Le Distingué Sénateur de Caroline du Sud parle d'une institution :
I mean, one of the reasons these techniques have survived for about 500 years is apparently they work.
Peu de phrases superficiellement pragmatiques pourraient autant démontrer le degré de corruption morale et de débilité intellectuelle dans laquelle peut enfoncer une idéologie, car assurément cet argument en faveur de la Torture est aussi celui qui fut avancé, et est encore utilisé, par toutes les cultures pendant des milliers d'années pour justifier le fait de priver certains êtres humains du droit fondamental d'avoir des droits.
Voir des Conservateurs US justifier la torture en disant qu'elle marchait bien quand les Nord-Viétnamiens l'utilisaient sur leurs prisonniers américains a quelque chose qui rappelle immédiatement l'historien Richard Hofstadter qui avait avancé l'hypothèse psychologique que les mouvements paranoïaques cherchaient une sorte de rivalité mimétique avec ce qu'ils voyaient comme le Grand Ennemi. Il ne faut pas lutter contre la Terreur, il faut une loi du Talion plus brutale, il faut "terroriser les terroristes".
On parle tellement de Torture depuis cinq ans qu'on commence à se désensibiliser et à oublier de s'étonner.
Or on ne pourra jamais assez s'étonner et s'effrayer qu'on ne s'étonne plus.
Des assassins ont commis un attentat horribles il y a 8 ans et nous avions tous de la sympathie pour le pays victime de cet attentat. Puis le gouvernement de ce pays s'est hâté d'utiliser des pratiques que tout régime démocratique - y compris les Conservateurs auparavant - condamne.
Or c'était non seulement criminel mais aussi inutile, dangereux et injustifiable.
La seule "justification" réelle de ce retour du Sadisme au premier plan de la politique n'est pas un "Scénario de la Bombe à Retardement" de 24, cela n'est qu'une rationalisation d'après-coup.
La vraie raison, tout le monde le sait, est que les terroristes venaient de pays d'Orient.
La Colonie de peuplement européenne indépendante a intégré un rapport colonial contre ces Etats sous-développés.
Il ne leur serait jamais venu à l'esprit de faire l'apologie de la Question contre des terroristes politiques allemands ou suédois. La précipitation avec laquelle ils ont réinstitué et légitimé cette violence inutile est impressionnante et devrait nous rappeler à quel point notre vernis de civilisation est mince.
En 5 ans seulement, une institution, dont ils niaient d'abord avec véhémence et honte qu'elle existât, est devenue défendable puis utile et même indispensable à la survie de la République et des libertés.
Ils arrivent même désormais, avec une arrogance qui donne le vertige à retourner la culpabilité et accuser ceux qui refusent la Torture d'être donc ipso facto des alliés objectifs des Terroristes (cf. le raisonnement abject de crétinisme de Karl Rove sur le caractère dissuasif de la torture : si jamais les Terroristes apprennent qu'on se met à respecter les principes qu'on affiche au lieu de torturer, ils vont avoir beaucoup plus de facilité à recruter).
Se sentir obligé de dire qu'on peut être anti-terroriste sans être pro-torture est déjà une sorte d'échec pour l'idée même de raison ou de discussion critique. De même que dire qu'on doit simplement veiller à ne plus parler de tous les actes de torture n'est pas un "compromis centriste raisonnable" mais un refoulement.
J'avais peu d'estime pour Jesse Ventura, l'ancien catcheur et ancien gouverneur indépendant du Minnesota (qui croit à des théories du complot sur le 11/09) mais cette interview montre une critique raisonnable où l'ancien soldat rappelle quelques évidences sur les horreurs de la torture :
Add.
Vagabond Scholar a un article exceptionnel sur la question.
Voir des Conservateurs US justifier la torture en disant qu'elle marchait bien quand les Nord-Viétnamiens l'utilisaient sur leurs prisonniers américains a quelque chose qui rappelle immédiatement l'historien Richard Hofstadter qui avait avancé l'hypothèse psychologique que les mouvements paranoïaques cherchaient une sorte de rivalité mimétique avec ce qu'ils voyaient comme le Grand Ennemi. Il ne faut pas lutter contre la Terreur, il faut une loi du Talion plus brutale, il faut "terroriser les terroristes".
