qui imprimait toutes ses pensées, y compris sans doute celles qu'il aimerait dissimuler, comme une sorte d'impression directe de ses flux de conscience.


    Dans toutes ces versions, Kal-El ressent le besoin d'écrire ses hiéroglyphes dans un super-livre grand comme un monument ou comme des Tables de la Loi, dernière Arche d'Alliance de l'Homme de Demain et de son monde disparu.

    Mais il est vrai que tout est gigantesque dans la Forteresse de Solitude, notamment la Clef de la Porte, déposée au seuil au vu de tous puisque Superman pense qu'il est de toute manière le seul être capable de la soulever, comme une sorte de Mjolnir.

    Comme il est le dernier survivant de Krypton, il doit considérer tout son Journal en Kryptonien comme une Pyramide dédiée à son monde mort, comme l'indiquent les nombreuses statues de ses parents et le musée associé. Superman lui-même était une arche envoyée dans le vide et son journal doit se voir comme une autre bouteille à la mer.

    Le Superman de l'Âge d'argent est surtout une projection d'un enfant américain vivant dans son "micro-monde" réimaginé dans une cabane dans les arbres. Et c'est pourquoi le héros doit les imiter et recréer une simulation autour de lui. Et de même que les enfants peuvent rêver d'autres parents, Superman porte le deuil de ses parents célestes. Cette nostalgie a en partie disparu par la suite pour insister plus sur le lien avec la Terre, les USA et ses parents adoptifs.

    Vivre sans "Moi" réel



    Peut-on remettre en cause l'identité réelle de ce "Moi-Masque" dans une société qui se crispe souvent uniquement sur l'individu ?

    La source de ce souci vient plus de Hume que du Bouddhisme. Hume avait cette thèse que notre corps avait finalement plus de continuité que notre prétendue "substance spirituelle", qui n'était que l'agrégat de nos pensées successives et contradictoires. Derek Parfit avait critiqué le primat du Soi pour des raisons morales et pour fonder le dépassement possible de l'égoïsme (contre la thèse classique de Hume ou Sidgwick selon laquelle on ne pouvait hélas pas critiquer rationnellement l'égoïsme sans avoir d'abord des émotions altruistes ou une "intuition" morale qui n'était pas que rationnelle). Daniel Dennett avait présenté la conscience de soi comme une réunification rétroactive de faisceaux divers. Galen Strawson avait aussi tenté de défendre l'idée d'une individualité "épisodique" contre nos cultures de l'identité "narrative" où nous nous racontons nous-mêmes pour nous persuader de notre originalité.

    L'essayiste Julian Baggini reprend encore cette même critique sur le Soi, mais j'ai l'impression que cela conduit finalement dans sa version à quelque chose qui apparaîtra à un Français une banalité un peu "existentialiste" comme chez Sartre, où notre Vrai Soi n'est rien d'authentique, plutôt un "projet" ou une "oeuvre".

    lundi 23 janvier 2012

    Les Vengeurs, un dimanche après-midi à l'Île de la Grande Jatte


    et autres couvertures hommages aux oeuvres d'art de Marvel.

    Joyeuse Année du Dragon Noir



    Dans le calendrier chinois, c'est donc le début de la 4709e Année depuis l'Empereur Jaune Huang Di 黃帝, et c'est l'Année du Dragon d'Eau 壬辰 ou Dragon Noir (Mâle Yang).

    Une des nombreuses légendes chinoises sur le Dragon est qu'il tient plutôt d'une sorte de "Chimère" qui mélange plusieurs animaux.

    Dans une explication "rationaliste", l'Empereur Jaune Huang Di aurait en effet superposé dans son emblème les armoiries de neuf bêtes des Royaumes qu'il aurait unifiés : un cou de serpent, les écailles d'une carpe, les cornes d'une biche, la face d'un Qílín (licorne/chimère), des serres d'aigle, des yeux de démons, des oreilles de boeuf, et des pattes de tigre. Seul l'Empereur avait le droit de porter les "Neuf Dragons" sur lui.

    Une Légende pour Qín : Lóng Mǔ, la Mère des Dragons

    Loin au sud des Royaumes combattants, plus au sud que le Royaume de Chu, à l'époque où Zhaoxiang régnait sur le Royaume de Qín, au bord de la Rivière de l'Ouest, Xī Jiāng, vivait une femme nommée Wen Shi, née vers 2408 après l'Empereur Jaune [290 avant notre ère].

    Elle trouva un jour une pierre étrange sur la rivière Xī Jiāng et la rapporta chez elle. Il en sortit cinq bêtes qui semblaient être des serpents et elle décida de les nourrir et de s'en occuper.

    Quand une sécheresse frappa sa région, elle demanda à ses cinq fils adoptifs de sauver son village et les serpents devinrent cinq Dragons qui apportèrent la pluie. C'est pourquoi on la nomma Lóng Mǔ (龍母), la Mère des Dragons.

    Après la réunification des Royaumes, quand le Premier Empereur Qín Shǐ Huángdì exigea que la vieille Lóng Mǔ, alors très âgée, vienne avec ses Cinq Dragons loin au nord dans sa capitale de Xiányáng, les Cinq Dragons bloquèrent le passage de Guìlín pour protéger leur Mère et empêcher que la vieille femme soit contrainte de faire ce voyage.

    Après sa mort, les Cinq Dragons l'enterrèrent et lui vouèrent un culte filial. Elle fut déifiée comme protectrice de la maternité et des Empereurs plus tardifs lui dédièrent même des Temples autour de la Rivière de l'ouest Xī Jiāng, dans la Province méridionale de Guangdong.

