Une discussion intéressante de deux croyants "modernistes" qui tentent de concilier leur foi qu'ils veulent "éclairée" avec les multiples passages les plus répugnants de la Bible où Dieu ordonne le génocide de tous les habitants de Canaan, y compris les femmes et les enfants.
Le premier (chrétien protestant) réinterprète le passage selon une méthode critique, comme une incompréhension "infantile" par les humains de ce que voulait dire Dieu. Le problème serait alors une retranscription avec erreur humaine qui vient brouiller le message divin.
La seconde (juive libérale) tente de conserver le texte en tenant compte de recherches qui nient l'historicité d'une conquête de Canaan mais en lui donnant un sens allégorique où chacun serait déjà un habitant de Canaan qui devrait extirper de soi l'idolâtre - un peu comme les Musulmans qui tentent de ramener le mot "jihad" à son sens le plus abstrait d'effort et non pas de Guerre. C'est plus ingénieux mais cela suppose quand même que Dieu aurait un sens très particulier des métaphores adéquates à utiliser ("Quoi, vous aviez pris mes appels au génocide au pied de la lettre ? Oh, désolé, c'était juste un test, je n'aurais jamais imaginé !"). Dans ce second cas, le problème ne serait pas le contenu littéral de la retranscription mais celui de la lecture.
Mais les deux s'approchent quand même très près de la solution historique ou critique la plus satisfaisante mais qui conduirait à la ruine de leur foi, que le texte est rédigé (et non pas "retranscrit") par des humains de l'Antiquité qui veulent vraiment légitimer le massacre de leurs ennemis et que le Seigneur des Armées (YHWH Tzevaot) n'est que l'expression de leurs propres désirs ou de leurs ressentiments.
mardi 31 juillet 2012
Seigneur des armées
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Libellés : laïcité
lundi 30 juillet 2012
Hedy, Mieux que Tesla
ComicsBeat m'apprend que Hedy Lamarr (née Hedwig Kiesler, 1913-2000) ne fut pas seulement actrice et déposa en 1942 (avec un musicien) un brevet aux USA pour un système de télécommunication avec étalement de spectre qui ne fut réalisé ensuite que vingt ans après pour coder les communications (plusieurs sites disent qu'elle a "inventé le Wi-Fi" mais j'imagine que c'est une simplification pour dire que son invention a contribué à ce qu'on utilise pour le coder).
Il faut dire que son premier mari, qu'elle avait épousé alors qu'elle n'avait encore que 19 ans, le riche Autrichien fascisant Friedrich Mandl avait hérité d'une compagnie d'armement et qu'elle avait pu s'intéresser à ce genre de technologie avant la Guerre et avant de fuir à la fois son mari et l'oppression européenne en 1937.
Voici un clip qui utilise une scène célèbre de sensualité dans un de ses premiers films réalisés en République tchèque, Extase (1933), dans sa période européenne avant qu'elle n'émigre vers les USA.
Publié par Phersv à 19:18 6 commentaires
Libellés : cinéma
dimanche 29 juillet 2012
Etoile Double & Nova
L'une des premières aventures jamais publiées pour Traveller fut Annic Nova par Marc Miller (dans Journal of the Travellers' Aid Society #1, 1979 pp. 16-32, repris dans Double Adventure #1 Annic Nova/Shadows, 1980).
Ces deux vaisseaux étranges qui suivent ne se ressemblent pas directement mais je trouve qu'il y a quand même un air de famille entre l'image de ce vaisseau perdu de l'Annic Nova et la couverture par Tony Roberts de (la réédition britannique de 1973 de) Double Star de Robert Heinlein.
Mais c'est en partie un accident de cette illustration tirée du Web, l'arrière-champ était très différent dans l'illustration originelle par Winchell Chung dans JTAS ou dans celle de Double Adventure.
Il n'y a strictement aucun rapport entre le module et le roman : Double Star (1956) est l'histoire d'un acteur qui joue le rôle d'un politicien assassiné et finit par s'identifier à ses conceptions (et cela n'a rien à voir non plus avec le wargame Double Star, 1979 du même Marc Miller, qui oppose des colons chinois et musulmans dans le système Epsilon Ceti). Annic Nova est le sauvetage d'un mystérieux vaisseau fantôme qui semble abandonné. Mais il se trouve que l'illustration de Double Star venait d'être reprise dans Space Wars: Worlds & Weapons, 1979 de "Steve Eisler" [Robert Holdstock] - tr. fr. Images de la science-fiction p. 90-91, et là l'intrigue est quasiment la même : on retrouve une épave inconnue près de Proxima Centauri et on tente d'enquêter dessus. Peut-être est-ce Winchell Chung qui fut inspiré par l'image de Roberts dans le livre de Holdstock ?
Dans la première version de l'aventure, cela devait conduire les aventuriers de Keng/Regina à une vingtaine de parsecs vers la planète Victoria/Lanth, qui est décrite dans JTAS #2. Mais cela disparaît complètement dans la version étendue du module de Double Adventure #1 et je n'arrive pas bien à voir si Marc Miller voulait préciser vraiment la vraie origine du vaisseau.
Publié par Phersv à 16:10 1 commentaires
Sens
J'aime beaucoup ces cases de Daredevil #15. C'est bien meilleur que tout Roy Lichtenstein, non ?
Nous avons peut-être tous des supersens, mais ce pauvre Matt Murdock est vraiment hypersensible.
Publié par Phersv à 12:06 0 commentaires
Libellés : art's sake, comics
Bruit de fond
D'après cette étude statistique comparative (sur cette base de données ouverte d'un million de musiques), la musique populaire occidentale décline en variété de timbres et depuis 50 ans et n'augmente que dans le volume (loudness). Ou comme le dit Kevin Drum, la musique devient globalement de plus en plus ennuyeuse et homogénéisée. Voir aussi la discussion sur MetaFilter. Cette vidéo explique la lutte sur le son, la compression et le volume.
Publié par Phersv à 10:20 2 commentaires
Libellés : musique
samedi 28 juillet 2012
Galimafrée
Beaucoup ont commenté un côté fascisant ou d'autres ont précisé que c'était plus hostile à la démocratie mais pour favoriser une monarchie ou une aristocratie, contre les deux pôles de la bourgeoisie nouveau riche et de la populace. [Et quand on voit que le site de critiques Rotten Tomatoes, pour la première fois de son histoire, a dû fermer les commentaires sur ce film parce qu'il y avait trop de Fanatiques menaçant de mort les critiques, on se dit qu'il y a peut-être un public un peu particulier attiré par l'idée d'un millionnaire qui prend son pied à tabasser en armure de cuir de la Racaille.] Amanda Marcotte tente une défense. Matthew Yglesias, plus nuancé dans son attention aux détails, trouvait que ce dernier film était au minimum hostile à la critique des inégalités, pas "fasciste" mais quand même plutôt très à droite. Mais je crains que la meilleure morale vienne du philosophe John Holbo qui trouve le film insuffisamment cohérent pour qu'on en tire la moindre leçon quelle qu'elle soit. Ce n'est même pas assez pluraliste ou dialogique pour qu'on puisse penser que cela serait intentionnel ou fait pour que le spectateur interprète sa propre signification ambiguë, c'est simplement une mosaïque hétéroclite.
I mean, Brian [Bolland] did a wonderful job on the art but I don't think it's a very good book. It's not saying anything very interesting. But at the end of the day, Watchmen was something to do with power, V for Vendetta was about fascism and anarchy, The Killing Joke was just about Batman and the Joker - and Batman and the Joker are not really symbols of anything that are real, in the real world, they're just two comic book characters.Les gens qui veulent défendre les superhéros disent souvent que ce sont des Métaphores. C'est vrai, sans aucun doute, mais il est assez facile de faire des métaphores. En un sens ce sont des Métaphores trop directes, des Métaphores qui crient "Je suis une Métaphore !" (en passant, j'aime beaucoup ce groupe de superhéros dans le jeu Mutants & Masterminds qui s'appelaient les "META-4" et qui au moins servaient à exprimer une critique assez radicale de l'Administration Bush). A force de prétendre avoir une "signification plus élevée", ils perdent tout sens réel et deviennent de simples conventions formelles.
Les X-Men par exemple pouvaient être des métaphores sur l'Adolescence, puis sur le Combat des Droits civiques des Noirs, puis sur les Homosexuels. La Guerre Civile de Captain America et Iron Man était censée être sur les droits des individus. Mais les histoires sur les discriminations sur des Mutants qui peuvent détruire la planète ne seront jamais que sur des Mutants qui peuvent détruire la planète. L'analogie sera toujours assez faible avec les combats réels contre les discriminations réelles.
Du même dessinateur, psy du Sofa.
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vendredi 27 juillet 2012
[JDR] Les mondes de Traveller (12)
Episodes précédents : (1) Introduction générale aux Mondes non-officiels de Traveller, (2) Spacefarers'Guides, (3)-(7) Judges Guild, (8)-(9) Group One, (10) Paranoia Press, (11) FASA.
Cette idée d'un scénario entièrement à bord d'un astronef de Croisière est assez courante dans les jeux de SF (surtout si les PJ n'ont pas encore leur propre vaisseau). Elle a été reprise l'année suivante dans Fasolt in Peril pour Space Opera, le scénario "Smile Please" dans White Dwarf #65 (1985 - avec une chute faite pour agacer les joueurs) ou plus récemment la jolie aventure sur un Titanic "One Crowded Hour".
Ce module regorge d'idées (peu développées en dehors des PNJ) pour exploiter ce contexte, depuis la prise d'otage, le crash sur une planète, le mystère de meurtre à la Croisière sur le Nil d'Agatha Christie (plusieurs passagers ont de Noirs Secrets à découvrir) ou une épidémie qui transforme l'embarcation de millionnaires en Quarantaine. Mais cela exige donc beaucoup de travail préliminaire à l'Arbitre pour élaborer le scénario puisqu'il n'a qu'un fil directeur ou des pistes hypothétiques.
Bill Paley n'a fait aucun effort pour insérer la ligne de la Croisière dans les Far Frontiers - on a plutôt l'impression qu'on doit être dans une région plus civilisée des Marches. Il cite quelques nobles avec des noms de mondes : Rheims (il y a bien un monde nommé Reims du côté de Deneb) et Athens-in-Space, mais on voit que l'Imperium est encore très vague aux yeux de l'auteur et que cela reste assez générique.
Adventure #3: Uragyad'n of the Seven Pillars par les Frères Keith est assez directement "Lawrence d'Arabie dans l'Espace", avec quelques touches de Dune. Le GRoG a déjà une fiche complète.
Le système de Talak (Sous-secteur Cabala, étoile Nijet) a deux planètes habitées : Talak (D687839-6, Niveau Technologique 6, à peu près années 1940) et plus près du soleil la planète désertique Vahjdi (D651769-4 Niveau Technologique entre 1 et 4, plutôt pré-industrielle). Talak a acquis le vol spatial par un moyen inconnu et a conquis sa voisine moins avancée Vahjdi avec seulement quelques milliers d'hommes.
Les PJ se font recruter par une Corporation d'origine impériale, la FDI, Frontiers Development, Inc. (qu'on retrouve dans d'autres aventures) pour organiser un coup d'Etat dans la dictature Talaki sur Vajhdi.
Le coup d'Etat sera un fiasco total et ils se retrouvent bloqués sur la planète. Pour pouvoir repartir, ils sont donc contraints de s'allier avec des nomades rebelles, les N'Raqah (NT 3) dont le centre spirituel est les "Sept Colonnes" au titre si lawrencien. Les N'Raqah ont une Leader charismatique, la Princesse Shevajrajahabri qui cherche (vainement pour l'instant) à les unifier contre les Talakis et les PJ peuvent choisir de la soutenir pour devenir "Uragyad'n (ou "Uraqyad'n") des Sept Colonnes", chefs de guerre des divers clans confédérés. Le scénario est donc avant tout militaire, plus que de l'ethnologie sur Vahjdi et il y a même une section Wargame. Il faut organiser ces nomades pour préparer des attaques et un conflit asymétrique contre les forces Talakis. Les nomades ont des mousquets et des sortes de chameaux à trois pattes, les Bondisseurs des Rochers, mais les Talakis ont des tanks et des mitrailleuses. Et les N'Raqah n'ont pas des Vers des Sables comme les Fremen.
Une autre intrigue est de savoir qui a fourni aux Talakiens leurs moyens pour envahir la planète et pourquoi ils recherchent de l'Onnesium (un minerai transuranien dont ils ne connaissent pas encore l'utilité). Comme dans Ordeal by Eshaar, l'Ennemi caché derrière la dictature talakie vient d'un autre monde.
Je suis très partagé sur cette aventure. Comme souvent avec les scénarios écrits par les frères Keith, elle est pleine d'idées et on a donc envie de la jouer pour voir ce que cela donnerait. Mais comme je n'ai aucun sens de la tactique et que l'aspect militaire de Traveller m'intéresse relativement peu, je crains que je m'ennuierai rapidement si on devait planifier les dynamitages des Monorails par exemple. Un bon scénario, mais il faudrait vraiment que je reprenne beaucoup le peuple des N'Raqah pour qu'ils semblent moins être de simples ombres des Arabes ou des Fremen. Le Pèlerinage des Sept Colonnes des N'raqah est assez bien décrit (avec le culte des "Sept Libertés fondamentales" qui font de ces Free Men des sortes de libertariens) et ne se réduit pas entièrement à la Mecque, on pourrait peut-être creuser dans cette direction si on voulait développer l'aspect d'exploration par rapport à la campagne d'insurrection. Les Talakis aussi pourraient gagner en profondeur. Pour l'instant on ne sait rien d'eux à part leur armement et le fait qu'ils viennent tout juste d'être unifiés après une longue Guerre. Ils doivent être les Turcs Ottomans de la Première Guerre mondiale si les N'Raqah sont les Hachémites, mais ils ont aussi un petit côté d'occupants allemands de la Seconde Guerre mondiale avec leurs Sections de la Mort.
