vendredi 27 mars 2015

Les "Terres sauvages de Fantaisie épique"


J'ai déjà parlé des Wilderlands of High Fantasy (et de la version Majestic Wilderlands, à l'échelle différente) et je retombe sur un texte que j'avais écrit il y a environ 5 ans en cas d'une introduction à une campagne Old School qui n'eut jamais lieu. Le projet n'était pas vraiment d'introduire les joueurs mais plutôt pour le MJ de mieux saisir les relations entre les différentes parties de ce monde qui n'est pas vraiment synthétisé. Je me concentre seulement sur les alentours de la Cité-Etat du Hégémon Invincible (C.E.H.I., ou du Suzerain InvincibleCSIO, City-State of the Invincible Overlord), la première cité de jeu de rôle. Cet endroit n'est pas sans problème : (1) je ne comprends pas très bien comment la Cité peut être à la fois très ancienne, très prospère et si isolée dans une région assez inhospitalière, entourée d'une énorme forêt peuplée d'Orcs ; (2) je n'ai toujours pas compris dans quel sens s'écoulaient les eaux dans cet étrange estuaire de Roglaroon où se trouve la C.E.H.I.

(Cliquez pour voir le côté oriental de la carte)

Histoire

Les Temps Obscurs
Il y a des milliers d'années, notre monde fut détruit par la Guerre Ultime entre les Dieux, les Démons et les Dragons. Certains de ces Démons venaient des Cieux dans leurs montures de fer et rasaient des civilisations entières. Plus tard, la Guerre des Pieux et des Philosophes opposa les mortels qui voulaient s'affilier à ce conflit cosmique, et les "Philosophes" impies qui voulaient utiliser les énergies démoniaques disparurent dans le conflit. Le monde n'était plus que ruines éparses, avec de rares communautés de survivants isolés.

L'Empire viridien
Au nord du monde, il y a environ quarante siècles, Armadad Bog, un obscur Dieu des Abysses, Dieu de la Mer et de la Mort séduisit une mortelle sirène et créa un nouveau peuple hybride et amphibie d'hommes verdâtres nommé les Viridiens. Ils soumirent certains tritons et les hommes de la surface et recréèrent un nouvel Empire thalassocratique, l'Empire vert. La plupart des Viridiens étaient aussi maléfique que leur Dieu ancestral et leur grande capitale de Viridistan, la « Cité des Epices de l'Empereur du Monde », est depuis l'aube de notre histoire un lieu d'oppression et de tourments, le centre d'un asservissement universel. Mais ce furent aussi eux et par les légions de leurs esclaves qu'un ordre précaire de la civilisation réapparut enfin dans les Terres Sauvages. Leur Empire Déclinant est maintenant millénaire et leur race est mourante au point que leurs divers sujets se seraient déjà affranchis sans la crainte de certaines sinistres sorcelleries.
[Pour ceux qui connaissent Glorantha, ce peuple pourrait faire penser aux Waertagi, s'ils étaient plus clairement maléfiques et s'ils avaient fondé un Empire sur leurs comptoirs.]

La fondation de la Cité-Etat du Hégémon Invincible
Sur notre territoire de la Péninsule de Pazidan qu'on appelle « les Terres Sauvages », les villes n'étaient plus que décombres anciennes de la Guerre Ultime. Les peuples vivaient dans la barbarie, avec des nomades qui ne vivaient plus que de chasses, de rapines et du pillage de ces vestiges. Seuls les Nains du Mont Tonnerre avaient pu garder la torche de la civilisation dans leurs cavernes profondes, avant de devoir en sortir sous l'assaut de certains groupes des derniers Dragons comme Analegorn le Rouge.

Ce furent ces Nains qui en cherchant dans les énormes Marais, en plein milieu des terres dans l'estuaire maritime du fleuve Roglaroon découvrirent, il y a plus de mille ans, les restes submergés d'une métropole abandonnée qui aurait pu rivaliser dans la nuit des temps avec la Cité de Viridistan. On ignore pourquoi elle avait été ainsi oubliée mais il s'agissait de l'ancienne capitale de l'Empire des Dragons. Des Humains des Landes de Raclelune descendraient même de cet Etat antique et aboli. Malgré les périls de ces Marais des Brumes marines et des Marais des Trolls, et les hordes sauvages de créatures inhumaines, la colonie des Ruines se développa. Cette Cité perdue, dont les noms variaient, comme « Rhamsandron » dans certains textes érudits, était entre une rivière et un estuaire marin, mais loin de la côte. L'estuaire s'enfonce au sud de la Grande Forêt Famine (Dearthwood) et l'embouchure, alimentée par des rivières d'eau douce est plus au nord-est, dans la baie consacrée à la déesse Modron.

Les Nains y installèrent quelques mines mais au fil des siècles des humains venus du monde entier furent attirés par cette étrange métropole dans le Marais, et peu à peu les Humains remplacèrent les Nains – qui demeurent la principale minorité (environ un habitant sur dix) et les alliés historiques de la Cité. Les Humains, issus de peuples divers, farouches barbares tharbriens, alryens plus urbanisés, altaniens à la peau rouge du sud, skandiks pâles du nord, peuplades gynocratiques venues de la lointaine Ghinor, installèrent une monarchie qu'on appelle l'Hégémon Invincible.
Les lois sont draconiennes et violentes et pourtant la Cité est aussi une des plus tolérante en matière religieuse (contrairement à l'oppression du Viridistan). La Cité est dans un état de guerre permanent contre son propre environnement et les nuées de moustiques des Marais. Elle n'a jamais pu au fil des siècles réussir à réduire considérablement les Marais ou les créatures sylvestres de la Forêt Famine, peuplé d'Orcs Sauvages de la Griffe Violette qui adorent une Déesse sanglante [sans doute un aspect de Kālī]. L'embouchure de l'estuaire à Modron, au nord-est, étaient si plein d'invasions de monstres que les habitants du Port étaient périodiquement tous massacrés, ce qui lui donne une ambiance encore plus spectrale et inquiétante que la Cité, malgré les efforts sempiternels pour protéger Modron et son rôle si central pour les débouchés vers la Mer Couleur de Vin.
Les travaux pour drainer les Marais des Brumes sont dévorés par des Trolls ou des Sauriens, les expéditions des colons de la Forêt et même des Druides n'ont jamais pu explorer le cœur obscur de ces bois touffus. Aucun espion n'a jamais pu trouver les refuges secrets des Orcs de la Griffe rouge.