    Le jeu de rôle dès le Jardin d'enfants



    Après avoir repris la critique de certains psychanalystes, je vais être un hypocrite complet et me féliciter (via ce portail de Scriiipt) que Serge Tisseron (amateur de BD mais critique des images violentes dans les médias) défende le jeu de rôle.

    Pour lui, non seulement l'activité ne nuirait pas à l'équilibre psychique (dans la critique traditionnelle depuis Don Quichotte, l'excès d'activité imaginaire éloignerait du réel) mais pourrait même être positif pour apprendre la vie sociale et la communication dès le plus jeune âge.



    Mais cela dit, même si on croit à l'argument de Serge Tisseron sur les plus jeunes, cela ne prouve pas que le jeu de rôle ne soit pas nuisible pour de vieux trentenaires/quadragénaires qui veulent continuer des veillées à se raconter des histoires.

    J'ai parfois tendance à croire dans mon pessimisme constant que le jeu de rôle a vraiment une valeur de développement mais qu'ensuite pour les gens comme moi, il peut finir par s'accompagner de certaines pathologies légères, comme de simples obsessions. :)

    dimanche 22 janvier 2012

    Propositions du Bourget



    J'espère que François Hollande pourra développer un peu ses propositions par la suite. Pour l'instant, il n'y a rien de très choquant mais cela ne risque pas non plus de beaucoup "enthousiasmer".

    Le non-cumul des mandats, que le PS promet depuis longtemps, est une bonne idée pour la politique française même si ce genre de problème constitutionnel paraît toujours abstrait aux électeurs et n'attirera pas tellement de suffrages. La dose de proportionnelle est un cadeau aux Verts qui vont rendre la coalition de Gauche plurielle encore plus nécessaire à l'Assemblée.

    Il redit aussi encore une fois qu'il veut fusionner l'impôt sur le revenu et la CSG mais il faut espérer qu'il tiendra bon cette fois et ne le reportera pas à avril 2017. Mais Jérôme Cahuzac a l'air d'être contre, aussi bien du point de vue politique que sur le fond.

    Parmi les autres points, il y en a pour lesquels même l'inconstant Srkozy a été ou sera favorable (vote des étrangers aux élections locales, retrait des forces d'Afghanistan, mariage et adoption pour membres du même sexe). La baisse du salaire du Président fait bien entendu démagogique mais c'est le genre de petit "signe" qui semble absolument nécessaire après ce mandat.

    La politique du logement semble encore un peu timide, en dehors du fait d'augmenter les amendes pour les infractions à la loi SRU.

    Devoirs envers l'avenir




    François Bayrou a redit ce dimanche qu'il faudrait voter des budgets en équilibre pour cesser de transmettre nos dettes en augmentation "à nos enfants". Et il n'est bien entendu pas le seul. Presque tous les hommes politiques utilisent cela. C'est devenu un cliché moral contre ces déficits : on payera plus tard notre faute, comme la Cigale, on sacrifie nos générations futures à nos plaisirs immédiats égoïstes comme des parents dénaturés et irresponsables. Finalement, on compare la culture du déficit à l'indifférence vis-à-vis de la pollution, et on va ainsi s'autoriser de modifier d'éventuelles répartitions dans les solidarités présentes au nom d'un devoir de solidarité envers nos successeurs.

    Le but implicite de tout pathos sur "Nos Enfants" est de dire que la dette n'inquiète pas que les spéculateurs actuels, qu'elle représenterait une attitude moralement condamnable et ainsi on peut irriter une sorte de réflexe de ressentiment au nom d'une Justice inter-générationnelle : ceux qui ne se plieraient pas à l'austérité n'auraient pas seulement tort, ce seraient des passagers clandestins vampirisant de pauvres êtres innocents et qui n'ont pas les capacités de se faire entendre ou de défendre eux-mêmes leurs intérêts. Je m'attends à ce que les éléments de langage réutilisent aussi un jour "on prend en otage nos enfants" ou "on vend nos enfants", pour fusionner deux expressions efficaces pour lever le ressentiment.

    Paul Krugman (via Ceteris Paribus) avait expliqué en décembre dernier un argument pour expliquer que la dette nationale est plutôt transmettre une dette de l'Etat envers certains de nos enfants. Ce seront en majorité des créanciers nationaux qui auront ces bons du trésor : on devra tous de l'argent à certains de "nos enfants". Nos enfants n'auront pas été "vendus à la servitude" - si ce n'est que certains de nos enfants pourront en tirer des gains.

    Mais un sceptique pourrait ne pas être convaincu par Krugman, un Keynésien qui préconise d'attendre d'abord une reprise avant de lutter contre les déficits. Les commentateurs de sa note lui répondent surtout que ces "enfants" qui bénéficieront des créances seront "ceux des 1%". Mais il est justement pour une taxation plus juste envers "ceux de nos enfants qui s'enrichiront de nos dettes actuelles".

    Même un économiste nettement plus libéral économique que Krugman comme Tyler Cowen critiquait l'expression de "fardeau de la dette transmis à nos enfants" (en admettant que la dette était quand même un problème actuel, pour d'autres raisons).

    Often deficit critics focus on the moral issues. On average future generations are better off than their parents, at least in a growing economy. They are less well off if their parents spend more rather than less. Is this immoral on the part of the parents?

    Je vais un peu exagérer son argument, comme je ne connais rien à l'économie, et j'espère de ne pas tomber dans un sophisme.

