mercredi 20 février 2008

Speculative Attack & the War Bubble



Une des analyses les plus fécondes du concept de causalité est celle d'un conditionnel irréel proposée par le métaphysicien David Lewis. "A cause B" signifie "si A n'avait pas eu lieu, alors (dans un monde possible assez similaire, ceteris paribus et mutatis mutandis) B n'aurait pas eu lieu". On peut distinguer parmi les problèmes de cette théorie deux cas dont on entend souvent parler :


  • la préemption : "A cause C, mais si A n'avait pas eu lieu, une seconde cause B serait intervenue qui aurait causé C", peut-on dire que A a quand même causé (préemptivement) C alors que si A n'avait pas eu lieu, C aurait eu lieu quand même, mais causé par B ?
  • la double prévention : "si A a empêché B qui aurait empêché C", doit-on dire que A a causé C en prévenant ce qui aurait prévenu C ?

J'évoque ces deux problèmes à cause de ce mot d'esprit relevé par Hertzberg. On confond parfois guerre préemptive et guerre préventive dans le flou du para bellum.

  • La guerre préemptive est attaquer le pays A parce qu'on croit que A va attaquer de toute manière et qu'on doit simplement se défendre pour l'empêcher d'attaquer le premier. La préemption suppose donc que la guerre aurait eu lieu quand même et donc n'est pas considérée comme injuste puisqu'elle implique que l'agresseur apparent n'est que le défenseur par anticipation.
  • La guerre préventive est attaquer le pays A parce qu'on croit que si on attend A va gagner un avantage tactique futur. La prévention peut prétendre que la guerre aurait eu lieu quand même (aurait même eu plus de chances d'avoir lieu à cause de l'avantage que gagnait A) aussi mais surtout qu'il est nécessaire d'agir pour modifier la manière dont elle aurait eu lieu (empêcher la guerre potentielle par une guerre actuelle). Le problème de la guerre préventive est qu'elle est considérée comme une agression déguisée en Jus ad bellum et ne correspond pas à l'idéal de la guerre d'auto-défense.


Mais un correspondant fait l'argument que la guerre en Irak de 2003 (- ?) n'était ni préemptive ni même préventive :

To be preemptive, a war has to be about to happen anyway. You’d rather not have a war at all, but the other guy’s going to attack you any minute, so you beat him to the punch. But it’s not like Iraq was massing troops on the Mexican border, or even aiming its tin-can missiles at us. So you don’t hear much any more about Iraq being a preemptive war.

You still hear the war called preventive, meaning we attacked Saddam because he was (a) capable of attacking us and (b) planning to do so, though maybe not right away (and probably not via Brownsville). Neither condition has turned out to be remotely true. The Iraq war has prevented nothing, least of all itself.

Iraq is a speculative war. Its IPO was based on speculation about WMD’s, terrorist connections, and the desire and capacity of people we didn’t know to adopt a form of government they didn’t know. Subsequent offerings have been based on more speculation, this time about bad things that might happen if we don’t continue the war indefinitely.

Like recent forays into South Florida real estate, our speculative war in Iraq was leveraged with a hefty mortgage and a blind eye toward the market’s down side.


Les phénomènes de "spéculation" renvoient donc à des représentations (croyances, savoir commun et dilemmes de décisions) qui semblent bien plus susceptibles de comportements irrationnels que les décisions stratégiques de "préemption". La dissuasion peut aussi être un jeu où les réactions non-optimales vont l'emporter mais il n'y a pas autant de phénomènes de cercles vicieux que dans les apories économiques qu'il cite. Le bourbier (quagmire) ressemble sur ce point à des boucles comme l'hyperinflation (ou bien à l'inverse avec le piège à liquidité en déflation, même si la une comparaison est vague).

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