Je passerais aussi sur l'imaginaire colonial britannique sous-jacent à toute aventure inspirée de T.E. Lawrence et sur tout l'Imperium de Traveller. L'article sur les sources littéraires du jeu que vient de citer Imaginos évoque ce côté "Victorien" qui est déjà présent bien avant Space 1889. Mais n'oublions pas que dans Adventure 9: Nomads of the World Ocean (1983), J. Andrew Keith et William Keith mettront les personnages contre l'exploitation d'une Corporation pour soutenir des indigènes d'origine turque.
Publié par Phersv à 14:09 1 commentaires
jeudi 26 juillet 2012
[JDR] Les mondes de Traveller (11)
Episodes précédents : (1) Introduction générale aux Mondes non-officiels de Traveller, (2) Spacefarers'Guides (1979), (3)-(7) Les mondes de Judges Guild (Secteurs Ley, Glimmerdrift Reaches, Crucis Margin, Gateway, 1980-1981), (8)-(9) Les mondes de Group One (Secteur Theta Borealis, 1981-1982), (10) Les mondes de Paranoia Press (Secteur Beyond & Vanguard Reaches).
Comme Imaginos a mentionné que c'était le 35e anniversaire de Traveller le 22 juillet, voilà l'occasion de relancer la série des mondes de ce jeu avec un nouvel éditeur indépendant qui collabora à Traveller : la célèbre "FASA Corporation".
FASA avait reçu comme "fief" à développer dans le grand partage de l'univers de Traveller le Secteur Far Frontiers, juste à côté du Secteur Vanguard Reaches de Paranoia Press. Il y a d'ailleurs un système nommé Freedonia dans le sous-secteur L, Inverness. Le Secteur des Frontières Lointaines est bien au-delà des de l'Imperium mais a une partie sous le contrôle du Consulat Jhodani. FASA y a mis plusieurs aventures dans les années 1980 mais ne publia jamais de guide sur tout le Secteur qui leur était dévolu. Ils avaient tendance à publier surtout des plans de vaisseaux, d'ailleurs, à cette époque.
En revanche, une douzaine d'années après, pendant la période de Megatraveller, le fanzine Traveller Chronicle #2-8 publia (par Dale Kemper puis complété par James Kundert) une description de ce Secteur qui tenta d'intégrer les Aventures de FASA, plus les données de Vanguard Reaches.
Comme mon objet est plus l'univers (non-"officiel") que l'histoire des compagnies (lisez plutôt le livre de Shannon Appelcline, Designers & Dragons, pp. 119sqq sur ce sujet), je traiterai donc ces Frontières Lointaines non-officielles à la suite des Aventures.
L'autre particularité des 9 aventures de FASA (1981-1982) est qu'une majorité (Aventure #1, 3, 4, 7, 9) furent écrites par les frères Keith. William Henry Keith, Jr (né en 1950-) et son petit frère John Andrew Keith (1958-1999) n'ont pas d'équivalents parmi tous les auteurs de Traveller et en dehors du créateur Marc Miller, aucun autre n'a dû autant influencer ce qu'est ce jeu. Ils furent si prolifiques qu'on les retrouve dans plusieurs aventures officielles de GDW et dans quasiment tous les magazines (depuis le Journal of the Travellers' Aid Society No. 7, 1981) et divers fanzines du jeu. Ils étaient même parfois contraints de prendre un pseudonyme pour qu'on ne remarque pas qu'ils écrivaient quasiment tout dans certains numéros (William Keith donne quelques pseudonymes de ses romans de SF : Keith Andrews, Keith Douglass, Ian Douglas, Robert Cain, H. Jay Riker). William Keith avait commencé comme illustrateur et les frères Keith avaient leur propre studio ("Marischal"). Ils firent aussi des suppléments Traveller pour Gamelords, Ltd. Ils reçurent d'ailleurs leur propre secteur à développer plus près de l'Imperium, Reaver's Deep (et ils publièrent quelques aventures dans ce Secteur dans la revue Space Gamer la même année, en plus des suppléments chez Gamelords).
Voici la liste des 16 sous-secteurs des Far Frontiers :
A Detsiaiem B Ienji C Naianch D Qiedrkia
E Pia F Retan G Dalesabandagh H Zezhpae
I Antideluvia J Alsas K Taemerlyk L Inverness
M Wulfek N Cabala O Jungleblut P Mnemosyne
Nous commençons dans le sous-secteur K (Taemerlyk)
L'Adventure 1: Ordeal by Eshaar, par les frères Keith est un scénario qui mélange diplomatie/espionnage et exploration dans un milieu difficile.
Ordeal by Eshaar represents FASA's first step into the field of publishing adventures. We've tried to keep the format close enough to that expected by TRAVELLER fans in their adventures, while at the same time introducing some unique new ideas and concepts.
Eshaar (Far Frontiers/Sous secteur K Taemerlyk, Hexagone 0206) est un monde à température très élevée, où toute eau est vaporisée (150°) mais où il s'écoule de l'acide sulfurique liquide. La planète a pu développer une espèce intelligente d'une structure radicalement différente des nôtres à base de silicium, les Eshaar Ashah.
Ils ressemblent un peu à des raies manta ou des trilobites terrestres et il est difficile de communiquer avec eux. Ils sont pourtant relativement pacifiques (surtout à l'égard des autres ou de leur environnement) mais ils ne peuvent pas supporter la moindre violence, même involontaire, envers un organisme vivant de la planète.
Cela explique le titre d'Ordalie par Eshaar : les Eshaar Ashas condamnent à des épreuves dans la Nature hostile ceux qui commettent la moindre violence ou transgression. Or Eshaar est convoitée à la fois par le Consulat Jhodani (qui a ouvert une ambassade) et par divers Vargrs et agents de l'Imperium, qui convoitent un minerai local, l'affas, une sorte de pétrole à l'acide sulfurique. C'est un peu la quintessence d'un scénario d'exploration. Les joueurs doivent apprendre à ne pas faire de faux-pas dans l'étiquette écologiste des Eshaar Ashan, à comprendre leurs diverses factions politiques tout en évitant les pièges des Jhodanis et en négociant avec les espions Vargrs. La planète elle-même est d'ailleurs un personnage dangereux, avec ses tempêtes d'acides sulfurique. Cela me paraît en 50 pages bien plus riche par exemple qu'une aventure comme Pen-Latol's World: Adventure on an Alien Planet, dans un genre assez proche du contact avec une planète exotique et une espèce moins avancée. Il y a même toute une ébauche d'un système politique pour gérer les rapports entre les factions et l'action diplomatique des personnages-joueurs (qui sont ici supposés être plus des agents impériaux que des indépendants).