    Par exemple, si on décide de couper des dépenses actuelles justifiables dans certaines infrastructures (prenons le cas le moins controversé), on peut aussi bien être accusé de reporter sur nos enfants des dépenses futures qu'ils accumuleront et devront prendre à cause de nos incuries présentes. Le bon rapport dépend de l'évolution des intérêts de la dette par rapport à l'évolution des coûts des investissements nécessaires.

    Pour parodier Helmut Schmidt ("Die Gewinne von heute sind die Investitionen von morgen und die Arbeitsplätze von übermorgen"), si les excédents d'aujourd'hui se payaient par le manque d'investissement de demain, c'est aussi "livrer" une dépense future à nos enfants.

    Même les centristes semblent s'effrayer (grâce à une propagande efficace) des 50,000 postes dans l'enseignement (surtout primaire) promis par Hollande, comme si le retour à un niveau plus proche de 2007 était une sorte de gabegie révolutionnaire.

    Il est compréhensible que Badinguet et son entourage considèrent l'instruction publique comme un investissement cher et peu "rentable" à leurs yeux : ils ne croient plus au compromis national de l'Etat-Providence de l'après-guerre ou même du Gaullisme, leurs enfants doivent de toute manière aller dans des écoles privées, ils n'ont plus envie de payer par leurs impôts l'éducation des autres, ils n'ont plus vraiment de souci de la culture ni même vraiment à long terme de la formation ou de la compétitivité nationale s'ils peuvent trouver des employés moins chers ailleurs. Ils ne cessent donc de la détruire pour justifier ensuite par son déclin d'en hâter la destruction. Mais la communauté nationale peut ne pas partager leurs priorités.

    Richard III n'aura pas lieu

    (Tous les jours au Théâtre 13 jusqu'au dimanche 12 février 2012)

    Matei Vișniec avait quitté la Roumanie de Ceaușescu en 1987 et il travaille depuis des décennies sur la signification de la dissidence face à l'expérience totalitaire.

    Sa pièce Richard III n'aura pas lieu se déroule de manière onirique dans la tête du metteur en scène et théoricien du théâtre Vsevolod Emilévitch Meyerhold (1874 – 1940) à la fin des années 1930 au moment où il veut monter une version de Richard III et va finir exécuté par la police stalinienne. La pièce porte donc sur des spectres qui viennent hanter la scène, comme les fantômes des victimes de Richard III (V, 3), mais la victime à sacrifier dans la tragédie est le metteur en scène lui-même.

    Je craignais un peu une lourdeur esthétique dans toute l'idée que la subversion théâtrale suffirait à inquiéter l'Etat totalitaire. Et il y aurait eu un risque pour le metteur en scène David Sztulman à vouloir forcer le trait d'une "mise en scène sur la mise en scène", un point de vue trop théorique du théâtre sur le théâtre. Mais le mélange d'humour et de fantastique réussit à atteindre un ton qui passe du rire à une amertume sombre. Il y a assez de joie communicative des acteurs pour qu'on puisse comprendre cet éloge spectaculaire du spectacle. Vișniec a capté un peu du décalage d'Anton Tchekhov entre comédie, farce et une sorte d'horreur propre à l'Etat totalitaire. Les autorités de censure qui se multiplient avec leurs acronymes et leurs exigences ne sont pas seulement "tatillonnes" mais passent dans le délire le plus stupide tout en révélant qu'ils ne comprennent que trop bien les plus infimes détails de la mise en scène.


    La pièce comprend des chansons et des danses et comme Meyerhold avait plus théorisé les techniques du corps et de la gestuelle que Stanislavski, même à l'intérieur de son esprit, ce sont les corps et leurs mimiques qui inquiètent plus les autorités staliniennes que le texte. Le Généralissime Staline n'apparaît pas alors comme un simple castrateur autoritaire mais comme un clown qui se veut paternel, compréhensif, voire rusé et subtil. Et on sait que Staline avait cette curiosité dans les despotes qu'il pouvait être à la fois brutal et suivre en effet la vie culturelle dans ses détails.

    Voilà un extrait de la pièce dans une version précédente de 2008 :



    Nicolas Hanny est un excellent spectre de Richard III, drôle, cauteleux, inquiétant. Les jeunes enfants qui interprètent l'Homme Nouveau sont justes et clairs. La pièce est réjouissante et une des meilleures créations que j'aie vue récemment.

    samedi 21 janvier 2012

    [JDR] Les mondes de Traveller (4)



    Nous continuons (voir partie 3) l'examen des descriptions du contexte laissé à Judges Guild, même si ces quatre secteurs ne sont plus officiels désormais dans l'univers de Traveller.

    Les produits Judges Guild ont dans l'ensemble une moins bonne réputation que ceux de GDW et la plupart semblent plus amateurs ou nettement moins "accomplis". Dans l'univers officiel, les noms des Sous-secteurs ont été globalement conservés mais les localisations et les noms des systèmes et des mondes ont souvent été complètement changés.

    La plupart furent écrits par Dave Sering. Il fit plusieurs scénarios pour D&D et ensuite pour DragonQuest, et c'est lui qui avait négocié les droits de Traveller auprès de GDW. Il faut dire que les deux compagnies JG et GDW étaient voisines dans l'Illinois : JG avait son siège à Decatur (la première demeure de Lincoln), GDW était à Normal (Bloomington, près de l'Illinois State University), à seulement 75km de Decatur et Dave Sering avait rencontré Marc Miller à une Convention de jeux à East Peoria. Il y a peut-être d'ailleurs une allusion à l'Illinois dans le supplément : un petit village pas loin de Decatur est nommé Mahomet (avec l'écriture française de Mohammed) et on trouve un système nommé Mohomet dans le Secteur Ley (sous-secteur E Fer de Lance, hexagone 0120).