L'essor de la Cité-Etat et la sujétion au Viridistan
Et malgré la lenteur de ces progrès, la Cité-Etat réussit à prospérer, carrefour des diverses tribus barbares, de la métallurgie naine, des marchands venus de la côte orientale et de l'Empire Viridien à l'ouest. Même si la Cité ne devint jamais une capitale organisée de tout un Royaume hiérarchique ou féodale, elle obtint un tribut de toutes les communautés des Territoires Sauvages et occupait nettement une position d'hégémonie sur tous ces villages. Le Conseil de cette Ligue est censé être une Assemblée représentative mais c'est le Potentat de la Cité-Etat qui a en réalité le dernier mot, au point que ce Sénat n'est devenu que cérémoniel. Certes, le grand port de Warwik, fondé par des rebelles, plus au nord, ne cesse de rivaliser avec la Cité (la population atteint environ la moitié de celle de la Cité-Etat, 40 000 habitants) et de chercher à mettre fin au tribut grâce à quelques raids de pirates, et des Skandiks ont fondés de petits royaumes sur les côtes orientales du côté de la Rune de la Mer – en en chassant la population gynocratique.

Mais lorsque éclata la Guerre contre le Viridistan, la dynastie des Hégémons comprit qu'ils ne pourraient pas garder leurs surnoms d'Invincibles contre les Sorciers viridiens et acceptèrent à leur tour de payer tribut. La Cité n'a pourtant jamais été réellement « conquise » littéralement par l'Empire viridien mais l'Empereur du Monde la considère bien sûr comme l'une de ses « Provinces ». Les Princes et Despotes successifs de la Cité protestaient souvent contre ces tributs ou relançaient une rébellion, mais ils étaient finalement contraints de reprendre leurs payements à chaque fois que les Viridiens prouvaient que leurs Légions nourries de sombre sorcellerie possèdent des flèches et traits magiques qui défient même les meilleures armures forgées par les Nains.

La Crise viridienne : le Dernier Empereur du Monde
Il y a environ 150 ans, l'Empereur viridien Cneminadus abandonna des siècles de traditions démonologiques et se convertit à une secte pacifiste, millénariste et monothéiste d'Herboristes venus des Cités Saintes du Désert, le culte de Mycr. Cela déclencha une Guerre civile sans précédent et les derniers cousins de la famille impériale, descendants du sombre Armadad Bog, s'entretuèrent Un sombre sorcier viridien, Hautulin Seheitt, le dernier "Vert Pur" avec sa soeur et épouse, assassina l'Empereur hérétique et se fit couronner à sa place. Il proscrivit le culte de Mycr, qui était devenu si influent dans le Marché des Epices dont dépendait l'Empire et les Mycrétiens persécutés commencèrent pour certains leur exode (même si les Herboristes mycrétiens sont encore nombreux à se cacher dans la ville et dans les catacombes de Viridistan).

L'Empereur Vert a allongé sa vie par son Art impie mais n'a pas eu d'héritiers après 150 ans de règne. On prophétise déjà qu'il serait l'Empereur Ultime du Viridistan. On le dit si déformé par ses contacts avec les Démons qu'il vit voilé et ne se montre plus à ses sujets. L'Empire accélère son déclin et des Démons commencent à lui échapper pour se conquérir leurs propres fiefs. Plus inquiétant encore, des Ordres de Sorcières, peut-être encore plus maléfiques que lui, semblent dépasser sa propre puissance. Des tritons des Océans espèrent enfin s'affranchir du joug viridien et mettre fin à leur Thalassocratie. Et les fidèles Mycrétiens, pacifistes ou pas, sont toujours un ennemi intérieur qui régule en partie l'économie des Epices, si vitale pour l'Empire, et qui aimerait libérer les Cités Saintes du Désert de l'occupant viridien.

La situation actuelle de la Cite-Etat
L'Hégémon actuel de la Cité-Etat, Hygelak le Terrible, a connu une vie d'aventurier avant d'hériter de son domaine. Il a accumulé des alliés inhumains qui viendraient d'autres Dimensions et qui feraient passer l'Empereur viridien corrompu pour un humain banal. Hygelak est un homme intelligent mais aussi impitoyable que ses prédécesseurs. Il pense à ce qu'il croit être le bien de sa Cité mais surtout à maintenir l'ordre. Il continue à craindre la Magie viridienne, malgré le déclin visible. Il a encore fait reconstruire le Port de Modron, grâce à l'Ordre militaire du Culte de Mithra. Il aurait même obtenu une alliance avec un Monstre aquatique, nommé « Maëlstrom », pour garder ce Port. Il attend l'occasion favorable pour enfin déclarer une indépendance totale – s'il n'a pas trop de menaces des Barons félons de Warwik, des Orcs de la Griffe rouge, des Raiders skandiks, des troupes de bandits et de pirates cachés dans le Marais et la Forêt. Sans parler des nombreuses autres menaces inconnues qui se cachent dans les diverses communautés des Terres Sauvages, des Cabales de Sorcières à l'ouest à certaines familles de Dragons qui tyrannisent les villages de certaines régions. Malgré la tolérance historique de la Cité-Etat, elle connaît quand même aussi quelques tensions religieuses. Les dieux principaux viennent souvent d'ailleurs, que ce soit le culte skandik d'Odin le Dieu aux Corbeaux ou les culte plus méridionaux de Thoth le Dieu Ibis du Marais et Harmakhis le Dieu Vautour. Un dieu barbare de la mer est Manannan. Un Culte oriental, l'étrange temple des Dieux exotiques de Pegana, s'est développé en soutenant – par la force – les luttes politiques des Guildes d'Artisans de la Cité, qui ont obtenu récemment des franchises et droits du Sénat. D'autres divinités plus antiques et mystérieuses encore dormiraient dans les profondeurs de l'ancienne capitale de l'Empire des Dragons.
Quant au monde criminel de la Cité, l'Hégémon a réussi à maintenir un ordre apparent mais cela n'empêche pas un schisme surnaturel entre la plupart des Voleurs de la ville et les Anciens Maîtres-des-Voleurs défunts qui ne leur pardonnent pas d'avoir laisser piller leurs sépulcres et leurs sanctuaires dans les souterrains.

[Cette dernière histoire fait très lankhmarienne. Mais en un sens, la Cité-Etat de l'Invincible Suzerain avait fait un effort pour ne pas reprendre directement le cliché d'une Cité dirigée par les Voleurs, comme le fera la Greyhawk de Gygax. Ici, malgré toute la puissance des Hors-la-loi dans la région, les Voleurs sont en état de siège permanent, surveillés de près par les espions du Suzerain, assassinés par des Maitres-Voleurs morts-vivants (qui transforment en plus leurs victimes dans leurs agents). Les Voleurs sont donc contraints de se serrer les coudes car ils sont loin d'être puissants. Le Suzerain contrôle la Guilde des Assassins (le Lotus Noir, sa « police secrète », à ne pas confondre avec l'Aspic Noir, agents secrets de Viridistan) et même en partie l'omniprésente « Cour des Mendiants », qui a des yeux partout. Le Suzerain aurait pu éliminer cette Guide des Voleurs s'il ne préférait pas laisser un ordre unificateur et éviter ainsi l'émergence de plusieurs réseaux concurrents qu'il ne pourrait pas aussi facilement surveiller.]

