John Holbo expose un joli paradoxe sur les Partis dans un système bi-polaire : si un Parti A est très monolithique et "partisan" (comme le Parti républicain depuis qu'ils ont perdu leur aile modérée) et que l'autre Parti B est plus partagé et "bi-partisan" (comme l'est encore un peu le Parti démocrate avec son aile conservatrice), les initiatives de A seront parfois votées avec des votes des deux Partis alors que toutes celles de B n'auront guère que les votes de B (voire d'une sous-partie de B). A pourra donc dire qu'il est plus "bipartisan" que B, parce qu'en fait B l'est plus que A.
C'est ainsi que les Républicains peuvent se plaindre qu'ils ont fait voter leurs lois avec le soutien de certains Démocrates alors que les dernières initiatives d'Obama ont Zéro voix républicaine (Olympia Snowe ayant reculé).
Ou autrement dit, le Parti le plus "bipartisan" profite ainsi au parti le plus monolithique en lui apportant un soutien unilatéral, sans réciprocité. Donc on s'attendrait à ce que le système tende vers une bi-polarisation accrue. Il serait donc surprenant que le système à deux partis des Etats-Unis ait pu garder si longtemps une structure bi-partisane, mais l'explication est la structure fédérale et l'histoire des USA depuis la Guerre Civile (l'Apartheid institutionnel depuis Plessy v. Ferguson), où l'affiliation régionale comptait plus que la structure du Parti. Les Démocrates du Sud étaient plus à droite que les Républicains du Nord ou de l'Ouest et même après le Grand Réalignement des années 60-80 (la Stratégie Sudiste de Goldwater, Nixon et Reagan), il y encore quelques Démocrates conservateurs (notamment dans le Sud et le Middle West) mais quasiment plus de Républicains modérés. Les années Bush ont radicalisé la bipolarisation avec les derniers changements de Partis (Jeffords ou Specter devenant démocrates et Zell Miller devenant républicain, avec l'hypocrisie finale de Lieberman qui agit comme un Républicain tout en prétendant parasiter une aile indépendante à la droite des Démocrates).
Ezra Klein me semble pinailler lorsqu'il objecte que les Démocrates sont devenus plus partisans aussi et qu'après tout ils avaient quand même réussi à s'opposer aux projets de privatisation de la retraite sous Bush (mais même les Républicains percevaient que l'idée serait très impopulaire dans leur électorat).
C'est tout au plus une réaction face à la droitisation du GOP. Ce graphique de Polarized America (via un commentaire à Holbo) confirme en gros que l'intuition du sens commun est correcte : le Parti républicain s'est considérablement droitisé à partir de Reagan alors que les ailes du Parti démocrates sont restées plus stables (avec un glissement relatif vers l'aile gauche, sans revenir au Progressisme "populiste" du début du XXe siècle).
Il y a deux grandes hypothèses sur l'abandon de la politique "bi-partisane" chez Obama depuis le vote de la Réforme "Affordable Care Act" en ce début 2010 (comme disait Paul Krugman : où était ce Barack Obama si énergique l'an dernier). La première, obamaniaque, veut qu'il soit un stratège brillant qui savait qu'elle échouerait mais qui ne la tentait que pour démontrer au public qu'elle ne pouvait qu'échouer. La seconde (qui me semble un peu plus vraisemblable) est qu'il espérait vraiment le soutien d'Olympia Snowe l'an dernier et qu'il n'a tiré qu'assez tard la conclusion qu'il devrait passer à une offensive même si elle était perçue comme plus "partisane".
Add. Ce genre de phrase stupide et condescendante de Badinguet est le genre de choses que nous pouvons certes tous penser mais qu'un Chef de l'Etat un peu responsable et sérieux ne penserait même pas à dire s'il ne voulait conforter tous les pires clichés sur l'arrogance française.
Politiquement, c'est sot. Dans le détail, c'est très simplificateur (les Américains répondront que les pauvres avaient déjà le Medicaid même s'ils surestiment parfois son application, une majorité de pauvres n'y ayant pas droit).
