samedi 10 janvier 2009

Le jeu de rôle comme stigmate social



Le hobby du jeu de rôle a beau avoir décliné depuis son sommet de popularité dans les années 80, je suis toujours étonné qu'il garde encore depuis 30 ans un air de "marginalité" que peu d'autres loisirs ont (les jeux vidéos sont nettement plus mainstream socialement par exemple). Même les dénégations dans le court reportage lié à cet article du Boston Globe aujourd'hui ("non, je n'ai pas honte de jouer encore, je n'en parle seulement pas pour ne pas être impoli"), on sent que ce n'est pas tout à fait un loisir aussi acceptable que la mycologie ou le bird-watching, et qu'il faut toujours demander des excuses de jouer. Et je ne peux pas ne pas ressentir le même embarras quand on me demande pourquoi j'aime les dés polyhédriques.

"The Internet is the way you find players, because you are not going to randomly meet guys or gals out there who play," said Tahsin, who enjoys playing the role of the dungeon master. He recalls not immediately telling his wife about his love for the game when they began dating. "It's still seen as a little bit embarrassing." He said his wife doesn't mention his hobby to her friends.




Ils font du "dungeoncrawl" dans le premier scénario de la première campagne de Pathfinder, dans le monde que j'avais décrit.

Comme d'habitude, ils identifient le jeu de rôle entièrement à D&D. D&D a son charme nostalgique mais rarement une activité aura eu autant besoin d'un parricide pour se débarrasser de son ancêtre encombrant qui monopolise 80% des participants - un peu comme si 80% des joueurs de jeux de société refusaient les jeux rivaux et toutes les innovations depuis le jeu de l'oie traditionnel, ou si 80% des joueurs de jeux informatiques continuaient le fétichisme de Space Invaders. Il y a une diversité de centaines de jeux que D&D continue à recouvrir avec son étrange système et ses propres conventions qui sont parfois prises pour des limitations internes du hobby.

Le jeu de rôle est un jeu tellement souple et adaptable que ces 80% pratiquent ce jeu en sachant sans doute qu'il est injouable et qu'ils l'ont nécessairement modifié ou altéré. C'est la dimension de libre jeu à l'intérieur du jeu de rôle qui ne peut pas exister dans le wargame, les échecs ou les jeux informatiques. C'est un jeu fait pour qu'on prenne conscience de la contingence des règles (même s'il existe des "minimaxeurs" dont le plaisir consister à exploiter le système, et des "formalistes" des règles qui refusent cette dimension narrative qui domine, sans éliminer, la simulation).

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