Je suis allé voir le spectacle de l'humoriste Josh Johnson (qu'on voit parfois au Daily Show) au Théâtre de l'Alhambra (il a un second spectacle mercredi 25 à la Cigale). J'aime beaucoup sa façon de sembler improviser une méditation profonde où il feint de s'émerveiller de quelque chose de familier. Tous les humoristes utilisent cette technique d'étrangeté du quotidien mais il réussit à donner cette impression qu'il est en train d'élaborer avec nous cette surprise même quand c'est en fait très travaillé. Il donne vraiment une impression de réflexion vivante et sans vouloir l'écraser dans la comparaison, il a quelque chose de philosophique comme l'avait souvent George Carlin (mais sans sa colère, avec plus de distance ou de détachement). Carlin était un cynique sarcastique (au sens réel du cynisme) alors que Johnson est un ironiste qui ne semble pas vraiment vouloir vous donner des leçons (ce qui le rend un peu moins politisé bien qu'il parle de politique si souvent). L'amertume de Johnson est pleine d'empathie alors qu'on dit d'habitude que l'empathie risque de nuire à l'humour.
D'après les nombreux extraits de son Flower Tour dans chaque ville, il semble changer énormément de "routine" au point qu'on peut se demander si c'est le spectacle qui est itinérant ou si c'est une succession de spectacles distincts.
Je m'attendais à des blagues assez politiques comme il a fait des séries de sketchs sur Musk encore la semaine dernière, comme celui à Detroit sur la fin de DOGE et ici il n'a même pas abordé le sujet. Son sketch brillant sur les (prétendues) "IA" était à Londres, si je me souviens bien.
Il a même été presque réticent sur Trump, esquissant quelques blagues indulgentes sur Macron, sur la durée des repas, sur les Parisiens ou sur les Retraites ("la retraite pour un Français, cela doit être être Français mais au carré"). Quand il évoque Trump, on dirait que c'est toujours plus un sentiment de honte collective qui domine qu'un sentiment de colère ou de crainte. On dirait qu'il parle d'un aïeul embarrassant ("Quand on le voit au G7, c'est un peu comme regarder votre père ivre qui se met à taper sur d'autres pères pendant un match de baseball") et pas un pourri fasciste.
Dans les tranches de vie, le sketch sur les bizarreries du train new-yorkais marchait moyennement ("à Paris, vous vous sentez en sécurité sauf si vous avez par hasard eu la malchance de vous faire voler, à New York vous vous sentez inquiet même s'il ne se passe strictement rien qui puisse mériter d'appeler la police") mais un sketch encore plus banal sur les embarras du regard dans les transports reposait entièrement sur son génie comique. C'était un exemple où un autre humoriste ne pourrait pas réussir à lui voler cette blague ou la raconter avec les mêmes effets. Même chose pour le sketch du pilote qui demande en mariage son amie en plein vol.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire