17 Bichat, jour de Henry Cavendish, découvreur de l'hydrogène.
Arguments contre la peine capitale
Presque toute la philosophie politique issue des Lumières (comme Rousseau ou Kant) avait défendu la peine de mort par des arguments de réciprocité (si le meurtrier se donne le droit de tuer un être humain, il donne à l'Etat le droit de le tuer aussi). Le Siècle des Lumières était prêt à critiquer l'arbitraire ou l'usage de la Torture comme tradition cruelle mais pas la Peine de mort.
Le grand philosophe du droit pénal des Lumières Cesare Beccaria donne dans son livre Des délits et des peines (1764 - publié deux ans après le Contrat social de Rousseau) quelques contre-arguments pour abolir la peine de mort, notamment à partir de la théorie de Rousseau (même si Rousseau refusa cette application). Et on peut adapter à partir de cela des arguments moraux de Kant contre les conclusions politiques que faisait Kant en faveur du Bourreau.
Argument du contrat
Le premier argument dépend d'une théorie du contrat social. Les individus ont donné à l'Etat une obéissance aux lois mais pas leur vie qui dépasse les bornes du contrat social (contrairement à ce que disait Rousseau). L'Etat a le droit de punir en retirant des droits (par exemple avec la prison qui supprime la liberté de mouvement) mais il n'a pas le droit de retirer tous les droits (bagne comme esclavage) et de supprimer la vie.
Argument de distinction de la guerre et de la paix & limitation de l'Etat
Un Etat peut acquérir en temps de guerre des droits de tuer des ennemis, ce qui est en dehors du droit pénal en temps de paix. Mais s'il dispose du droit de tuer ses citoyens, alors il ferait un acte de guerre contre ses propres concitoyens. Il aurait un pouvoir excessif et sans limite sur la vie de ses sujets.
Argument de la perfectibilité morale
La punition a pour but de réhabiliter un citoyen si c'est du moins possible. Par définition, la peine de mort rend impossible le perfectionnement moral. Donc elle est immorale.
Le fait que l'individu se soit donné le droit d'assassiner un être rationnel ne donne pas à l'Etat le droit d'exécuter une personne (sauf éventuellement cas de légitime défense ou de danger imminent).
3 commentaires:
Le dernier point m'interpelle
"La punition a pour but de réhabiliter un citoyen si c'est du moins possible."
On en deduit que certains individus (j'ai clairement de noms de fait divers en tête) ne sont pas réhabitables.
Du coup la peine de mort est morale sur ces gens la ?
Le raisonnement peut impliquer que de vrais incorrigibles doivent être soignés et qu'on doit protéger la société, ce qui peut impliquer des peines de prison longues.
Je pense souvent à l'exemple de Charles Manson (condamné à la prison à vie). Manson, par provocation psychopathe, ne cessait de dire qu'il ne regrettait rien et qu'il recommencerait s'il était libéré, ce qui était un argument rétroactif pour justifier dans son cas de ne pas le libérer. Mais pas de le tuer pour autant, en raison des autres arguments.
Le philosophe utilitariste John Stuart Mill avait un argument paradoxal en faveur de la peine de mort en disant que sans cette peine, on devrait autoriser la prison à vie, qu'il trouvait PLUS cruelle et déshumanisante que la peine de mort. Et la prison à vie pose des problèmes similaires à la peine de mort si on ne peut pas réviser périodiquement la possibilité de libérer le condamné.
Ou pour le dire autrement avec un argument "déontologique" (partant d'un idéal moral) : même s'il n'existait en réalité que très peu de criminels qui puissent être vraiment réhabilités, la peine de mort resterait immorale, en raison même de ces possibilités de perfectionnement moral.
Je trouve assez étonnant que Kant n'ait pas vu cette conséquence possible de sa théorie morale. Je ne sais pas si c'est par une croyance que c'était plus un hypothétique Purgatoire dans l'au-delà que la Prison qui devait accomplir cette possibilité de s'amender.
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