samedi 3 janvier 2009

Hierarchicus contre-attaque



La Chine et l'Inde sont deux succès économiques contrastés dans la mondialisation.

- La République populaire de Chine (population : 1 321 millions) est en train d'atteindre un PIB total en Parité de Pouvoir d'achat de 7034 "trillions" de dollars (2e rang mondial derière les USA), avec un PIB/habitant de $5325 (100e rang mondial).

- L'Union indienne (population : 1 147 millions) a un PIB total en parité de pouvoir d'achat de 2965 "trillions" de dollars (4e rang), et un PIB par habitant de $2563 (165e rang mondial).

Les avantages souvent cités de l'Inde sont par exemple que c'est une démocratie, avec plus de transparence et donc un système juridique (fondé sur la common law britannique) et un droit des contrats qui peut être plus respecté (même si sur d'autres points l'Etat serait en fait moins efficace que l'Etat chinois, voire plus corrompu dans certains Etats de l'Union). L'Inde a aussi l'avantage de pouvoir être mieux intégré rapidement dans une sphère anglophone (même s'il n'y a qu'une petite minorité dont "l'anglais indien" soit vraiment la langue maternelle).

Le gros désavantage est un écart immense d'inégalités avec 85% des gens vivant avec moins de 2,50$ par jour (en Parité de Pouvoir d'achat) mais le coefficient de Gini de l'Inde (37, donc pas très au-dessus de la France) est inférieur à celui de la Chine (47). L'Inde a un fort taux d'analphabétisme (au moins 40%), alors qu'il est très faible (2%) selon les chiffres officiels en Chine. L'Inde a aussi des clivages ethniques et linguistiques bien plus importants qu'en Chine. La Chine a toujours un fort avantage industriel mais j'ignore quelle est la répartition à venir dans les hautes technologies à forte valeur ajoutée.

Cet article par le vieil entrepreneur Gurcharan Das (Hindou du Pendjab qui était PDG de Procter & Gamble en Inde) cherche à trouver d'autres avantages "culturels" de son pays :


I think it may have something to do with India’s much-reviled caste system. Vaishyas, members of the merchant caste, who have learned over generations how to accumulate capital, give the nation a competitive advantage. Classical liberals may be right in thinking that commerce is a natural trait, but it helps if there is a devoted group of risk-taking entrepreneurs around to take advantage of the opportunity. Not surprisingly, Vaishyas still dominate the Forbes list of Indian billionaires.


Dire que l'existence d'une caste de commerçants/artisans héréditaires favoriserait l'émergence du capitalisme est pour le moins contre-intuitif et semble même inverser un argument traditionnel selon lequel ce fut un obstacle.

Certes, de fait, les milliardaires comme Lakshmi Mittal sont d'origine Vaishya (même si de manière amusante les Vaishyas riches comme ces Agarwals s'empressent d'inventer des mythes généalogiques pour dire qu'ils sont d'origine plus élevée, donc royale kshatriya).

Et cela néglige le fait étrange que la caste brahmane (qui est censée ne pas s'intéresser aux affaires terrestres) joue aussi un rôle disproportionné dans l'économie à présent, ce qui démentirait la fonction normale du système (comme le rappelle Gaddeswarup).

De même pour certains groupes religieux en dehors du système, comme la secte des Jains ou la petite minorité des Parsis comme la dynastie Tata. Une étude dans le sud montrait même que 45% des entreprises appartenaient à des membres de basses castes.

Puis Das explique que la superpuissance indienne se méfie du pouvoir militariste (ce qui surprendra tous les riverains de l'Océan indien) :


When you have millions of gods, you cannot afford to be theologically narcissistic. It also makes you suspect power.


Comme le dit bien Chazelle, on est dans l'Idéologie pure. Le polythéisme gêne la recherche du pouvoir terrestre ? Oui, comme pour l'Empire romain ou le nationalisme hindou du BJP.


Add. Un bon résumé de la différence entre les deux superpuissances émergentes par une expérience en réincarnation :


If you were born today, would you rather be Chinese or Indian?

Delhi-born Pallavi Aiyar, the first Chinese-speaking Indian journalist based in Beijing and author of an engaging new book about the two countries, takes on the charged question.

The best option, she contends, is to be a high-caste Indian man. His political freedom would certainly outweigh the economic opportunities of any Chinese citizen, she argues.

But if that weren’t possible, she’d choose to be a wealthy Chinese woman, because she wouldn’t be as constrained as her Indian counterparts by low literacy rates and limits on female participation in the public sphere.

If she had to be poor, she’d go with China. An Indian latrine cleaner may get to vote, she says, but a Chinese one is far less likely to be viewed as completely subhuman.

3 commentaires:

Cardamome : a dit…

Tsk, tsk, tsk. Tu oublies référence incontournable sur l'Inde :-)

Cardamome : a dit…

ajouter "cette" entre oublies et référence, merci...

Phersv a dit…

En fait, j'ai même écrit l'entrée en pensant à elle et en me demandant si je disais des bêtises sur les Vaishyas.