Ceci n'est qu'un aide-mémoire pour revenir un jour sur des questions de "théorie du jeu de rôle".
Je commence donc par des notes sur Markus Montola and Jaakko Stenros (dir.), Beyond Role and Play, 2004, une anthologie d'articles théoriques disponible gratuitement sur le site de Ropecon, la principale Convention du jeu de rôle finlandaise (la Scandinavie a développé de nombreuses approches théoriques non seulement sur le jeu de rôle "autour-d'une-table" mais sur son cousin d'improvisation interactive le "Grandeur Nature" ("Live-Action"), comme ce qu'ils appellent "l'Ecole de Turku").
Le premier article, "In Search of the Self: A Survey of the First 25 Years of Anglo-American
Role-Playing Game Theory" est par Paul Mason, un auteur britannique (mais qui a aussi vécu longtemps au Japon et a publié de nombreux articles comparant diverses expériences du jeu de rôle).
Mason ne trouve pas beaucoup d'ouvrages théoriques publiés (les livres sur le jeu de rôle étant plus souvent descriptifs ou historiques que théoriques, y compris le livre d'ethnographie de Gary Fine, Shared Fantasy, University of Chicago, 1983) et cite le plus souvent soit des articles de fanzines (surtout la plus importante, Alarums & Excursions, qui a une tradition d'analyse critique plus poussée que toutes les autres publications - hélas, ces textes sont très rares à trouver et non scannés - il faut aller à la British Library) et des revues, voire de site Web (ou le newsgroup rec.games.frp.advocacy). Les débats se limitaient au départ à un problème simple, l'opposition entre le réalisme de la simulation et la jouabilité du système.
La première étape pour dépasser cette distinction en préfigurant assez directement ce qu'on appelle depuis le Modèle triadique Ludisme-Simulationnisme-Narrativisme fut une classification non pas des types de jeu mais de 4 types de joueurs (la Voie Quadruple, "The Four-Fold Way") par Glenn Blacow, "Aspects of adventure gaming", Different Worlds #10 (1980) (reproduit sur le site de Théorie de JH Kim) : (1) wargamer (cherche avant tout le plaisir de la résolution tactique de problèmes), (2) powergamer (cherche avant tout une impression de progression et de contrôle à l'intérieur de cette réalité fictive), (3) storyteller (cherche avant tout une histoire intéressante) et (4) role-player (cherche avant tout à incarner une personne). Glenn Blacow, un des premiers rôlistes au MIT, se vantait dans les fanzines des années 70 d'avoir été à l'origine de la 4e forme à une époque encore dominée par la 1e et la 2e figure. On voit que l'article du magazine de la scène californienne distingue simplement deux formes de "Ludisme" dans les deux premiers types. Mais le narrativisme va être surtout développé dans le Grandeur-Nature australien "freeform" avant d'influencer profondément le jeu "autour-d'une table".
Une autre taxinomie vient en fait de la théorie du théâtre et plus précisément du jeu d'improvisation, à partir de Keith Johnstone, Impro: Improvisation and the Theatre, 1979. En suivant la gradation de Johnstone, James Wallis distingue dans "Through a mask, darkly", dans la revue britannique éphémère Interactive Fantasy 3 (1995) quatre manières de jouer un rôle :
(1) le Jeu de Marionnette (on manipule complètement le personnage qui n'est qu'une interface pour le jeu, pour résoudre des problèmes),
(2) le Jeu d'un Archétype (on interprète un type abstrait pour un scénario, par exemple dans les simulations d'entraînement des jeux de rôles en entreprise où on joue "Le Client"),
(3) le Jeu d'une Personnalité (on développe un personnage fictif)
et enfin la pratique la plus immersive, (4) le Jeu de Masque (où le joueur s'identifie à un Masque qu'il adopte sans prétendre le créer lui-même). La dernière théorie ne semble pas convenir vraiment au "jeu de rôle" au sens ludique mais plutôt à certains jeux/rites/cérémonies décrits par Johnstone où l'Acteur simule une sorte de "transe" de possession devant le Masque (on revient là au lien entre cérémonie religieuse/chamanique et premières formes de théâtre, entre le liminal et le liminoïde (ce qui sera l'objet de l'article suivant, de Martin Ericsson).