Theatre: A Very Wooster Holiday
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*Happy Christmas, Jeeves* by Heidi McElrath and Nathan Kessler-Jeffrey,
directed by Karen Lund, based on the stories of PG Wodehouse Taproot
Theatre Com...
Il y a 54 minutes
6 commentaires:
La seule raison de l'existence du bipartisme c'est le mode de scrutin.
=> Anonyme : Non. L'explication mécaniste "à la Duverger" par le mode de scrutin, même si elle est populaire, ne se vérifie pratiquement jamais. Elle n'explique pas pourquoi, par exemple, le Canada, qui applique aussi le "First past the post" est très loin d'avoir un système bipartisan. Ni pourquoi la Grande-Bretagne qui a le même mode de scrutin connait l'existence de "deux partis et demi" (ce qui était également le cas de l'Allemagne fédérale avant l'apparition des Verts alors que le mode de scrutin y était radicalement différent).
Le paradoxe du partisan est très ancien et sa première formulation est due à Montaigne analysant les choix politiques d'Henri IV : celui-ci avait demandé à deux théologiens, un catholique et un protestant, ce qu'il en était du salut de l'autre camp selon eux ; le catholique aurait dit que les protestants allaient tous brûler en enfer tandis que le protestant aurait reconnu que certains catholiques iraient au ciel ; Henri IV en avait conclu qu'il valait mieux être catholique ; Montaigne condamne évidemment cette prime à l'intolérance. Son analyse recoupe vraiment la tienne sur de nombreux points.
> Anonyme & Maruku
Maruku me semble avoir raison : la "loi" de Duverger (Uninominal Majoritaire à Un Tour produit un système à deux partis) a de nombreux contre-exemples (l'entrée Wiki en anglais est plus développée que son équivalent en français).
Pour tester la "corrélation" de Duverger, il faudrait sans doute un pays avec un système multi-parti solidement implanté qui passe à un scrutin uninominal et voir si au bout de quelques temps le système évolue. Ou la reciproque : un pays avec un système à deux partis changerait-il en adoptant un système à deux tours ou bien un système proportionnel.
Dans le cas britannique, le multipartisme relatif ("2 Partis et demi) n'existe-t-il pas que de manière régional (en gros les Libéraux-démocrates en Cornouailles, plus les partis écossais ou unionistes) ?
Mais de toute manière le paradoxe concerne le problème du "bipartisan" au sens de la coalition "consensuelle" par compromis (que les deux partis doivent travailler ensemble) et non pas la question du "bipartisme" en soi (qu'il y ait deux partis principaux et hégémoniques).
Notre système majoritaire à deux tours a des limites mais il me semble quand même un peu moins écraser les petits partis que le système britannique (sauf quand le petit parti est vraiment isolé à la marge et sans alliés). Le système majoritaire à deux tours pourrait cultiver un petit parti centriste même si cela n'arrive plus vraiment de fait (nous avons un Parti majoritaire et une Coalition d'opposition, plus les extrêmes sans alliés).
> Goodtime
Très jolie comparaison. Dans les deux cas, c'est donc le parti "ouvert" qui y perd dans ce jeu. C'est en général le plus dogmatique qui paraît le plus convaincant (il doit y avoir un type de paradoxe en théorie des jeux qui corresponde à ce cercle vicieux - comme un passager clandestin qui pourraient d'autant mieux profiter d'un bien commun qu'il a refusé d'y contribuer ou un agressif unilatéral qui profiterait de la coopération, contrairement au Tit for Tat d'un jeu du Prisonnier itéré).
Il y a quand même une différence : dans ce Paradoxe de l'intolérant, la solution la moins ouverte l'emporte parce que l'intolérant se dit explicitement moins ouvert (et s'en glorifie) alors que dans le cas du Parti monolithique, il va prétendre que sa politique est la plus bi-partisane alors qu'elle l'est moins (et même parce qu'elle l'est moins). Cela paraît presque dialectique comme inversion.
Très intéressant débat sur les deux points discutés plus haut.
Sur la phrase de Sarkozy, il faut se souvenir qu'il faisait partie des 60 députés ayant saisi le Conseil Constitutionnel pour faire annuler la Couverture Médicale Universelle (saisine intégralement rejetée, à un article périphérique près).
Oh, well.
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