La quantité de scénarios produits a été impressionnante. Depuis 2007, donc en seulement deux ans, Paizo a sorti trois campagnes complètes, la description de l'univers en 256 pages, plusieurs guides de localités et de monstres et déjà plus d'une vingtaine de modules indépendants des campagnes.
Description de gammes :
- La première campagne : L'Eveil des Seigneurs des Runes (modules #1-6, traduit en français chez Black Books)
La première campagne commence dans un petit village au bord de la mer, Pointesable (Sandpoint) en Varisia, près de la cité-Etat de Magnimar. Les personnages sont censés être des personnalités locales luttant contre des assassins avant de pouvoir progresser et affronter des dangers plus épiques au bout de six modules qui leur permettront de découvrir le passé de la Varisie. Une qualité de ces scénarios est que certains PNJ peuvent être surprenants et que malgré la quantité de donjons et oubliettes, il y aura quand même pas mal de roleplay pour bien explorer la vie locale du village. Une autre qualité est que l'intrigue d'ensemble est expliquée dès le premier numéro, ce qui évite au Meneur de jeu de devoir lire l'ensemble pour s'en faire une idée de la direction. - La seconde campagne : La Malédiction du Trône écarlate (#7-12)
La seconde inverse le point de départ en se situant d'emblée dans une grande cité de 20 000 habitants, Korvosa, plus grande métropole de ces frontières de Varisie, la rivale de Magnimar, ville corrompue avec des truands dickensiens et des intrigues politiques shakespeariennes.
Le ton est donc dès le départ plus grandiose, puisque les personnages seront vite catapultés dans les hautes sphères de la politique korvosienne et la Guerre civile qui couve (surtout qu'il pourrait ne pas être clair du tout de savoir quel est le bon camp).
L'unité thématique est aussi assurée par un jeu dans le jeu avec une sorte de Tarot divinatoire (le Harrow, composé de 54 cartes spécialement créées) qui doit servir à guider les personnages mais surtout à donner une impression de Destinée inexorable.
Un défaut est qu'on retrouve le cliché du Mal Ancien déterré qui était déjà dans la première campagne, et qu'ils ont hélas choisi de ne pas retracer toute le développement dès le premier numéro. Mais dans l'ensemble, je crois que c'est plus intéressant que le premier module, mais aussi peut-être plus difficile à mettre en place et avec plus de risque de dirigisme comme il y a de nombreux PNJ puissants. Mais j'avoue que j'ai toujours préféré les aventures urbaines aux donjons. - La troisième campagne : La Deuxième Obscurité (#13-18)
La nouvelle campagne qui doit bientôt arriver à sa conclusion est encore moins manichéenne puisqu'elle permet de jouer des personnages amoraux dans le Port-aux-Enigmes (Riddleport), la cité des pirates de Varisie, avec un complot qui semble lié aux Drows des forêts environnantes. Je n'ai pas essayé mais les Elfes noirs et les Pirates ne m'inspirent pas tellement et me semblent avoir déjà été trop utilisés dans d'autres scénarios D&D (ne serait-ce que dans la série à succès récente de Freeport chez Green Ronin).
La quatrième campagne, L'Héritage du Feu, commence dès mars prochain. La cinquième, dès l'été, sera Le Conseil des Voleurs. - Dans la vingtaine de modules indépendants, je remarque que la série U (U pour Urban) se déroule plus au centre du monde de Golarion, dans la Cité insulaire d'Absalom, siège de la Société des Eclaireurs, ces explorateurs-archéologues-géographes qui sont un des fils directeurs. Il serait peut-être bien de les utiliser avec le Guide d'Absalom qui vient de sortir.
Valdemar est un royaume pseudo-médiéval de contes de fées où le monarque et ses chevaliers sont en relation empathique avec une race particulière de chevaux intelligents incorruptibles, ce qui doit assurer la moralité de la chevalerie.
Blue Rose a créé un univers assez similaire où le royaume d'Aldis est une quasi-utopie, peuplée non seulement d'humains mais de citoyens animaux comme des chats intelligents et magiciens et des griffons. Le système politique est particulier car la Monarque à la Rose Bleue n'est pas héréditaire et est choisie par un animal féérique divin, le "Cerf d'Or". En théorie, le Cerf d'Or est infaillible au moment de l'élection mais le Monarque peut toujours être corrompu après son choix, ce qui est déjà arrivé dans le passé.
Un défaut qui saute aux yeux est le côté très étriqué de tout cette région grande comme la France. Valdemar avait de nombreux voisins, ce qui permettait un peu de diversité, même si l'opposition était assez simpliste entre le Valdemar tolérant et féministe et ses ennemis intransigeants, dogmatiques, homophobes et phallocrates. Aldis n'a que trois voisins : Rezea (des steppes de barbares), Kern (dirigée par un nécromancien) et Jarzon (théocratie d'une Eglise traditionnaliste et intolérante). Et voilà, c'est tout, un monde avec seulement quatre pays, c'est maigre pour les intrigues politiques ou l'exploration... D'un autre côté, rien n'empêche d'insérer cette péninsule dans un univers plus vaste.
On s'est beaucoup moqué du côté "politiquement correct" de Blue Rose (notamment sur les questions de Gender Politics). Les autres D&D supposent que vous êtes des croisés éradiquant des Orques. Celui-ci suppose que vous êtes des militants féministes anachroniques dans un monde médiéval. C'est un peu rafraichissant (et je dois avouer que j'aime beaucoup ces chats intelligents comme minorité principale pour remplacer les elfes) mais cela risque d'être aussi un peu ridicule, il faut le reconnaître. Certes, Aldis n'est pas vraiment une utopie. Il y a une méritocratie fondée sur l'éducation (comme la Chine impériale en théorie) mais pas d'Etat-providence quand même, ouf, comme le fait remarquer Kim dans sa défense de Blue Rose (qui contient une bonne introduction à ce monde).
Mais si j'essayais de créer un patchwork de mes mondes favoris comme je l'avais dit dans cette liste, il y aurait sans doute un pays inspiré d'Aldis pour plus de variété (ou peut-être aussi avec une reprise des dæmons de Pullman).
2 commentaires:
Valdemar a des accents du monde Houyhnhnm chez Jonathan Swift, non ?
Non, il y a peut-être un peu de fable misanthrope, mais le modèle est plutôt le Bayart cheval magique de Maugis et les frères Aymon, je crois.
Mais surtout le vrai modèle sont les dragons semi-intelligents de Pern d'Ann McCaffrey, qui eux aussi sont en empathie avec leurs monteurs (McCaffrey appartient à un autre sous-genre de science fantasy, la planetary romance, inspirée notamment de Jack Vance).
Tout ce genre de Romantic Fantasy illustre d'ailleurs (comme les genres si particuliers des séries au Japon) la contingence d'une tradition récente : il a suffi que certaines oeuvres écrites par des femmes introduisent ce modèle pour qu'ensuite cela se cristallise comme un "genre" avec ses propres conventions : des romans avec des animaux intelligents (Lackey, Tamora Pierce), des personnages travaillés par leur identité sexuelle et les "gender roles" (Lackey, Elizabeth Lynn ; j'ignore d'ailleurs quel est la poule et l'oeuf dans le succès disproportionné de la Romantic Fantasy dans la communauté gay de fantasy : Lackey a-t-elle traité ces thèmes à cause de ce succès ou est-ce l'inverse ?).
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