- J'ai acheté Nobi Nobi (Magie), le petit jeu de cartes simulant un jeu de rôle du dessinateur Takashi Konno. On tire une carte de début de scénario et chaque joueur à tour de rôle est le MJ tirant une carte de scène pour un des autres PJ. Le système est ultra-simple, dans le genre des vieux livres Fighting Fantasy avec deux caractéristiques Force et Technique, plus des capacités spéciales (certains combats collectifs de boss font aussi penser un peu à Tunnels & Trolls). Sur les 40 cartes de scènes, il y a environ 35 scènes avec des tests à réussir (un score à dépasser avec 2d6 + bonus). Si le PJ réussit, il obtient une carte Lumière et s'il échoue une carte Ténèbres (mais celles-ci peuvent être des expériences positives aussi). Il y a aussi 5 cartes dites "Roleplay" où le joueur improvise une scène d'ambiance et où on serait donc plus proche d'un jeu narratif. Sans vouloir le changer entièrement en un jeu du type "For the Story", je regrette qu'on ne soit pas plus proche de 20 Tests contre 20 Roleplay dans la répartition de ces scènes. Le jeu se termine quand tous les joueurs ont été trois fois MJ. Je n'ai fait que lire pour l'instant, pas encore testé. J'ignore pourquoi la petite boite sur la Magie a une bien meilleure note que celle sur les guerriers.
- P. "Tybalt" Cuvelier (le créateur de Kosmos) propose une idée brillante de transformer totalement un jeu en inversant les prémisses Daaark en jeu optimiste. Par exemple, dans Shadowrun, au lieu d'être des mercenaires cyniques et désabusés, d'être des révolutionnaires qui doivent réussir à renverser le pouvoir des Corpos.
- Et puisque je continue à parler de Hârn : je n'avais jamais remarqué avant que Jeff Rients n'en parle, mais les Orcs/Gobelins de Hârn sont petits : 90 cm pour les plus petits, les Araki ou Gobelins Rayés, et environ 1,20-1,25 m pour les autres, ce qui les met plus au niveau des Halflings. Leur plus gros désavantage est leur faible longévité qui dépasse rarement deux décennies. L'élément le plus original est aussi l'idée que les Orcs utilisent un système comme les ruches d'insectes sociaux avec 1% des Orcs comme Femelle "Pondeuse" (et la plupart des Orcs sont des mâles infertiles, le "Roi" étant le père de la colonie). La plupart des colonies "garguns" correspondent à ce qu'on peut imaginer mais les Kyani de Pujet et Amekt (au nord de Hârn, près d'Orbaal) sont les plus pacifiques et civilisés, et négocient avec les barbares Ymodis.
dimanche 22 décembre 2024
No Vice
Publié par Phersv à 00:17 0 commentaires
samedi 21 décembre 2024
Le Maréchal MacMacron
(pardonnez-moi pour ce partage d'une image par IA, dont on connaît les effets environnementaux délétères...)
Si Sarkozy se voyait en Napoléon III (populiste autoritaire servant la bourgeoisie), Emmanuel Macron est à la fois le Président royaliste MacMachon de 1875 mais surtout le Roi Louis-Philippe d'Orléans visitant Mayotte (conquise en 1841-1843).
La population : "Monsieur, de l'eau, de l'eau."
Le Potentat : - Que d'eau, que d'eau.
Publié par Phersv à 09:39 0 commentaires
vendredi 20 décembre 2024
[Hârn] Le problème de Lythia
N. Robin Crossby (1954-2008), Britannique devenu Canadien, distribuait son monde de Hârn depuis 1983 par une compagnie de wargames canadienne de Tom Dalgliesh, Columbia Games (surtout connue pour ses wargames avec brouillard de la guerre). A la fin du XXe siècle, Crossby et Dalgliesh se disputèrent et Crossby créa sa propre compagnie, Kelestia Games, et après sa mort en 2008, sa fille récupéra même officiellement selon le droit canadien (du moins d'après les sources que j'ai pu lire) les droits de Hârn et de l'univers de Kelestia (Keléstia est le nom de tout l'univers, Kèthîra le nom de la planète, Lýthia le nom du continent principal (en gros l'Eurasie) et le Venârivè la région occidentale de cette masse continentale (en gros l'Europe, le Proche-Orient et le nord de l'Afrique).
Columbia Games a quitté sa Colombie britannique, s'est installé aux USA, de l'autre côté de la frontière dans l'Etat de Washington. Tom Dalgliesh continue de publier les anciens textes sur Hârn (et Dalgliesh y avait d'ailleurs participé). Au début du XXIe siècle, Kelestia ne publiait que de nouveaux textes sur ce continent de Lythia, avant de décider de concurrencer les anciens modules par un nouveau continent révisé et approfondi.
Il y a donc deux Lythia, une version ancienne (chez Columbia) et la vision nouvelle de Crossby (chez Kelestia).
Il y a pour moi un petit "problème" de Lythia dont je ne vois pas d'équivalent pour d'autres mondes fantastiques.
Hârn est une île. C'est "l'Île des brumes", île mystérieuse loin à l'ouest, à 150 km du continent de Lythia (ce qui n'est pas si loin, c'est à peu près la distance de la Corse ou de la Sicile au continent, mais Hârn est grande comme Madagascar). Sa place dépend donc de sa différence, du contraste avec Lythia. C'est un univers de "basse magie" où le fantastique est censé rester assez discret : on y accepte un peu de magie sur Hârn (il y a des non-humains, des elfes, des nains, des orcs, des titans demi-dieux, des monstres et des sorciers) mais on précise bien que c'est étonnant, marginal et exotique par rapport à Lythia. Lythia doit demeurer un peu réaliste, voire "banale" ou quasi-"réaliste" comme une Terre parallèle pour que Hârn paraisse d'autant plus en décalage.
Les premières publications sur Lythia chez Columbia Games (comme Ivinia, Harbaal, Menglana, Shorkyne) étaient donc déconcertantes car la forte atténuation de la magie créait un cadre si pseudo-historique qu'on pouvait se demander à quoi bon en faire un monde imaginaire. Ce serait un peu comme un monde fictif pour ceux qui n'aiment pas les mondes imaginaires et je ne m'y voyais pas y jouer. Le fan de Hârn semblait donc vouloir qu'il y ait de tels domaines hors de Hârn seulement comme faire-valoir pour l'Île des Brumes, qui brillait d'autant plus comme anomalie que Lythia reste "normale".
Mais Crossby a dû évoluer dans sa manière de jouer sur Lythia à force de la créer ou de l'explorer, car la magie y a connu une inflation au point que les publications actuelles sur Lythia (notamment comme la région du Venârivè ou le Royaume d'Emélrenè, la plus "hârnique") ont plus de créatures surnaturelles que les premières versions de Hârn (au point qu'il y a des coins avec tant de dryades et élémentaires qu'on pourrait être presque dans un monde medfan habituel).
On est face à un dilemme dans ces publications médiévales fantastiques. Hârn avait une promesse de médiévalisme avec peu de magie et si l'inflation de la magie continue, Lythia semblera contredire ses origines et redevenir un peu plus "générique". Mais le jeu de rôle med-fan tend toujours à une inflation du fantastique dans les scénarios même si le cadre de départ prétendait être le moins magique.
Le problème peut donc se reformuler ainsi :
(1) si Lythia restait aussi peu magique que les impressions de départ, qui voudrait y jouer ?
(2) Mais d'un autre côté si Lythia devient plus magique, ne perd-elle pas un peu de son originalité ?
Un autre problème (mais cela pourrait être vu comme un avantage aux yeux de certains) est le fait que les dix dieux disparates de Hârn semblent assez "globaux" en réalité. La plupart des autres cultures retrouvent sous des noms assez proches à peu près les mêmes divinités. En termes gloranthiens, Kelestia est plus proche d'un monomythe même si les publications récentes le remettaient en cause (notamment sur l'histoire d'Ilvir qui ne serait pas que le petit dieu local mais une version d'un ancien dieu plus important de la forêt sur le continent, une sorte de Cernunnos déchu en force extraterrestre plus lovecraftienne).