  • Ley Lines et Tancred (1980)
    Dave Sering commence en 1980 par un supplément sur un seul système, Tancred (1232, Sous-secteur N Outreaumer), mais je vais commencer par parler du contexte plus général de tout le Secteur Ley (voir carte des quatre secteurs de Judges Guild : Ley, Glimmerdrift Reaches, Crucis Margin et "Maranantha-Alkahest" (Gateway)).

    Jeff Rients a réalisé un Wiki sur sa propre version du Domaine Gateway qui synthétise bien des données sur ces quatre secteurs (en ajoutant quelques éléments de sa campagne).

    Le secteur Ley est à la frontière "traîne" (trailing) de l'Imperium, avec une majorité des 410 systèmes à l'intérieur de la frontière. Le supplément est un peu plus court que le Supplement 3: Spinward Marches (44 pages), à 31 pages seulement (par la suite, au contraire, Judges Guild va ajouter des descriptions plus détaillées de certains systèmes).

    Je croyais que le nom venait des ley lines mais on parle d'une Maison noble des "DeLey".

    La capitale du Duché Impériale est Jullanar (Sous-secteur Ikhnaton, hexagone 0404), siège du Duc Impérial de Ley Alanir Kimar Re'Donan. En gros, les 10 sous-secteurs impériaux sont A Ikhnaton, B Cauchemar, E Fer de Lance, F Guadix, la moitié de G Tempête Titanesque, I Haut-seigneur, J Fédération Matarishane, K Mondes de la Frontière, N Outreaumer, O Prince des Diamants. Dans les Profondeurs d'Osiris (Secteur L) se trouve un petit empire de 22 mondes, l'Empire Sydymique (des Humains mutants de 2,40m) et il y a des influences de la théocratie Marlienne (dans le secteur de Glimmerdrift) sur le sous-secteur P Mondes extérieurs. En revanche, la référence à un "Tri-Empire" est trompeuse : il s'agit d'un Sous-Secteur des Glimmerdrift mais il n'y a aucune entité politique de ce nom.

    Le supplément se termine par une longue table des rencontres, quelques animaux locaux et une table des rumeurs amusante qui a notamment une idée de campagne : le "prince héritier de l'Empereur" est venu visiter récemment le secteur Ley et il vient de disparaître. Dans l'univers officiel, l'Empereur Strephon n'a eu qu'une fille, la Princesse impériale Iphegenia Alkhalikoi (Varian et Lucan sont des neveux de l'Empereur), mais il faudrait aussi chercher ce qui pourrait attirer des princes impériaux dans cette frontière.

    Les illustrations noir & blanc sont par un certain Ken Simpson et il a souvent recopié d'autres illustrations professionnelles (dont certaines étaient dans Images de science-fiction, voir page 22 ou page 28).

  • Tancred (1980)
    Tancred est un supplément plus long sur un seul système et une planète, Tancred II, Sous-secteur Outreaumer (corrigeons en Outremer) Hexagone 1232, UWP B8668367.

    La planète est assez grande (et riche) mais a une population (8) qui se compte en quelques centaines de millions. Le régime est une oligarchie aristocratique, régie par des Nobles héréditaires. Le Niveau Technologique est 7 (équivalent de la Terre à la fin du XXe siècle, années 1970, avec quelques satellites mais pas beaucoup d'accès aux vaisseaux interstellaires en dehors de l'Astroport de Hauteville et d'une Station de Scouts Impériaux près de la Géante Gazeuse Tancrède IV. Il y a une carte de la planète et des villes principales (qui sont très géométriques selon le modèle urbain américain).

    Tout le Sous-secteur Outremer a des mondes nommés d'après des références aux Croisades médiévales, à la Palestine et au Proche-Orient : Sidon, Naplouse, Jaffa, Haifa, Hebron, Ramallah, Tyr, Ibelin, Mirabel, Arsouf (la capitale du Sous-secteur d'Outremer), Ayyoubia, Ascalon (plus du côté du sous-secteur Thorstone les systèmes Cairo, Fatima et Petra). A Arsouf, le Comte Anselme De Ley est le suzerain du Sous-secteur.

    Le nom du système Tancred est une référence au chevalier croisé Tancrède de Hauteville (1170-1112). Cela explique le nom de la capitale de la planète, Hauteville (la dynastie des Normands de Sicile) et les autres villes comme Roger (pour Roger Guiscard) ou Bohémond. Mais le texte parle aussi de colons venus de "Melagar III", non-localisé (ce qui peut évoquer Melaghar en Inde), et il y a quelques noms de mondes indiens dans le secteur (Kailāsa, Kubera, Orissa).

    Les idées de scénario sont très militarisées, comme hélas très souvent dans Traveller. Une rébellion contre le régime recrute et se forme avec des Mercenaires. Mais il y a plusieurs niveaux d'intrigue politique, avec certaines factions de Nobles et de corporations impériales manipulant les Rebelles et certains Mercenaires prêts à récupérer la Rébellion contre leurs employeurs. Cela conduirait sans doute à des aventures qui tiendraient plus de séries de wargames tactiques (il y a d'ailleurs des schémas de véhicules pour jouer les batailles et j'imagine que ce serait bien adapté pour le wargame Striker qui sortit ensuite). Mais un des scénarios, où les personnages devront kidnapper un groupe d'enfants nobles, a quelques bonnes idées qui me donneraient envie de l'adapter en retirant un peu cet aspect de wargame.