C'est un bon début qui sait bien exploiter la position si isolée de ce monde. En revanche, je suis plus dubitatif sur le MacGuffin de l'affas comme nouveau "pétrole", même si l'univers de l'Imperium est très loin d'avoir dépassé le stade de la rareté des carburants. Mais l'affas a aussi un avantage indirect qui ne se réduit pas qu'à l'économie : si les personnages en trouvent un gisement, ils gagnent du respect des Eshaar Ashans qui la considèrent comme le sang de la planète Eshaar.
Publié par Phersv à 01:23 7 commentaires
mercredi 25 juillet 2012
[Comics] Wonder Woman #11
Zola, la jeune maîtresse de Zeus, va bientôt accoucher et WW va devoir donc passer à de nouveaux héritiers du Cronide qui veulent le Trône de l'Olympe, les deux jumeaux Apollon et Artémis. Et autant Azzarello avait été très peu manichéen sur Hadès ou même avec Eris, autant les enfants de Léto sont ici de jeunes divinités arrogantes et cruelles. Ils livrent donc Zola à Héra en échange du Trône puisque la prophétie annonce que le fils de Zola pourrait hériter.
On suppose depuis le début que le fils va être Zeus lui-même, dans une parodie du Christianisme (ou du sinistre Avengers #200) et la prophétie de Déméter dans cet épisode qui parle du thème frazerien du Dieu qui Meurt pour Renaître semble confirmer que cela va bien être le cas. Mais Azzarello va peut-être nous surprendre : on n'a toujours pas vu Athéna et la fille de Métis paraît faite pour gouverner. Ou alors cela pourrait être un retour de Dionysos contre Apollon, comme le plan de la série semble suivre les Douze Olympiens.
Appendice
DC Comics a réédité les épisodes de Wonder Woman vol. 1 #212-222 (1974-1975) sous le titre The Twelve Labors. Ca a un intérêt disons "historique" pour se rappeler du sexisme persistant de la série même dans les années 70 alors que les scénaristes commencent à mentionner explicitement le féminisme dans les histoires (Gloria Steinem avait redonné vie à WW dans cette période en la prenant comme une référence).
WW (qui avait perdu la mémoire) se donne à elle-même le défi de Douze Travaux avant d'avoir le droit de revenir dans la Ligue de Justice. Mais le thème mythologique du titre n'est hélas pas vraiment bien traité. Cela pourrait tout aussi bien être douze histoires habituelles de cette période (en dehors des narrateurs de la Ligue qui introduisent chaque épisode). Si vous voulez vraiment un album TPB, attendez la compilation des histoires d'Azzarello. Cela dit, certains de ces récits de l'Âge de Bronze sont assez mignons dans leur style (et un numéro où elle affronte le maléfique Walt Disney ne peut pas être entièrement mauvais, par exemple).
WW avait perdu ses pouvoir en 1968 (quand DC voulait en faire une sorte d'Emma Peel - l'auteur de SF Samuel Delany écrivit certaines aventures et utilisa même Fafhrd & Gray Mouser) et elle vient de les récupérer dans le #204, 1973 (je crois comprendre que la perte de mémoire est d'ailleurs un moyen maladroit de DC pour mettre sous le tapis des histoires contradictoires et refouler ces 5 ans). Son copain habituel Steve Trevor est mort (DC changera hélas d'avis et Aphrodite le ressuscitera dès le #223) et les scénaristes ont fourni un nouveau petit-ami potentiel, Morgan Tracy, diplomate international à l'ONU. Ce Tracy me semblait bien plus sympathique et plus intelligent que le militaire Steve Trevor mais il sera révélé 5 ans après dans WW #268 qu'il était en réalité un chef d'un réseau criminel international appelé le "Cartel".
[Et vingt ans après, dans WW (vol.2) #170, 2001, Phil Jimenez essayera à nouveau de lui donner un petit-ami cadre de l'ONU, le docteur en agronomie Trevor Barnes, mais il sera tué deux ans après par le nouveau scénariste Walt Simonson dans WW #194, 2003. Il n'est jamais bon d'être une copine de Batman ou un copain de Wonder Woman, certains personnages semblent condamnés au célibat.]
Publié par Phersv à 15:19 2 commentaires
Libellés : comics
mardi 24 juillet 2012
Planeurs & Pagodes
Sur le site Bibliodyssey, ce livre sur la Chine de 1670 siècle par le célèbre naturaliste hollandais Olfert Dapper a ces images d'écureuils volants (peut-être aeretes ou trogopterus ?) . Ils donnent presque l'air de voler plutôt que de planer. Comme il n'y a pas d'échelle, on dirait presque des Yazirians de Star Frontiers (qu'on pourrait donc rajouter au jeu Terra Incognita !).
Publié par Phersv à 17:17 1 commentaires
Libellés : jdr
[Comics] DnA'Verse
Dan Abnett et Andy Lanning (qu'on surnomment juste DnA) signent tellement de titres en co-scénaristes qu'il est parfois difficile de se souvenir qu'il s'agit de deux individus distincts et j'ai une tendance à les imaginer comme une sorte de créature bicéphale Abnettlanning (même si à l'origine Abnett était l'écrivain plus prolifique et Lanning davantage un encreur). Après leurs nombreux comic-books en Angleterre dans 2000AD ou chez Marvel UK ou les romans d'Abnett pour les univers de Games Workshop, ils ont notamment créé Resurrection Man chez DC en 1997-1999 et reprirent ensuite brièvement la Légion des Superhéros en 2000-2004. Puis ils partirent chez Marvel où ils écrivirent surtout des séries spatiales (Nova, Guardians of the Galaxy, etc.). Depuis juillet 2011, ils ont notamment repris chez Marvel les New Mutants (au #25) mais ont en même temps relancé Resurrection Man chez DC. Et depuis le mois dernier, ils ont en plus un nouveau titre chez Boom! Studios !
New Mutants (vol. 2) #46 (Marvel Comics)
L'histoire paraît assez peu originale avec un nouveau voyage dans le temps où un des membres va devenir un supervilain omnipotent dans un futur possible (par coïncidence, Avengers Academy vient aussi de faire la même histoire). Le groupe lutte contre une version de Cypher/Warlock qu'on avait déjà aperçu dans le Futur de New Mutants Annual #6 (1990) : ici, ce ne sont donc pas les Sentinelles qui sont à craindre mais le Virus Transmode de la Technarchie où "Douglock" est devenu le Magus technarchique. L'ennui avec tous ces remakes de Terminator est qu'on a encore plus de mal dans les comics à craindre un Futur possible (dont on sait qu'il sera évité) qu'une Mort actuelle (dont on sait qu'elle ne sera que temporaire). Quand le Cannonball du futur laisse penser que Danielle va mourir, il est difficile d'en tirer la moindre émotion comme les Nouveaux Mutants (que ce soit Cypher ou Magik) meurent de multiples fois.
Resurrection Man (vol.2) #11 (DC Comics)
Au moins avec ce personnage, on ne peut pas faire le même reproche de revenir sans cesse, puisque c'est justement son pouvoir. Mitchell Shelley est un être humain qui suite à une expérience militaire a acquis le pouvoir de se régénérer et de revivre avec un nouveau superpouvoir à chaque fois qu'il "meurt".
