jeudi 4 novembre 2021

Le prix de la magie

La plupart des jeux de rôle utilisent comme prix pour les pouvoirs soit de la fatigue physique (T&T dans les premières éditions, C&S, Légendes...), soit des points spécifiques d'énergie magique, de fluide, de "psyché", "énergie astrale", de "mana" (Arduin, Runequest, Das Schwarze Auge, T&T maintenant..). C'est Arduin qui fut le premier à parler de "mana" pour les points de sortilège alors que D&D utilisait son système "Vancien" de quantité de sorts par niveau. 

On peut imaginer d'autres coûts possibles. 

1 La vitalité ou d'autres caractéristiques physiques

Certains systèmes proposent que les mages puissent sacrifier aussi des points de vie et leur sang, et pas seulement de la fatigue. On peut même imaginer que les sorts puissants demandent des auto-mutilations rituelles (offrir un de ses yeux, une main...) mais cela donnerait donc une magie très limitée sauf si ce n'est que pour les sortilèges les plus puissants. 

Ce système peut aussi dégénérer vers un système de sacrifice où ce n'est pas le sang du lanceur qui est offert, comme dans l'image traditionnelle de la démonologie (voir option 8). 

2 D'autres caractéristiques mentales ou psychologiques

Un exemple d'un autre sacrifice pourrait être de brûler son CHArisme (la magie donne une aura effrayante). Un autre exemple serait la SANté mentale, comme c'était un peu le cas dans Call of Cthulhu et cela correspond bien à une vision sombre de la magie dans les Pulps et dans l'Heroic Fantasy. 

3 L'âge ou le temps

Une forme particulière de sacrifice "physique". Les sortilèges vieillissent le lanceur (comme le faisait Wish dans D&D pour en limiter l'usage). Sous des formes extrêmes, cela pourrait aller jusqu'à impliquer que seuls des espèces à très haute longévité comme les Elfes ou les Dragons (ou des Morts-vivants) peuvent maîtriser la magie. Ou alors les Mages doivent sans cesse chercher des moyens de réduire leur âge à nouveau, ce qui peut les conduire à du vampirisme, par exemple, ou bien au sacrifice de certains qui se vieillissent pour produire des élixirs de jouvence pour les autres. 

Une forme plus complexe serait une sorte de décalage dans le temps (le sorcier deviendrait plus lent ou au contraire plus accéléré progressivement, désynchronisé du cours régulier du temps). 

4 Des geis

Les pouvoirs se payent pas des "geis" (geas, en gaélique, tyngedhau en gallois), gages ou interdits magiques, ou bien par des "Voeux". Runequest l'a fait pour certains cultes (Yelmalio et Humakt) et c'est une idée qui vient des mythes celtiques où les Rois et mages ont des tabous étranges. Le problème est que si on multiplie les geis, cela peut finir par devenir un peu ridicule. Les Héros celtiques avaient généralement un grand voeu étrange, pas toute une collection de petites prohibitions. 

De manière générale, une idée est que la croissance des Pouvoirs magiques se payent par de la perte de liberté. Le PJ se "p-n-j-ise" en augmentant son "pouvoir". Voir aussi option 7 sur la perte d'Humanité. 

5 Des souvenirs

C'est assez compatible avec la Magie vancienne de D&D où on doit mémoriser un sortilège et le réapprendre quand on le lance. A haut niveau, on pourrait imaginer que le sortilège doit vider un souvenir précis à spécifier. Le mage pourrait aussi avoir plus de chances de devenir amnésique et d'avoir des problèmes d'identité. C'était un système proposé comme option par Kieron Gillen dans DIE

6 Une corruption ou mutation magique

C'est le système de Dungeon Crawl Classics où les échecs critiques en magie finissent toujours par transformer les mages expérimentés en monstres chaotiques (ce qui est souvent plus violent que les "Queues de Dragons" dans Rêve de Dragon). 

7 Sa moralité ou son humanité

La corruption ne serait alors pas seulement physique mais morale, ce qui revient à une version plus rigide que les "voeux" déjà mentionnés dans l'option 4. Au lieu de se faire des règles, le mage acquerrait des tares (je crois que c'est la première fois que je conjugue "acquérir" au conditionnel). 