La Géographie
La Cité aurait dû rester assez isolée, dans ces zones humides entre de grandes chaînes de montagnes. Au nord se trouvent les Monts Majestueux, avec la société naine de Fort-Tonnerre, le meilleur allié de la Cité. Au sud on trouve la chaîne des Murs des Nuées, des Ered Cantref et des Ered Losthain. La route principale de pierre est celle entre Fort-Tonnerre (8000 habitants) et la Cité (80 000 habitants) mais la Cité a aussi une vieille route vers les tribus altaniennes au sud. Des marchands passent par les collines de l'ouest pour venir du Viridistan ou bien à travers les gués du Fleuve pour arriver des ports du nord ou de l'est, pour les marchands de Tarantis. Le Viridistan a investi dans une Voie impériale qui se dirige au nord des Monts Majestueux, sans doute dans l'espoir de développer un autre Port maritime vers la Mer de Valon, en dehors du Duché de Warwik.

Plusieurs rivières descendent de ces chaînes pour former un réseau dans ces Marais, dont le fleuve principal est le Roglaroon. La Rivière du Conquérant, descend vers les sud jusqu'à la Cité et rejoint l'estuaire maritime qui va jusqu'à l'embouchure de Modron.

Démographies :
Les villes de la région par ordre décroissant d'importance :
Hex 2623 La Cité-Etat du Suzerain Invincible (CESI) : 80 000
Hex 3402 Warwik : 37 000
Hex 4829 Ossary : 12 800 (Skandiks)
Hex 4013 Sticklestead 10 000
Hex 2606 Thunderhold : 8 000 (surtout Nains)
Hex 3615 Modron : 4 900

Et ensuite quelques petites villes juste en dessous de ce seuil de 2000 habitants.
Hex 1123 Lakenheath 2000
Hex 1313 Catalan 1990
Hex 0122 Caelam 1960
Hex 1209 Bernost 1950
Hex 0531 Charnock 1880
Hex 2312 Byrny 1850
Hex 0905 Smitten 1840
Hex 3529 Hel 1840
Hex 4609 Croy 1830
Hex 4314 Sunlitten 1800
Hex 1128 Landmarch 1760

Les communautés sont surtout humaines. Il y a de nombreux Nains à 0907 Elixer, 2120 Gaehill et bien sûr leur cité 2606 Thunderhold (où les Nains ne sont certes que le quart de la population). Les Elfes, moins nombreux mais plus dispersés, ont notamment 0231 Jasonyira, 1128 Landmarch, 1423 Anguikan, 1934 Sunfells, Adderwood, Elf-burn, 3406 Seasteadholm, Benobles 4923 Palewood (le principal centre elfe est plus au sud, dans la péninsule barbare d'Altanis, la ville d'Actun). Les Hobbits ont 0633 Wildwood, 1720 Bulwark, 2733 Atwain. Les Gnomes ont le village de 4622 Lightelf (et les camps aux alentours).

La Cité-Etat du Suzerain Invincible
La Cité a environ 80 000 habitants [la première version donnait 20 000 hommes (et Amazones ?) en âge de se battre sans préciser la population totale, qui a été ensuite multipliée par 4 pour avoir femmes, enfants et invalides] et près de 60 (!) auberges ou tavernes. Au nord ouest, elle est dominée par la Citadelle du Suzerain, « Citadelle Cryptique » avec le Palais de la Lumière argentée et des reliques technologiques d'une autre civilisation (une tourelle avec mitrailleuse installée par les Nains). La grande « Rue Régalienne » part de la Porte des Dieux (au sud) jusqu'aux trois Temples principaux (Corbeau, Ibis, Vautour)* et a une intersection avec la Rue d'Argent. On divise la Cité en 5 grands quartiers à partir de cet axe principal :
(1) Le Quartier des Voleurs est à l'est de la Rue Régalienne (donc du côté « droit » en entrant) et au sud de la Rue d'Argent. C'est la partie la plus dangereuse de la ville. On y trouve notamment la Rue des Ombres et la petite Rue du Vieux Temple de la Gargouille.
(2) Le Quartier des Marchands est toujours à l'est de la Rue Régalienne et des Temples mais au nord de la Rue d'Argent. C'est là qu'est la Rue des Artisans.
(3) Le Quartier des Roturiers, le plus étendu, est à l'ouest de la Rue Régalienne jusqu'à la Rue des Vagissements. Cela comprend la grande Rue des Caravanes (qui va de la Régalienne aux Vagissements), la Rue des Tempêtes, la Rue des Tourbillons et la Place du Marché aux Esclaves. C'est aussi là qu'est l'Ecole des Connaissances anciennes, la principale université des bonnes familles (mais qui n'enseigne pas la Magie, il n'y a pas d'école officielle de ce type dans la Cité), et la Prison.
(4) Le Bord de Mer est plus à l'ouest de la Rue des Vagissements, de la Place du Marché aux Esclaves et de la Rue des Festivals, et au sud de la Rue des Brigands de Mer jusqu'à l'estuaire du Roglaroon, Le nouveau et influent Temple des Dieux de Pegāna est ici. (5) Le Quartier des Nobles est au coin nord-ouest, autour de la Place des Dieux près des Temples et autour de la Rue du Crépuscule avec le Palais d'Eté du Suzerain Invincible (avec son Gynécée). On y trouve au nord de la Place des Plaisirs à Profusion, le Parc des Statues obscènes, les théâtres, l'Ecole des Bardes et surtout la Maison des Sages près de la Rue de la Muraille.

