mercredi 2 janvier 2008

Empire et Colorado



Je viens de voir sur Serie Club la mini-série Empire (2005, ABC). C'est d'une incroyable médiocrité (et je ne crois pas être très difficile en matière de peplum). Cela permet encore mieux d'apprécier Rome (tournée aussi en 2004-2005, HBO & BBC, quatre fois plus d'épisodes), qui se déroulait à peu près sur la même période entre la mort de César et la guerre entre Octave et Marc-Antoine.

Le problème de Rome était qu'on se souciait assez peu des personnages fictifs de Lucius Vorenus et Titus Pullo, et qu'on s'intéressait bien plus aux personnages comme Atia et Octave. La série (notamment la saison 2) est presque son hagiographie et même adolescent il est représenté comme étrangement surdoué.

A l'inverse, le problème d'Empire est que le beau Octave (joué par Santiago Cabrera qui jouait le peintre Isaac Mendez dans Heroes) a l'air trop naïf et stupide. Pire, il est même dénué d'ambition avant le dernier épisode. Il est donc d'abord un peu éclipsé par le personnage fictif du gladiateur grec Tyrannus (sic), qui lui sert de tuteur.

Tyrannus est le vrai héros de la mini-série. Il est bien sûr inspiré du Maximus de Gladiator (mais aussi peut-être un peu Spartacus qui a eu un téléfilm en 2004). Il se reproche de n'avoir pas sauvé Jules César aux Ides de Mars (hommage à In the Line of Fire ?) et a fait le serment d'être le garde du corps d'Octave, qu'il n'arrête pas de sauver. Même la bataille finale de la Guerre civile n'est gagnée que grâce à Tyrannus.

Octave a encore plus d'aventures absurdes que celui de Rome (il est même réduit à participer à l'entraînement des Gladiateurs en se cachant de Brutus puis presque simultanément de Marc-Antoine).

Les anachronismes sont innombrables. Toute la période entre 44 et 31 semble se concentrer sur quelques mois. Octavien Auguste est représenté comme un humaniste universaliste, presque pacifiste. Il pardonne même à Brutus (la bataille de Philippes n'a pas lieu et il est seulement exilé !), puis à Marc-Antoine qu'il épargne sur le champ de bataille.

Quant à toute l'histoire de la IIIe Légion qui aurait été décimée à Bibracte (-58, Saône et Loire), décrite comme une bataille contre Mithridate du Pont (vaincu en -65 en Arménie !!), cela défie l'imagination en mélangeant la Gaule et l'Asie mineure, en attribuant à César un événement qui eut lieu en Afrique 70 ans plus tard, vers 18 après J.C., et en traitant une Légion un peu comme les Morts de Dunharrow pour Aragorn.

Les costumes sont assez réussis et comme la série passait sur ABC et non HBO, il y a moins de voyeurisme. La série est tournée en Italie, comme Rome, et les décors sont moins visibles. Mais les dialogues manquent complètement de subtilité, au point d'en devenir involontairement comiques. Les combats de gladiateurs prennent plus de place que les événements historiques. Ils ont tellement simplifié les oppositions qu'ils ont même retiré Cléopatre de l'histoire, alors qu'on s'attend à ce qu'elle joue plus de rôle qu'Agrippa.

Le passage où Octavien est amoureux d'une Vestale Kamane (je ne sais pourquoi ils disent qu'une Vestale adore "Pallas Athéna" alors que le nom semble assez facile à associer à Vesta ???) flirte un peu avec le fantastique (j'ai même cru qu'elle allait devenir une Bene Gesserit). Octavien ne devient d'ailleurs héroïque que pour pouvoir épouser cette Vestale et non pas vraiment pour régner sur Rome, mais il finit par faire le choix cornélien de préférer Rome à son amour.

*


J'ai craqué et ai finalement abandonné la mini-série. A la place, j'ai enfin vu la fin de la série animée Chris Colorado (2000), le 26e et dernier épisode "La Destinée des Krantz". Ce devait être la fin de la Première Epoque mais il n'y eut hélas jamais de suite, à cause du retrait d'AB Productions, et les auteurs ont depuis fondé le studo Label-Anim.

Chris Colorado est une série étrange, au scénario ambitieux avec des retournements et révélations fréquentes, ce qui rend le feuilleton complètement incompréhensible assez vite, tant les auteurs s'amusaient à développer plusieurs couches de mystères.

Il n'y a par exemple pas de prologue explicatif en dehors de quelques images allusives. Nous sommes dans un futur post-apocalyptique, où une étrange météorite, Sheol, a ravagé la Terre, notamment les centres urbains, et détruit toute technologie. La civilisation s'est reformée autour de ruines mayas, l'ancienne cité de Chichén Itzá (sans qu'on comprenne bien pourquoi, même si on apprend plus tard que les anciens Mayas auraient déjà mentionné la même météorite Sheol). D'étranges mutants vivraient dans les ruines des grandes villes. La technologie est devenue plus rare et centralisée dans le gouvernement mondial. Mais un homme aux étranges pouvoirs issus de la Comète, "Thanatos", a créé une armée d'homme zombifiés électroniquement pour prendre le contrôle du monde (leur masque fait penser aux crânes du Dia De Los Muertos mexicain). La série commence alors que Thanatos vient d'être battu par un mouvement de résistance.

Chris Krantz dit "Colorado", le héros, est un aviateur qui vit dans le Grand Canyon avec son grand père Sam Krantz et son "frère de sang", un shaman Hopi(tribu de l'Arizona), qui fait beaucoup penser aux Indiens dans Lucky Luke. L'ambiance fait penser aux Pulps. Dans le premier épisode, il vient sauver le Président de la Fédération mondiale, tombé dans les ruines de la Ville (New York). Au fil des épisodes, on découvre que le Président de la Fédération est l'oncle de Chris, que "Thanatos" est à la fois son autre oncle et son père (c'est une aggravation du syndrome Darth Vader : Chris Colorado perd même la raison dans un épisode et dans sa fureur héroïque il devient aussi "Thanatos"), et finalement que presque tous les personnages sont liés d'une manière ou d'une autre. La série s'arrête avec la disparition de la famille Krantz et l'arrivée au pouvoir de Rebecca Wong, une cyborg qui est la petite amie de Chris. La réussite de la série tient dans l'ambiance paranoïaque où tous les personnages peuvent être des traîtres ou des doubles.

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