[En passant, Glorantha me semble avoir un problème assez différent que Lythia : la Passe des Dragons y est si originale que le reste du monde paraît trop générique en comparaison. L'Ouest ressemble à l'Europe, l'Orient ressemble à la Chine, la Passe des Dragons est assez inclassable et on ne peut pas facilement donner un équivalent. ]
Publié par Phersv à 23:39 0 commentaires
jeudi 19 décembre 2024
Re. : Gaston Phébus, la Mini-série (1978)
Correction sur la note d'hier : La série va bien jusqu'à la mort d'Yvain le Bâtard de Foix et le Bal des Ardents de 1393 comme échec final de la dynastie directe de Fébus.
Dans la série, l'un des personnages les plus charismatiques est Corbeyran, l'oncle de Fébus. Corbeyran est joué par le sévère acteur Georges Marchal (1920-1997), qui avait déjà joué le Roi Philippe le Bel dans les Rois Maudits (1972) et il donne une autorité énorme à Corbeyran en mentor / confident du bouillant Béarnais.
Corbeyran de Foix-Rabat est un personnage de "bâtard" particulièrement original et qui semble être au moins partiellement historique (1321-1402 ?, même s'il y a des données contradictoires sur sa généalogie ou même sa génération). Sa mère aurait été la première épouse légitime du grand-père de Gaston III Fébus (1331-1391) et il aurait donc failli être le Comte légitime - si ce n'est que sa mère avait été répudiée (pour stérilité) et qu'il fut enfanté après cette répudiation (et dans la série alors que sa mère était déjà entrée au Couvent, ce qui aggravait sa scandaleuse illégitimité).
La fiction dit qu'il était jaloux de son demi-frère, le comte Gaston II de Foix-Bearn (1308-1343) jusqu'à ce qu'on lui confie la garde du futur héritier et qu'il transforme en amour paternel son devoir envers son neveu, l'enfant de son rival. La mini-série a complètement inventé le mythe que Gaston II et Corbeyran seraient nés le même jour comme Héraclès et Eurysthée, Corbeyran serait né 13 ans après...
Il y a une opposition amusante entre les Rois Maudits (1972) où Philippe VI de Valois est joué (par Benoît Brione) comme un brillant Machiavellien qui invente la Loi salique et la mini-série Gaston Phébus (qui commence environ une génération après) où le même Philippe VI "le Fortuné" est interprété (par François Maistre) de manière satirique comme un clown incompétent, couard et rétrograde qui ne sert que de faire-valoir à Fébus.
Publié par Phersv à 21:46 0 commentaires
mercredi 18 décembre 2024
Gaston Phébus, ou le Lion des Pyrénées (1978)
Je suis retombé sur le site de l'INA sur Gaston Phébus, cette vieille mini-série d'Antenne 2 que je n'avais pas vue depuis 46 ans mais qui fut un de mes Game of Thrones quand j'étais enfant (même si je préférais de loin Les Rois maudits et surtout Moi, Claude). J'avais oublié l'importance du surnaturel. Il y a de nombreux éléments de fantastique, des prophéties (un astrologue prédit ce qui va arriver dès le premier épisode) et des événements quasiment miraculeux (l'Ours Hannibal qui se libère de ses liens pour accomplir la vengeance divine).
Je ne défendrais pas la série mais la reconstruction historique a une ruse qu'on pourrait généraliser : comment tenter de rendre raison d'un fait historique en inventant des causes fictives qui puisse en inverser le sens.
En gros, la réalité historique est que Fébus le Béarnais (1331-1391) avait été un fort mauvais mari pour Agnès de Navarre (1334-1396), épousée en 1349 (Phébus avait 18 ans et Agnès 15 ans), au point de la répudier en 1362, juste après la naissance de son héritier, parce qu'il n'avait pas reçu de dot et (peut-être) de tuer leur fils de 18 ans en 1380 parce qu'il aurait conspiré contre lui.
L'idée curieuse des scénaristes fut donc d'inventer un prétexte mélodramatique ou romantique, une histoire de Vengeance, pour tenter de rendre Phébus sympathique malgré cette histoire de répudiation et d'assassinat de son fils. Ici, Gaston avait un unique amour, "Myriam", qu'il épouse en secret en 1346 (il a donc 15 ans, l'année de Crécy) mais qui est assassinée par Agnès de Navarre, la soeur de Charles "le Mauvais", et Phébus ne l'épouse que par haine et pour se venger d'elle.
Le Mariage par haine est une stratégie un peu surprenante. Cela est censé atténuer toute la cruauté que le Comte de Foix aura ensuite envers la Princesse de Navarre. Tout est donc la faute des manoeuvres des Navarre et Agnès (jouée par Nicole Garcia, qui avait déjà une trentaine d'années) est terrifiante dans son amour pervers envers Gaston.
Dans le scénario, il y a d'autres changements plus mineurs. Phébus est le seul Français à lutter efficacement contre les Anglais en ce début de Guerre de Cent ans, alors que dans la réalité, il louvoie entre son allégeance de Foix envers la France et la neutralité envers ses voisins d'Aquitaine.
Je ne crois pas que la mini-série le mentionne (je ne l'ai pas revue en entier) mais il y a une coïncidence horrible dans cette saga familiale entre Foix-Béarn et Navarre, des deux côtés des Pyrénées, deux bûchers funéraires. En 1387, Charles de Navarre meurt brûlé vif à 54 ans dans un accident (une bougie qui allume le linge imbibé d'alcool dont il était recouvert). 6 ans plus tard, en 1393, peu de temps après la mort de Phébus, son dernier fils survivant, son bâtard favori Yvain (ou Jean) de Foix meurt brûlé à 36 ans lors du célèbre désastre du "Bal des Ardents" (où le Roi Charles VI le Fol sombra dans la démence). Il serait donc facile pour les scénaristes de faire de la mort d'Yvain les dernières représailles d'Agnès de Navarre qui meurt en 1396. [En passant ce célèbre surnom de Charles le Mauvais ne vient que d'une chronique espagnole du XVIe siècle et n'est donc pas encore utilisé au XIVe - et le prétendu "Jean le Bon" ne doit ce surnom qu'à une supposée bravoure pendant la bataille de Poitiers de 1356.]
Publié par Phersv à 23:28 0 commentaires
Vieux jeu narratif par Gazouillis sur Mars
Sur le site de microblogging détenu par le milliardaire escroc fasciste, j'avais participé il y a 3 ans (mars 2021) à un jeu où on devait faire chaque jour une petite nouvelle en moins de 120 caractère avec un thème imposé (Mars) et un mot chaque jour. Comme je ne pense pas que le site du trafiquant de crypto et fan de Trump tienne éternellement, en voici la copie :
1er Désert
Mais ce n'est pas possible, cet endroit n'est sur aucune de nos cartes de Barsoom.
Le Thark sourit.
"Vous croyez qu'on terraforme sans laisser une part de désert du réel ? Ce serait trop prévisible et monotone."
2 Viking
Une autre nef volante sortit des pingos gelés d'Utopia.
"Par Issus, pourquoi faut-il que ce soient des Aînés ? murmura-t-il. "j'y ai déjà perdu une main comme Týr, mais cette nuit, je mourrai les armes dans les 3 qui me restent, comme vos guerriers des sagas vikings."
3 Impact
(La Disparition d'un scriptor)
A longship is landing.
"First Borns".
Sky Corsairs of Barsoom, bloodthirsty picaroons, sadistic cut-throats... but also scholars.
I am afraid.
"Oh, I know your publications... High Impact Factor Journals!"
This Martian Viking is a haughty snob.
4 "Nous apprécions le fait que vous ayez déconstruit certains récits sur nous", dit le Premier né. Ils doivent pirater toutes les infos du système, y compris Jasoom. Leur réseau de pouvoir est un panoptique dont le centre est au Pôle Sud mais la circonférence partout.
5 Chroniques
Je dis à mon ami thark de baisser les armes. Nous allions suivre les Premiers Nés dans les plaines australes au-delà d'Argyre. Les anciennes chroniques disaient que les demi-dieux de Barsoom rêvaient son destin dans leur demeure polaire.
6 Planète
Ce sont eux qui se nommaient ainsi, Premiers Nés parce que dans leur mythologie, ils étaient les premiers êtres pensants de la planète issus de l'Arbre de Vie. Ils étaient des humanoïdes quasi-immortels mais j'ignorais s'ils avaient le moindre lien avec les Zoophytes.