* Corbeau est en fait dans le texte "Odin, Père aux Deux Corbeaux", dieu skandik, Ibis est "Thoth" et Vautour est Hamakhis, dieu de la mort qui n'a pas grand chose à voir avec le Ha(r)makhis égyptien réel, qui est un des noms d'Horus le Dieu-Faucon comme Sphinx de l'Horizon. Mais j'aime bien l'idée par coïncidence d'une triade Corbeau, Ibis, Vautour (avec une légère redondance dans les deux charognards).
On peut y ajouter ces Panthéons (dont les dieux de Pegāna comme Dorozhand, Dieu du Destin, Sirami, Seigneur de l'Oubli et Yoharneth-Lahai, Dieu des Rêves).
Il doit y avoir aussi quelques réfugiés monothéistes Mycrétiens qui fuient l'Empire viridien (mélanges des premiers chrétiens et de Herboristes).

mercredi 25 mars 2015

Aquaman (vol. 7) n°1-40, 2011-2015


Aquaman est tellement l'objet de plaisanteries comme un superhéros inutile que c'est même devenu un des thèmes dans sa propre série où personne n'arrive à le prendre au sérieux. Mais le problème n'est pas tellement son pouvoir principal (télépathie avec la faune marine) mais le fait que ce pouvoir l'isole nécessairement du monde de la surface et des autres superhéros, quels que soient les choix des scénaristes qui cherchent toujours de subterfuges pour expliquer comment il pourrait être utile au reste des héros qui peuvent se déplacer dans l'espace ou sur terre. Quoi qu'on tente de faire avec sa personnalité ou son entourage, il reste un personnage déterminé par le pouvoir si particulier et si local.

La nouvelle version relancée par Geoff Johns (et reprise à la fin par Jeff Parker) a commencé il y a trois ans. Il a refait presque table rase du passé mais en commençant in medias res et en récréant des origines légèrement différentes par la suite.

Aquaman dans le passé

Le premier Aquaman avait été créé en novembre 1941 par Mort Weisinger et Paul Norris, quelques temps avant Pearl Harbor et donc bien après Namor the Submariner (qui date de 1939 et commence à avoir sa série régulière en 1941). Il n'était pas à l'origine aussi dérivé du Submariner qu'on pourrait le croire : il n'était pas encore un hybride atlante-homme mais un enfant humain artificiellement modifié par son père scientifique (donc plus comme Doc Savage). Et contrairement à Namor, Aquaman n'était pas un "anti-héros" (Namor commence en disant qu'il renvoie dos à dos les Américains et les Nazis) mais un superhéros américain plus traditionnel.

Ce n'est que dans les années 1960 que sa continuité va devenir beaucoup plus proche de celle de Namor, sans que je sache trop si c'est déjà un des premiers signes de plagiat allant de Marvel par DC (d'habitude, presque tous les plagiats de cette époque vont dans le sens opposé, de DC par Marvel) : son père va être un gardien de phare amoureux d'une Atlante (comme Namor était fils d'un marin américain et d'une Atlante). Mais contrairement à Namor, il n'a au début aucune prétention sur le trône d'Atlantis et se voit très clairement comme un Humain de la surface avec des capacités amphibies et non pas un Atlante capable d'aller à la surface. Tout change soudain dans un épisode d'Aquaman (vol. 1) #18 (décembre 1962) quand, dans le même épisode, Aquaman est "élu" Roi d'Atlantis à la mort du Régent précédent et épouse Méra, princesse exilée d'un royaume aquatique d'une autre dimension (mais qui acquiert un statut honoraire d'atlante pour pouvoir épouser le monarque). Dès lors toute son histoire va se centrer sur Atlantis (même si Aquaman fut l'un des membres les plus constants de la Ligue de Justice avec le Martien). Un des thèmes les plus récurrents et fatiguants va être sa guerre perpétuelle contre Orm (a.k.a. "Ocean Master", Aquaman #29, sept. 1966). Orm est à cette époque son demi-frère humain (fils du même gardien de phare mais d'une humaine) mais cela faisait de lui un adversaire de peu de poids. Dans la version de Peter David (Time & Tides, 1994), il devient donc le fils du sorcier atlante Atlan (vrai père d'Aquaman) et d'une Inuit.

Le Seigneur des Sept Mers

La nouvelle série va commencer par une inversion (qui avait déjà eu lieu aussi dans le récent dessin animé Justice League) : son demi-frère Orm est cette fois entièrement atlante, de même mère mais pas de même père, et Ocean Master est nettement moins loser en héritier légitime du trône (c'est Aquaman qui devient le "bâtard" sang-mêlé même s'il est le fils aîné) qu'en humain plein de ressentiment contre son super-demi-frère. Orm lui propose d'ailleurs le trône par une sorte de souci légaliste envers sa primogéniture et Arthur le refuse en disant vouloir rester sur le seuil défenseur de cette côte entre la Mer et la Terre, ce qui en fait un gardien liminal des frontières et plus le seul protecteur des profondeurs.

Les premiers épisodes (n°1-4) ne sont guère originaux, avec une ambiance de film d'horreur entre Jaws et Alien, pour installer le cadre d'un village humain, Amnesty Bay. Aquaman et son amie Mera (qui ne vient plus d'une autre dimension dans cette version mais d'une colonie perdue d'Atlantis, La Seconde Mer) luttent d'abord contre des sortes de piranhas humanoïdes qui viennent d'une Fosse océanique des abysses de l'Atlantique, et qui descendent d'une autre colonie perdue de l'Atlantide parmi les Sept anciennes cités. Aquaman est dit "Seigneur des Sept Mers" et ce chiffre de Sept Mers va devenir essentiel dans cette série.

Les Autres

On découvre ensuite (n°7-13) qu'Aquaman avait créé sa propre équipe de superhéros, les Autres, dont le point commun était seulement de lutter contre l'agent Black Manta. Chacun des six membres avait déjà ses propres capacités mais chacun a reçu un des six talismans qui appartenaient à Atlan, le Dernier Roi de l'Atlantide (il ne manquait que la Septième relique, le Sceptre d'Atlan).
Aquaman a son Trident. Kahina la Voyante iranienne a son Sceau de Clairvoyance, qui accroît ses pouvoirs. The Operative (Joshuah Cole) est un vieux mercenaire espion qui a la Clef qui ouvre toutes les portes. Prisoner of War (qui est hanté par les âmes de plusieurs camarades défunts) a les Menottes (qui créent un champ de force). Ya'Wara est une femme de la jungle brésilienne liée aux bêtes sauvages et elle a reçu l'Orbe de téléportation. Vostok-X est un astronaute créé par les Russes pour affronter l'espace et il a le Heaume, qui permet de voler. Black Manta tue Kahina et Vostok-X, Aquaman et les Autres (en tout cas les quatre survivants) arrivent à arrêter Black Manta et récupérer le Sceptre.

Peu de temps après, le Sceau de Clairvoyance de Kahina sera transmis à Sky Achesay, une shaman apache d'Arizona (#20), qui sauve la vie du petit-fils de The Operative contre Morgane La Fay (Aquaman Annual #1) - mais Ya'wara quitte temporairement l'équipe après avoir été charmée par Morgane.