Dans le #9 lors de son dernier décès, il est justement devenu une sorte de créature de métal liquide (décidément, Terminator a marqué). Et ici, il revient vers la ville qu'il croit être celle de sa naissance pour en savoir plus. Et il y retrouve son ancien allié Hooker, qui a subi une variante du même pouvoir (si ce n'est qu'il "ressuscite" sans aucune régénération et devient donc plutôt une forme de zombie monstrueux). Bien entendu comme tout officiel du Gouvernement US des médias depuis trente ans, Hooker est prêt à tout pour découper Shelley en morceaux et lui arracher son immortalité.
Le problème de Resurrection Man est qu'il n'évite pas vraiment l'aspect répétitif de certaines séries TV avec des Fugitifs : Shelley s'enfuit, il se fait capturer (en ce moment par la Méchante Organisation Gouvernementale) et/ou tuer, il ressuscite avec un nouveau pouvoir et s'enfuit à nouveau. Il manque encore un vrai but ou un thème qui permette de ne plus donner cette impression d'une structure mécanique, mais au moins les scénaristes ont réussi à donner l'impression que ce cycle pourrait s'arrêter : dans le numéro précédent, le Ciel et l'Enfer ont tous les deux attaqué Shelley pour sa déplorable tendance à ne pas mourir et il leur a demandé le temps nécessaire pour comprendre ses vraies origines avant de périr enfin.
The Hypernaturals #1 (Boom! Studios)
Les Hypernaturels sont un groupe de superhéros dans un lointain futur (seulement daté comme "An 100 après le Quantinum" mais l'Humanité a eu le temps de se répandre à travers la Galaxie, on doit donc être dans plusieurs siècles au minimum). Avec cette description, on se dit immédiatement qu'Abnett & Lanning vont donc reprendre de manière non-officielle leur propre version indépendante de la Légion des Superhéros dont ils avaient été renvoyés en 2004 (et toute leur version avait été effacée comme trop "sombre" et n'ayant jamais eu lieu).
Ce qui caractérisait le plus leur run sur la Légion avait été en effet un traitement un peu plus sinistre des pouvoirs. Dans un univers où des planètes entières d'humanoïdes partagent un superpouvoir, il était tentant d'en instrumentaliser certains aux pouvoirs plus profitables. Les Téléporteurs notamment s'étaient donc faits cloner pour être mieux asservis comme des moyens de voyage dans l'espace.
Mais pour l'instant, même si ce premier épisode a quelques liens visibles avec la Légion (et même un peu de son "argot"), Abnett & Lanning ne semblent pas aller dans une direction si dystopique qui leur avait été reprochée par DC. En revanche, ils insistent bien plus que la Légion sur un dépaysement de Science-Fiction transhumaniste à la Grant Morrison. On est après la Singularité et les Nanomachines sont partout, ce qui explique en partie que les superpouvoirs soient aussi diffusés - même si tous les pouvoirs ne sont pas encore égaux. L'Humanité n'a rencontré dans toute la Galaxie aucune espèce extraterrestre en dehors de quelques ruines d'un peuple inconnu appelé les Nephilim. Le Quantinum (l'Internet Intelligent qui se communique dans l'Univers) est adoré comme un Dieu (ce qu'il est, en un sens). Les Hypernaturels sont un groupe qui sert des sponsors de la Société du Spectacle et les Intelligences artificielles du Quantinum pour des mandats de Cinq Ans (comme les missions dans Star Trek).
Le numéro commence avec l'équipe entière qui semble avoir été détruite. Bewildered (Creena Hersh, hypervitesse) doit reformer une nouvelle équipe, avec l'aide de Thinkwell (Poul Indersun, hyperintelligence, allusion à Brainiac 5 et à Brain Wave, 1953 de Poul Anderson) et bientôt sans doute l'ancien membre renvoyé Clone-45 (Hatch Groman, hyperforce et hyperinvulnérabilité, comme Ultra-Boy). Elle reprend de jeunes membres, Shoal (Oz Sheppard, essaim de strangelets) et Halfshell (Deedee Cadiz, cyberarmure). Les scénaristes ont décidé de commencer assez petit avec un groupe aussi restreint qui les oppose à la Légion.
Le premier épisode a été critiqué comme assez traditionnel mais il va falloir un peu de temps pour installer l'univers du Quantinum. Et on espère que DnA pourront mieux se délasser dans ce titre sans tout le bagage de la Légion ou d'un univers DC, même s'ils sont particulièrement habitués à utiliser un univers partagé qu'ils n'ont pas créé.
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Libellés : comics
[Comics] Journey Into Mystery #639-641
Cf. #637
Comme on l'a déjà résumé la dernière fois, le nouveau Loki ressuscité est devenu le Dieu du Changement et plus le Dieu du Mal. Depuis la disparition d'Óðinn le Père, Asgard est dirigé par une Troïka de Grandes Déesses, Iðunn la Vierge, Freyja la Femme et Jörð la Mère (qui est aussi dans l'Univers Marvel la même Déesse que la Gaïa du Panthéon grecque, et donc la mère des Titans).
Loki est envoyé en mission dans le panthéon britannique de l'Autre-Monde, la représentation de tous les mythes du Royaume-Uni, qui dans l'Univers Marvel contient un éternel Roi Arthur, divers aspects féériques de Merlin et le Corps Interdimensionnel des Captain Britain.
L'Autre-Monde d'Avalon est en effet assiégé par une nouvelle force, le Dieu de Manchester, qui représente (avec un long décalage) l'arrivée des mythes de la Révolution Industrielle et de la Modernité dans l'inconscient britannique. Le scénariste Kieron Gillen (qui est britannique, est-il même nécessaire de le préciser) joue donc avec des thèmes politiques qui auraient plu à Michael Moorcock ou à China Miéville. Et si la folklorique et censément innocente monarchie d'Arthur ne valait plus la peine qu'on la défende ? Comme l'avoue Gillen dans une interview, il s'agit sans doute de son récit le plus ambitieux chez Marvel.
Les récits modernes aiment cultiver dans la mythologie un résidu d'un passé immuable d'une manière assez peu authentique. Nous pouvons rêver à la manière d'un William Morris sur l'Albion éternelle mais la vraie Grande-Bretagne est désormais aussi façonnée depuis deux siècles par tout ce que William Morris ou JRR Tolkien refoulaient. Notre fantasy moderne globale est d'ailleurs en grande partie née de ce refoulement néo-romantique anglais (mélangé avec un peu de Western lovecraftien de Fritz Leiber). Et la seule chose qui puisse désamorcer tout ce romantisme est d'ailleurs ici l'humour anglais, qui peut être conservateur tout en étant sarcastique. Le récit va donc faire se confronter aussi des genres anglais, la nostalgie de la High Fantasy avec des aspirations et des tensions dystopiques du steampunk.
