mercredi 5 janvier 2011

[JDR] Kōan de définition

(piqué sur un .sig)

Après une longue ascension, le rôliste parvint au sommet de la montagne où l'attendait le Vénérable.

"Ô Vénérable du Sommet, je n'arrive pas à définir le jeu de rôle. Peux-tu m'aider ?"
"Le jeu de rôle, rôliste, c'est jouer à la Barbie... Si ce n'est qu'il n'y a pas de Barbie."

Et le rôliste connut l'illumination.

  • Add. : Voir les commentaires, le Vénérable n'est peut-être pas si "illuminant".

  • 8 commentaires:

    Frédéric Sintes a dit…

    C'est vrai mais comment distinguer distinguer jeu de rôle de récit en groupe ? Pour cela, on a besoin de deux choses qui s'appellent "propriété" et "résistance".

    La propriété, c'est le "rôle" du jeu de rôle : je contrôle certains éléments de l'espace imaginé et partagé que d'autres ne peuvent pas contrôler (par exemple, ce que dit, fait, ou pense tel personnage).

    La résistance, c'est le fait que la fiction résiste aux choix du joueur/actions du personnage : qu'on ne puisse pas casser un mur à mains nues si on n'est qu'un humain "normal", mais aussi qu'un adversaire puisse nous tenir tête. C'est le "jeu" du jeu de rôle.

    Ce qui fait que Glass town n'était peut-être pas un JDR au sens RPG sur table : il semble qu'il y ait propriété puisque chaque enfant jouait un soldat et administrait une île, mais y avait-il une résistance possible ?

    Le théâtre est un jeu de rôle mais pas un role playing game, il y a bien propriété, mais pas résistance. Le jeu "Il était une fois" ne possède pas de propriété, tout le monde peut décrire ce qu'il veut.

    Mes deux centimes.

    Phersv a dit…

    C'est juste, ce que j'écrivais sur Glass Town ou un jeu enfantin avec des poupées n'est pas du tout rigoureux pour le jeu de rôle et je n'entendais pas être sérieux !

    La notion de résistance du réel (ou d'adversité, ou d'objectivité minimale) est en effet importante pour définir l'élément ludique (qui garde donc un minimum de confrontation dans la collaboration).

    Mais dans un récit de groupe ou collaboratif, on pourrait imaginer une manière de gérer la résistance (du contexte "simulé") par un vote des participants par exemple, qui aurait le dernier mot sur les improvisations individuelles (Munchausen rappelle un peu cela mais seulement après coup quand il s'agit d'évaluer le meilleur récit).

    On s'approcherait alors du jeu de rôle tout en étant encore dans un jeu proche d'une improvisation collaborative.

    Je pense que Branwell Brontë et ses soeurs ne votaient pas, il n'y avait aucun système et seulement accumulation et imposition de "faits accomplis" où Branwell affirmait une chose (par exemple, dans son récit, tel personnage meurt) et Charlotte le remettait en cause (elle change la version dans son propre récit).

    Mais en effet, le jeu du papa et la maman ou le cow boy et les indiens ne sont pas encore des jeux de rôle au sens actuel (le game dans le Role-Playing) parce qu'ils sont au mieux du "calvinball (règles improvisées successivement), voire un jeu sans autre règle que le consentement collectif du Faire Semblant, qui peut se dissoudre unilatéralement dès qu'un participant le veut ("Non, je ne suis même pas mort").

    L'élément commun entre GlassTown et le jeu de rôle, c'est l'origine dans un jeu de figurine. Mais la grande différence est que les Brontë n'avaient pas de règles de wargames comme Gygax. Elles utilisaient donc les figurines napoléoniennes (comme Arthur Wellesley, Baron de Douro, Duc de Wellington, qui est le vrai héros de la saga et l'idole des Brontë) comme des Barbies matérielles mais elles n'avaient aucun autre paramètre, pas de caractéristiques autres que celles qu'elles improvisaient à partir des personnages réels qui étaient plus ou moins représentés. On avait une représentation sans aucune "simulation" (et si Wellesley, au lieu de faire de la politique en Angleterre, allait coloniser une terre inconnue ou l'Afrique, c'est le point de départ).