Atlantis et le retour du Dernier Roi

Puis l'Atlantide déclare la guerre au monde de la Surface (n°14-16, cross-over avec Justice League n°15-16). Le Roi Orm d'Atlantis et Aquaman sont en fait manipulés par un complot de Vulko, partisan d'Aquaman qui espérait ainsi le remettre sur le Trône. Orm est capturé par les autorités américaines et Aquaman est forcé de reprendre le Trône malgré les réticences de loyalistes fidèles à Orm, comme leur soeur Tula, chef de l'Armée.

Atlan, le Dernier Roi d'Atlantis avant sa destruction, revient (n°17-19, 21-25) et dévoile que la dynastie d'Aquaman descend ironiquement de ses ennemis xénophobes alors qu'Atlan était partisan de l'ouverture à tous les humains. Atlan règne désormais sur les Glaces et s'allie à la colonie perdue de Xebel, d'où vient Mera. Pendant ce temps, Orm et Black Manta sont libérés de prison et des criminels humains pillent Atlantis. Aquaman devra réveiller un monstre des profondeurs et s'allier aux créatures des Fosses océaniques pour vaincre Atlan et reprendre son trône.

La mini-série Aquaman & The Others n°1-11

Depuis juin 2014, Les Autres ont eu droit à leur propre mini-série, où Aquaman n'a parfois qu'un rôle secondaire par rapport aur este de l'équipe. Ecrite par Dan Jurgens, elle a eu tendance au début à annuler une partie des décès qui avaient eu lieu dès les premières apparitions de cette équipe. La soeur de Kahina (n°1) est venue la remplacer, à la place de la shaman apache. Un clone de Vostok-X est venu remplacer le Vostok précécent (n°4).

Un groupe d'alchimistes des métaux tente de récupérer les Six Reliques d'Atlantis (n°1-6) et ensuite Les Autres doivent lutter contre un groupe de super-terroristes ex-communistes qui se trouve avoir des liens avec Vostok-X et une des personnalités multiples de Prisoner of War (n°7-11).

D'autres Monstres des Profondeurs

Geoff Johns part au numéro 25 (janvier 2014) de la série régulière Aquaman et Jeff Parker reprend une thématique de Kaiju et Monstres des profondeurs (mais il y a quelques traces de mythe arthurien comme le fait que le sénéchal d'Aquaman s'appelle Kay). Il mène de front des histoires atlantes (plutôt avec Mera) et une intrigue qui reste liée au monde extérieur. Le Projet Triton étudie les créatures atlantes (avec le Dr Shin, vieil ami ambigu d'Aquaman qui a de l'affection pour lui mais aussi de l'hubris de savant). Quand le monstre Karaqan est vaincu et qu'un des plongeurs du Projet est blessé, il est sauvé en étant combiné ou "hybridé" avec le monstre et devient La Chimère (n°26-34), et Aquaman doit aussi arrêter des Monstres mythiques libérés par un archéologue qui lui avait volé son Sceptre (parmi ces Monstres, Heracles devenu fou, Aquaman Annual #2, tout cela est repris dans l'album n°5, Sea of Storms).

Le Retour de la Reine Mère

A partir du n°35, le scénario me semblait plus intéressant que toutes ces histoires de monstres. Aquaman apprend qu'Atlantis dépend d'une sorte de pouvoir psionique collectif qui lui échappe en tant qu'hybride demi-atlante. Il découvre aussi avec l'aide du Martien que sa mère Atlanna avait survécu et s'était enfuie en passant par Kataranga, la Cité des Gorilles, une autre colonie perdue d'Atlantis. Il la retrouve sur Pacifica, une autre dimension peuplée de Trolls de Feu (vus dans Aquaman vol. 1, n°1, 1962), de dinosaures et de divinités mélanésiennes des volcans (Mu aurait été un meilleur nom que "Pacifica", non ?). Aquaman repart en laissant Atlanna sur Pacifica mais elle lui offre une relique qui fait enfin de lui le souverain légitime d'Atlantis en étant imprégné de l'essence de sa mère (deus ex machina un peu décevant).

Jeff Parker part avec le numéro 40, après seulement 15 numéros (voir cette interview), avec le dessinateur Paul Pelletier. DC relancera à nouveau la série avec une autre équipe, Cullen Bunn au scénario et Travis McCarthy aux dessins. La direction s'inverse encore et Aquaman sera renversé du trône d'Atlantis. Parker dit que le personnage d'Aquaman a besoin périodiquement d'être à nouveau plus tiré vers la surface ou les lecteurs finissent par se lasser de ce qui ressemble plus à une série d'heroic fantasy qu'à un superhéros traditionnel.

samedi 21 mars 2015

Jeux de songes


Comme j'ai relu les Little Nemo ces temps-ci (en attendant ce que donnera le Big Nemo annoncé par Alan Moore), j'ai vraiment envie de jouer quelque chose sur le Rêve. C'est un thème qui revient très souvent dans les jeux de rôle (dans la magie de 8th Tribe, ou comme les Dreamlands de Call of Cthulhu ou la récente campagne Dreamhounds of Paris par Robin Laws) mais il n'y en a pas tant qui l'ont vraiment mis au centre de tout le jeu.

1 Hystoire de Fou

Rêve de Dragon est un très beau jeu mais je n'ai jamais trouvé qu'il était si "onirique" que cela, malgré sa cosmogonie ou son si beau système de magie (qui me donne un peu trop l'impression d'être en train de pirater un compte informatique dans un jeu cyberpunk). C'est donc l'autre jeu de Denis Gerfaud, Hystoire de Fou (1998) - qu'il a généreusement mis gratuitement en ligne sur Rêve d'ailleurs, qui a finalement l'atmosphère la plus proche des rêves. Dans Hystoire de Fou, on joue des êtres normaux de notre monde qui sont soudain basculés en groupe dans une crise de démence dans un univers qui tient de Lewis Carroll et Philip K. Dick. Comme ils savent qu'ils sont dans une réalité hallucinatoire, ils peuvent en partie tenter de la manipuler ("incrédire" un fait en niant qu'il ait eu lieu). Ils peuvent aussi prendre le risque d'intensifier la Crise pour la modifier (en prononçant un mot leitmotiv choisi à l'avance qui les rend fous comme "scolopendre" ou "exquis"). Ils doivent tenter de décoder la cohérence cachée de ce rêve pour réussir à en sortir. Un des aspects humoristiques est que les vêtements des personnages changent sur une table aléatoire dite de la Saint Frusquin, ce qui fait qu'on peut se retrouver dans une scène soudain en tutu ou en couche-culottes. Les scénarios sont un mélange de délire et de cohérence à retrouver. L'idée de campagne signifie ici plusieurs "Crises" reliées autour du même thème mais on est quand même censé refaire un personnage nouveau au bout d'un moment. Le livret avec l'écran, Des Recettes de la Folie, introduit plus explicitement des personnages et des thèmes d'Alice au Pays des Merveilles.