Tolkien pouvait jouer à vaincre symboliquement ce dieu de Manchester comme les horribles tours polluantes de Saruman à la fin du Seigneur des Anneaux mais c'est bien entendu Manchester qui a le dernier mot contre le bocage idyllique des Hobbits. Karl Marx avait été formé par cette ville et on avait déjà évoqué la théorie d'Asa Briggs selon laquelle Manchester manifestait la plus épouvantable paupérisation du prolétariat bien plus que Birmingham ou d'autres villes de la Révolution Industrielle.
Loki vient donc en Avalon avec ses deux alliés, la jeune Leah (une émanation de Hela la Déesse de la mort) et Daimon Hellstrom, Fils de Satan, l'Exorciste et Mercenaire surnaturel (qui a déjà aidé Loki dans la lutte contre Cauchemar des épisodes précédents). Et la Guerre entre les dieux d'Avalon et Manchester va être reliée symboliquement à des sites terrestres dans le Royaume-Uni matériel. La Modernité a aussi ses lieux de mémoire technologique, comme l'Impérialisme de Cragside ou le Transport mécanique de Witton Park-Stockton. Kieron Gillen avait déjà utilisé la magie et la mythologie dans Phonogram pour représenter des métaphores de l'Angleterre : Britannia y était la Déesse de la Britpop avec Damon Albarn en Prince consort. Ici, Master Wilson, le "Druide Urbain" de Manchester, aime citer les Sex Pistols ("There's No Future in England's Dreaming") et j'imagine que j'ai raté de nombreuses autres citations comme Gillen fait toujours le Montaigne des références de pop. Ce Wilson est d'ailleurs un avatar de Tony Wilson (1950-2007), un producteur de disques (e.g. Joy Division) qu'on surnommait Mr Manchester.
Cet Arc de trois épisodes est particulièrement réussi parce que Gillen parvient mieux encore qu'auparavant à faire de Loki un être à la fois perfide et sympathique. D'habitude, il se contentait d'en faire quelqu'un d'espiègle et bien intentionné, et ici il se développe vraiment en Dieu du Changement, avec toutes les ambiguïtés que le Changement peut représenter, pas toujours pour le mieux. C'est un personnage qui a donc pour essence de mûrir et de ne pas en rester au status quo, ce qui est très rafraîchissant dans les comics. Mais la subtilité est que même le Changement si doué, si retors peut avoir quelque chose de trop naïf. Il y a une sottise du Conservatisme obtus et une nouvelle niaiserie dans le Progrès.
La fin s'amuse à faire des clins d'oeil à Alan Moore et à son anarchisme ou son éloge du Terrorisme. Quand DC Comics utilise les personnages de Moore en ce moment, on a l'impression de réchauffé ou de pillage alors que Gillen a donné à Marvel Comics un hommage meilleur que la plupart des bd du défunt "Vertigo".
Je ne dépasse jamais une description banale dès que j'essaye de parler des dessins parce que j'ai encore moins de sensibilité qu'un troll de Svartalfheim. Mais Richard Elson, qui vit toujours dans les West Midlands près de Birmingham, était bien adapté à ce passage sur Albion. Il donne de l'épaisseur aux réactions de Loki (même si, volontairement, les dieux d'Avalon ont quelque chose d'assez stéréotypé). Les moues et les mines des adolescents y sont parfaites dans une série sur l'enfance.
C'est un des plus grands plaisirs de comics en ce moment. Il y avait déjà eu d'autres comic-books sur des "vilains" ou "anti-héros mais cela ne se réduit pas du tout à cela. Loki ouvrait bien plus de possibilités de récits originaux, un jeune dieu de la Révolution, plus ironique que tous ces garnements comme Harry Potter ou Artemis Fowl. Il est un peu triste que cette série, une des meilleures de Marvel, s'arrête assez tôt mais Gillen dit qu'il avait en tête une fin depuis le départ. Mais comme ce monde est ce qu'il est, vous devriez essayer avant qu'il ne disparaisse - même si, pour être franc, les albums Trade Paperbacks commencent déjà à paraître. Le prochain Arc Tout Brûle avec Surtur sera la conclusion du cycle de Kieron Gillen sur Journey Into Mystery et le numéro d'Octobre 2012 (#645) est annoncé comme un Climax (avec le retour de Stephanie Hans aux dessins).
Gillen revient sur le dernier numéro de JiM #641 dans son Tumblr.
Publié par Phersv à 10:24 3 commentaires
Libellés : comics, mythologie
Le lycée comme cadre de fiction pré-moderne
Ce commentateur de Metafilter fait une remarque intéressante : adapter une oeuvre de Shakespeare ou d'Austen dans le cadre plus codifié ou plus rigide d'un lycée est une bonne simulation moderne du manque de mobilité sociale. L'Université marche déjà moins bien car les individus y ont trop gagné en liberté, le lycée est une scène figée plus archaïque. Le retour au lycée n'est pas seulement un retour vers un passé individuel mais vers un passé de nos sociétés plus ou moins démocratiques.
Peut-être une bonne raison finalement pour jouer au jeu de rôle d'humour noir Alma Mater.
Publié par Phersv à 09:46 3 commentaires
dimanche 22 juillet 2012
Les Filles de l'Exil
King Lear, I, 1
Toi, n'es-tu pas, comme moi-même,
Flambeau dans ce monde âpre et vil,
Âme, c'est-à-dire Problème,
Et Femme, c'est-à-dire Exil ?
Hugo, Les Contemplations, VI, XV, 1856
S. Darlington a en effet joué avec le thème en en faisant un jeu de science-fiction sur un thème qui mélange Blade Runner, la série Dollhouse ou L'Ève future. On joue donc des andréides femmes parfaites, des "Pandore" ou "Galatée" conçues pour être les épouses ou compagnes dont rêveraient les hommes. Mais elles prennent conscience de leur liberté et s'enfuient, cherchant à concilier leur autonomie et leur désir profond de trouver une vie accomplie dans une union véritable. Filles de leur concepteur (le Duc de Milan), elles ont choisi le risque de l'Exil, risque d'indépendance mais aussi de solitude sans amour. Comme l'a bien précisé Rappar dans son dialogue avec l'auteur, Playing Daughters of Exile, on peut concevoir ces Femmes plus comme des manipulations biologiques (ce qu'on entend d'ailleurs par "androïde" en français) que comme des robots mais c'est un choix de création de contexte. Il n'est pas précisé par exemple si elles pourraient se reproduire mais elles sont pour l'instant en tout cas dénuées de tout droit, maintenues dans la même minorité que les héroïnes shakespeariennes.
L'Auteur a eu quand même assez d'espace dans cet exercice pour décrire un peu d'univers général. On est dans un univers plutôt "cyberpunk" (et donc assez dystopique) mais en même temps à la lisière d'un univers "transhumain" plus proche de la Singularité des jeux récents. Le système solaire est gouverné par des Mégacorporations tyranniques mais elles sont des Intelligences artificielles qui correspondent aux planètes cis-uraniennes connues à l'époque de Shakespeare.
Il y aurait sans doute de nombreux choix à préciser pour les joueurs dans ce que la technologie permet (sans tomber dans l'excès de catalogue des jeux de SF). Les andréides peuvent espérer dans leur exil l'aide de quelques humains vivant entre les planètes ou d'autres créatures artificielles comme des Bouffons.