7 Vapeur
Leur technologie était hétéroclite et en déclin. Vaisseaux ou ceintures de vol au Huitième Rayon, contrôle de la lumière et invisibilité, cerveaux mécaniques télépathes à vapeur, pistolet au radium. Le manque de robots n'expliquait pas le maintien de l'esclavage.
8 Extraterrestre
Je tentais de m'expliquer au Thark. Le problème des programmes de Barsoom est qu'on a projeté des perspectives très géo-centrées sur la vie extraterrestre. ER Burroughs était plus travaillé par le racisme contemporain que par la xénobiologie.
9 Olympe
Les Premiers Nés, "les Martiens Noirs" de Burroughs, auraient pu paraître subversifs en inversion du colonialisme mais ils n'en étaient que le miroir, avec leur théologie politique où ils manipulaient la Panoplia Prophetica du haut des neiges de leur Mont Olympe.
10 Rouge
Il manquait une vraie insurrection contre ce pouvoir fossilisé des Premiers Nés. Il fallait injecter un peu d'éléments radicaux d'Aelita dans les veines de Barsoom, des Rouges comme anticorps dialectiques contre les identités figées.
11 Le Premier Né volubile continuait à me vanter l'efficacité des Missions de pasteurs therns pour maintenir leur hégémonie secrète. Mais ma mission serait maintenant de les libérer de ce fantasme conspirationniste, en aidant à la prise de conscience des Barsoomiens.
12 Il fallait manipuler l'esprit collectif de l'IA qui gérait l'inconscient de Barsoom. Je discutais en buvant de "Menni l'Ingénieur" de Bogdanov, qui décrit une utopie égalitaire dans certaines cités créée par les ingénieurs des canaux.
13 Je venais de grokker que la perception extra-sensorielle de certains Martiens pouvait aussi être une vulnérabilité si on commençait à brouiller leurs idéologies. Il peut être vertigineux mais risqué de se pencher au bord de ce cratère bouillonnant de la noosphère.
14 Sous la surface de Planum Australe, sous la calotte du pôle, nous marchions près de la mer sous-terraine qui brillait de phosphorescences. Il faudrait pouvoir partager toute cette eau dans les canaux en ruine.
15 Je contemplais les eaux sombres sub-polaires, sans marées des deux lunes. La mer inerte des profondeurs y est plus mortelle que n'importe quelle tempête océanique. Pouvait-on la revivifier sans passer par les tumultes d'une guerre et les hydres hideuses de Mars ?
16 Je n'étais pas assez technicienne pour réparer ma Ceinture au 8e Rayon et m'enfuir en volant de ce centre occulte de leurs réseaux de nonces et de légats. Mais je semais chez les Premiers Nés et leurs divers serfs quelques doutes sur leur destinée manifeste.
17 J'avais croisé l'auteur de la Guerre des Mondes dans un de ses voyages temporels. Ses Sarmaks octopodes sans immunité avaient fui un choc viral mais il fallait une autre sorte de virus mémétique pour contrer le culte agonisant d'Issus et recréer une guerre des classes.
18 En regardant la glace où était préservé le corps momifié d'Issus, je vis mon reflet sur ses traits décharnés. Ell
e s'était faite passer pour une Déesse vivante pendant tant de siècles qu'ils demeuraient fidèles à leur propre manipulation.
19_Masse Mon ami, le Thark à 3 bras, Reges Tarshish, fit remarquer que je tombais dans le cliché de la Sauveuse qui allait conscientiser des masses mineures. Ce serait plutôt l'écho de la ferveur sacrée qui allait dégeler ces eaux glacées de leurs calculs impérialistes.
20_Eclaireur Reges Tharshish avait trouvé la solution grâce aux rayons d'invisibilité des Premiers Nés et il échappa à leurs gardes. Un spectre éclaireur hante la Plaine australe, plane sur les eaux et il sait se servir d'un Huitième Rayon.
21_Rivière La Momie de la Déesse morte s'éleva hors de la glace et commença à psalmodier dans la Langue universelle de Barsoom. "Anta Odeli Uta ! Anta Odeli Uta !" Elle s'était dégagée de la rivière sous-terraine, comme de quelque obscure limite stygienne.
22 L'idole défunte oscillait dans le giron d'une nuit brillante et se consumait lentement. Les Premiers Nés qui l'écoutaient appeler à l'abandon de leur empire savaient qu'elle n'était qu'un masque mais étaient quand même ébranlés par ses sentences d'outre-tombe.
23. καιρός "ANTA ODELI UTA" était un appel à l'émancipation et il y avait quelque chose d'incongru à voir l'ancienne théocrate despotique reprendre ce mantra. Reges Tharshish avait saisi l'opportunité en projetant le 8e Rayon anti-grav sur le mausolée.
24/ Système De mon côté, j'avais pu redémarrer les cerveaux à vapeur qui allait diffuser les messages de révolte et en faire un système de libération. Peut-être y avait-il une part de vérité dans le paternalisme du nudge.
25 Pay no attention to that Thark behind the curtain! Les tyrans de Barsoom avaient simulé si longtemps la divinité qu'ils devaient tomber par cette simulation. L'atmosphère mentale changea brutalement.
26 Dans cette gravité, je me surpris de la longueur de mes bonds auprès de l'idole d'Issus. Le dormeur allait s'éveiller. Le culte est le soupir de la créature opprimée, l'esprit d'un état de choses sans esprit, la caféine des masses assoupies.
27 Révolution Il ne faudrait pas 687 jours pour que la révolution s'étende à chaque Cité-Etat de la planète, embrasant les canaux, fondant des chaînes invisibles, soulevant les différents peuples vassalisés par la théocratie.
28 Tectonique L'enveloppe fragile de cette momie d'Issus se désintégrerait vite mais c'était la faille sismique qui bouleversait la tectonique sous la Plaine australe, comme une aurore nouvelle sortie de ces cratères.
29 Canyon Notre fable résonnait du Mont Elysium jusqu'au fond des canyons de Noctis Labyrinthus. Reges Tharshish, pragmatique, demanda si rien de durable pouvait s'établir sur un mensonge, même bien intentionné. Trop tôt pour juger. Il faudrait visiter quelques branches futures.
30 Opposition Chaque dédale des avenirs possibles est une tête qui repousse au fur et à mesure qu'on émonde le présent. Dans cette Hydre de Mars, je trouvai des oppositions qui réapparaissaient, et même une église tyrannique qui s'était accaparé le message que nous avions projeté.
31 Persévérance Nous avons donc réinitialisé la Barsoom à une autre bifurcation pour tenter de réduire ces effets indésirables pour la liberté. La psychohistoire est pour l'instant plus un art qu'une science. L'action humaine tâtonne mais la persévérance est divine.
Publié par Phersv à 20:29 1 commentaires
Libellés : fiction
Syllogomanie
Le calendrier de l'Avent sur la collectionnite par Martin Vidberg.
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Libellés : hobbies
mardi 17 décembre 2024
[Hârn] Les 18 peuples barbares de Hârn
Un des choix de Crossby quand il a créé son île de Hârn (qui est trois fois plus grande que la Grande Bretagne) est que les 7 Etats (enfin, 9, si on compte Elfes & Nains) plus ou moins "urbanisés" sont très loin de la recouvrir entièrement. La majorité de la superficie est peuplée de 18 peuples humains parfois encore nomades, qu'on appelle communément les "Barbares" (sans compter les tribus de "Garguns", Orcs). Depuis sept siècles (!) que les Etats féodaux se sont répandus sur l'île, ils n'ont jamais réussi à conquérir entièrement tous ces territoires. Les Cités se sont étendues surtout sur le sud-est (Melderyn), le centre (Kaldor, Chybisa), le nord (ports d'Orbaal) et surtout l'ouest (Rethem, Kanday, République Thardique).
Comme on ne retient facilement que 6-9 noms, dix huit peuples "barbares" (dont certains sont eux-mêmes divisés en plusieurs tribus rivales), cela fait un peu trop pour qu'on arrive à bien les distinguer. De plus, ce n'est pas comme les divers nomades magiques de Glorantha, le pseudo-réalisme fait que les Barbares de Hârn sont souvent assez indiscernables. Certes, si vous ne jouez que dans un seul Royaume de Hârn, vous n'avez besoin de connaître que les tribus limitrophes, notamment pour le petit royaume de Chybisa ou le grand royaume de Kaldor, qui sont encerclés.