2 La méthode du Docteur Chestel

L'autre grand classique sur ce thème est bien sûr La méthode du Dr Chestel (1991) de Daniel Danjean, où on joue des Soigneurs qui entrent dans l'Intracos ou Onirocosme personnel d'un patient pour le soigner (idée qui sera retrouvée aussi dans le film The Cell et bien sûr manipulée de manière non-thérapeutique mais plus mercenaire dans Inception, 2010). Il y une quantité impressionnante de scénarios gratuits et le jeu a beaucoup d'humour. De tous ces jeux, c'est peut-être la vision la plus "positive" du Songe, même si elle peut rester cauchemardesque tant que la thérapie n'a pas amélioré les choses.

3 Alices I : Wonderland

Hystoire de Fou ressemble beaucoup (en moins sombre) à Wonderland, (2005), un beau jeu gratuit écrit par Marco Chacon. Il est bien édité et très complet (en revanche, je n'aime pas les illustrations par ordinateur). Dans Wonderland, Lewis Carroll n'a pas écrit un conte mais décrit en fait ses visions d'une autre dimension immpossible à comprendre par notre Raison et notre logique si ce n'est sous forme de métaphores et de jeux de mots. Cette dimension terrifiante, le Wonderland, est en train depuis le XIXe siècle de contaminer progressivement quelques sujets de notre univers et leur folie est en fait contagieuse. On joue des personnes infectées, qui, comme Lewis Carroll, sont descendus dans cet Autre Monde au-delà du Miroir, au risque de perdre leur Raison. Plus on descend profondément sous la structure de l'Echiquier, plus on approche un chaos indicible digne d'un cauchemar lovecraftien, Abysse au-delà du Bien et du Mal. En effet, le Wonderland n'a pas une intentionnalité mais ils sont fascinés par cet univers fait de "logique" qui leur échappe tout autant. Là où cela commence à un peu moins me plaire est le côté X-Files ou Delta Green. Les gouvernements terriens commencent à comprendre qu'il se passe quelque chose mais ne savent pas trop comment lutter contre cette infection extra-dimensionnelle qu'ils cachent au public. Des complotistes en revanche ont remarqué qu'il y a des fous étranges et contagieux. Les PJ doivent réussir à explorer assez Les Merveilles sans succomber aux créatures qui y vivent et un des problèmes est qu'à chaque fois qu'ils entrent dans le Pays du Merveille, un double irrationnel d'eux, leur "Ombre" reste dans le monde réel et risque de les discréditer en faisant à peu près dans le monde réel le même genre de choses qu'ils font dans ce monde onirique. Une autre complexité est que le Pays des Merveilles est lui-même déchiré entre des puissances qui gouvernent les Lois de l'Irrationnel et des puissance de "Déconstruction" qui veulent refaire les métaphores qui tissent les sous-bassements de cet univers.

4 Alices II : A Red and Pleasant Land

Zak Smith a fait sa propre version du récit de Lewis Carroll pour tout D&D-like, avec A Red & Pleasant Land. Une des idées drôles est qu'une Alice y est une Classe de personnage avec ses propres capacités. C'est une sorte de Pays des Merveilles un peu "gothique", la Voïvodie, où la Reine de Coeur est une vampire qui décapite pour éviter d'avoir d'autres vampires adversaires. Cela regorge d'idées et concepts, c'est assez joli mais c'est encore trop sombre pour moi, comme le Wonderland de Chacon.

Brand (dont je découvre seulement après dix ans d'existence le blog) vient d'avoir des Designer's notes sous forme de 5 thèses de l'auteur. Dans la dernière de ces notes, Zak S. glisse vers un autre sujet pour s'en prendre à certains auteurs indies et notamment ses ennemis de forums trop "politiquement corrects" - même si je ne pense pas que Fred Hicks, le developpeur de Fate, qui se contente de reprendre une thèse féministe assez standard, ait fait partie des pires Haters refoulés et conservateurs qui ont insulté Zak et son entourage).

5 Alice inversée : Don't Rest Your Head

Par coïncidence, cet autre jeu, Don't Rest Your Head (2006) est justement de Fred Hicks. C'est aussi un jeu d'horreur, comme presque tous les jeux dans cette liste et le Rêve est définitivement l'ennemi. On joue des insomniaques qui découvrent que si on se force à cesser de rêver pendant assez de temps, on prend conscience de la vraie réalité cauchemardesque qui est cachée à la majorité (les jeux adorent ce thème gnostique). Comme dans Hystoire de Fou, on peut choisir d'avoir certains effets mais cela entraîne une hausse de sa Folie et la Folie est donc un prix à payer.

6 Little Nemo

Il est clair qu'un mécanisme d'Hystoire de Fou comme les tables aléatoires de La Saint Frusquin iraient très bien dans l'atmosphère onirique en général.

Deux petites différences qu'on pourrait creuser pour simuler une atmosphère plus proche de Little Nemo serait :

(1) les PJ s'attribuent des petites phobies, compulsions et névroses et ensuite le Monde du Songe s'adapte en miroir au profil individuel, comme si c'était plus comme des Intracosmes de La méthode du Docteur Chestel qui seraient associés. Les adversaires vont être plus reliés à leur propre névrose alors que dans Hystoire de fou, l'écriture de scénarios préalables présuppose nécessairement plus les personnages autour du thème.
Mais cela risque de poser des problèmes pour le MJ qui devra développer un contexte commun à partir de toutes ces idiosyncrasies. Et cela pourrait risquer d'avoir encore moins de durée de vie.

(2) Le but serait l'inverse d'Hystoire de Fou ou Wonderland, d'essayer de rester dans le Rêve (tout en gardant un peu d'autonomie) alors que celui-ci devient de plus en plus instable (effet Flip).

Pour que les joueurs voient le Réveil comme un échec récurrent, leur "puissance" de modifier le Rêve augmente graduellement dans le Rêve (ils créent des Merveilles) alors qu'ils doivent recommencer de zéro dans leurs effets quand ils ont été "expulsés" et que le Rêve recommence le lendemain. Le pire adversaire n'est donc plus le Cauchemar mais au contraire la Chute récurrente où le Rêve s'interrompt. Le Docteur Pill avec son Opium est en ce cas une aide à rester dans le Rêve (un peu le contraire du jeu Don't Rest Your Head où les personnages passent leur temps à être hypnophobes et à se bourrer de café et d'amphétamines).

jeudi 19 mars 2015

[JDR] En relisant... Casus Belli 21

Casus Belli n°21, août 1984, 15 F, 55 pages.

