D'un côté, je trouve qu'on exagère un peu dans certains arguments contre la dernière idée idiote du Président. Je ne pense pas qu'on "traumatiserait" toute une génération de CM2 non plus ou qu'un enfant de 10 ans soit l'innocent qu'on semble s'imaginer. J'ai entendu un pédopsychiatre de plus dire que cela gênerait la structuration de l'enfant. On a rarement vu des specialistes se contenter d'intuitions vagues à ce point - et je dis cela sans du tout partager le dogme canguilhemien habituel des Français contre la scientificité de la psychologie.
Le problème n'est pas qu'on instaurerait un "Devoir de Névrose" chez les enfants (même si ça a été ma première réaction). Ce n'est pas une crise psychologique mais politique, un gadget inutile de plus, un simple effet d'annonce pour faire scandale, pour jouir du plaisir narcissique d'être au centre d'initiatives crétines prises sans concertation. Ce n'est même plus la monarchie, cela devient l'arbitraire. On passe de l'histoire au devoir d'empathie, à un jeu de rôle obligatoire où on doit non pas comprendre son passé mais vivre le Chemin de Croix des émotions nationales. C'est à nouveau le même cirque totalitaire de Môquet. La preuve qu'il lance ces idées comme des diversions chaque semaine est qu'il aurait pu prendre le temps d'en parler pour la classe de 4e par exemple (qui, elle, a la Seconde Guerre mondiale au programme). Tout cela sera enterré et ridicule, une fois de plus (Darcos a déjà dit que ce serait facultatif).
Et là où ça devient indécent est que l'Agité frénétique de l'Elysée réussit à faire de la polémique même avec ce qui devrait être le plus consensuel. Après avoir critiqué l'expiation, il joue avec le génocide. Ce type est vraiment l'inverse de Midas, il salit et corrompt tout ce qu'il touche.
Il n'y a rien à reprendre à la très belle démolition par Henry Rousso contre le "Marketing Mémoriel".
Une fois encore, seule émerge du passé une mémoire mortifère, seule est digne d’être remémorée avec éclat une histoire criminelle. De l’Histoire, de sa profondeur, de sa complexité, on ne nous montre plus aujourd’hui qu’un usage utilitaire. Le passé est devenu un entrepôt de ressources politiques ou identitaires, où chacun puise à son gré ce qui peut servir ses intérêts immédiats. Il est inquiétant de voir qu’une fois de plus, le - mauvais - exemple est donné au plus haut niveau, que la «mémoire» et la défense de bons sentiments ne servent qu’à faire passer les ombres de la politique réelle.
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