Sur ces 18 tribus, 10 sont d'origine "Jarins" (celtiques ?), 6 sont "Pharic" (germaniques) et 2 "hybrides".
Les 10 Jarins sont les Adaenum (pêcheurs au sud-ouest, adorent le dieu de la mer Eder), Anoa (nomades au nord, liés au dieu Ilvir, ennemis des Taelda), Bujoc (sylvestres matrilinéaires, religion totémique), Chymak (marins du sud, alliés des Hodiris, haïssent les Sindar d'Evael de manière fanatique), Equani (guerriers tatoués du nord-ouest, ennemis des Ymodis), Kabloqui (cannibales influencés par les Orcs, au nord du lac, ennemis des Equani), Kubora (guerriers du nord-ouest, dont certains furent les fondateurs du Royaume de Rethem), Taelda (chasseurs primitifs des forêts du nord, liés au dieu Siem, ennemis des Anoa), Urdu (chasseurs nomades du nord-ouest) et les Ymodi (guerriers du nord, religion totémique).
Les autres tribus "Pharic" sont les Chelni (éleveurs de poneys près d'Evael, certains se sont convertis au dieu nordique Sarajin), les Gozyda (des brigands du sud-ouest, alliés de Kanday contre Tharda), les Hodiri (cavaliers nomades), les Kaths (primitifs près de Kaldor, religion totémique), les Pagaelin (plutôt violents, une partie est infiltrée par une secte d'assassins de Naveh) et les Tulwyn (entre Tharda et Evael, négocient avec les Orcs, adorent Kekamar le dieu des Vents). Les autres tribus plus "exotiques" sont les Kamaki (éleveurs insulaires au sud-ouest, venus de loin au sud) et les Solori (tribu primitive du sud-est qui sont victimes d'un génocide perpétré par les Paladins de Larani).
Ce n'est pas du tout manichéen, même si globalement les Bujoc ont l'air plutôt sympa et les Kabloqui ou les Pagaelins pas tellement.
Add. Les 18 tribus, par taille de la population.
1 Hodiri 25 000
2 Kubora 20 000
3 Pagaelin 18 000
4 Taelda, Urdu, Tulwyn 10 000
5 Equani 7500
6 Adaenim 6000
7 Anoa, Bujoc, Gozyda 4000
8 Les autres Chymaks, Kabloqui, Ymodi, Kaths, Kamaqui...
Publié par Phersv à 21:25 0 commentaires
lundi 16 décembre 2024
[OSR] Survol de Knock! n°2
Knock! An Adventure Gaming Bric-à-Brac n°2 (janvier 2021)
Ceci n'est pas une recension (lisez celle de Pookie). Comme la dernière fois, c'est plutôt un "aide-mémoire", je me concentre sur une indexation des Générateurs aléatoires pour les retrouver si j'en avais un jour besoin pour une partie. Je dois avouer que j'ai un réflexe dans ces Générateurs qui est plutôt de choisir l'idée qui me plaît le plus sans vouloir lancer le dé, mais il y a des cas qui se répètent où le Générateur devient indispensable.
La couverture du n°1 avait un démon et celle du n°2 a un générateur de Pacte avec un Diable (qui peut aussi proposer un voeu gratuit décidé par le Diable pour commencer la voie de la corruption...).
d6 Livres magiques, dont un qui vous transforme en Barde. p. 3
Générateur de chevaliers errants (dommage que le générateur de 20 noms soit la plupart du temps juste des noms assez connus de chevalier de la Table ronde) p. 16-18
Générateur de quirks des classes de personnage p. 20-21 J'aime beaucoup certains secrets comme ce Voleur qui a perdu son Ombre mais qui montera de 5 niveaux d'un coup quand il l'aura récupérée, ce Mage à personnalité dissociée la nuit ou ce halfling qui sait faire de la soupe de champignons si délicieuse qu'elle restaure 1d8 points de vie.
Générateur d'événements pendant une session de recherches magiques entre les parties p. 28-29
Générateur de bâton magique p. 30
Générateur des secrets du Miroir de la Harpie Erynie et de ce qu'elle peut demander en échange p. 38
1d20 événements horribles qui arrivent quand vous dormez dans le Donjon p. 42-43 Quelques idées étranges et fantastiques mais globalement, ce n'est pas une bonne idée de dormir dans le Donjon...
1d12 événements horribles qui arrivent quand votre torche s'éteint dans le Donjon. p. 45
8 sorts féeriques souvent répugnants des Gobelins comme Cotte d'Asticots (crée une armure faite de vers), Morve enflammée ou Urine Acide...
20 livres dans les étagères d'un sorcier p. 49-50.
1d30 pouvoirs et vulnérabilités spéciales des Vampires p. 58-59
1d20 modifications originales à donner à vos Rencontres aléatoires (un peu comme les Traits chaotiques de RQ) p. 60-63
1d12 équipes de PNJ rivaux des PJ p. 68-69
Un nouveau système d'alignement qui change le tableau 3x3 avec Loi et Moralité en "Empathique / Insensible", "Protecteur / Manipulateur" et "Généreux / Egoïste", ce qui donne 8 alignements.
Générateur d'équipement pour jeu post-apo p. 72-73
Encore un générateur d'idiosyncrasies de Gobelins p. 83-85 (voir les sorts supra p. 46).
Générateur d'objectifs des PNJ pendant un combat p. 90
Des conseils pour donner des secrets et historiques pour les objets magiques comme dans Earthdawn p. 107
Une rencontre effrayante : la danse macabres des Ossements et le Ver des Saturnales p. 111
30 Grimoires de magie (sorts regroupés par des genres) p. 128-130 (cf. supra p. 49-50 et un peu comme la longue liste qu'avait faite Bruce Heard dans Dragon n°82, février 1984)
16 Malédictions liées à 4 Divinités Mineures : Fardoer (Limons), Klackyon (Géométries), Asphyxie Miasmatique du Caldera, Glimerla (déesse halfling des Bracelets Criards) p. 135-139
d30 Mais que font ces Araignées Géantes ? p. 140-142
d100 Mais que fait ce Cube Gélatineux ? p. 143-145
Propositions pour changer des sorts classiques en versions plus intrigantes (comme ce "Révéler la Magie" qui fait apparaître des bêtes qui la flairent ou une version plus terrifiante de "Dissiper la Magie" où on n'est pas sûr de là où va cette magie "dissipée") p. 152-153
30 PJ débutants (très) étranges (ou plutôt une liste de PNJ originaux, disons) p. 155-161
Dans les créatures, je retiens surtout le Flatteur, un être féérique qui booste le moral d'un PJ mais qui le rend progressivement chaotique.
La partie sur les classes de PJ a une classe-espèce de Brownie (p. 193), lutin de 30 cm, banni de la Cour Seelie, privé de ses pouvoirs. Il peut regagner progressivement des pouvoirs comme téléportation ou d'illusions, et il doit accomplir des hauts faits pour espérer un jour être réintégré. La race des Ornithorynques (les Platyfolks) pourrait avantageusement remplacer les Hobbits. La classe des Plague Doctors est bien illustrée (p. 204-205) mais je ne suis pas sûr d'en vouloir à une table de jeu.
D'habitude, je n'indexe pas les scénarios (de même pour les conseils, les cartes ou les monstres) mais il y a un petit bac-à-sable (un "hexcrawl") d'Islayre (p. 210-213) avec des villages humains et halflings sur lesquels déferlent des hordes invoquées d'un autre plan qui commencent d'abord par attaquer les Gobelins. Cela donne une diplomatie qu'on trouve dans certains vieux mégadungeons : les PJ penseront-ils à s'allier aux Gobelins contre l'ennemi commun ? Un seul défaut du scénario, le choix pas très intuitif d'une numérotation en spirale des Hexagones.
Publié par Phersv à 16:55 0 commentaires
samedi 14 décembre 2024
Archéologie de Hârn & Théologie comparée
Je n'aime pas beaucoup les religions du monde de Hârn parce que je trouvais que c'était seulement (comme dans beaucoup de jeux de rôle) une liste un peu disparate de dix dieux (Chevalerie, Connaissance, Destruction, Fécondité, Infertilité, Violence, Nuit, Rêve, Commerce, Mal) sans une vraie mythologie.