    La figurine est ce que Kendall Walton appelle un "prop" (élément de départ stable pour lancer la mimesis, comme dire qu'un bout de bois est un pistolet), mais il manque encore des paramètres qui ne soient pas arbitraires.

    Il manque notamment un "contrat social" clair entre les participants à la place du simple croisement de récits contradictoires.

    Zut, j'aurais dû faire un post, les commentaires sont peu lisibles...

    Desméïl a dit…

    Messieurs vous êtes, comment dire, très intéressants...
    on atteind un sommet.
    Je propose l'édition d'un livre...
    Je ferais l'éditeur. J'attend les textes...

    Je blague mais j'aime bien.

    Frédéric Sintes a dit…

    :)
    Entre Calvin et Hobbes et le big model, je vois qu'on a des références communes. ^^

    Je ne vois pas quoi dire de plus...

    Frédéric Sintes a dit…

    Ah, si évidemment, comme tu as dû le voir avec Breaking the Ice, la frange indépendante des créateurs de JDR conçoit des jeux où l'improvisation tient un rôle central et les responsabilités du MJ sont réparties entre les participants, et ça donne des jeux très forts.

    Desméïl a dit…

    [les jeux à impro] ...Encore faut-il que le background soit bien maîtrisé par les uns et les autres (culture), qu'il y ait une adéquation de personnalités (mentalité et caractère des joueurs, je pense aux powergamers névrotiques), et une grande expérience du jeu de rôle (et/ou théâtre et/ou jeux de société) à la fois en tant que MJ et joueurs et cela des 2 côtés...
    Pour moi, conditions réunies rarissimes, ils faut vraiment des gens de grande qualité, pour arriver à jouer comme ça.

    Ancien joueur de RQ, c'est pour ça que j'ai eu bcp de mal avec HEROWARS...

    << Oldschools are die-hards >>

    Phersv a dit…

    Oui, dans le jeu à impro, on risque d'être parfois un peu aussi à la limite du jeu de rôle d'ailleurs (même si la catégorie est floue). Extraordinary Adventures of Baron Munchausen est bien mais ce n'est plus du jeu de rôle.

    La partie de Breaking the Ice n'a pas été entièrement convaincante de ce point de vue tant nous hésitions entre le jeu (il y a des dés à tirer mais c'est chaque joueur qui évalue arbitrairement le nombre de dés pour l'autre) et la narration libre (on avait tendance à donner à chaque fois le maximum de chances pour arriver au récit désiré).

    HeroQuest n'est pas évident à maîtriser. Cela m'avait paru vraiment trop flou à la première lecture mais après une campagne où j'étais joueur et pas MJ, je trouve que ça roule vraiment bien. En revanche, le jeu narrativiste a tendance à avoir un peu moins de risques et dangers que dans un jeu traditionnel. On ne risque pas de mourir bêtement dans une scène mineure ou accidentelle, je pense (comme ce pauvre Rurik qui meurt tué par un trollkin dans les règles de Runequest 1e édition).

    Frédéric Sintes a dit…

    Bof, je joue très souvent à des "jeux narratifs" (en asso, en conv' et avec des amis proches, voire parfois en famille), je fais jouer des néophytes, et ce sont surtout les rôlistes plus traditionnels qui peinent à changer leurs habitudes : les néophytes se débrouillent souvent très bien.

    Donc je ne partage pas cet avis.
    De même, dans un jeu comme Breaking the Ice, les mécaniques "ludiques" créent un effet miroir entre les enjeux du joueur et ceux du personnage. Il ne s'agit donc pas de chercher à gagner à tout prix, mais d'avoir des choix et des difficultés à surmonter pour que le jeu ne soit pas juste un parcours de santé (cf. le principe de résistance).

    D'un autre côté, les jeux où on ne lance pas de dés et où c'est le MJ qui gère tout souffrent du problème de l'acceptation de l'arbitraire des jugements totalitaires du MJ générateurs de frustration. Un système transparent rend l'actance (traduction de "agency" avec des rustines) possible, ce qui est très stimulant pour un jeu dont la narration est dominante.