On parle tellement de Torture depuis cinq ans qu'on commence à se désensibiliser et à oublier de s'étonner.
Or on ne pourra jamais assez s'étonner et s'effrayer qu'on ne s'étonne plus.
Des assassins ont commis un attentat horribles il y a 8 ans et nous avions tous de la sympathie pour le pays victime de cet attentat. Puis le gouvernement de ce pays s'est hâté d'utiliser des pratiques que tout régime démocratique - y compris les Conservateurs auparavant - condamne.
Or c'était non seulement criminel mais aussi inutile, dangereux et injustifiable.
La seule "justification" réelle de ce retour du Sadisme au premier plan de la politique n'est pas un "Scénario de la Bombe à Retardement" de 24, cela n'est qu'une rationalisation d'après-coup.
La vraie raison, tout le monde le sait, est que les terroristes venaient de pays d'Orient.
La Colonie de peuplement européenne indépendante a intégré un rapport colonial contre ces Etats sous-développés.
Il ne leur serait jamais venu à l'esprit de faire l'apologie de la Question contre des terroristes politiques allemands ou suédois. La précipitation avec laquelle ils ont réinstitué et légitimé cette violence inutile est impressionnante et devrait nous rappeler à quel point notre vernis de civilisation est mince.
En 5 ans seulement, une institution, dont ils niaient d'abord avec véhémence et honte qu'elle existât, est devenue défendable puis utile et même indispensable à la survie de la République et des libertés.
Ils arrivent même désormais, avec une arrogance qui donne le vertige à retourner la culpabilité et accuser ceux qui refusent la Torture d'être donc ipso facto des alliés objectifs des Terroristes (cf. le raisonnement abject de crétinisme de Karl Rove sur le caractère dissuasif de la torture : si jamais les Terroristes apprennent qu'on se met à respecter les principes qu'on affiche au lieu de torturer, ils vont avoir beaucoup plus de facilité à recruter).
Se sentir obligé de dire qu'on peut être anti-terroriste sans être pro-torture est déjà une sorte d'échec pour l'idée même de raison ou de discussion critique. De même que dire qu'on doit simplement veiller à ne plus parler de tous les actes de torture n'est pas un "compromis centriste raisonnable" mais un refoulement.
J'avais peu d'estime pour Jesse Ventura, l'ancien catcheur et ancien gouverneur indépendant du Minnesota (qui croit à des théories du complot sur le 11/09) mais cette interview montre une critique raisonnable où l'ancien soldat rappelle quelques évidences sur les horreurs de la torture :
Waterboarding is torture. I'll put it to you this way: You give me a waterboard, Dick Cheney and one hour, and I'll have him confess to the Sharon Tate murders.
Add.
Vagabond Scholar a un article exceptionnel sur la question.
9 commentaires:
Juste parfait ce post.
Sur: "une critique raisonnable où l'ancien soldat rappelle quelques évidences"
Une chose qui m'a frappé dans toute cette aventure est que ce sont souvent les anciens soldats comme Armitage par exemple qui ont demandé que les USA se conduisent honorablement alors que des gens qui avaient lâchement refusé de combattre pour leur pays au moment de la guerre du Vietnam (Bush Jr ou Bolton par exemple) adoptaient une attitude va-t-en guerre digne des vieux lâches qu'ils sont. Mais le pire est sans conteste l'attitude de toute l'intelligentsia politico-médiatico-universitaire qui a eu tellement peur de se faire accuser de traitrise qu'elle n'a pas souligné quelques évidences comme le fait que la torture était dans tous les cas inacceptable. Ayant tout cautionné de W., ils sont trop timorés en ce moment et les Républicains en profitent pour changer les termes du débat.
Jusqu'à très récemment, j'étais persuadé que Yoo, Rumsfeld et Cheney au moins ne pourraient échapper à la justice. J'avoue que j'en suis de moins en moins sûr surtout après la décision proprement méprisable d'Obama de reculer dans la publication des photos.
Oui, c'est ce que dit Jesse Ventura, il n'y a pas de pires fanatiques de la guerre que ces Chickenhawks et Stratèges en fauteuils.
Les militaires et même John McCain (malgré ses retournements et hypocrisies) étaient bien plus contre la torture que certains pundits bien assis devant leur ordinateur et qui semblent tirer une joie de Schadenfreude à dire que leurs troupes devraient avoir le droit de se défouler.