    Il y eut quatre autres scénarios de Judges Guild situés dans ce Secteur Ley et ils sont paraît-il assez mauvais : JG 0350 Darthanon Queen (sous-secteur Guadix), JG 0710 Amycus Probe (Profondeurs d'Osiris) et sa suite JG 0720 Rogue Moon of Spinstorm, JG 0730 Simba Safari (Prince Diamant).

  • vendredi 20 janvier 2012

    La fin de "4% de l'Internet"


    Megaupload, le célèbre site de téléchargement, avait son siège à Hong Kong et en Nouvelle-Zélande mais leurs serveurs étaient distribué à travers le monde, dont 525 serveurs rien qu'en Virginie (voir aussi l'article d'OWNI). Il a quand même été bloqué par le FBI dans une investigation internationale (avec les polices de Hong Kong, des Pays-Bas, du Royaume-Uni, d'Allemagne, du Canada et des Philippines).

    Le fondateur, le pirate allemand millionnaire Kim "Dotcom" Schmitz a été arrêté avec plusieurs autres employés en Nouvelle-Zélande pour fraude au copyright. 50 millions de dollars ont été saisis. A l'annonce de l'arrestation de Julius Bencko, le "designer graphique" slovaque du site, l'Internet a été surpris d'apprendre qu'ils avaient un designer graphique.

    L'Inde avait déjà interdit l'an dernier sur son territoire Megaupload, RapidShare, MediaFire et d'autres sites suite à des plaintes de producteurs de Bollywood. Les MegaUploaders auraient peut-être dû se convertir au "kopimisme" pour plaider la liberté de culte.

    En décembre dernier, Megaupload avait mis une vidéo musicale publicitaire avec plusieurs chanteurs volontaires et Universal avait protesté contre cette promotion de leur pire ennemi par certains de ses propres artistes. Le PDG de la compagnie était supposé être le DJ Kasseem Dean dit "Swizz Beatz", époux de la chanteuse Alicia Keys. La publicité a-t-elle contribué à hâter cette inculpation ?

    Avant de faire de Kim "Dotcom" une sorte de "héros" de la "liberté de pirater", il faut rappeler que cet entrepreneur avait dénoncé auprès de PayPal certains de ses concurrents, Fileserve.com, Videobb.com, Filesonic.com, Wupload.com, Uploadstation.com, en disant qu'ils cultivaient beaucoup plus de violations du copyright que Megaupload.

    Add. Numerama dit qu'Universal Music avait envisagé un rapprochement avec MegaUpload.

    J'ai du mal à comprendre que certains "Anonymous" veuillent ainsi se méprendre sur le site, qui n'a strictement rien d'un WikiLeaks :

    Ils montrent aussi qu'en 2006 et 2007, MegaVideo s'était monté en repompant le contenu de YouTube, Kim Dotcom souhaitant dupliquer toutes les vidéos pour ensuite les exploiter commercialement.

    jeudi 19 janvier 2012

    Murs et "Mères Réfrigérateurs"



    Via Jean-Daniel Flaysakier, un article sur le documentaire Le Mur.

    Le film, par Sophie Robert, reprend la critique de la psychanalyse sur l'autisme en France et ridiculise certains psychanalystes interrogés dans le film.

    Mais même Roudinesco, qui occupe un peu la position d'avocate de la tradition freudienne en France, ne tente pas vraiment de les défendre vraiment :

    “The film is unfair,” Élisabeth Roudinesco, a French historian of psychoanalysis at the University of Paris VII, said. “It is fanatically anti-psychoanalysis. But I don’t think she’s manipulated the film to make them look ridiculous; rather, I think she chose to talk with very dogmatic psychoanalysts who come across as ridiculous.

    Ce sont pourtant des psychanalystes connus qui sont interrogés, comme Daniel Widlöcher (peu Lacanien), ou le pénible Naouri. Mais les Lacaniens sont les plus drôles dans le documentaire dans leur dogmatisme.

    Le documentaire montre qu'au moins certains psychanalystes continueraient encore aujourd'hui, comme au temps de Bruno Bettelheim, à culpabiliser les mères des enfants autistes (théorie dite des "Mères réfrigérateurs de Leo Kanner). Les partisans de la causalité non-génétique prétendent même que ce serait un lobby politique des parents qui voudraient imposer l'origine "naturaliste" génétique, largement acceptée aux USA.

    Mais une des faiblesses du film est de se fonder sur une sorte de "morale" ou d'anecdote, avec la comparaison de deux enfants et le succès des PECS sur l'un d'eux, ce qui donne une impression de simplification.

    [JDR] Les mondes de Traveller (3)



    En dehors de l'univers officiel de l'Imperium de Marc Miller, c'est Judges Guild qui fut la première compagnie à obtenir les droits de GDW de développer des suppléments pour Traveller.

    On oublie aujourd'hui à quel point l'idée même de "supplément" est quasiment née avec Judges Guild. Les jeux de société et les wargames avaient certes des "fanzines" et des propositions de règles optionnelles mais on n'imaginait pas tout un marché de "suites" au jeu. Les fondateurs comme Bob Bledsaw (souvent orthographié "Bledsoe" sur les modules) racontent que Gary Gygax, même s'il préparait déjà ses propres suppléments à D&D, leur avait accordé ce privilège parce qu'il avait sous-estimé l'importance que des modules et aides de jeu auraient dans le jeu de rôle (ce droit leur fut d'ailleurs vite retiré par TSR).

