jeudi 14 janvier 2016

La tolérance a plusieurs maisons


Nos amis les "Unitariens Universalistes" (les théistes les plus "ouverts" du monde puisqu'ils en arrivent à ne plus avoir de dogme en dehors de leur lien social - ce qui en devient presque suspect comme dépouillement de la religion) font remarquer que c'est le 448e anniversaire de l'Edit de Torda en Transylvanie (1568) qui accorda la tolérance religieuse en Hongrie pour quelques temps (tolérance garantie pour Catholiques Romains, Luthériens, Calvinistes et Unitariens, tolérance de facto pour les Chrétiens orthodoxes (majoritaires), les Juifs et les Musulmans). Les Unitariens disent que ce texte qu'ils sont fiers d'avoir inspiré fut le premier texte aussi "oecuménique" de l'histoire moderne (Wikipedia fait remarquer que le texte protège les prêcheurs et les congrégations mais pas les individus et la liberté de conscience en général). Mais l'Edit fut vite annulé par le nouveau voïvode István Báthory (un lointain cousin de la célèbre Elizabeth des romans gothiques) qui prit le pouvoir en 1571 (et qui fut un souverain catholique relativement "tolérant" quand même pour cette période, en protégeant par exemple les Juifs de Pologne).

Mais même Catherine de Médicis avait signé l'Edit de Saint-Germain (janvier 1562, donc six ans avant l'Edit de Torda). C'était aussi une tolérance, certes très limitée pour les Huguenots : ils obtenaient le droit de se réunir mais seulement à l'extérieur des villes et en restituant les anciennes églises catholiques. Paradoxalement, c'est ce début de tentative de conciliation qui va déclencher les Guerres de Religion : la Ligue des Guise va considérer qu'on a trop cédé aux Protestants (et vont commencer les massacres) et les Réformés vont refuser de rendre les lieux de culte et les vandaliser.

Add. J'avais cité il y a un an le passage d'Utopie (1516) où le catholique Thomas More utilisait un argument de tolérance théiste où l'Être divin ineffable veut être adoré dans la multiplicité.

Mais cette tolérance d'Utopia ne vaut que pour les théistes. Les athées, eux, et tous ceux niant l'immortalité de l'âme (par exemple les Epicuriens, qui ne sont pas exactement "athées" en un sens, mais aussi les Aristotéliciens), même s'ils n'étaient pas punis physiquement (ce qui est certes un grand progrès par rapport aux Lois 909a-910c de Platon qui préconise encore la peine de mort pour athéisme), devaient être déchus de leurs droits civiques : quelqu'un qui ne croit pas en l'immortalité de l'âme ne peut bien entendu pas tenir un serment ou signer un contrat et il est donc un péril pour la Cité Parfaite.

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