Jour 1 : Athènes
Dîner à l'arrivée chez Mani Mani (rue de Phalère à Athènes). Ils ne font plus les demi-portions à partager semble-t-il mais ils ont offert un μαστίχα très parfumé.
Jour 2 : d'Athènes à Nauplie
Le Canal de Corinthe (Διώρυγα της Κορίνθου, 1882-1894) est un site impressionnant, 6 km de long, 25 m de large, 60 mètres de profondeur (mais seulement 8 mètres de tirant d'eau). Dans l'Antiquité, le "δίολκος" n'était pas un Canal mais un système de portage des navires sur des rails de bois. Néron avait déjà tenté de transformer ce très ancien système par un Canal un an avant d'être exécuté.
L'Ancienne Corinthe (11 km plus au sud et dans les terres que la Corinthe moderne) avait deux ports, Cenchrées au sud-est sur le Golfe Saronique et Léchaion au nord-ouest sur le Golfe de Corinthe, mais le diolkos passait près de l'actuel Canal, depuis Schoinous (près d'Isthmia, actuelle "Kalamaki de Corinthie") vers l'actuelle Poseidonia.
On dit que le diolkos aurait peut-être été développé déjà par le Tyran de Corinthe, Périandre fils de Cypselos (640's ? - 585 ?). Ce Périandre est un personnage mystérieux qui est décrit par les textes soit comme un monstre qui aurait couché avec sa mère Crateia, qui aurait tué sa femme et se serait mortellement brouillé avec son fils, soit au contraire comme un des Sept Sages (mais dès l'Antiquité, on disait que c'était un homonyme ou un cousin du premier et on attribue à ce Périandre le fragment "la démocratie est supérieure à la tyrannie" et "un tyran devrait se protéger par la loyauté et non par les armes"). Platon mentionne peut-être ce tyran quand il dit que l'âme corrompue par ses désirs rêve de coucher avec sa mère (République IX, 571c). Le père de Périandre Cypsélos aurait été enfermé dans un coffre enfant à cause d'une prophétie comme Persée et Periandre pourrait être un des modèles possibles pour certaines allusions politiques sur Oedipe chez Sophocle.
Nous sommes allés jusqu'aux ruines de l'Ancienne Corinthe (sans monter jusqu'à l'Acrocorinthe). Dans la légende du concours entre Hélios et Poséidon, pour une fois Poséidon ne perd pas et partage la souveraineté avec Hélios : à lui l'isthme et à Hélios le sommet. Les rois mythologiques de Corinthe comprennent un éponyme Korinthos, fils de Hélios, Sisyphe fils d'Eole (roi d'Ephyra), Glaucos, Bellerophon, un certain Créon ou Menoecos fils de Lycaethos. La Cité a donc les deux plus grands héros de l'Hubris, celui qui défie la Mort (Sisyphe) et celui qui veut aller au Ciel (Bellerophon). Seul le premier est gardé comme un des condamnés célèbres du Tartare. Dans l'Iliade, elle est censée être aussi soumise à Agamemnon de Mycènes.
On n'est pas allé au Lac Stymphale, cela aurait fait un détour dans le chemin entre Corinthe et Nauplie. On se promène au bord du Golfe argolique (à Anisi, près de Tolo).
Jour 3 : Mycènes
Le Musée de Mycènes a un bon résumé de la mythologie : il y a deux Maisons successives : les Perséides et les Atrides. J'ignorais qu'une étiologie antique croyait voir un lien entre Mycènes et μύκης (champignon) parce que le Pommeau de l'épée de Persée aurait eu une forme de champignon (ou parce qu'il se serait désaltéré avec un champignon)... Il y a quelque chose de très obscur sur ce mythe où Persée d'Argos et son oncle Proetos de Tirynthe échangent leurs cités parce que Persée aurait tué son grand-père Acrisios par accident. Les Argiens ont formé une mythologie où les cités archaïques de Mycènes et Tirynthe seraient postérieures à eux.
Je pensais que je serais plus frappé par la Porte des Lionnes mais en fait, c'est surtout les grands tombeaux (le tholos de Clytemnestre, celui d'Egisthe ou le tholos d'Atrée à côté) qui étaient les plus impressionnants avec leur haut dôme.
Ma fille Rainé a reçu des adaptations d'Aristophane. Les Grenouilles est peut-être le plus drôle mais hélas demande un peu de savoir qui sont Eschyle et Euripide, ce qui rend donc la pièce peu adaptée pour les enfants. Les Oiseaux est très, très bizarre (et paraît presque plus impie ou blasphématoire que toute l'oeuvre des sophistes : les escrocs qui fuient Athènes réussissent avec l'aide de Prométhée à compromettre la communication entre Ciel et Terre). La Paix n'est pas très drôle en dehors du scarabée géant pour aller sur l'Olympe.