    Les rapports entre GDW et JG semblent être demeurés meilleurs et d'ailleurs GDW maintint longtemps une politique plus ouverte que TSR à l'égard de petits groupes et éditeurs : par exemple FASA Corporation de Jordan Weisman (compagnie qui devint si célèbre ensuite avec des jeux comme Star Trek, BattleTech puis Shadowrun) est née comme une compagnie de suppléments pour Traveller.

    Je ne sais comment couvrir ces divers suppléments sans être ennuyeux. Les Atlas pour Traveller, qui sont souvent seulement des listes de données, sont difficiles à commenter.

    Ce site a donné la liste des suppléments JG pour Traveller :

    JG75 Judges Shield/Referee Screen
    JG78 Log Book
    JG89 Starships and Spacecraft
    JG105 Dra'k'ne Station
    JG330 Tancred
    JG340 Ley Sector
    JG350 Darthanon Queen
    JG480 Fifty Starbases
    JG490 Glimmerdrift Reaches
    JG500 Doom of the Singing Star
    JG520 Navigator's Starcharts
    JG590 Crucis Margin Sector
    JG640 Marooned on Ghostring
    JG710 Amycus Probe
    JG720 Rogue Moon of Spinstorme
    JG730 Simba Safari
    JG760 Marantha-Alkahest Sector
    JG880 Corsairs of the Turku Waste
    JG940 Waspwinter
    JG960 Darkling Ship

    Commençons donc par la première aventure, même si on ne couvrira sans doute pas tout par la suite (je n'ai d'ailleurs pas tout, n'ayant pas le CD-Rom des "Traveller Apocrypha").

  • Dra'k'ne Station (1979)
    Ce scénario de 64 pages paru en 1979 aurait réussi à paraître avant Adventure 1: Kinunir. C'est écrit par Bill Paley (qui travailla aussi un peu pour FASA par la suite). Les illustrations sont surtout par Kevin Siembieda (qui fonda ensuite la compagnie Palladium), avec deux dessins par Paul Jaquays.

    Ce premier module est surtout un simple "Donjon" dans l'espace. Il s'agit d'une station de recherche creusée dans un astéroïde avec un immense labyrinthe de douzaines et douzaines de salles surtout vides, avec quelques objets étranges à inspecter (2 chances sur 6 de ne pas fonctionner) et quelques robots. Il y a même une table de génération aléatoire de "Machins à décrire mais dont on ne sait pas à quoi ils étaient censés servir". Je n'ai pas vu de grand secret à découvrir, ni de quoi que ce soit qui mériterait vraiment de piller cet astéroïde. Je me demande même si le vieux Metamorphosis Alpha ne serait pas déjà un scénario plus intéressant avec ses mutants.


    Tout cela serait assez "oubliable", s'il n'y avait quand même des interactions avec des êtres vivants, une espèce intelligente nouvelle derrière cette station abandonnée, les Dra'k'ne.

    Les Dra'K'ne sont de grandes créatures (4 mètres) et ont une symétrie radiale avec 3 pieds, 3 bras, 3 langues et 3 yeux. Malgré l'illustration de Kevin Siembieda, ils ressemblent sous certains points à de grands "reptiles" comme des Dinosaures et sont d'ailleurs habitués à un climat chaud et humide de jungle. Ils sont très développés et ont naguère eu un vaste empire de 100 parsecs de rayon, à 3000 parsecs de distance. Mais leur ancien Empire s'est écroulé et ils ont été massacrés par leurs ennemis, les Gnr*?!sht*lup (certains sons n'existent que pour des bouches à trois langues) et leurs alliés.

    Cette Station était un de leurs postes avancés secrets d'espionnage et ne contient plus que des Dra'K'ne en cryogénie. Ils sont collectivistes fanatiques, très xénophobes et, ovipares, ils détestent surtout les mammifères (peut-être Bill Paley a-t-il été influencés par l'explication écologique sur les K'kree qui détestent tous les carnivores). En plus, si on les réveille (l'un d'eux, Freg'sh'ne, UPP C4D893, est déjà éveillé à l'arrivée des personnages-joueurs), il faudra donc faire face à des paranoïaques dont l'espèce a été exterminée par une coalition d'espèces étrangères.

    Leur monde d'origine aurait comme UWP A697A99-B (donc une petite planète très océanique mais avec un régime bureaucratique et une forte population à haut niveau technologique) et leurs caractéristiques personnelles ont Force +6, Dextérité -3, Endurance +7, Intelligence +1, Education +2, Social -4).

    Un problème de cette espèce si on voulait l'ajouter dans l'univers officiel est qu'elle ferait double emploi avec les Drak Ne'Vha/Drakarans.

    Les Drakarans vivent (direction "direct/centre") dans l'espace du Consulat Jhodani et des Vargr (Secteur Ghoekhnael/Anzsidiadl ). Ils ont été ajoutés dans l'univers officiel de l'Imperium dans GURPS Alien Races vol. 1, p. 100-112 par David Pulver, tiré de son autre supplément pour SpaceMaster, Aliens & Artefacts p. 15-20 (mais j'ignore quel est le degré de "canonicité"). Les Dra'K'ne sont des sauriens à trois yeux, les Drak Ne'Vha sont de petits Tyrannosaures cyclopes, la ressemblance est proche au point que je crois à une influence inconsciente. En revanche, les Drakarans sont de taille plus proche des humanoïdes ou même de Droynes alors que les Dra'k'ne sont vraiment immenses.

