dimanche 15 avril 2012

[Alphabet d'Avril] O comme Oráculo


Après Hellas et Mythic Greece, cet Alphabet du mois d'avril aura été très "hellénocentrique". Commençons par l'élément que je préfère dans ce vieux jeu espagnol Oráculo (1992), le fait que le Meneur de jeu s'appelle "La Moire". L'idée du Destin est centrale puisque les personnages de ce jeu mythologique doivent commencer par aller à l'Oracle de Delphes pour apprendre leur Destin sous la forme d'une énigme à interpréter. Cette idée du titre est fascinante.

Mais cela montre immédiatement la conception de ce jeu dans ses limites assez strictes. Le jeu est très encadré et plus orienté vers des débutants puisqu'il précise souvent les mini-systèmes et l'ordre de petites aventures. Ces systèmes ressemblent presque à des jeux de société autour des "Jeux Olympiques" ou des "Concours de poésie". Cette idée a peut-être en partie été redécouverte par le récent jeu indépendant Agôn.

En dehors de cela, il est vrai qu'Oráculo n'a, je crois, pas très bonne réputation dans les milieux hispanophones (ce blog se demande même si ce fut l'un des pires jeux espagnols), contrairement à l'autre jeu le plus célèbre de JOC, Aquelarre.

Oráculo a mal vieilli. Du point de vue du design, c'est un ensemble de systèmes qui rappelle plutôt le début des années 1980. C'est un jeu avec six Classes : le Colon, l'Amazone, le Guerrier (il est parfois précisé "spartiate"), l'Asclépiade (et non pas l'ascète comme dit l'entrée sur le Grog), la Sibylle et l'Athlète.

On ne tire pas ses caractéristiques : elles sont déterminées au départ par la Classe (même si elles peuvent s'améliorer ensuite) et vont toutes de 6 à 15. Autant dire que ce jeu ne sait pas vraiment personnaliser deux persos débutants s'ils sont de la même Classe. Les personnages ont une douzaine de caractéristiques : Intelligence, Sagesse, Habilité, Force, Agilité, Rapidité, Constitution, Charisme, Intuition, Apparence, Prestige. Une d'elles, l'Attitude (Actitud) a l'air d'être en gros "le Moral", ainsi que le soutien aux autres personnages.

Chaque personnage se choisit son Dieu protecteur. Le plus risible dans le jeu est les caractéristiques longues et détaillées de tous les dieux, avec des scores pires que dans Deities & Demi-Gods. Athéna, par exemple, a une Sagesse de 900, ce qui paraît un peu dénué de sens si votre personnage a une Sagesse de 10. Mais je suis de mauvaise foi, car Mythic Greece avait commis la même erreur de tout vouloir quantifier pour que Diomède puisse tenter d'attaquer Aphrodite (Iliade V).

Il y a en plus des "Points de Vie" et des "Points de Santé" (ainsi qu'un système de Points d'Héroïsme, qui sert aussi à l'expérience). Les personnages acquièrent en plus des Langues et des compétences, avec une liste assez peu adaptée à l'aventure (Commerce, Sciences, Arts, Histoire, Techniques militaires). Les Niveaux montent jusqu'à 10 et le système d'expérience est assez différent avec deux types de points d'expérience. On a d'abord les points d'Héroïsme jusqu'au niveau 8 où on doit passer à une nouvelle échelle avec des "points mythiques".

La présentation des règles énumère des cas particuliers de manière parfois rigide et sans assez de détails. La règle sur l'Amour (p. 64-65) précise de manière bizarre qu'il faudra attendre des Règles avancées pour l'option d'amours non-hétérosexuelles, comme si le jeu devait avoir un système différent pour l'homosexualité. On tombe amoureux selon l'Apparence ou la Constitution (sauf l'Amazone qui a droit à d'autres critères) et le jeu offre un "intérêt" à s'amouracher : on peut y gagner des points d'Attitude...

Il y a quand même un cas prévu assez fascinant, si un des personnages meurt (et si aucun dieu ou aucun Asclépiade n'a pu intervenir pour le sauver). Le groupe de haut niveau peut faire appel à la Sibylle (peut-être avec un peu d'Asphodèle - même s'il n'y a aucune règle pour en trouver) pour descendre dans l'Hadès pour le récupérer. Hélas, il n'y a aucun détail dans ce qui aurait pu être une source de jeu plus intéressant ou même un début de "Quête Héroïque".

Avec 130 pages, Oráculo, qui précise parfois tant de mini-systèmes, paraît parfois très incomplet. Par exemple, la pauvre Sibylle n'a pas le droit à beaucoup de précision sur ses sortilèges, ce qui rend la Classe inutilisable, comme un Magicien de D&D sans aucun système de magie.

Il n'y eut qu'une extension, le scénario Atlántida (1995), qui entraîne vers la "Nouvelle Atlantide", fondée en ce XIe siècle avant JC par des descendants de Poséidon mélangés avec des divinités aztèques (en partie imaginaires comme "Atlanteo"). Les aventuriers vont accompagner une nef atlante pour aller explorer les ruines amazones de "Mirina" (par une coïncidence, j'avais aussi utilisé la même Myrina dans mes propres campagnes grecques).