Ce qui m'agace est qu'on pinaille, qu'on change le débat sur le degré de waterboarding (alors qu'on a violé et assassiné, quel que soit le degré de waterboarding). On oublie l'enjeu total et il faut lire les blogs républicains qui parlent des anti-tortute comme si c'étaient une sorte d'excès de sensiblerie comme P.E.T.A.
Publius (chez hilzoy) avait une réduction par l'absurde intéressante, qui ne me semble pas être un sophisme de la Pente Glissante (même s'il y a du vague dans (2) :
(1) Concédons la thèse (très discutable empiriquement) que le waterboarding puisse marcher (au sens de l'utilité des informations).
(2) Mais en ce cas des actes de violence bien pires pourraient encore plus marcher (par exemple menacer le prisonnier de tuer ses enfants devant lui).
(3) Or tout le monde (il faut espérer) serait d'accord pour dire que (2) ne serait pas justifié moralement.
(4) Donc (1) ne doit pas être pas une justification suffisante.
Un autre argument utilitariste (utilitariste de la règle) que j'aime bien serait de dire que même si on se trouvait en réalité dans le scénario hypothétique de la Ticking Bomb (un acte illégal pour sauver un grand nombre) et même si le tortionnaire agissait de bonne foi, sans sadisme et qu'il en avait tiré des résultats, on devrait condamner ensuite le tortionnaire tout en pensant qu'on pourrait le comprendre.
Ce qui compterait serait le principe d'universalisation. On voudrait comme règle que l'interdiction de la torture soit maintenue par la suite, et son cas particulier ne devrait pas faire jurisprudence.
Sur "(2) Mais en ce cas des actes de violence bien pires pourraient encore plus marcher (par exemple menacer le prisonnier de tuer ses enfants devant lui). "
Dans un des épisodes de 24, on montre par vidéoconférence au terroriste qui refusait de parler le meurtre de son enfant (en Égypte je crois) puis on le menace d'en tuer un autre. Mais, happy end, à la fin Bauer révèle que c'était une mascarade et que l'enfant est vivant. Civilisé quoi!
Sur le principe d'universalisation. C'est ce que j'aimais paradoxalement dans la CIA Old School: Ils étaient capables de commettre des horreurs sans nom mais au moins avaient-ils la décence de le faire dans le secret, sans demander à être couvert par écrit par les politiciens.
Merci pour cette injection du sérum de l'indignation...
Je crois beaucoup à l'analyse d'Andrew Sullivan, pour qui la torture est directement liée à la volonté d'attaquer l'Irak: fausses informations pour une guerre sans justification, et à l'autoritarisme républicain en général. Mais lui aussi, comme presque tous les Américains, reste aveugle à la dimension raciale qui a permis ce déchaînement.
J'ai vu Henri Alleg discuter de torture ici à New York il y a quelques mois. Il n'avait pas une position légaliste (c'est un crime!), morale, ou utilitariste, mais principalement marxiste: la torture n'est que l'expression (la plus détestable) d'un impérialisme plus général: guerre d'Algérie, guerre en Irak...
C'est pour ça aussi que le débat compte pour les USA, au-delà des (j'imagine) centaines de victimes, et des coupables, et au-delà même de la question de la torture.
Merci pour cet article!
"Ils étaient capables de commettre des horreurs sans nom mais au moins avaient-ils la décence de le faire dans le secret, sans demander à être couvert par écrit par les politiciens."
Mais justement, j'ai du mal à comprendre le débat actuel sur la torture. Personne n'en a discuté à l'époque de l'URSS, du Vietnam ou du maccarthysme? Certains cas de tortures ont bien dû être découvert. Ou alors est ce une forme d'amnésie collective amenant au recours puis à la justification ce genre de pratique?
@Thibault L:
Après le Watergate, la CIA avait mené son enquête interne sur l'histoire de ses turpitudes et ça avait donné les Family Jewels (http://en.wikipedia.org/wiki/Family_Jewels_(Central_Intelligence_Agency))
Il me semble que depuis lors, la CIA était demeurée relativement légaliste.