    On imagine que les Gnr*?!sht*lup qui les ont massacrés pourraient être un nom dra'k'ne pour les "Anciens" et que ces derniers auraient pu s'amuser avec les gènes des Dra'K'ne pour fabriquer les Drakarans dans cet espace Vargr, mais je ne vois pas trop l'utilité pour eux (j'ai le même problème avec les différentes interventions des Anciens) ou comment cela pourrait fournir des idées de scénarios si on n'a pas un élément original à ajouter en plus sur un secret des Dra'k'ne.

    L'idée la plus simple serait un "McGuffin" de haute technologie inconnue à trouver mais c'est trop prévisible et peut déstabiliser le jeu. Ou alors les Dra'k'ne connaissent le monde d'origine des Anciens. Ou alors ils connaissent un des secrets, comme par exemple la source de l'Onde Impératrice Psi qui va bientôt dévaster le Consulat Jhodani dans l'histoire canonique ? Et puisqu'on parle de "psioniques", c'est peut-être tout aussi prévisible que la Haute Technologie mais tant pis : peut-être que leur biologie est la seule à résister aux pouvoirs psi des Anciens, ce qui expliquerait le génocide ? Ou alors ils ont un pouvoir psi latent d'annuler les autres pouvoirs psi (Psionic Dampener), ce qui pourrait rendre toute l'interaction avec les Jhodanis plus intéressante ?

    L'idée d'un camouflage en astéroïde a pu directement inspirer un des détails de l'Adventure 6 Expedition to Zhodane, qui utilise un plus petit vaisseau "espion" en forme d'astéroïde. Comme ce module est un de mes favoris, cela me rend plus indulgent pour ce scénario archaïque. Mais je n'imagine pas le jouer avec ses centaines de salles monotones. Comment les premiers joueurs pouvaient-ils être aussi patients ?

  • mercredi 18 janvier 2012

    Re: GM Questionnaire

    23 Answers to the GM Questionnaire

  • 1. If you had to pick a single invention in a game you were most proud of what would it be?

    That "Youth Potion" my sister's Alchemist PC became addicted to.

    That was really fun, I had not foreseen her character could become an infant.

  • 2. When was the last time you GMed?

    I co-refereed in October 2010 (Tango!) and GMed a small module in August 2010. It's been a long time.

  • 3. When was the last time you played?

    October 2011.

  • 4. Give us a one-sentence pitch for an adventure you haven't run but would like to.

    V&V: You play your counterparts in another possible world where you have superpowers and where you live in the 1970's.

    And other Ideas for Superhero RPGs.

  • 5. What do you do while you wait for players to do things?

    I give secret notes to other players and instill paranoia.

  • 6. What, if anything, do you eat while you play?

    Pimm's and chocolate.

  • 7. Do you find GMing physically exhausting?

    Yes, and painful for my back because I hate sitting still.

  • 8. What was the last interesting (to you, anyway) thing you remember a PC you were running doing?

    When I used the Iron Lawstaff as a lightning rod.

  • 9. Do your players take your serious setting and make it unserious? Vice versa? Neither?

    Yes, I try not to put any discipline in my game.

  • 10. What do you do with goblins?

    More half-goblins?

  • 11. What was the last non-RPG thing you saw that you converted into game material (background, setting, trap, etc.)?

    Owls.

  • 12. What's the funniest table moment you can remember right now?

    That time when we met ourselves and discovered we were not ourselves, we were the clones.

  • 13. What was the last game book you looked at--aside from things you referenced in a game--why were you looking at it?

    Traveller Alien Books. I am bored by Monster manuals but I love books about sentient species and other civilizations.

  • 14. Who's your idea of the perfect RPG illustrator?

    The weird classicism of Miles Teves but with the dynamism and clarity of Alan Davis

  • 15. Does your game ever make your players genuinely afraid?

    Not really.

  • 16. What was the best time you ever had running an adventure you didn't write? (If ever)
    Expedition to Zhodane. That's still my favorite adventure.

  • 17. What would be the ideal physical set up to run a game in?
    Our Fortress of Solitude. On the Moon.

  • 18. If you had to think of the two most disparate games or game products that you like what would they be?

    C&S and Heroquest.

  • 19. If you had to think of the most disparate influences overall on your game, what would they be?

    Philosophy and comic-books.

  • 20. As a GM, what kind of player do you want at your table?

    Friends who love stories. They can be any type, immature powergamers or thespians.

    Patient but not too casual gamers.

    People who would not imagine fighting each other for the loot.

  • 21. What's a real life experience you've translated into game terms?

    I used a travel to Egypt as a basis for my (unfinished) Mummy Campaign.

  • 22. Is there an RPG product that you wish existed but doesn't?

    Yes, a good Indian Mythology Epic RPG. I wish someone did that so that I did not have to procrastinate on doing Bhāratavarṣa.

    I still want to play a game about Artificial Intelligences but I did not find a good solution for post-singularity RPGs.

  • 23. Is there anyone you know who you talk about RPGs with who doesn't play? How do those conversations go?

    My blog readers. I annoy them with all my "Let Me Tell You About That Time When..." stories.

    But they learnt how to skip the posts.

  • mardi 17 janvier 2012

    Quelques doutes sur Spinoza



    Spinoza, c'est curieux.