L'article est en revanche très bref sur la période récente, la source la plus fertile de théories ces dernières années sur les forums (aujourd'hui en hiatus) de TheForge de Ron Edwards. Mason mentionne comme une première étape du Modèle Triadique GNS une distinction de campagne entre (1) Préparation (2) Diégèse (3) Métajeu, mais je ne suis pas sûr de voir en quoi cela correspond exactement à Simulationnisme/Narrativisme/Ludisme, à part pour le (2). Voir sur ces points la volumineuse page de JH Kim.
Je commence donc par des notes sur Markus Montola and Jaakko Stenros (dir.), Beyond Role and Play, 2004, une anthologie d'articles théoriques disponible gratuitement sur le site de Ropecon, la principale Convention du jeu de rôle finlandaise (la Scandinavie a développé de nombreuses approches théoriques non seulement sur le jeu de rôle "autour-d'une-table" mais sur son cousin d'improvisation interactive le "Grandeur Nature" ("Live-Action"), comme ce qu'ils appellent "l'Ecole de Turku").
Le premier article, "In Search of the Self: A Survey of the First 25 Years of Anglo-American
Role-Playing Game Theory" est par Paul Mason, un auteur britannique (mais qui a aussi vécu longtemps au Japon et a publié de nombreux articles comparant diverses expériences du jeu de rôle).
Mason ne trouve pas beaucoup d'ouvrages théoriques publiés (les livres sur le jeu de rôle étant plus souvent descriptifs ou historiques que théoriques, y compris le livre d'ethnographie de Gary Fine, Shared Fantasy, University of Chicago, 1983) et cite le plus souvent soit des articles de fanzines (surtout la plus importante, Alarums & Excursions, qui a une tradition d'analyse critique plus poussée que toutes les autres publications - hélas, ces textes sont très rares à trouver et non scannés - il faut aller à la British Library) et des revues, voire de site Web (ou le newsgroup rec.games.frp.advocacy). Les débats se limitaient au départ à un problème simple, l'opposition entre le réalisme de la simulation et la jouabilité du système.
La première étape pour dépasser cette distinction en préfigurant assez directement ce qu'on appelle depuis le Modèle triadique Ludisme-Simulationnisme-Narrativisme fut une classification non pas des types de jeu mais de 4 types de joueurs (la Voie Quadruple, "The Four-Fold Way") par Glenn Blacow, "Aspects of adventure gaming", Different Worlds #10 (1980) (reproduit sur le site de Théorie de JH Kim) : (1) wargamer (cherche avant tout le plaisir de la résolution tactique de problèmes), (2) powergamer (cherche avant tout une impression de progression et de contrôle à l'intérieur de cette réalité fictive), (3) storyteller (cherche avant tout une histoire intéressante) et (4) role-player (cherche avant tout à incarner une personne). Glenn Blacow, un des premiers rôlistes au MIT, se vantait dans les fanzines des années 70 d'avoir été à l'origine de la 4e forme à une époque encore dominée par la 1e et la 2e figure. On voit que l'article du magazine de la scène californienne distingue simplement deux formes de "Ludisme" dans les deux premiers types. Mais le narrativisme va être surtout développé dans le Grandeur-Nature australien "freeform" avant d'influencer profondément le jeu "autour-d'une table".