Jour 4 : Epidaure
Le complexe des temples d'Asclépios, Apollon et Hygeia (plus des divinités égyptiennes inconnues) est si vaste que cela donne une impression d'un Disneyland de ville de cure, avec son stade et tous ses temples. Si on descend dans l'Abaton d'Asclepios, on y voit les publicités antiques promettant une guérison.
Un élément intéressant de l'image ci-dessus dans la notion de représentation ou l'histoire de la BD est le sens de lecture de l'image : d'abord à gauche, ce que croit voir subjectivement le Patient pendant son "incubation" dans le Temple (il voit Asclépios) et ensuite à droite la réalité objective avec le serpent qui vient lécher la blessure pendant qu'il dort (ce que voient les Prêtres). La plus grande image est donc un peu comme une "bulle" de pensée de la réalité dans la case à droite mais le rêve est "la vérité" de ce qui est visible dans le monde éveillé.
Il y a des spectacles dans le Théâtre d'Epidaure mais ils sont en août (les Troyennes cette année), mais qui a l'endurance d'aller en Grèce en août ?
Jour 5 : Petit tour à la Forteresse dite de Palamède à Nauplie. Dispensable, sauf pour la vue sur la baie du golfe argolique et pour voir Argos au loin.
Voyage vers Sparte, pour voir Mystras. Mystras fut une capitale du Despotat du Péloponnèse à la fin de l'Empire byzantin et abritait environ 20 000 personnes. Maintenant la ville est une ville-fantôme de ruines.
Jour 6 Mésaventure en Laconie
Nous sommes le jour du Sabbat et tous les garages ferment quand notre voiture a un problème d'alternateur (whatever that is). Nous trouvons finalement quelqu'un de très aimable qui nous aide et nous repartons vers Monemvasia où nous arrivons assez tard.
Jour 7 Monemvasia
Charmante ville pour s'y perdre, un village médiéval qui est encore habité contrairement à Mystras. La ville fut imprenable au début pour les Francs au début de la période d'occupation franque du XIIIe siècle mais ensuite elle changea de main souvent. Il est difficile d'imaginer que la dynastie Paléologue croyait encore après la chute de Byzance que Monemvasia pourrait leur servir de base pour reprendre le contrôle de l'Empire. Elle fut occupée successivement par les Francs, les Byzantins, les Turcs, les Vénitiens, les Turcs à nouveau et même les Anglais qui devaient y voir une nouvelle Gibraltar.
La "Sainte Sophie" de Monemvasia est vue par les Grecs comme une version miniature de celle qui fut perdue à Constaninople.
Nous repartons vers Nauplie en passant par Sparte et même brièvement par Tegea.
Jour 8 Musée archéologique de Nauplie : deux grandes salles qui réunissent des fouilles de plusieurs cités autour de Nauplie des ruines mycéniennes à la période classique.
Il y a une rupture nette dans le style entre les géométries abstraites des XIIIe siècles et le début d'apparition de thèmes narratifs mythiques vers le IXe-VIIe siècle. Peut-être que la création des mythes se cristallisa pendant cet âge où Argos et Thèbes devaient être plus influentes, ce qui explique leur place si importante par rapport à Sparte et Athènes, et même par rapport à Mycènes ou Tirynthe.
Ce bouclier votif du VIIe siècle à Tirynthe représente un guerrier tuant une guerrière, peut-être Achille face à Penthésilée. Petit détail bizarre : l'audio-guide en français devait avoir été traduit par un traducteur automatique : il disait par exemple que cet épisode avec Penthésilée est dans "La Négresse" (sic !, pour l'Ethiopide d'Arctinus de Milet). Il parlait aussi d'une ruine "dans les Arbres" (= à Dendra).
Passage final à Eleusis avant de revenir à Athènes.
Le musée d'Eleusis explique bien le processus d'initiation et le festival. Un détail est qu'alors que les divinités d'Eleusis sont la Mère et la Morte (Déméter et Koré Porteuse de Torches), le clan des prêtres se disait descendant d'Eumolpos, fils de Poséidon. Tout le mythe du partage entre Athéna et Poséidon recouvre donc aussi non pas seulement l'opposition entre stabilité par la sagacité / mouvement impétueux mais aussi Athènes et Eleusis. Eumolpos et ses Eumolpides sont peut-être reliés plus à l'eau douce qu'il faut franchir plusieurs fois sur la Hiera Hodos pour arriver à l'initiation (il y a toujours aujourd'hui un semi-marathon sur cette Voie sacrée de 21 km). Les Petits Mystères avaient lieu en fin d'hiver, au mois d'anthestéria (février) et les Grands Mystères en fin d'été, au mois de boedromion (septembre). Un détail est qu'on ignore quels étaient les objets sacrés que le Hiérophante montrait dans un coffre aux Initiés. Le secret des Mystères a été bien gardé.
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