    Aucun grand philosophe classique n'avait été aussi audacieux et n'avait publié à la fois une théorie déiste ou "athée" en un certain sens du terme et une politique quasi-démocratique. Personne n'avait ainsi dépassé la théologie, la téléologie et même une certaine vision "moralisante" du monde, pas même Machiavel ou Hobbes.

    Mais en même temps, il y a des raisonnements difficiles à prendre au premier degré et parfois (si en tout cas Spinoza est sérieux et ne demande pas une double lecture "ironique" comme le pense Leo Strauss) d'un conservatisme extrême qui pourrait avaliser tout status quo.

    Ainsi, toute la lettre du Traité théologico-politique dit que Dieu a voulu faire un lien politique avec les Hébreux (l'Alliance) puis qu'il a voulu y mettre fin et inscrire désormais son Alliance dans la raison (passage au Christ comme "salut des ignorants"). Mais on sait bien que le Dieu de Spinoza ne veut rien. Il ne peut donc pas être sérieux quand il adopte ce vocabulaire des caprices contingents de l'histoire des religions.

    La récente compilation d'études d'Alexandre Matheron, Etudes sur Spinoza et les philosophes de l'âge classique a des articles vraiment très clairs (le petit article "Le droit du plus fort : Hobbes contre Spinoza" est un rare cas où de l'histoire de la philo approche de la philo, ce qui serait le cas idéal).

    Mais dans sa dévotion pour Spinoza, il dit souvent (dans le chapitre sur Negri par exemple) que Spinoza échapperait à toute "idéalisation" de l'Etat, contrairement à Hobbes, Rousseau (celui du Contrat social) et surtout Hegel, parce que pour Spinoza l'Etat n'est pas au-dessus des rapport de forces, il n'en est qu'une forme certes plus accomplie.

    Mais je lis le Chapitre XIX du Traité théologico-politique qui dit clairement que rien de bon ne peut durer sans le Pouvoir ("sublato imperio, nihil boni potest consistere", traduit "sans l'Etat" par Appuhn). J'imagine qu'il va simplement dire que c'est une sorte de théorie du "moindre mal" (comme le "bien" est relatif), mais l'Etat paraît donc rationnel et nécessaire à la vie collective sous la Raison pour rendre la Raison effective. Certes, Spinoza ne dirait pas que l'Etat est la rationalité absolue accomplie comme chez Hegel, mais je ne vois presque qu'une différence de degrés (en dehors du fait que Spinoza conserverait une sorte de théorie du Contrat entre des puissances d'agir alors que Hegel veut que la rationalité échappe à cette genèse).

    Ces chapitres sont curieux. Au chapitre XVIII, Spinoza dit qu'on ne peut ni ne doit chasser un tyran car si on en a déjà un, un autre prendra sa place (Cromwell à la place de Charles Ier). Soit on est dans un Etat libre, soit on ne pourra pas la restaurer. Donc il dit que la Hollande peut rester libre tant qu'elle n'a pas eu encore son propre roi mais seulement des comtes locaux. Mais les Provinces Unies ont alors bien réussi à se débarrasser du Roi d'Espagne. Et on ne comprend pas pourquoi il mettrait cette limite aux puissances des multitudes, en dehors d'un simple conseil de prudence.

    La fin du chapitre XIX a un passage que je ne comprends pas du tout, tout à la fin : " tametsi caelibes non sint, absolute habent" : "les princes (séculiers) tiennent un pouvoir absolu, bien qu'ils ne soient pas célibataires". Que vient faire cette histoire de célibat dans une section sur la prééminence du pouvoir séculier sur le pouvoir religieux ? Il est en train de plaisanter que même le Roi est tyrannisé par la Reine ?? Ce n'est pas vraiment son genre que d'insérer ce genre de blagues...

    De manière générale, il y a parfois des passages "machiavéliens" où Spinoza a vraiment l'air de vouloir réduire tout droit au fait. Le dernier paragraphe du Traité politique (XI, 4) dit en gros qu'il est naturel que les femmes soient soumises aux hommes puisqu'elles n'ont pas réussi à se soulever contre le pouvoir masculin.

    S’il était naturel que les femmes fussent égales aux hommes et pussent rivaliser avec eux tant par la grandeur d’âme que par l’intelligence qui constitue avant tout la puissance de l’homme et partant son droit, à coup sûr, parmi tant de nations différentes, on en verrait quelques-unes où les deux sexes gouverneraient également, et d’autres où les hommes seraient gouvernés par les femmes et élevés de manière à être moins forts par l’intelligence. Comme pareille chose n’arrive nulle part, on peut affirmer sans restriction que la nature n’a pas donné aux femmes un droit égal à celui des hommes, mais qu’elles sont obligées de leur céder ; donc il ne peut pas arriver que les deux sexes gouvernent également, encore moins que les hommes soient gouvernés par les femmes.

    Si la philosophie "immanentiste" ou "réaliste" consiste à entériner les rapport de force effectifs comme des faits indépassables, cela réduit un peu toute l'image de subversion de l'auteur. Les gauchistes aiment voir en Spinoza une sorte de "dévoilement" (comme Machiavel) que les rapport de force ne s'arrêtent pas dans la démocratie formelle. Mais cette théorie qui veut éviter le discours de la "justification" morale semblerait aussi arriver à des conclusions qui semblent difficiles à justifier rationnellement.

    Add. Je viens d'ajouter une entrée Adriaan Koerbagh à Wikipedia, comme l'édition Lagrée-Moreau du TTP en parlait et que Wikipedia FR n'avait rien pour l'instant.