Une autre taxinomie vient en fait de la théorie du théâtre et plus précisément du jeu d'improvisation, à partir de Keith Johnstone, Impro: Improvisation and the Theatre, 1979. En suivant la gradation de Johnstone, James Wallis distingue dans "Through a mask, darkly", dans la revue britannique éphémère Interactive Fantasy 3 (1995) quatre manières de jouer un rôle :
(1) le Jeu de Marionnette (on manipule complètement le personnage qui n'est qu'une interface pour le jeu, pour résoudre des problèmes),
(2) le Jeu d'un Archétype (on interprète un type abstrait pour un scénario, par exemple dans les simulations d'entraînement des jeux de rôles en entreprise où on joue "Le Client"),
(3) le Jeu d'une Personnalité (on développe un personnage fictif)
et enfin la pratique la plus immersive, (4) le Jeu de Masque (où le joueur s'identifie à un Masque qu'il adopte sans prétendre le créer lui-même). La dernière théorie ne semble pas convenir vraiment au "jeu de rôle" au sens ludique mais plutôt à certains jeux/rites/cérémonies décrits par Johnstone où l'Acteur simule une sorte de "transe" de possession devant le Masque (on revient là au lien entre cérémonie religieuse/chamanique et premières formes de théâtre, entre le liminal et le liminoïde (ce qui sera l'objet de l'article suivant, de Martin Ericsson).
L'article est en revanche très bref sur la période récente, la source la plus fertile de théories ces dernières années sur les forums (aujourd'hui en hiatus) de TheForge de Ron Edwards. Mason mentionne comme une première étape du Modèle Triadique GNS une distinction de campagne entre (1) Préparation (2) Diégèse (3) Métajeu, mais je ne suis pas sûr de voir en quoi cela correspond exactement à Simulationnisme/Narrativisme/Ludisme, à part pour le (2). Voir sur ces points la volumineuse page de JH Kim.
Règle de blog : Pas de post purement théorique jdr sans contenu jdr.
Les Bascinets de Haute Distinction Tactique et Poliorcétique étaient des casques magiques forgés pour les grands généraux de l'armée des Nains. On dit que les porter améliore sensiblement la tactique militaire mais aussi le charisme de celui qui les porte. Il vaut mieux ne pas être trop grand pour le porter (en terme de Runequest, pas plus de TAI 12).
En revanche, il faut lancer un d4 comme il n'en resterait plus que quatre :
2 commentaires:
Et ces 4 types de joueurs peuvent se retrouver en discordance avec les mêmes types de jeu, ce qui donne 16 situations possibles. On pouvait s'en rendre compte dans une partie standard de DD, d'où les threads interminables sur le 3 ou 4fold model qui, partant d'assomptions différentes, aboutissaient à des malentendus répétés.
Oui, on peut très bien être un powergamer/ludiste dans un jeu narrativiste ou de role-player (c'est souvent le cas dans Vampire, par exemple : on insiste sur le côté roleplayer de jouer une âme torturée et très vite on essaye de maximiser des Pouvoirs pour "gagner" dans des intrigues face aux autres). L'inverse est aussi possible mais peut-être plus rare, on peut être un role-player dans un jeu fait plus pour le ludisme (par exemple, rien n'interdit de le faire dans D&D4 mais c'est quand même difficile quand tout le jeu tend à une optimisation des pouvoirs par tour sur une grille).
La catégorie "Ludisme" était, de l'aveu de Ron Edwards, un peu trop "fourre-tout" (tout ce qui n'est pas dans l'opposition Construire un récit/Simuler un modèle convaincant).
Robin Laws a notamment ajouté une catégorie importante de joueur qu'on oublie tout le temps dans la théorie et qui n'est pas à proprement parler "ludiste" : le joueur simplement "passif ou social" (casual gamer) qui vient avant tout pour être avec des amis, qui pourrait tout aussi bien aller au cinéma mais qui ne se soucie pas tellement des autres finalités interactives comme la tactique, le monde simulé ou l'interprétation d'un personnage. C'est celui qui s'ennuie vite si l'arbitre du jeu s'écoute trop parler avec son monde (Narrativisme) ou si les autres joueurs veulent trop optimiser des tactiques (Ludisme). On pourrait alors ajouter des traits d'amitié ou de sociabilité dans le jeu (Philia ?) qui ne se réduisent pas au classement de Caillois qui a seulement Agôn (compétition), Mimicry (Imitation), Alea (le hasard) et Ilinx (Vertige).
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