Dans ce vieil article, j'avais supposé que les dix dieux devaient en partie venir des neuf alignements de D&D et j'avais donc fait l'hypothèse de ce tableau :
Loyal Bon Larani |
Loyal Neutre Save K'nor |
Loyal Mauvais Agrik |
Neutre Bon Peoni |
Neutre Ilvir ; Sarajin ? |
Neutre Mauvais Naveh |
Chaotique bon Siem |
Chaotique neutre Halea |
Chaotique Mauvais Morgath |
En fait, le principal créateur de Hârn, N. Robin Crossby (1954-2008) avait déjà à mon insu expliqué les vraies origines dans un supplément appelé Nushenic Libram: The Lost Gods (2003), où il racontait les cultes originels de sa campagne en 1978 avec 18 dieux du Panthéon "nushénique" qui furent ensuite remaniés pour donner les 10 dieux hârniques.
Il y avait bien dans ce tableau les trois alignements de D&D mais croisés avec 6 fonctions un peu comme les 5 fonctions utilisées par MAR Barker dans son panthéon de l'Empire du Trône du Pétale (la relation de Larani/Agrik est restée celle entre Karakan et Vimuhla et la relation Peoni / Save K'nor devait être aussi à peu près celle entre Thumis et Ksarul) :
Loyal |
Neutre |
Chaos |
|
Souveraineté | Lorthéa (Justice) | Haléa (Echanges) | Morgath (Rétribution) |
Guerre | Larani (Chevalerie) | Sarajin (Force) | Agrik (Destruction) |
Savoir |
Peoni (Tekhnè) | Save K'nor (Theoria) |
Ky Sirvris (Mètis) |
Moralité | Vakar'sKur (Vertu) |
Hedoni (Plaisir) |
Tave'kvir (Vice) |
Nature |
Hver (Fertilité) |
Tevelar (Sauvage) |
Ilvir (Désolation) |
Mystère | Siem (Rêve) |
Shii (Magie) |
Naveh (Ténèbres) |
J'ai laissé en gras les dix dieux qui ont été conservés (et je n'ai pas adopté l'orthographe originelle).
Non, je plaisante sur la 3e ligne du "savoir", c'est en fait Médecine / Connaissance / Connaissance maléfique, pas Technique / Contemplation / Ruse (d'ailleurs, il est étrange de mettre Contemplation en plus neutre que les Techniques). Mais "Hedoni" (plaisir en grec), semble bien indiquer que ce tableau des 18 dieux suivait un certain ordre philosophique a priori. Crossby dit aussi que Haléa, déesse du Commerce, a absorbé "Hédoni" pour devenir surtout une déesse du plaisir et de l'intérêt égoïste, plus Aphrodite ou Uleria que Hermès ou Issaries.
La déesse Peoni devait être une sorte de Chalanna Arroy (déesse de la compassion) à l'origine avant d'absorber la fonction de Hver et de devenir aussi et surtout une sorte d'Ernalda (déesse de la Terre). Le fait que Peoni ait été d'abord Asclepios et pas Gaïa/Demeter réfute mon hypothèse que son nom viendrait de "peones".
Lorthea, le Roi Loyal des Dieux, a disparu et cela donne un vide curieux dans la religion hârnique. Les autres pertes sont Ky Sirvris en dieu maléfique de la connaissance, toute la 4e ligne sur la Moralité, Hver, Tevelar et Shii (qui servait de dieu des "Moines" au sens d'arts martiaux dans sa campagne).
Faire d'Ilvir le dieu de la Stérilité et de la Gaste Terre modifie de manière intéressante son mythe. Au lieu d'être simplement un petit dieu exotique qui a un stock limité de créatures polymorphes qui se réincarnent comme je le croyais dans la Hârn actuelle (Ilvir est sans doute l'un des aspects les plus originaux de cette île), il est chargé de la réincarnation parce qu'il ne peut pas vraiment créer et répandre la vie comme dieu (asexué) de la Désolation.
En passant, Crossby dit aussi que les dieux furent créés a posteriori selon les demandes des joueurs et cela explique pourquoi ces cultes font tant "classes de PJ" avec trois dieux différents pour les guerriers plus Shii en dieu des Shaolin.
Je n'ai jamais été très satisfait de l'opposition Larani (Honneur chevaleresque) / Agrik (destruction et violence) - tout comme Heironeous et Hextor dans le panthéon de Greyhawk. Minerve et Mars peuvent être tous les deux valorisés pour les Romains mais Agrik est bien plus maléfique même qu'Arès (c'est pourquoi je l'avais mis comme "Loyal Mauvais"). Hârn est censé ressembler à un monde pseudo-médiéval de low fantasy et il est difficile d'imaginer des nations entières satanistes, comme Agrik semble bien pire que Baal. Certes, même Larani peut avoir des aspects plus ambigus avec des adorateurs fanatiques partisans de Guerres saintes mais cela n'atténue pas tellement le manichéisme. Je pense que même si Agrik ne sera jamais un dieu "bon", il faudrait le modifier pour le rendre un peu plus ambigu ou pour que son point de vue puisse devenir un peu plus défendable ou compréhensible. Par exemple, je pense qu'il faudrait insister sur une guerre contre Morgath pour que les deux divinités des chevaliers Larani et Agrik aient une sorte de front commun contre le dieu du Chaos. Canoniquement, Agrik et Morgath sont en fait plutôt alliés et cela rend difficile de croire que des civilisations entières pourraient se réclamer d'Agrik le Destructeur par le Feu (même si on ne peut pas retirer complètement son association avec l'élément Feu ou l'idée qu'il était à l'origine chez les Azeryans un serviteur pour le sacrifice au dieu neutre du Feu primaire Manrasusha). Agrik est le dieu principal du Royaume de Rethem et important dans la République Thardique mais il est banni dans tout le reste de Hârn. Pour devenir un peu plus crédible, Agrik ne serait pas seulement le destructeur mais celui qui fait passer des épreuves terribles par le Feu purificateur pour mieux lutter contre le Chaos final de Morgath, un dieu de l'effort sur soi-même, un Shiva ou un Mithra inflexible mais qui se voit quand même comme le "bon côté", même si Might makes Right. Larani pense que la force des chevaliers implique des devoirs envers les faibles (noblesse oblige), Agrik trouve que c'est naïf et que c'est le rapport de force et l'obéissance absolue des faibles qui est nécessaire pour mieux lutter contre le Chaos et pour sauver le monde. De manière générale, l'opposition Larani / Agrik serait meilleure si elle apparaissait plus comme une opposition entre disons une aile plus "charitable" du Christianisme (et encore, c'est plutôt Peoni qui représente vraiment la Compassion) et une aile qui évoque plus l'Inquisition ou le Despotisme hobbesien, pas un Grand Ancien qui vous promet seulement que vous assisterez à l'Apocalypse. Mais cela demanderait de changer énormément de choses dans le Canon hârnien et par exemple de retirer l'alliance avec Morgath et tous ces Balrogs enflammés (les Vhirs) qui servent Agrik. On devrait sans doute garder des aspects sinistres importants comme son aspect millénariste (Agrik est lié à la Fin du Monde dans les flammes) et les Jeux de gladiateurs mortels à l'ouest de Hârn (Agrik comme dieu du duel et de l'Ordalie - on est encore au Haut Moyen-Âge après tout). Je veux bien à la rigueur que la vision entièrement maléfique soit la "vérité" objective dans le jeu mais pas la représentation sociale commune exotérique dans son culte et dans ses Ordres de prêtres et de chevaliers (les Agrikiens seraient des Templiers qui croiraient servir un Archange dur mais juste et serviraient en fait le Baphomet).
Publié par Phersv à 23:46 0 commentaires
dimanche 24 novembre 2024
[OSR] Générateurs dans Knock! n°1
Knock! est un mégamagazbook de plus de 200 pages édité par les Joyeux ChampiHommes (dont Eric "Surcapitaine" Nieudan ou Olivier "Nobboc" Revenu). Plein d'humour et de trouvailles, c'est sans doute une des meilleures sources d'idées "oSR" (ou "Jeu d'Aventure à Bricoler Par Soi-Même", DIY) avec d'autres sites qui collaborent avec eux comme ceux du Grümph ou de Kobayashi.
Les Merry Mushmen ont résumé l'esthétique de la Régénération Néo-Paléo-Chaos en 7 points (qui viennent d'autres manifestes comme ceux de Matt Finch) :
- (1) les décisions du joueurs doivent compter plus que les caractéristiques sur la feuille de perso.
- (2) le cadre est un environnement dynamique conduisant à des situations intéressantes, non pas un récit linéaire.
- (3) le maître du donjon doit être un arbitre neutre de l'interaction avec ce cadre, pas un metteur en scène.
- (4) les arbitrages comptent plus que les règles
- (5) les dés doivent produire des situations inattendues par des tables de résultats aléatoires.
- (6) le cadre n'a pas à être "équilibré" pour être "jouable" et ce sont les joueurs qui doivent donc évaluer si une situation dangereuse peut être résolue à leur niveau de capacité.
- (7) la création de perso doit être rapide pour permettre de les remplacer rapidement.
(1) me paraît essentielle en jeu même en dehors d'un cadre dit "Old School". La forte mortalité impliquée en (7) paraît plus discutable à mes yeux (mais j'ai une tendance à voir le "Death Funnel" ou les "Total Party Kills" comme un échec collectif de tout le jeu, pas comme une expérience amusante).
Le seul désavantage de cette vaste taille du magazine est qu'on se perd dans des mines de bonnes idées. J'ai la flemme de faire un vrai index et je ne vais faire qu'un aide-mémoire de quelques idées à réutiliser en jeu, notamment les générateurs aléatoires (sans parler ici d'autres éléments qui font aussi l'intérêt du mook comme les nombreux conseils, les monstres, les plans ou les illustrations) :
Knock! An Adventure Gaming Bric-à-Brac - Being a Compendium of Miscellanea for Use with Old School Role-Playing Games n°1 (février 2021) voir aussi la fiche sur RPGeek et la review chez Pookie
La couverture a déjà un générateur aléatoire de Démon qui dégouline de saveur originale, notamment ses motivations (comme retrouver son amour perdu) ou ses effets magiques (comme échanger l'âme du PJ avec la sienne). En parlant de chaos aléatoire, voir aussi les pages comme Chaotic Shiny ou d4 Caltrops.
Chris McDowall : Le Golem de Grimoires de Magiciens p. 16
Daniel Sell : d66 vulnérabilités originales de grands sorciers p. 20-24
Nobboc : d66 équipement (contient par exemple une armure en cuir qui est en réalité en peau de troll en train de se régénérer, ou une fiole contenant un homoncule...) p. 25-27
Daniel Sell : générateur de PNJ aventurier retraité dans le village, sa personnalité, ses motivations
Jack Shear : générateur de ce qu'il y a dans la bosse d'Igor p. 52
Fiona Geist : générateur de goblin féérique atypique p. 59-60
Nobboc : 8 rencontres étranges avec des statues p. 80
Nobboc & Nieudan : 20 casques magiques p. 104-105
Jason Sholtis : 1d12 transformations psychologiques affectant temporairement le Donjon p. 130
Nobboc : 1d12 lames magiques p. 133
Chris Tamm : générateur d'égouts sous une ville p. 134-139
E. Nieudan : générateur de factions dans un donjon p. 140-142
Nouvelles classes de personnage
Nobboc : : Armure vivante p. 161-162 (voir aussi le monstre Amas d'Armures p. 180)
Ethan Lefevre : Arme Animée p. 178
Benjamin Baugh : Swarm Lord p. 173 (un être contrôlant une masse de petites créatures, que ce soit des rats, des insectes, serpents, oiseaux...).
Nobboc : d66 Anciennes Occupations du PJ (avec un petit côté Warhammer) p. 176
La fin du magazine a quelques créatures et des lieux. Dans The Wizard Cave de Chris Tamm, il y a des tables pour créer des motivations de sorciers dans leurs caverne p. 209.
J'aime bien aussi l'idée de rajouter une espèce de Blaireaux intelligents (Badgermen, qu'on pourrait appeler Meles en latin ou Mujina / Tanuki en japonais) pour les donjons comme ils creusent des tunnels et sont généralement des animaux assez cools.
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mercredi 20 novembre 2024
[RuneQuest] Rêves sous le Pavillon rouge
Nous avons commencé une nouvelle campagne de RuneQuest avec Gianni.
Elle se déroule dans l'Empire de Kralorela, un Etat millénaire où on adore les Dragons et où les humains (les "Kralori") rêvent de cultiver leurs talents pour faire éclore leur nature draconique, comme l'Empereur Godunya (et comme la secte du Sentier de la Maîtrise Immanente).
Nous jouons dans la Cité de Lur Nop, le seul endroit dans l'Empire où un quart de cette ville portuaire est ouvert aux Barbares pour le commerce (son nom vient peut-être de Lop Nur, site des essais nucléaires chinois dans le Xīnjiāng). La Préfète de la Province de Wanzow est l'Exarque Violette Máng Jiāo'ào (Fière et Affairée) Tso et le Juge principal est Sa Seigneurie Yǒng Sù Lóng.
Il y a six personnages, le Magistrat et son Entourage :Publié par Phersv à 16:09 6 commentaires
vendredi 15 novembre 2024
Premières nations américaines : deux Germano-Cherokees
Christian Prieber (1697-1745), un juriste saxon "radical" qui s'enfuit dans les colonies anglaises d'Amérique en 1735 pour s'installer chez les Cherokees qui étaient alors au nord de la Georgie (sud-est de l'actuel Tennessee). Il s'y remaria avec une indigène et devint une sorte de premier ministre du Chef Moytoy (1687-1741). Moytoy avait été déclaré (avec l'aide de commerçants britanniques) Empereur de toutes les nations cherokee. Prieber vivait paraît-il entièrement comme un Cherokee au point de choquer les Occidentaux. Il écrivit des livres sur eux et devint un communiste utopiste qui pensait que la République cherokee deviendrait un modèle pour le monde, le "Royaume du Paradis". Il tenta de résister aux avancées européennes et espérait dresser les Cherokees contre les Anglais qu'il accusait de les exploiter, mais il fut capturé par les indiens Creeks et livré aux Britanniques. Il mourut en prison vers 1745. Ses oeuvres utopistes furent hélas perdues avec lui dans sa détention. Un récit dit que sa fille Creat (peut-être fille aussi d'une fille de Moytoy ?) épousa un chef nommé "Double-Têtes" (car il portait deux scalps de Blancs) mais qu'un jour un aigle enleva leur enfant et que Double-Tête aurait alors tué la malheureuse Creat.
Sequoyah (1770-1843) ou "Georges Gist", métis de la tribu Cherokee (son père serait aussi, comme Prieber ci-dessus, un Allemand). Il était handicapé et boiteux, ne pouvant espérer devenir un chasseur. Il avait dû fuir de son Tennessee vers l'Alabama puis dans les années 1830 dans le nouveau Territoire Indien cédé à l'est de l'actuel Oklahoma. A partir de 1810-1820, il crée un système d'écriture pour la langue cherokee, un syllabaire de 86 signes. Au début, les Cherokee étaient réticents à l'adopter mais ensuite, dès que Sequoyah réussit à l'enseigner à certaines femmes, le syllabaire fut adopté par presque toutes les tribus au point que le peuple analphabète devint soudainement un des peuples les plus lettrés, plus alphabétisé que leurs voisins colons. Sequoyah devint un politicien cherokee qui écrivit leurs lois et leur constitution et il tenta de négocier avec les USA. C'est pour l'honorer que son nom fut donné à l'arbre.
Publié par Phersv à 14:08 0 commentaires
Libellés : clio
Les rétrospectives Casus Belli : 26 et suivantes
Comme l'a dit Imaginos, Faenyx reprend sur son blog la rétrospective des Casus Belli de la première formule et notamment après le numéro 25 que j'avais survolé et avant le numéro 39 où commence la rétrospective de Vociferator. Vous aurez donc ainsi une synthèse de toute la série (Vociferator en est pour l'instant au numéro 54).
