9 Bichat, jour de John Wallis (1616-1703, né 26 ans avant Newton).
Ce qu'on appelle en philosophie l'argument ontologique (du grec "on, ontos", ce qui concerne l'existence) paraît assez peu convaincant, voire comme un paralogisme qui ne peut convaincre que ceux qui espèrent et désirent déjà croire en sa conclusion.
La version la plus simple consiste à dire que (1) si je considère un être le plus "parfait" de tous les êtres, il devrait avoir toutes les perfections et que s'il lui manquait des propriétés, alors il serait au moins imparfait dans cette propriété. (2) Or s'il n'existait pas, il lui manquerait certaines propriétés, donc (3) un tel être serait très particulier parce qu'il serait celui dont la définition même serait suffisante pour impliquer nécessairement l'existence. Si l'être le plus parfait n'existait pas, il ne serait pas l'être le plus parfait. (Je ne considère pas les versions plus compliquées comme celle de Gödel).
L'argument ne convainc pas parce que nous suivons presque tous la réponse que fit déjà Gaunilon de Marmoutiers (vers 1000-1080). Rien ne nous dit que la notion d'être le plus parfait n'est pas vide et c'est donc une pétition de principe que de présupposer déjà qu'il doit y avoir un être qui est le plus parfait et que son existence doive être une des propriétés de "perfection" de l'être le plus parfait.
Mais une autre solution, qui était proposée par exemple par le philosophe et logicien (athée) David K. Lewis (et qui semble sur certains points assez proche de la version "immanentiste" de Spinoza et peut-être aussi d'une version logique non-modale de Bertrand Russell) est de dire qu'en fait l'Argument ontologique est valide mais qu'il ne prouve pas l'existence d'un être personnel ou "bon" au sens d'une personne qui se soucie de nous.
On peut appeler cela "l'argument ontologique minimal".
Pour Lewis, "possible" veut dire "ce qui est instancié dans au moins un monde possible" et nécessaire veut dire "ce qui est instancié dans tout monde possible". Or par définition, il n'existe aucun monde où rien n'est instancié donc c'est une propriété nécessaire en tout monde qu'il y ait quelque chose. Si on appelle "La Réalité" la totalité des mondes possibles (et non pas seulement notre monde) alors par définition la Réalité "est" nécessairement (il n'y a aucun monde possible où on ne puisse pas dire que la Réalité n'est pas instanciée). Donc l'être maximal dont parlait l'Argument ontologique existe nécessairement mais ici "perfection" veut dire le maximum de réalité possible et non pas Dieu.
Une autre version serait de dire que s'il existe quelque chose, alors il existe nécessairement quelque chose. Pour Lewis, on peut dire qu'il est contingent (non-nécessaire) qu'il existe ce monde-ci et ce qui existe de fait pour nous. Mais il n'est pas contingent qu'il existe quelque chose.
Cet Argument est décevant.
Il ne dit pas qu'il existe nécessairement un "Être ou "Etant" Suprême" ou bien cet "Etant" tel que pour lui l'être ne serait pas une propriété accidentelle extérieure mais qu'il y a nécessairement de l'être et donc qu'on ne peut pas se demander s'il aurait pu y avoir rien à la place de quelque chose.
Mais il n'est pas certain que la métaphysique puisse faire nettement mieux que cet argument si minimal ou trivial et qu'on puisse vraiment arriver à un contenu "théologique" ni à un contenu "cosmologique" plus précis de ce qu'un monde devrait nécessairement être (sauf si on prend la solution plus "Spinoziste" de dire qu'il ne peut pas y avoir d'autres mondes que le nôtre et que ce monde-ci est donc non seulement nécessairement une réalité mais même la seule et unique réalité possible).
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