Le système
Le jeu est bien entendu, comme tout jeu indie réalisé en 48h, minimaliste. Chaque andréide est une femme parfaite qui réussit ce qu'on attend d'une Epouse mais elle est définie par trois traits : un Don particulier (par exemple "Particulièrement douée en Musique"), un Défaut (du point de vue des attentes qu'on a d'elle du moins, par exemple "Capricieuse") et un score en "Violations de Programmation" sur 20.
Ce score est donc la seule "caractéristique" du jeu (du moins en termes chiffrés, le Don et le Défaut pouvant intervenir aussi dans l'évaluation des actions). Cela représente le nombre de fois où ces Femmes ont désobéi à ce qu'on attend d'une Femme et c'est donc à la fois leur indépendance et le risque qu'elle s'écarte de plus en plus de la norme au point de devenir ce qu'elles craignent le plus, une vieille fille perdue.
Le système à une seule caractéristique veut donc proposer une sorte de contradiction. Le/a joueur/euse sera récompensé à chaque fois que le score augmente puisque le personnage deviendra plus libre de désobéir à sa programmation. Il/elle voudra donc que le score augmente. Mais les personnages redoutent aussi en même temps que le score finisse par les rendre impossibles à marier puisqu'elles continuent à espérer un amour authentique dans un monde où leur maître et propriétaire avait peu de chance de les aimer réellement.
On a donc l'équivalent d'autres jeux où un score qui monte peut être ambigu ou "une bénédiction mélangée" comme on dit, comme le score en Mythe de Cthulhu dans l'Appel de Cthulhu (on connaît mieux la réalité du jeu mais on perd graduellement la raison, puisqu'il y a un rapport inversement proportionnel avec la Santé mentale).
La différence est qu'ici, comme le score unique en Violations de Programmation remplace tous les autres et représente finalement la capacité à se libérer, il paraît assez difficile de résister à la tentation de le faire monter, malgré le coût en fin de partie. Et la récompense opposée (trouver l'Amour) paraît peut-être un peu trop abstraite, voire improbable, pour qu'on puisse être attirée vers ce but. Ce fut d'ailleurs un reproche indiqué par un arbitre du GameChef (qui se contredit d'ailleurs en trouvant qu'il y a parfois trop de détails sur certains aspects de l'univers) :
What happens to daughters who have violated all their programming? They become NPCs, but what does the GM (there is a GM, right?) do with them?
I’m not sure the tension between wanting to rebel and wanting to avoid violating all your programming is an interesting one because it’s unclear what violating all your programming actually means.
Finally, it’s the GM’s job to make the PCs fall in love? How do they do this? What do you do with the enemies and foils? I feel like, if some of the extensive description was cut down, some of these more concrete details could have been addressed.
Peut-être qu'on pourrait là aussi construire une caractéristique indépendante (ou bien semi-dépendante dans un rapport inverse) qui représenterait la chance d'obtenir un mari. On aurait toujours le spectre de devenir un PNJ à 20 Violations mais on pourrait avoir un autre score pour trouver avec qui tomber amoureux.
Le problème est que si c'est une sorte d'Amour parfait digne d'un Philtre, l'Andréide semble un peu condamnée à un Amour tragique et décevant. Et si elle gardait assez d'autonomie, on ne serait plus vraiment dans une fin de Comédie shakespearienne.
Test : Embarquement pour Cythère
Nous avons fait un test avec Rappar comme MJ, et trois joueurs (avec une majorité de joueuses d'ailleurs). Armide jouait Rosalind (Réservée mais Trop Fantasque, Violations : 7), A. jouait Silvia (Douce mais Trop Grande, Violations : 10) et je jouais Perdita (Mesurée mais Trop Maladroite, Violations : 8). Nous avons fui la Terre ensemble (je soupçonne d'après son nom que la timide Rosalind avait eu l'idée qu'on se travestisse en hommes). Sur la planète Vénus, planète de l'amour et des plaisirs, nous avons trouvé divers petits boulots grâce à nos dons. Je ne vais pas trop gâcher le scénario si Rappar compte le publier dans la version française du jeu, mais nous avons pu peu à peu découvrir les noirs secrets derrière le monde des désirs.
L'expérience montre qu'on entre assez facilement dans le concept des personnages. Cela s'avère assez différent d'un jeu de SF habituel (disons une partie de Eclipse Phase, par exemple, où on peut jouer des androïdes) et contrairement aux reproches des arbitres, je ne trouve pas du tout que le thème shakespearien y soit plaqué ou artificiel (même si cela demanderait beaucoup trop de travail pour un joueur francophone qui ne baigne pas dans ces citations et références si on voulait les exploiter dans notre langue).
Publié par Phersv à 11:27 4 commentaires
samedi 21 juillet 2012
Super-Kinks
Les Inrockuptibles ont consacré un numéro spécial aux superhéros et énumère dix chansons qui évoque ces personnages. C'est un des marronniers d'Internet. Il y en avait 20 sur Buzzfeed et un autre Top Ten il y a cinq ans. Le blog When We Are Earth-4 avait proposé aussi des chansons seulement sur les personnages DC. Et cette liste ne porte que sur Superman.
Les Kinks, le célèbre groupe britannique des frères Davies, ont utilisé plusieurs fois des allusions à des personnages de comic books, mais il faut reconnaître qu'elles sont souvent très indirectes, voire détournées.
En 1968, ils donnent le titre de "Johnny Thunder" dans l'album The Kinks Are The Village Green Preservation Society, mais la référence au vieux personnage des années 40 de DC Comics paraît très vague, peut-être plus sur la sonorité qu'autre chose.
Mais ils n'en restent pas là puisque 5 ans après, ils réutilisent le même nom dans la chanson "One Of The Survivors" dans Preservation: Act 1 (1973), qui présente ce Johnny Thunder comme un motard amateur du rock des années 50.
Dans le même album, Here Comes Flash n'a sans doute rien à voir avec le superhéros du même nom (et peut-être plus avec le personnage humoristique Flashman).
En 1979, dans l'album Low Budget, les Kinks ont plusieurs chansons qui réutilisent les superhéros de manière mélancolique.
"Catch Me Now I'm Falling" a Captain America se plaignant du déclin des Etats-Unis et de l'ingratitude des alliés. Certains Américains aiment beaucoup ce second aspect et prennent la chanson avant tout comme une dénonciation des Occidentaux et un vrai appel à la solidarité. Le site déjà cité de Rooktopia dit même que la chanson doit être appréciée de manière non-ironique (un peu comme une célèbre chanson de 1967 au premier degré de Sardou). Je reste hésitant. Les Kinks sont bien entendu des valets de l'impérialisme comme tout le Rock (et les comics) par essence (là, ça va troller dans les commentaires) mais on pourrait aussi y trouver (surtout avec l'humour de Davies) un commentaire plus cynique. Le héros Captain America en Oncle Sam désabusé y paraît aussi pathétique et plein de ressentiment. Et le ton si détaché sur la Chute des USA (la chanson est curieusement joyeuse parfois) devrait quand même un peu gêner l'interprétation précédente. J'ai plutôt l'impression qu'ils jouent sur ce thème qui devait être si courant
Ce clip YouTube réalisé récemment par un amateur (et donc encore pleine d'imagerie du 11 Septembre) relève justement de la première interprétation.