Ah, cette couverture. Elle est signée "de Lartigue" et je présume qu'il s'agit bien du jeune Hubert de Lartigue, qui n'a à cette époque que 21 ans et vient à peine de commencer ses études de graphisme. Il a déjà fait des couvertures professionnelles pour des romans de sf mais son style évoluera énormément quand il réalisera des couvertures françaises de Runequest (1987) ou Cyberpunk (1990). Il fera aussi les couvertures de Casus Belli n°75 (1993) et n°108 (1997).

On y voit une équipe traditionnelle de PJ faisant leur feu de camp dans une épave d'avion. Cela reprend bien sûr un code casusien du mélange de wargames et jeux de rôle, et des allusions aux titres divers sur la couverture (comme la couverture du n°10, avec son tank et son dragon, ou celle du n°20 où les aventuriers fuyaient les orcs et semblaient croiser des Grognards à Friedland). Mais en un sens (et malgré quelques défauts dans les silhouettes des personnages), je trouve la métaphore plus puissante tant elle évoque bien l'idée que le jeu de rôle a quelque chose d'un Culte du Cargo, comme le disait Ron Edwards. Dans une société hautement technologique dont la plupart d'entre nous ne comprend plus vraiment le fonctionnement de notre environnement, le jeu de rôle est un loisir quasi-rituel de basse technologie (feuille, crayon, dé ou cartes à jouer) où on simule des veillées et un lien social traditionnel (c'est d'ailleurs pourquoi certains comme moi ne se reconnaissent pas dans le jeu en ligne). Les intervenants doivent improviser et interpréter en formalisant une activité imaginaire, ce qui est contradictoire et concrétise dans le jeu la naissance même des mythes où l'imaginaire joue à se prendre au sérieux. L'ironie de cette image est qu'on peut imaginer que les aventuriers doivent prendre l'épave pour un ossement de quelque léviathan de métal et que le spectateur-joueur à distance voit ce que les personnages dans le cadre du jeu ne comprennent pas. Il se peut aussi (mais je pense à une simple coïncidence) que l'image convienne particulièrement au mélange d'époques et de technologies dans un des scénarios qu'on verra par la suite, Le Dandy.

Il y a environ 20 pages de wargames (dont un jeu en encart, 1914).

James Bond 007, L'opération du tonnerre. Michel Serrat fait part de son enthousiasme pour le nouveau jeu de Victory Games. Ce jeu à "licence" par Gerard Klug fut en effet important dans l'histoire du jeu. Ce fut, je crois, le premier jeu de rôle à utiliser des "points d'Héroïsme" pour que les joueurs puissent avoir un moyen de mieux assurer des succès héroïques indépendamment des probabilités normales. Cette petite innovation de règles (qui fut reprise aussi dans Marvel Superheroes de Jeff Grubb et bien d'autres jeux) commençait à quitter le modèle simulationniste vers l'idée "narrativiste" de représentation du récit et de ses clichés.

La Nuit d'Esus par Jean-Marc Montel (un des co-créateurs de Légendes, actuel directeur de l'ENSG) est un scénario d'introduction pour Légendes celtiques (le premier pour ce jeu). Gwenda, une guerrière-magicienne pleine de ressentiment, qui fut sacrifiée il y a 20 ans au dieu Esus revient se venger. C'est une traque simple qui doit être surtout faite pour expliquer les compétences aux joueurs. Un défaut est qu'il n'y a pas de vrai dilemme moral : on a eu raison de sacrifier cette magicienne et en plus les responsables sont déjà presque tous morts, il n'y a pas de vrai secret à trouver pour l'exorciser. La moitié de la place est prise par la fiche complète de la PNJ (elle a 02/20 en "Raconter des histoires drôles"). Je me demande si nous n'avons pas joué à ce scénario (Légendes était, avec Mega et L'Ultime épreuve, les jeux les plus pratiqués autour de moi à cette époque, pas du tout D&D) mais il ne m'a pas laissé de souvenirs.

Devine qui vient dîner ce soir. L'Arène des oppositions crée un double adversaire, la Pièce cannibale se cache dans les trésors pour attaquer et le Murouissant transmet les bruits dans un seul sens.
Les notes de Zormilius (écrites par Denis Gerfaud, dessinées par Bernard Verlhac, alias le regretté Tignous) continuent avec le Nénuphar des sables et les Chorélithes (pierres dansantes).

Nouvelles du Front a une annonce sur les Grandeurs Nature. On annonce la traduction à venir de Call of Cthulhu et la sortie prévue de Légendes des Mille et Une Nuits, ainsi que des Chroniques de Lynaïs (règles avancées de L'Ultime Epreuve) et La Compagnie des Glaces (dont on dit que les règles s'inspireraient de James Bond 007).

La Menace de Hirato [la table des matières dit par erreur "Hitaro"] de Martin Latallo est un scénario pour le Japon médiéval prévu à la fois pour Land of the Rising Sun (la variante japonaise de Chivalry & Sorcery créée par la célèbre Lee Gold) et pour Bushido (Latallo avait fait le dossier et le scénario pour le n°15 et il avait écrit le scénario du numéro 20 qui était aussi pour deux systèmes, Call of Cthulhu et Daredevils, je me souviens que j'admirais entre autres cette faculté de "bilinguisme" ludique et le fait qu'on pouvait déceler parfois certaines forces respectives de chaque système selon les différences). Dans la province de Shinano, les aventuriers vont explorer un seul village, ses bandits et ses spectres. La criminalité est un vrai problème puisque sur 300 habitants, il y a 30 Yakuzas.

Le Dandy, scénario de Didier Guiserix pour MEGA. Il ne fait que 5 pages denses (p. 45-49) mais c'est simplement la base à développer soi-même d'une mini-campagne révolutionnaire par rapport à ce que Casus Belli avait fait jusqu'à présent en 1984, et cela domine de loin tout ce numéro. Ce scénario transformait MEGA vers un jeu encore plus ouvert, mélange de mission et d'un quasi-"bac à sable" cosmique. Je me souviens encore de mon choc il y a plus de 30 ans quand je me suis dit "ah, bon, on peut faire cela dans un jeu de rôle ? on peut tout faire ??"

Les Messagers Galactiques sont en effet envoyés au début dans l'inconnu, parce que des territoires entiers de Terres parallèles disparaissent vers une autre dimension de poche. Ils vont découvrir un univers-mosaïque formé par ce "Dandy", un aristocrate qui s'ennuie et qui a décidé de jouer au dieu en fabriquant son fief personnel, le monde de Shamazantha.