Mais il me semble qu'il y a une différence fondamentale entre une démocratie dont le service de renseignement dépasse de temps à autres les bornes en torturant mais en ayant conscience que la révélation de ces agissements entrainerait le lâchage par le gouvernement et un gouvernement démocratiquement élu qui s'arroge le droit de violer officiellement les droits humains. En signant ces autorisations, l'Administration Bush a officiellement mis les USA au même rang qu'Al Quaida. Le monde n'avait absolument pas besoin de ça étant donné que, qu'on le veuille ou pas, les USA sont le chef du monde libre.
Merci pour les précisions. Mais à cette époque, il s'agissait surtout d'affaires de surveillance de kidnapping, ou de tentatives d'assassinats à l'étranger-ainsi que d'injection massive de LSD et autres joyeusetés, si j'en crois le projet MKULTRA!
Je ne vois pas vraiment mention de la torture, donc peut être que les Etats Unis sont passés à côté du débat à l'époque.
J'ai toujours eu du mal à comprendre la stratégie de l'administration Bush. Elle voulait sûrement s'inspirer de la méthode du "Fou furieux" adoptée par Nixon- On est peut être une démocratie, mais on est prêt à tout, y compris lancer les bombes- qui était déjà risquée. Afficher ouvertement qu'on torture revient à éteindre l'incendie avec une conduite de gaz. Vos informations ne seront pas forcément fiables, les autres peuples vous détesteront et vos citoyens prendront peur.
Les Républicains feraient mieux de passer à autre chose plutôt que de s'enliser sur ce sujet.
> Damien B.
Oui, la thèse de Sullivan est plausible quand on voit la mauvaise foi de Cheney. C'est encore pire que le sadisme dans le cynisme : forcer des prisonniers non plus à donner des informations mais à mentir pour justifier l'invasion après coup.
La vitesse avec laquelle ils se sont réclamés du Général Paul Aussaresses et de ses arguments est curieuse. J'avais cru de manière peu critique à la théorie du documentaire Escadronns de la mort, l'école française mais après toutes les controverses sur la fiabilité de l'auteure, je ne sais pas si il y eut vraiment une continuité directe. Cela paraît possible car Aussaresses a vraiment enseigné aux USA et je me souviens d'avoir lu vers 2003 que la CIA avait recommandé à ses cadres de regarder la Bataille d'Alger.
Un jour, il faudra comprendre comment est né le scénario des premières saisons de 24. Les scénaristes surfaient juste sur un sujet dans l'air, cherchaient juste un peu de controverses pour des raisons commerciales et ont été récupérés ou cela partait vraiment un peu d'intentions ou d'obsessions de producteurs ultra-conservateurs ?
> Thibault L.
Je n'avais pas pensé à cette rationalisation de l'irrationalité, dont parlait Thomas Schelling. Etant donné la continuité entre l'administration Nixon et l'administration Bush-Cheney, c'est quelque chose à prendre en compte. La vraie clef ne serait pas que le ressentiment mais la volonté d'afficher et maximiser l'impression de ressentiment irrationnel, en espérant un effet dissuasif de la folie furieuse. Il est effrayant que ce soit une vraie possibilité dans leur esprit quand on lit l'argument deshumanisant de Karl Rove ("si nous ne torturons plus, les Musulmans n'auront plus de raison de ne pas rejoindre Al-Qaeda").
Sur le fait que les Républicains n'ont aucun intérêt rationnel à devenir le Parti Pro-Torture, c'est justement ce qui est le plus bizarre. Au lieu de leur première position modérée (c'est mal mais cela ne concernait que "a few bad apples"), ils ont commencé à considérer de manière binaire que si les Libéraux critiquaient tant la Torture c'est donc que cela devait avoir des bons côtés. Et maintenant être pro-Torture contre les Terroristes (et pro-détention infinie sans jugement) a rejoint une sorte de nébuleuse de programme conservateur avec être pro-Life. Il faut montrer qu'on torture les Terroristes comme on montre qu'on ne grâcie pas les Assassins.
Les Américains sont devenus tellement polarisés et politisés depuis 2000 qu'ils arrivent à croire que la Torture est une position politique ou morale comme une autre dans les Culture Wars au lieu d'une anomalie historique par rapport à ce qui a précédé.
Il y a d'autres éléments qui confirment l'hypothèse de la torture pour impliquer Saddam Hussein dans Al-Qaeda.
Enregistrer un commentaire