Publié par Phersv à 14:00 2 commentaires
Libellés : casus belli, jdr
lundi 11 novembre 2024
Stagecoach de John Ford (1939) et La Diligence de Goscinny (1967)
Dans Stagecoach de John Ford, la diligence a 9 passagers au total : deux à l'avant, Buck le conducteur et Curley Wilcox le sheriff, et sept à l'intérieur, Ringo Kid le truand-au-grand-coeur, Dallas la prostituée, Hatfield le joueur sudiste hautain, Mme Lucy Mallory la femme de l'officier qui part le rejoindre, Doc Boone le médecin alcoolique, Peacock le vendeur de whisky et M. Henry Gatewood, le banquier qui s'est enfui avec sa caisse.
Dans La Diligence de Lucky Luke, il y a 8 membres dans l'expédition au total : Hank Bully le Fouet (équivalent de Buck), Lucky Luke sur son Jolly Jumper (équivalent de Curley mais avec le charisme du Ringo Kid), et six dans le compartiment : Scat Thumbs le tricheur (équivalent de Hatfield, y compris dans la caricature de l'acteur, mais en plus sympathique), Jeremiah Fallings le Photographe, Digger Stubble le Prospecteur, Madame Annabella (qui peut s'inspirer de scènes misogynes du début du film) & Oliver Flimsy (qui au début fait plutôt penser à ce lâche de M. Peacock), le Révérend Sinclair Rawler (qui n'est que très approximativement équivalent à Gatewood). Dans l'adaptation américaine en dessin animé de 1984, Rawler devient un médecin et plus un révérend pour ne pas choquer les spectateurs (et le vieux Digger est retiré).
L'itinéraire est ce qui change le plus entre le film classique et la bd.
Stagecoach traverse seulement 330 km entre Tonto (Az), puis "Apache Wells" (ville fictive, plutôt Apache Junction) et Lordsburg (New Mexico), à travers le territoire apache. Une diligence avec six chevaux sans une bonne route ne faisait guère qu'une douzaine de km par heure.
Dans La Diligence de Goscinny & Morris, le voyage va de Denver (Colorado) à San Francisco (Cal.) en passant par Fort Bridger (Wyoming), Salt Lake City (Utah), Carson City (Nevada) et Sacramento (Cal., selon l'actuelle route 50) soit une distance de plus de 2000 km, 6 fois plus long que dans Stagecoach. Ce chemin depuis Fort Bridger doit correspondre à peu près au sentier californien et au chemin du Pony Express.
Le film se déroule en 1880 et les campagnes de Geronimo à travers cette région (Arizona, Mexique, Nouveau Mexique) se déroulent de 1878 à 1885.
La bd croise le voleur de diligence Black Bart qui était actif en Californie et Oregon de 1875 à 1883.
Publié par Phersv à 19:30 6 commentaires
Libellés : bd
jeudi 31 octobre 2024
Mantra Warrior: The Legend of the Eight Moons (2023)
Ce dessin animé thaïlandais de Veerapatra Jinanavin, Nạkrb mn trā: Tảnān pæd dwng cạnthr̒ était diffusé aujourd'hui dans le cadre du Festival des Utopiales à Nantes. Ce n'est que la première partie d'un cycle qui adapte en version futuriste avec des Méchas le Ramakien (la version thaï du Rāmāyaṇa). Le film est une animation qui évoque un mélange entre la Guerre des Clones de Gennady Tartakovsky (et au-delà tout Star Wars) et le Shōnen à la Saint Seya. Le plus remarquable est la rapidité des rythmes des mouvements : les Méchas sont des primates anthropoïdes (les "vānara" du Rāmāyaṇa) qui sautillent et rebondissent avec plus d'agilité que les Méchas habituels.
Je n'ai plus l'âge des combats de catch des Shōnen (où on passe son temps à hurler qu'on va avoir plus d'énergie que l'autre) mais ce dessin animé est intéressant dans son usage de la mythologie hindoue. Le Ramakien est une adaptation thaïlandaise qui a des différences locales et notamment plus d'influences du Shivaïsme tamoul du sud de l'Inde par rapport à la version classique.
1 Le Prince Rāma n'est pas explicitement dit être le 7e avatar de Viṣṇu mais de "Narai" (Nārāyaṇa en sanskrit, le "Refuge Humain" ou la "Source"). Rāma est l'héritier exilé du Roi de la planète Ayodhya (appelée "Ayutthaya" en thaïlandais).
2 Le roi d'Ayodhya, son père, n'est pas nommé dans le film (en sanskrit, c'est Daśaratha). Il n'y a aucune mention de son frère Phra Phrot (en sanskrit Bharata) ou de sa mère Kaikeyī et toute l'histoire de l'exil de Ram est retirée : au lieu d'être écarté suite aux intrigues de Kaikeyī, il est injustement accusé d'avoir conspiré contre son père et il est plusieurs fois insinué que ce dernier est un tyran injuste.
3 Seul le frère de Rama, Lakṣmaṇa, est utilisé dans la famille. Au lieu d'être le fidèle avatar de Śeṣa, il y est un comic relief, efféminé, narcissique mais loyal. Il est décrit comme incapable de se battre, malgré toute sa bonne volonté, mais comme incarnant une puissance infinie de régénération.
4 Sītā (avatar de Śrī Lakṣmī) est la plus changée : elle n'est pas enlevée seulement pour sa beauté pour être l'épouse de Rāvaṇa (en thaïlandais Thotsakantha) mais parce qu'elle est elle-même l'ambroisie d'immortalité, incarnation de la Śakti ultime de l'univers. D'habitude, Ravana a l'immortalité avant même d'avoir enlevé Sītā. Je n'ai pas vu trace de la légende du Ramakien, où contrairement au Ramayana, Sītā est en fait la fille secrète de Thotsakantha, abandonnée suite à un oracle qui disait qu'elle causerait sa perte.
5 Au lieu de demander l'aide des vānara seulement après l'enlèvement de Sita, Vanara est ici le nom de la planète dont la population sert de soldats-Méchas pour la planète suzeraine d'Ayodhya depuis le début.Dans une réduction remarquable du manichéisme, il est impliqué que le Roi d'Ayodhya a exploité les Vanaras sans compassion en les envoyant se faire tuer pour sa gloire. Les Vanaras ont donc une amertume contre les Princes d'Ayodhya avant même l'épopée. Cela explique que dans cet épisode, Ayodhya va se retrouver face à une révolte de Vanara que va utiliser aussi l'empire de Thotsakan.
6 Le vrai héros de l'histoire n'est plus du tout le Prince Rāma, qui reste presque toujours dans une position seulement défensive, mais un humain, "Vāyu" qui va être appelé à piloter l'armure de Hanumān le Singe Blanc (dans la légende, c'est "Phra Phai", Vāyu, le dieu du vent, qui est le père de Hanumān).
7 Le roi de Vanara est Pali (en thaïlandais "Phālī", en sanskrit "Vālī" ou "Bālī"), fils d'Indra. Il servait la planète Ayodhya mais s'est rebellé et ne cesse de décrire son frère Sukreep (Sugriva), fils de Phra Xāthity (Surya le dieu soleil, qui est ici le nom d'un type de Mecha), comme un traître à la cause de Vanara parce que celui-ci est resté fidèle à Ayodhya. La puissance de Pali repose sur le vampirisme, l'exploitation énergétique qui lui permet d'absorber l'énergie des autres et de sacrifier ses soldats pour s'alimenter. Toute l'intrigue à la Star Wars est que le seul moyen pour le Général Sukreep de vaincre Pālī est d'abord de s'infiltrer dans son vaisseau amiral pour détruire la source de ce pouvoir qu'il vampirise.
