mardi 13 juin 2017

Dharmakshetra


Dharmakshetra est une série indienne de 2014 (visible sur Netflix mais créée pour la chaîne EPIC, spécialisée en séries mythologiques). Elle re-raconte le Mahābhārata d'une manière originale puisqu'elle commence après la mort de tous les personnages et montre leur procès de l'après-vie (en 25 épisodes, un pour chaque personnage) pour décider par la discussion devant le Juge-Archiviste du Karma Chitragupta, et non par le combat, qui avait raison dans les différends.



C'est un choix très étrange : l'épopée est un genre martial sur une Bataille et là, c'est la même fable avec uniquement les dialogues mais sans la Bataille, et sans même certains épisodes surnaturels considérés comme bien connus (d'où l'ellipse dans le premier épisode sur le "vastraharan" de Draupadi quand son sari devient infini grâce à Vishnu). En termes grecs, on passe donc de l'épique au tragique et certaines plaidoieries font penser à des laïus artificiels de dissertation pour ménager des changements de perspective. C'est plutôt un drame "procédural" où on explore les différents angles des personnages en jouant sur des retournements qui viennent du style contemporain d'intrigues mais en gardant la matière antique.

Ce n'est pas vraiment une adaptation de l'épopée originelle mais plutôt un commentaire post-moderne ou une suite, parfois assez subtile dans son ironie si on reconnaît les détails qui sont déformés ou subvertis. Je ne crois pas que ce soit d'ailleurs très amusant si on ne connaît pas déjà une autre version plus directe et simple. Au lieu d'introduire les personnages graduellement, ils sont tous là en même temps dans le procès. Comme dit cet article, c'est une bonne stratégie pour redécouvrir l'épopée sous un nouveau jour.

Certains éléments sont discutables. C'est bien sûr très statique comme c'est un long procès (avec des flash-backs, certes). Le casting me gêne un peu parfois. Bhima ou Draupadi (Kashmira Irani) sont réussis, assez conformes à la manière habituelle de les représenter. En revanche, Karna (un certain Aarya DharmChand Kumar) ne me semble pas du tout avoir le charisme solaire du héros tragique qui doit faire face à Arjuna.

3 commentaires:

賈尼 a dit…

Aurais-tu une série plus directement accessible à nous conseiller ? J'avais cherché une fois du côté de la rue du Faubourg Saint-Denis mais impossible de m'y retrouver parmi les coffrets à 30 à 50 DVD !

Phersv a dit…

En vraie version indienne, je n'en ai jamais vu en entier. La série de 2013 a de bons échos mais je la trouve trop lente avec ses 300 épisodes. L'avantage est qu'ils ne coupent rien des personnages mineurs contrairement aux autres adaptations.

Cela dit, même eux font des coupures dignes d'Hollywood quand il s'agit d'un film plus centré sur un seul événement. J'en ai vu un sur la bataille d'Arjuna et Karna et c'était très infidèle (par exemple Bhisma était encore vivant alors que c'est après sa défaite que Karna accepte de se battre à nouveau du côté des Kaurava).

En version non-indienne, 18 Days est quand même pas mal du tout si on accepte le choix de mettre des vaisseaux spatiaux ("parce que le Temps Mythique, tu vois, c'est à la fois le futur et le passé, man"). Je n'aime pas toujours Grant Morrison mais je trouve qu'il a saisi pleins de choses vraiment bien dans son adaptation en tentant de les occidentaliser (Bhima en Obélix, Yudhisthira en Roi Arthur, Krishna en Lucifer etc.).

Et bien sûr, la plus accessible pour nous, c'est la version de Peter Brooks.

Phersv a dit…

Ah, j'oubliais une petite difficulté de langue de cette série : ils utilisent parfois certains des surnoms poétiques des personnages. Par exemple, ils disent "Panchali" à la place de Draupadi et il faut se rappeler qu'elle est la princesse de Panchala (de même que dans l'épopée elle est parfois appelée Krishnaa en raison de sa couleur de peau et qu'il ne faut pas la confondre avec Krishna). De même, Yudhisthira y est parfois appelé DharmaRaj du nom de son vrai père divin Yama Dharma.