8 Une ressource externe non-renouvelable
C'est aussi compatible avec le simple mana ou bien avec le sacrifice de certains êtres vivants. 

Dans le dessin animé DragonPrince, les humains (contrairement aux Elfes) ne peuvent pas lancer de sorts sans sacrifier une créature féérique et parasiter son énergie (et le coût est dans ce cas aussi psychique car le sacrifice de ces formes de vie innocente affecte aussi l'âme et l'aura des lanceurs, voir option 7). 

Dans le système si complexe de Mistborn, certaines formes de magie doivent consommer ou absorber du métal. D'autres univers utilisent des cristaux, des gemmes. Calidar utilise une sorte de "pétrole hanté par des esprits", tellement analogue aux énergies carbonées qu'il s'épuise. 

6 commentaires:

Lechaviro a dit…

Pour info, The Riddle of Steel proposait effectivement un système où les magiciens luttaient pour éviter de vieillir lorsqu'ils lançaient des sorts. Ludiquement, néanmoins, je ne crois pas que cette proposition ait rencontré un franc succès. Je me souviens plutôt de critiques et de grognements à ce sujet.
Il faut dire que la vieillesse n'est pas très compatible avec les désirs rôlistes, ou tout simplement les clichés héroïques. Le temps est un peu comme la maladie, ça n'est pas un thème qui se prête aisément au divertissement.

Phersv a dit…

Merci, je ne connaissais pas : coût en mois de vie. Il y avait des chances de ne pas vieillir du tout ou c'était automatique ? En un sens, cela contribue à renforcer l'idée que les personnages non-mages vont être meilleurs physiquement à tout point de vue si le vieillissement dégrade les caractéristiques des sorciers.

Dans Traveller, on avait l'habitude de commencer avec des quinquagénaires pour avoir assez compétences. Ici, le PJ sorcier n'a pas intérêt à commencer avec trop d'expérience préliminaire.

lechaviro a dit…

Oui, il y a des chances de ne pas vieillir du tout. Le dilemme auquel fait face un magicien consiste à devoir répartir sa réserve de dés entre les effets du sort (portée, puissance, durée…) et la résistance au vieillissement. En d'autres termes, en lançant un sort, on fait un test pour voir si on réussit à lancer le sort, et un jet de sauvegarde contre l'âge.
La limite du principe est que ce système ne fonctionne pas du tout sur un coup d'un soir (one-shot) : si le joueur se fiche d'avoir un vieillard en fin de partie, le magicien peut lancer des sorts extrêmement puissants et bousiller facilement tout le scénario. Et même en campagne, ça n'est vraiment pas évident à équilibrer AMHA. Enfin, les gens jouent à TROS pour le système de combat (pas exempt non plus de sévères défauts, pourtant) et pas pour celui de magie :)

GCM a dit…

Je travaille actuellement à l'élaboration d'un JdR de science-fiction horrifique (Alastor 66),à partir des règles de The Black Hack. J'ai dans mes cartons une classe de "mago" – le Warlock – qui, pour lancer un sort, doit sacrifier un point d'attribut. Avec tout ce que ça implique:
FOR et/ou CON, le PJ s'affaiblit.
DEX, le PJ est de plus en plus paralysé ou, à l'inverse, tremble de plus en plus.
INT, le PJ s'abrutit, s'avilit...
SAG, le PJ perd ses sens et sa volonté.
CHA, le PJ s'enlaidit et suscite de plus en plus de mauvaises réactions.

Phersv a dit…

Temporairement seulement ou ce sont des points permanents ?

Dans une de mes campagnes, la démonologie fonctionnait un peu comme cela, chaque type de Démon pouvait booster une caractéristique de +1d6 mais en se nourrissant de sacrifice (permanent) dans une autre. Mais le PJ sorcier avait décidé que CHA is a Dump Stat et était donc un Quasimodo qui se cachait tout le temps avec son CHA de 0.

賈尼 a dit…

On peut même imaginer un jeu avec autant de ‘classes’ de magiciens qu'il y a de caractéristiques différentes, chaque magicien dépensant des points de sa carac associée pour lancer des sorts — évidemment il faudrait que ces points soient récupérables.