Après avoir fait grève et manifesté hier (j'oubliais à quel point on fait du surplace, départ prévu à 14h30 de République, départ réel à 16h !), c'est à mon tour d'être touché par elle parce que je n'ai pas pu reprendre le travail aujourd'hui.
RER A : Service non assuré avec interconnexion suspendue à Nanterre Préfecture.
RER B : Service non assuré avec interconnexion suspendue à Gare du nord.
Je ne pensais pas que le conflit durerait à vrai dire. C'est bien de voir les deux côtés de la barrière pour avoir plus d'empathie sur le discours sur "la Galère" - je me demande pourquoi tout le monde utilise ce terme devenu attaché plus particulièrement aux problèmes de transport, même les journaux au style censément plus austère comme le Monde) !
Ca fait très bizarre de se lever, raser, doucher à 5.30 pour trouver porte close à 6h30. L'avantage est que je peux profiter plus de ma journée que si j'avais fait une grasse matinée sciemment. Et j'ai un employeur plus compréhensif qu'ailleurs, ce qui fait que la grève n'a que peu d'effets directs pour moi.
La Grève des transports - même avec le service minimum - a indéniablement des effets dangereux pour certains qui perdent de l'argent.
Mais ce qui est agaçant chez Sarkozy n'est pas l'idée mais le fait que le Président de la République instrumentalise si cyniquement de telles oppositions :
Fustigeant "l'immobilisme", le président a mêlé l'actualité syndicale à son propos : "En cette veille de grève, réfléchissons bien à ceux qui n'ont aucun statut."
M. le Président, garant de l'unité nationale, se dit soudain préoccupé d'équité, mais seulement comme justice corrective et seulement contre les petits privilèges de certains peu argentés, jamais contre les vrais privilèges des intérêts dont il est le représentant.
Les syndicats sont faibles et peu représentatifs en France : moins de 10% et très concentrés dans certains secteurs, 4% dans le privé, 25% dans le public (c'est un point où nous sommes même derrière les Américains, pourtant historiquement peu syndicalisés : 13 % de syndicalisation aux USA, 8,5% dans le privé, 37% dans le public ; l'Angleterre a encore, malgré des années de thatcherisme, 20% dans le privé, 60% dans le public, la Suède environ 80% dans le privé, 93% dans le public). Ils sont donc contraints de suivre des bases souvent plus radicales (il suffit de voir le basisme de SUD) et ils n'ont pas autant la fonction d'encadrement qu'ailleurs. Mais au lieu de répéter tout le temps le cliché sur l'archaïsme de nos syndicats, il faut se rappeler que les facteurs sont multiples : individualisme français, division syndicale et un patronat plus fermé qui est aussi responsable de l'échec de la culture de la négociation. Le rapport de force n'arrive pas dans l'échec de la négociation mais comme préalable pour établir les cadres.
Je ne connaissais pas avant aujourd'hui l'étymologie du mot "grève". Le terme désignant le rivage plat, la plage (oui, sous la Grève la plage) viendrait de la même racine que la pierre aplanie, gravier et peut être que ces tombes creusées (grave, graben). La Place de Grève à Paris, à côté du fleuve, servait aux exécutions et dans les années 1800, entre la Première République et l'Empire, la première apparition du mot grève comme interruption de travail (ce qu'on appelle ailleurs strike, Streik) est chez des travailleurs qui se rendent sur la grande place pour "faire Grève". Les réunions festives sur la Place de l'Hotel de Ville (tout comme la Concorde) ont sans doute oublié à quel point ce lieu est hanté dans notre histoire nationale de la Guillotine (Hugo : " Nous sommes tous mêlés à ce que fait la Grève").
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