Le même album a "Wish I Could Fly Like Superman" qui utilise à nouveau le thème du superhéros comme un fantasme inversé par rapport à la vie réelle ("I'm too weak, I'm so thin // I'd like to fly but I can't even swim"). Comme pour Captain America dans la précédente, le superhéros chez les Britanniques a quelque chose de ridicule et un symbole d'échec. Les Européens ont un problème avec la métaphore du superhéros.
[En passant, le groupe canadien Our Lady Peace a encore utilisé Superman dans le même sens dans Superman's Dead en 1997.
Le thème de la mort de Superman à la place de la mort de Dieu est un thème fréquent. Un autre groupe canadien, Crash Test Dummies avait réalisé en 1991 un dithyrambe funèbre de Superman mais avec plus d'affection.]
Pour en revenir aux Kinks, même la chanson Plastic Man (1969) qui a l'air si joyeuse (les Kinks l'avaient écrite en partie pour avoir un "succès facile") est assez cruelle sur un homme dont la malléabilité représenterait l'artifice et l'hypocrisie :
Plastic Man got no brain,
Plastic Man don't feel no pain,
Plastic people look the same.
Kick his shin or tread on his face,
Pull his nose all over the place,
He can't disfigure, or disgrace.
He's got a Plastic Wife who wears a plastic mac,
And his children wanna be plastic like their dad,
He's got a phony smile that makes you think he understands,
But no one ever gets the truth from Plastic Man.
Publié par Phersv à 22:30 1 commentaires
jeudi 19 juillet 2012
Partie de Myth: Pantheons
C'est un jeu de cartes qui serait assez classique mais le support a été bien déguisé par un habillage mythologique. Au lieu des quatre "couleurs" habituelles comme Carré ou Trèfle, on a cinq Domaines : Fertilité, Mort, Guerre, Cieux et Vent, et douze cartes de puissance croissante dans chaque Domaine (par exemple un XII de Fertilité). Le jeu inclut 12 dieux qui ont souvent une spécialisation dans un ou plusieurs Domaines : Amaterasu est une Déesse des Cieux alors que Thor a des ressources à la fois en Guerre et en Vent, Jupiter a à la fois des Cieux et du Vent. La main de chaque Dieu est en effet composée de Cartes pré-déterminées (les cinq pouvoirs spéciaux de ce Dieu, qui ont des noms particuliers comme le Marteau Mjolnir de Thor ou l'Egide d'Athéna) plus sept cartes tirées au sort.
Le jeu se déroule normalement mieux à trois ou quatre joueurs (pour ne pas trop ralentir, ne pas suivre leur idée d'aller jusqu'à 6) mais peut être un peu long pour expliquer toutes les petites règles sur les pouvoirs propres à chaque Domaine (la Mort peut envoyer des Pestes, le Vent peut protéger une Cité, etc.).
Chaque Cité à chaque Tour a un Domaine dominant (qui est l'Atout) mais le Dieu qui a gagné le tour précédent et qui "a la main" a le droit de jouer dans n'importe quel Domaine. Les autres doivent obligatoirement le suivre s'ils ont des cartes disponibles dans ce Domaine (bien que cela puisse ne pas être le Domaine en Atout).
Une subtilité tactique du jeu est que les cartes faibles peuvent fournir certains avantages et qu'il peut donc parfois être relativement intéressant de perdre un tour de jeu de cette manière. Quand on prévoit qu'on va perdre la bataille, il faut donc savoir optimiser sa défaite pour en tirer un profit ultérieur.
La complication supplémentaire est qu'en plus de sa main de cartes, on doit aussi gérer des "pions" de chacun des 5 Domaines reçus à la fin de chaque tour. Les pions de Fertilité (qui représentent la population) servent de points de victoire à la fin du jeu.
Dans la partie test que je viens de faire à deux (au lieu de trois), Armide avait tiré au hasard la Déesse celtique Mórrigan (Mort + Guerre) et j'avais Athéna (qui est entièrement spécialisée en Guerre) et je crains que malgré quelques pouvoirs assez puissants de Pallas Athéna, je me sois fait complètement écraser. La Mórrigan a conquis dès le début quelques Cités dans les premiers Plis (Macchu Pichu, Tombouctou, Reykjavik) et n'a presque jamais perdu la main sur le Domaine Mort en Atout, ce qui lui fournissait à chaque fois de nouvelles cartes alors que je ne réussissais pas à acquérir de Miracles pour utiliser des pions de Guerre pour lancer des Invasions sur ses Cités. Quand Rome tomba enfin aux mains de la Mórrigan après un combat acharné sur 7 tours de jeu (il faut 4 plis pour la prendre), la partie était définitivement gagnée pour la Déesse à la Corneille qui l'emportait sur la Déesse à la Chouette.
Normalement, on doit jouer en trois "époques" (une époque s'arrête quand toutes les cartes de la main d'un Dieu sont épuisées). Cela doit permettre de minimiser un peu le hasard d'une distribution de cartes, mais cela rend aussi le jeu sans doute un peu plus long, autour de deux heures.
Appendice :
Je me suis demandé si les Dieux sont équilibrés. C'est difficile à évaluer comme les cartes de pouvoirs ont des effets spéciaux parfois compliqués et qu'on ne peut donc les réduire à la valeur indiquée. Par exemple, Mórrigan peut jouer une carte (son VIII de Mort) qui lui permet de gagner un jeton de Mort pour toutes les Guerres faites par les autres.
Mais en gros, en en restant au niveau chiffré des cartes, voici la comparaison des Douze Dieux du jeu :
Amaterasu : V, VI, VII, VIII et XIII de Cieux
Anansi : II de Guerre, III de Mort, IV de Cieux, IV de Fertilité, IX de Vent
Anubis : I, III, IV, VI, XIII de Mort
Athéna : I, III, IV, VI, XIII de Guerre
Buffle Blanc : V, VI, VII, IX, XIII de Fertilité
Gaṇeśa : VII de Mort, VII de Guerre, VIII de Vent, VIII de Fertilité, VIII de Cieux
Guānyīn : V de Fertilité, VII de Vent, VI, VIII, IX de Cieux
Jupiter : I & VII de Guerre, III de Vent, VI & XI de Cieux
Mórrigan : III & VIII de Mort, VI, VIII et X de Guerre.
Quetzalcohuātl : V, VII de Cieux, VII, VIII de Fertilité, VIII de Mort
Þórr : I, V, V, IX, XIII de Vent.
Tiamat : VII de Mort, VII de Guerre, VII de Vent, VII de Fertilité, VII de Cieux
Publié par Phersv à 23:42 3 commentaires
Libellés : hobbies, mythologie