Les territoires hétéroclites, et dont certains se désagrègent déjà depuis quelques années, comprennent un morceau de mangrove tropicale peuplée de pygmées africains, des morceaux celtiques médiévaux-fantastiques avec de la magie, d'Angleterre du début XXe, de Provence du milieu du XXe siècle et plus récemment de Suède du fin XXe,


La subtilité du Dandy est qu'il peut transférer son esprit comme les Méga et qu'il le fait tout le temps dans les corps de divers PNJ. Le trouver ou le capturer n'est donc pas évident et c'est aux joueurs de trouver une solution.

J'imagine que l'inspiration devait être à la fois Sur les Terres Truquées de Valérian & Laureline et La saga des Hommes-Dieux de Philip José Farmer, qui donnera en 1994 un autre jeu de rôle à part entière chez Jeux Descartes, Thoan. Il y a aussi une influence du Monde du Fleuve du même Philip José Farmer dans certains PNJ comme le fait que Manfred von Richthofen est un héros historique qui vient lutter ici contre le Dandy. L'importance historique de ce scénario paraît indiscutable et j'imagine que certains futurs chefs d'oeuvre ("Des ombres sur la lande" de Pierre Lejoyeux, le scénario de Méga II dans une Terre parallèle où des Zoulous dotés de cavorite sont en train de conquérir l'Angleterre du XIXe siècle) sont aussi des hommages au Dandy de Didier Guiserix.

Je viens de voir qu'il existe même un jeu de société réalisé par un fan de MEGA qui a pris cette carte comme plateau de jeu.

Le Vieil Ami d'André Foussat est un module AD&D, niveau 1-3. La vieille sorcière Effraie engage les aventuriers pour aller sauver son ami, un illusionniste, contre une bande d'Orcs. Ce scénario d'introduction est traditionnel (peut-être pour contrebalancer le côté expérimental du Dandy) mais il réutilise pour une fois l'Auberge de la Mort subite introduite dans le scénario parodique de Guiserix du n°12 et l'Arène d'Oppositions introduite dans ce numéro.

vendredi 13 mars 2015

Jogo de interpretação de personagens


Quand on se promène sur Internet, on voit vite que le jeu de rôle peut avoir des développements très variables selon les pays et que le Brésil est un des pays qui semble particulièrement fascinés par ce loisir (même si la vague d'éditions professionnelles a commencé environ dix ans après la mode des années 1980). Je n'ai pas l'impression que ce soit aussi vrai au Portugal, par exemple, mais je n'ai aucune donnée sérieuse.

Dans l'usage, les Brésiliens semblent dire "jogo de roleplaying" en gardant le terme anglais (mais ils utilisent le terme cenário comme un faux ami pour "cadre de campagne).

O Desafio dos Bandeirantes (1992, "Le Défi des Pionniers") fut un des premiers jeux, se déroulant dans un Brésil alternatif au XVIIe siècle (quand il est disputé notamment par les Portugais et les Néerlandais, les deux en conflit avec l'Espagne).

mardi 10 mars 2015

David McCall Johnston

Je n'aime pas vraiment le cycle de Corum de Michael Moorcock mais ces couvertures celtico-psychédélico-art-nouveau par David McCall Johnston vers 1971 sont vraiment intéressantes. J'aime bien aussi cette Mélusine.

vendredi 6 mars 2015

Lanterne verte et Glissement vers le Rouge




  • Pour commencer sur des questions de cosmologies, j'ai déjà dit l'autre jour que je venais de voir en lisant de vieux Green Lantern que John Broome avait créé une planète vivante membre du Corps comme Mogo bien avant Alan Moore (Green Lantern #24, octobre 1963).

    Mais Adam Strange avait déjà affronté la planète vivante Yggardis dans Mystery in Space #60 (juin 1960) "Attack from the Tentacle World" (par Gardner Fox, elle n'est réapparue qu'une seule fois dans DC Comics Presents 78, 1985, par Marv Wolfman).

    Chez Marvel, je pense que la première planète vivante doit être Ego the Living Planet qui apparaît dans Thor #132 (Sept. 1966). Elle devint bien plus importante que les précédents chez DC.

  • Mais là, en lisant Green Lantern n°33 (décembre 1964) par Gardner Fox, je vois que Hal Jordan avait utilisé le Red Shift (glissement vers le rouge, pour que son déplacement relatif change la longueur d'onde de son Rayon vert) contre un adversaire bien avant que l'auteur de sf Larry Niven ne le fasse dans Ganthet's Tale. En l'occurrence, il pouvait ainsi changer son rayon de vert en jaune (avec les effets étranges que le spectre visible a dans l'univers DC). [Je vois que cela devient un mème nerd.]

    Ganthet's Tale était en partie le résultat d'une "Bible Green Lantern" que l'auteur de Hard Science Larry Niven avait rédigée. Il y avait des idées diverses : une idée idiote (que les farfadets terriens venaient des Gardiens), une idée sans intérêt mais neutre (que ce n'était pas Krona mais d'autres Oans qui avaient réussi en fait à accomplir le Crime de Krona), une bonne idée (utiliser le Red Shift).

  • Mais il y avait aussi dans ce livre une idée que je trouve excellente sur ce "Péché Originel": au lieu de dire de manière mythologique que Krona avait "créé le Mal en regardant le Big Bang" (ce qui semble repris en ce moment dans le Multiversity de Grant Morrison avec "La Main Vide" qui apparaît à la Création), Larry Niven avait proposé de manière plus crédible scientifiquement que Krona avait détruit l'avenir du Multivers en reliant le Big Bang avec la séparation de l'univers d'anti-matière. Les Gardiens ne culpabilisaient pas d'être à l'origine du Mal (ce qui aurait un sens religieux) mais du fait que leur première civilisation aurait condamné à l'inexistence les Univers futurs après le Big Crunch, ce qui ferait de Krona le plus grand génocideur de potentialités, et donc en un sens le vrai Mal radical dans son nihilisme (Krona s'étant ensuite converti à une sorte de culte de l'entropie). 
  • dimanche 1 mars 2015

    Collection de soutien pour un joueur


    Le créateur de suppléments amateur Christopher Banks vient de perdre sa fille de 5 ans et RPGNow/DriveThru a organisé un fond de soutien, qui comprend la dernière version de Shadowrun et plusieurs suppléments, dont certaines de ses oeuvres pour Savage Worlds sur les Romains, les Mongols ou sur les Trois Royaumes (il en a fait aussi des versions pour les règles de Legends / Mongoose Runequest, mais cela n'est pas dans cette collection), pour le prix d'environ 18 euros.

    Je n'ai regardé que le livre sur les Trois Royaumes (60 pages) et c'est un série de scénarios "clefs en main" sur cette période.