Ce post recense d'autres aventures publiées dans le magazine de jeu de rôle Lider.

9 commentaires:

Desméïl a dit…

Je suis comme toi.
Mes premiers amours littéraires sont grecques... Mes premières épopées sont héllènes... "sous le soleil d'Olympie" je crois fut ma première expérience du monde fantastique que sont les îles thyrénnéenes, bien, bien avant la Fantasy... Plus tard vint l'iliade (je ne compris pas tout) mais l'odyssée apporta son lot d'émerveillement et de réveries en plein été.
Bien sûr cette littérature est fabuleuse, comment ne pas y penser pour un jeu de rôle (surtout venant de RuneQuest) ?
Il y a évidemment eu quelque Livre dont vous êtes le héro reprenant cette univers-là. Aussi quelques scénarii de TSR avec un arrière goût athénien... Mais enfin le filon a toujours été maladroitement exploité, car souvent anachronique historiquement. Je pense à ce grand ancêtre, Myth and Magic...
J'aurais aimé une 'Mythic Earth', homogène avec une vraie trame de fond unifiée... Pas un catalogue à la Deities & Demigods...

Desméïl a dit…

As tu lu les "Murailles de feu" de ... ???

Phersv a dit…

Ah, Man, Myth & Magic, il paraît que le jeu est nul mais j'aimerais beaucoup le trouver. Le descriptif dans un Casus Belli, je crois, était "Votre équipe a un druide celtique, un légionnaire romain et une prêtresse d'Isis, c'est n'importe quoi". Oui, mais c'est vraiment le n'importe quoi que j'ai envie de jouer. :)

- Oikouméné reprend d'ailleurs ce concept de groupe hétéroclite à la Alix.

Ils préparent pour le nouveau Runequest une version grecque mais je crains que ce soit plus pseudohistorique que mythique.

Non, je n'ai pas lu Les Murailles de Feu de Steven Pressfield (et pas non plus Le Lion de Macédoine de David Gemmell).

Un roman de fantasy antique qui m'avait plu dans sa gestion de l'anachronisme pour mélanger plusieurs périodes de l'Antiquité était Oath of Empire de Thomas Harlan : des Romains d'un monde uchronique (on est au VIIe siècle mais l'Empire n'est pas tombé) ressuscitent par magie un César zombie, une Cléopatre zombie et un Alexandre zombie pour lutter contre les Perses et contre Mahomet et le chaos magique commence à se répandre dans tout l'Empire. C'est en fait un monde plus fait pour le wargame que pour le jeu de rôle.

Imaginos a dit…

> Le descriptif dans un Casus Belli, je crois, était "Votre équipe a un druide celtique, un légionnaire romain et une prêtresse d'Isis, c'est n'importe quoi".

J'ai la flemme de vérifier, mais ça me rappellerait plutôt (sans être la citation exacte) le panorama des JdR dans Chroniques d'Outre-Monde n° 6.

Phersv a dit…

Bonne mémoire, oui, cela doit être ça. MM&M avait l'idée que les personnages se réincarnaient, peut-être comme dans Rêve de Dragon.

L'auteur, Herbie Brennan, a aussi écrit des LDVELH et de très nombreux bouquins New Age mystico-sectaires comme "Comment se souvenir de vos Vies passées".

Imaginos a dit…

Ça m'apprendra à me fier à des souvenirs embrumés sans aller vérifier (surtout que j'avais eu un doute hier soir après avoir posté) : c'est toi qui avais raison du départ, c'est dans le banc d'essai de CB 24 (p 45) :

Atmosphère : retour à l'antiquité, mais un peu fouillis (ex : un gladiateur romain accompagné d'un druide celtique et d'un sorcier vaudou africain).

N'empêche que j'ai un souvenir confus d'une allusion quelque part à une prêtresse d'Isis, comme dans ton explication. :-\
Et ça ne vient ni de CB 24, ni de COM 6, ni de J&S 18, qui sont les trois seules présentations francophones du jeu qui me reviennent à l'esprit (à moins qu'il n'y ait eu un banc d'essai dans Runes, mais ça ne me dit rien).

Desméïl a dit…

Un dernier message tardif (aussi rapide que ma mémoire est défaillante/foudroyante :-) :
j'ai retrouvé dans ma "Collec de guerre", une campagne et extension officielle de la version espagnole de RuneQuest : , ce long scénar paru en dos-carré cartonné, format "Gateway" ou "Mythic Earth", qui se passe en partie en Grèce et notamment à Mycène. Il y est question d'un artifact puissant, le casque d'Agamemnon…
Ce qui est très intriguant — car ne parlant pas l'espagnol— dans cette campagne, c'est cette histoire de porte, ou portail où, semble-t-il, Krascht essairai de "venir" sur notre bonne vieille terre, grâce à une secte secrète dont le symbole est une hache noire à double tranchant (ça ne vous rappele rien, mhmm…? :-).
Maintenant que j'écris, ça me fais furieusement penser au masque de N.
hum, hum !

Desméïl a dit…

ça va te plaire Fred ! :-)

Phersv a dit…

Greg Stafford aussi dans son RQ Viking s'était amusé à mélanger avec Glorantha en y mettant une famille de Wind Children (Nar Sylla).