Drakar och Demoner fut en 1982 le premier jeu de rôle de langue suédoise et commença comme adaptation de Worlds of Wonder, l'édition générique par Steve Perrin du Basic Role-Playing de Chaosium. Dès les éditions suivantes comme la 3e de 1985, le d% des compétences était abandonné pour un système uniforme au d20.
L'édition actuelle de 2022 (la 9e ?), qui est en partie un retour aux bases, est publiée par Fria Ligan. Ils l'ont aussi publiée en anglais sous le titre de Dragonbane à la place de Dragons & Demons qui doit paraître trop risqué face aux "Sorciers de la Côte de Nazebroque" (il y avait aussi eu une traduction anglaise d'une ancienne édition qui s'appelait Ruin Masters).
Le jeu vise sans doute en partie les Suédois nostalgiques de leur premier jeu et paraît concurrencer directement leur propre jeu Forbidden Lands (qui utilisait pour l'heroic fantasy le système de Year Zero) mais cela peut-il attirer un fan du Basic Role-Play qui ne voudrait pas utiliser simplement OpenQuest ou une autre variante ?
Création de personnage
On tire avec 4d6 où on en retient 3 ses 6 caractéristiques : Styrka (Force), Fysik (Constitution, ce qui est aussi les Points de vie comme il n'y a plus de caractéristique TAIlle), Smidighet (Agilité), Intelligens (INT), Psyke (Pouvoir, traduit Willpower dans l'édition anglaise) et Karisma.
On tire aussi son espèce et en dehors des grands classiques tolkiéniens il y a deux espèces un peu plus originales : les Canards (Anka en suédois, Mallard dans l'édition anglaise) comme dans Glorantha et les Vargrfolk (en anglais Wolfkin). J'ai vu des illustrations avec des félins mais ils doivent être dans une extension à venir ? Chaque espèce a (comme dans Forbidden Lands) un petit pouvoir particulier qui demande de sacrifier 3 points de Volonté (le "Lupin" a par exemple l'utilisation d'un super-odorat pour pister). On tire aussi sur une liste un "point faible" et comme dans beaucoup de jeux OSR, il y a plusieurs propositions d'individualisation par des tables aléatoires.
Il y a ensuite 10 "professions" d'origine pour déterminer les compétences et en dehors des classes habituelles (Barde, Chevalier, Guerrier, Voleur, Magicien), il y a l'Artisan, le Chasseur, l'Erudit, le Marchand ou le Marin. On a le droit de s'entraîner aussi dans d'autres compétences que ceux de sa profession, tant que la majorité est dans cette liste.
Les compétences sont notées sur 20. La chance de base dans une compétence est à peu près égale à 1 + la caractéristique associée divisée par trois. On commence avec une douzaine de compétences "entraînées" où ce score double (donc un personnage moyen avec une caractéristique de 12 aura 05 en chance de base mais 10 en compétence entraînée, mais si la caractéristique associée atteint 16-18, on peut atteindre 07 en chance de base et 14 au score maximum). Donc si on compare avec RuneQuest, on a peu de compétences qui vont dépasser les 25% mais elles peuvent tourner autour de 50-70%, ce qui paraît quand même moins incompétent que dans Forbidden Lands, Mutant Year Zero ou Coriolis.
L'expérience ressemble à RQ : à la fin d'un scénario, on doit faire des jets d'expériences sur les compétences qu'on a utilisées et si on fait PLUS que le score, on peut augmenter d'un point.
Les compétences maîtrisées (avec des scores atteignant 18 par exemple) ouvrent aussi la voie à des "capacités héroïques" qui réussissent automatiquement mais demandent de payer des points de Volonté quand on les utilise.
Système
On doit faire le moins possible sur d20 en dessous de sa compétence ou de sa caractéristique. Un 01 s'appelle un drakslag (un jet de Dragon) et c'est une réussite critique, et un 20 s'appelle un demonslag (un jet de Démon). Une originalité est qu'on peut choisir l'effet du Dragon en combat : doublement des dés de dégâts, ignorer l'armure ou avoir droit à une seconde attaque gratuite.
Comme dans D&D5, si on a un avantage, on peut jeter un d20 supplémentaire et choisir le meilleur (et réciproquement si on a un désavantage) et on peut accumuler et additionner ces boni et mali.
Si on n'a pas tiré un Demonslag, on a droit à une relance ("Push") mais cela entraîne un coût qu'on choisit et qui va occasionner un désavantage temporaire dans une des caractéristiques tant qu'on ne s'est pas reposé (par exemple une "condition" Fatigué pour les jets concernant la Force, ou En colère pour les jets concernant l'Intelligence).
Comme dans RQ, on peut parer des coups mais c'est assez différent car cela implique de sacrifier son attaque ce tour. Les Monstres ont un système spécial simplifié et ne sont pas censés parer (ce sont les PJ qui doivent tenter de parer leurs coups). Un jet de "Dragon" en attaque ne peut être paré que par un Dragon en parade. Un Dragon en parade donne droit à une contre-attaque immédiate si l'Attaque était normale. Les Armures sont beaucoup plus efficaces que dans le RQ traditionnel puisque toute attaque qui ne passe pas l'armure (même sans parade) risque d'abîmer l'arme.