8 L'autre personnage central est "Vela" (ou Weela ?), qui n'est autre que Nila le Singe Noir, le pendant de Hanumān le Singe Blanc. Dans le Ramakien, Nila est le fils de Phra Kan Chai Si (qui est "Kālá" le Noir, dieu du Temps et de la Mort, qui peut être aussi vu comme un aspect de Viṣṇu - dans le Bhagavad-Gītā - ou au contraire ici plutôt de Śiva/Rudra) et dans le dessin animé Vela accepte de devenir le "Héraut" de Kala (il n'y a pas d'histoire de conflits entre plusieurs royaumes singes où le père adoptif de Nila servirait Pālī). Alors que dans le mythe, Hanumān est dévoué à Rāma et Nila insubordonné (au moins au début), ici "Vayu" est indiscipliné mais généreux alors que Vela est discipliné mais froid, rigide et impitoyable. Le premier est ici un trickster plein d'énergie, l'autre un ascète sérieux. La dualité entre les deux héros-singes semble donc être une dualité interne au dieu Shiva, dieu de l'énergie, de l'exubérance, de l'effort et de la destruction et il est clair que c'est Vayu/Hanumān qui reste dans son insouciance joyeuse plus proche des vertus de son seigneur Rāma / Viṣṇu. Au début de l'histoire, le général Sukreep a confié à ce Nila la mission d'infiltrer comme agent double l'armée de son frère maléfique Pālī et celui-ci lui fait confiance (un peu comme le sage géant rakshasha Phipek (Vibhīṣaṇa) est envoyé par Shiva pour espionner son frère Thotsakantha ; cette épopée accorde plus de place à l'information et à l'espionnage que dans les batailles frontales classiques).
9 Je n'ai pas identifié qui est censée être Bus̄ʹbā ("Fleur" en thaïlandais), la fille dans le triangle amoureux Vayu / Vela. L'histoire où Vela choisit de sacrifier son amour pour Bus̄ʹbā pour sauver Vayu et mieux servir Rama n'est pas du tout crédible (pourquoi Bus̄ʹbā serait-elle moins efficace ?). Mais cela sert à créer le conflit pour le prochain film : Hanumān et Nila servent tous les deux Rama tout en s'en voulant l'un et l'autre. Busba pourrait-elle être une allusion à Trijaṭā, la sage démone fille de Vibhīṣaṇa qui rejoint la cause de Rama et dans certaines versions devient l'épouse de Hanuman ?
10 L'histoire des Huit Lunes de Vanara dans le titre de cette première partie est peut-être une allusion astrologique mais cet alignement assez ridicule des Huit Lunes sert surtout à évoquer l'arrivée de Kala le destructeur. La seconde partie du cycle sera consacrée à la construction du Pont vers Lanka (qui a l'air de devenir un Pont hyperspatial dans cette version).
Publié par Phersv à 23:49 2 commentaires
Libellés : cinéma, l'orient compliqué, mythologie
lundi 28 octobre 2024
Absolute Wonder Woman #1
Wonder Woman est ré-imaginée si souvent par DC qu'elle va finir par se métamorphoser plus souvent que les variantes d'un virus. Comme tant de personnages DC, elle n'a plus un "canon", mais plutôt un halo d'attributs contradictoires.
L'autrice Kelly Sue DeConnick a écrit en 2021-2022 Amazons: Historia (je n'ai parlé que du tome 1). Elle y racontait que six Olympiennes (Aphrodite, Artémis, Athéna, Déméter, Hestia et Hécate) avaient créé les Amazones dans une révolte contre le patriarcat (et Héra, la septième déesse, est un personnage plus ambigu car elle est à la fois pleine de rancoeur contre Zeus et opposée au changement du statu quo). DeConnick était à nouveau revenue vers le mythe de Pandora et Diana est donc bien une sorte de "golem" façonnée par Hippolyta à partir de Sept Olympiennes. DeConnick justifie le nom de "Diana" en disant que c'est cette fois la déesse lunaire et sylvestre Artémis et non Aphrodite ou Athéna qui représente le mieux la figure tutélaire des Amazones d'Hippolyta.
Absolute Wonder Woman est un reboot par une autre autrice, Kelly Thompson, ou plutôt (ce qui revient au même dans le Multivers DC) une version alternative de plus (comme l'univers Ultimate l'avait été pour Marvel) et il n'y a pas de lien avec ce qui était raconté il y a deux ans dans Amazons: Historia, à part peut-être dans la représentation très inhumaine du dieu Apollon qui apparaît ici.
Diana y est nettement plus inquiétante : les Olympiens ont emprisonné les Amazones immortelles pour une raison inconnue. Diana est donc l'Unique et Dernière Amazone (DC hésite toujours sur le statut de ses personnages et tend toujours à multiplier des doubles de ses personnages avant de changer d'avis et de les éliminer périodiquement pour réinstaurer leur unicité). Née sur l'île du Paradis mais enlevée dès la naissance, Diana a été élevée au fond des Enfers, dans le Tartare par une des prisonnières infernales, l'enchanteresse Circé. On est donc plus proche de la sombre déesse Hécate que d'Artémis.
L'univers DC Absolute repose sur certaines inversions de nos présupposés : Absolute Batman a abandonné l'idée de base que Bruce Wayne doit être un riche héritier pour en faire un prolétaire des bas quartiers de Gotham. De même, Circé est d'habitude la pire ennemie de Diana et c'est donc un retournement total d'en faire sa mère adoptive à la place de la figure maternelle d'Hippolyta (alors qu'il y a eu aussi des histoires où Diana doit lutter contre une fille de Circé et d'Arès, Hippolyta II, qui est considérée comme son antithèse). Il se peut qu'il y ait aussi une allusion à l'histoire récente de Amazons Attack où Circé avait été capturée aux Enfers par la Déesse d'Apokolips Granny Goodness ? Perez avait fait des Amazones les Gardiennes de l'Hadès mais WW, la Dernière des Amazones, y est maintenant une sorte de "Scott "Mister Miracle" Free", la rose innocente sortie des Enfers comme une dernière espérance contre le mal.
Une idée que j'aime bien est reprise de l'enfance d'Héraclès : dès le berceau, Diana sait se défendre contre les monstres des Enfers, qui ne doivent pas être envoyés par Héra mais par l'écosystème infernal.
Circé y est décrite au début comme une cynique prête à abandonner le bébé mais qui va finir par éveiller une réel sentiment maternel. Et elle ne fait pas que nourrir Diana, elle va lui transmettre aussi une part de ses connaissances de magicienne, ce qui change la guerrière en une "guérisseuse", comme dans cette case où elle soigne Cerbère. Cela ne fait que confirmer le concept traditionnel qu'elle doit incarner la compassion et pas seulement l'héroïsme. Cette version ne sera donc peut-être pas si sombre que son enfance aux Enfers pourrait le faire penser.
Cette Diana version Absolute ne vole pas (et n'a pas d'avion invisible) mais elle chevauche un Pégase-Zombie qui crache de la foudre. Elle porte aussi une épée ridiculement gigantesque de JRPG, épée rectangulaire d'Athéna. Kelly Thompson reprend une vieille idée de John Byrne, le cadre de Gateway City pour que WW ait aussi sa propre ville imaginaire (alors que Perez utilisait Boston).
Comme le fait remarquer Corentin, critique de ComicsBlog, une des forces des dessins de Hayden Sherman & la coloriste Jordie Bellaire est la place des cases silencieuses. Mais le récit reste rythmé par la narration de Circé (qui risque donc de voler la vedette à Diana). On peut deviner que même si cette Diana ne partage pas la moralité de Circé, elle va être opposée aux Olympiens plus nettement que les versions antérieures. Comme on l'a déjà dit, les fictions modernes vont souvent prendre un point de vue prométhéen contre les figures d'autorité archaïque.
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lundi 14 octobre 2024
Sexe et explorateurs dans l'Amazone
En décembre 1945, on apprit que Curt Nimuendajú (62 ans) avait été retrouvé mort après une hémorragie dans le territoire ticuna dans le "Haut-Amazone" (qu'on appelle Rio Solimões) près du Pérou. Curt Nimuendajú, né à Iéna en 1883 sous le nom de "Kurt Unckel" et fasciné par la vie dans la jungle, s'était installé en Amazonie depuis près d'un demi-siècle, à vingt ans. Malgré son absence de tout titre universitaire, il avait consacré de nombreuses monographies ethnographiques ou mythologiques à différents peuples de la région, comme les Guarani du sud Brésil (pas très loin de la région du Paraguay où la soeur de Nietzsche avait vainement tenté de créer un refuge "aryen" en 1887-1889). Ce sont les Guarani qui lui donnèrent son nouveau nom, "Nimuendajú", qui signifiait "celui qui s'est fait son foyer" (ou moins littéralement, "celui qui s'est installé") et que Unckel prit désormais comme son nouveau nom légal une fois qu'il devint officiellement brésilien. Nimuendajú fut considéré comme un des Pères de l'ethnologie "indienne" du Brésil.
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