Il n'y a pas de localisation des coups mais en cas de blessures sévères on tire sur une table des séquelles (dont des effets psychologiques comme un Stress post-traumatique).
Le chapitre créature ne décrit que 15 Monstres, dont les Démons dont l'effet est plus de maudire que de blesser. La règle spéciale pour les Monstres peut les rendre plus effrayants qu'un PNJ normal comme ils ont des règles séparées.
Magie
Chaque Mage choisit une compétence spécialisée dans l'une des trois écoles, en Animisme (le shamanisme traditionnel de RQ), Mentalisme (discipliner son propre esprit et modifier son corps) ou Elémentalisme (invoquer des sylphes, salamandres...) et certains sorts (6 seulement) relèvent de la Magie générale. Un débutant ne peut pas avoir plusieurs collèges à la fois et il y a peu de sorts dans chaque collège (13 sorts en Animisme, 13 en Mentalisme, 16 en Elémentalisme). Le Mage utilise des Grimoires et le nombre de sortilèges qu'on peut retenir préparés est seulement égal à son score de base dérivé de l'INT (donc 5-7).
Si on tire un "Démon", on a une table de catastrophes magiques et l'une d'elle peut faire apparaître... un Démon.
Il y a une règle assez chouette sur l'énergie. Si on atteint un score trop faible en Points de Volonté (qui doivent être souvent dépensés puisque ce sont aussi eux qui alimentent les capacités spéciales), on peut les recharger en sacrifiant des Points de Vie. On choisit quel dé (d4, d6, d10...) on lance et le résultat est à la fois les Points de Volonté en plus et les Points de Vie en moins.
Dimmornas Dal ("Le Val Brumeux")
Les règles n'ont pas vraiment d'univers explicite et Fria Ligan ne doit pas avoir acheté aussi les droits d'Ereb Altor, la Terre parallèle utilisée dans les premières éditions. Mais la boite a quand même inclus des PJ pré-tirés avec un mini-setting, le Dimmornas Dal, le "Val des Brumes" perdu entre les Monts des Crocs de Dragon au nord et les Monts des Soucis (je suppose que c'est le sens allemand de Kummer) au sud, la Forêt de Fer à l'ouest et le Marais Hanté à l'est. Au milieu se trouve le village d'Utkante ("Bordure", traduit Outskirt en anglais), hameau de 200 colons humains.
Le cadre a pris le nom de D och D à la lettre. Dans le passé, les Dragons ont aidé les mortels à emprisonner les Démons du Val Brumeux, mais ensuite les Humains ont commencé à rejeter tout autant l'autorité de l'Empereur-Dragon. Les Orcs qui occupaient le Val après la chute de l'Empereur-Dragon ont tenté de réveiller les Démons mais les autres peuples viennent de revenir depuis quelques années dans le Val en guerroyant contre les Orcs.
La campagne de 15 aventures dans le Val met les PJ face à diverses factions qui veulent retrouver l'ancien secret de l'Empereur-Dragon qui serait caché ici. Or la difficulté va être de savoir quelles sont les vraies intentions de ces diverses factions. Ce n'est pas très original (on n'échappe pas au vieux cliché de la relique divisée en plusieurs fragments) mais je crois que l'originalité n'est pas vraiment le but si Drakar och Demoner est aux Suédois ce que Basic D&D, Mega, l'Ultime Epreuve ou l'Oeil Noir est à beaucoup de joueurs français (si ce n'est que DoD est toujours resté diffusé sous une forme ou une autre). C'est un petit "bac-à-sable" et il n'y a pas nécessairement un ordre linéaire entre ces aventures : les PJ peuvent trouver diverses rumeurs qui les envoie dans plusieurs directions dans le Val Brumeux. L'arrivée a un petit donjon dans le genre des Barrow-Wights du Seigneur des Anneaux, les tertres ou cairns des Chevaliers.
Conclusion
J'aime beaucoup de choses dans la légèreté et l'accessibilité de DoD mais je suppose qu'on aurait droit ensuite à des extensions. l16 pages, c'est est rapide si on voulait avoir des détails sur la Magie.
Pour l'instant, la différence importante avec son origine dans le lignage du jeu de Steve Perrin paraît être la rapidité des combats et ces idées comme la relance de dés ou de sacrifier ses Points de Vie en échange de Points de Magie. Les personnages me semblent aussi légèrement moins fragiles que dans Forbidden Lands mais je n'ai pas testé en jeu.
Voici pour comparer un extrait de l'Occident de la carte de leur ancien monde Ereb Altor, avec les pays médiévaux de Kardien ou Zorakin, les forêts elfiques de Goiana, l'île sacrée de Caddo ou les îles d'Erebos (pleines de Canards), à l'ouest de l'ancien empire de Jorpagna, au bord de la Mer de Cuivre :
Voir aussi la discussion sur CasusNO qui m'a aidé à comparer avec Forbidden Lands.
Raskal fait un test du scénario d'intro (j'aime bien la traduction de Mallard en "colvert").